Forum RPG Dark Fantasy, Cyber Punk ; Création originale
 
Derniers sujets
Le Dernier Testament des Rêveurs. Tome 1Jeu 18 Juin - 15:05Porte des Rêves
Background ChanséliséaJeu 18 Juin - 13:26Porte des Rêves
RèglementMer 17 Juin - 14:46Porte des Rêves
Fiche Personnage PrédéfiniMar 16 Juin - 19:40Porte des Rêves
Recensement des avatarsMar 16 Juin - 19:37Porte des Rêves
Validation de HisokaSam 15 Juin - 21:59Satomi Haneko
Hisoka Juunan (Fiche Terminée)Sam 15 Juin - 21:52Satomi Haneko
Petite purge en altitude - RakanVen 14 Juin - 9:04Saibogu Yumia
Votez pour la Fracture des ShinobisLun 3 Juin - 20:32Chikakuzu Yasuda
PNJ - Harumi SaruwatariDim 2 Juin - 1:21Saruwatari Tsubaki
QuetzalcóatlDim 2 Juin - 0:52Porte des Rêves
08. Demande d'ArbitrageVen 31 Mai - 23:11Fujiwara Rakan
Le Deal du moment :
Funko POP! Jumbo One Piece Kaido Dragon Form : ...
Voir le deal

Partagez
La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 4:15
La Fracture
-
Takama-ga-hara
高天原






Introduction


Les rêves... Très concrets ou très abstraits, personne n'échappe aux rêves. Mais d'où viennent-ils et que signifient-ils ? Dès le XIXe siècle Pré-Fracturien de notre longue histoire, des spécialistes ont commencé à tenter de comprendre les mécanismes de formation des rêves, leur rôle dans la qualité du sommeil et leur signification. Freud leur attribua un rôle d’exutoire des pulsions et frustrations. Le rêve fut qualifié aussi de fantasme pour assouvir des désirs jamais contentés, d'utopie et d'idéal, d'horizon à atteindre, de porte sur l'au-delà, de monde des esprits... Tout est permis dans les rêves, il n’y a pas de conséquences dans la réalité. Reflets de nos conflits intérieurs, de nos angoisses, nos peurs, mais aussi nos désirs, les rêves révèlent des choses sur soi, des vérités cachées, comme une petite voix qui nous aidera à prendre des décisions. Qu’ils soient agréables ou non, ils aident à la récupération psychique par des mécanismes encore mystérieux, même encore de nos jours. Les rêves sont nécessaires et bons pour la santé. Tout le monde ou presque rêve, mais on ne s’en souvient pas forcément. La vie dans le monde que nous habitons est en réalité un rêve éveillé qu'il faut faire réalité, un rêve où le mérite — mériterait d'exister. Toutes les histoires comptées sont des rêves, parfois éveillés. Toutes les fictions sont des rêves, parfois plus transcendant que la réalité ; et à travers le rêve qu'invoquent ces fictions, passent les songes comme une brise sur la peau, sublimant ce que le désir amoncelle de rancœur à chacune de nos insatisfactions. Ainsi désirais-je compter une histoire si brute, si froide, si terrible et si sublime, que pourtant aussi surréaliste qu'un rêve, on y trouva les plus beaux et concrets reflets de nos âmes. C'est ainsi que naquit, pour le meilleur et pour le pire, le récit de la Fracture.

Dans les alpes françaises, deux bûcherons étaient à la tâche, l'un et l'autre claquaient leur hache sur un arbre pourtant bien robuste. Les braillements et les essoufflements se suivaient de cette façon durant cette belle matinée d'hiver.
J'étais l'un de ces bûcherons qui claquaient sa hache. Je bûchais pour le compte d'un certain seigneur de Paudrisseaux, mais qu'importe, avec les seigneurs, ils payaient et nous trimions. Nous approchions le midi quand nous avons finalement décidé de nous poser pour casser une croûte. La forêt qui nous logeait n'était qu'à quelques pas de la limite interdite, là où aucun ne se rendait jamais. Parce qu'au-delà de cette limite, se trouvait la Porte des Rêves, ce petit soleil noir trônant au-dessus du sommet des alpes que nous, les pécores, avions interdiction d'approcher. La porte était de toute façon sous la garde d'une garnison que ne laissaient passer que ceux qui en avaient officiellement ou officieusement le droit. Je mangeais ma viande quand je sentis soudainement un effroi. Je dressais les épaules et sentis mon échine piquer mon corps jusqu'au frisson. Je lâchais ma viande en interpellant tout de suite mon compagnon après cela.
-T'as sentit ça ?
-Sentit quoi ? Me répondit-il en mâchouillant.
-Je sais pas, on aurait dit un cri de femme, mais de loin.
-Ta petite femme te manque à ce point ? Se moquait-il.
-Non mais sans rire je l'ai entendu j'en suis sur.
-Et moi, j'ai entendu ma viande craquer et rien d'autre. Ne te cherche pas des excuses pour pas reprendre le boulot.
Mais le cri retentit de nouveau, assez puissant pour nous faire nous lever d'un seul coup tous les deux.
-Tu l'as entendu là !
-Ouais ! Foutu bonne femme, elle s'est sûrement fait prendre par un ours.
-Depuis quand y'a des ours ici ?
-Tu as pas lu ton contrat toi hein ?
Encore une fois le hurlement résonna, cette fois assez pour que mon comparse et moi puissions repérer approximativement sa position.
-C'est derrière la forêt.
-Moi, je ne vais pas là-bas !

Je me saisissais de la hache, et me rendis en trottinant à travers le bois jusqu'à la source de ces hurlements. Le passage n'était pas difficile, la forêt n'était pas si dense que cela. C'est alors que sans m'en rendre compte, je me retrouvais à la lisière du bois, qui débouchait sur un chemin conduisant à la Porte des Rêves. Ce chemin en croisait un autre, sur lequel avançait péniblement un attroupement de personne en file indienne sous la supervision de plusieurs soldats de l'Empire Celte. Je dressais le regard vers la montagne, ébloui par ce soleil noir dont jaillissait le flux qui disparaît dans le ciel à mesure qu'il s’éloignait dans l'horizon blanchâtre des nuages hivernaux. C'est là que je comprenais que le cri que j'avais entendu était celui d'une femme qu'on venait de sacrifier dans le gouffre que la Porte des Rêves avait creusé dans la montagne en apparaissant il y avait plus de 2000 ans. Le corps de la pauvre femme était aspiré vers la sphère noir, comme si celle-ci s'emparait d'elle, de son être, de son âme, jusqu'à la désagréger et la faire disparaître totalement. Je pouvais la voir, malgré la distance, flotter vers le soleil noir et y être aspirée entièrement. C'est alors que l'un des soldats qui surveillait la queue vint vers moi et m'interpella.
-Tu viens pour le sépulcre ? Tu vas au bout de la queue comme tout le monde, pas de favoritisme.
-Le sépulcre ? Demandais-je intrigué.
-Tu n'es pas au courant ? La Tour d'Ivoire a raconté que la porte s'essouffle et que c'est pour ça que les Rêveurs perdent de leurs pouvoirs, ce serait même la cause de la peste jaune. Les fanatiques viennent sacrifier des bêtes, des civils et des Rêveurs, pour nourrir la porte du coup. Ils pensent que le flux qui est aspiré par les corps retourne à la sphère. En gros moins y a de monde, moins le flux est partagé, donc plus la porte se sent bien... C'est l'idée.

Un bûcheron comme moi, ne comprenait pas grand chose à ces choses-là. Je m'inquiétais plutôt sur le résultat du congrès des éminences qui se déroulait à Parisis. On disait que cette fois, toutes les nations et tous les Rêveurs allaient enfin conclure une paix durable, mais je n'avais jamais entendu parler de ce problème concernant la porte. Pour nous, les civils, le flux ne valait pas grand-chose sauf si nous nous découvrions la possibilité de l'utiliser, ce qui n'était pas mon cas... Personne ne semblait choqué de ce qu'il se passait. Des sacrifices humains quand-même, je croyais pourtant qu'on en avait plus vu depuis la société pré-Fracturienne...
-Je ne savais pas... Je suis désolé.
-Désolé de quoi ?
-Pour ces pauvres gens, je veux dire...
-La porte est là depuis l'an 2045 de l'ancien calendrier. Plus de 2000 ans maintenant. À chaque fois que quelque chose qu'on ne comprend pas survient des tarés commencent à faire des trucs malsains, c'est comme ça. Il ne faut pas s'inquiéter, la porte ne bougera pas et les gens arrêteront de se sacrifier.
-Mais la loi n'interdit pas le sacrifice humain ?
-Si... mais elle n'interdit pas le suicide. Ces gens meurent parce qu'ils le veulent.
-Comme si la guerre ne faisait pas déjà assez de morts. À croire que cette porte qui donne autant de pouvoir est plus une malédiction qu'une bénédiction.
-Je ne crois pas que la porte soit responsable... C'est nous qui choisissons d'utiliser les pouvoirs de la porte d'une façon ou d'une autre.
-Je ne saurais pas dire si nous avons évolués ou régressés....
-Je dois reprendre mon poste, sinon la foule va devenir folle, ils se marcheraient dessus ces cons. Mais passe à l'occasion si tu veux, tu as l'air d'être un bon gars.

C'est alors qu'un second cris retentissait, un cris qui me glaçait encore plus le sang que le précédent et je devinais sans peine qu'il venait d'y avoir un nouveau sacrifice dans le gouffre sous la porte des Rêves. Plus impressionnant encore était que le cris de la femme qu'on venait de tuer fut si puissant qu'il en devint presque assourdissant. À ce moment je me rappelais ce que disaient mes parents, sur les raisons qui poussaient quand j'étais enfant, et même bien avant, tous ces gens à venir prier en dessous cet astre aussi sombre que lumineux : Sous la Porte des Rêves, tout est plus intense, tout ce que l'on fait, tout ce que l'on veut, et tout ce que l'on croit. Sous la Porte des Rêves, l'impossible n'existe pas.


La Fracture, un vortex de lumière, un soleil noir qui s'est élevé au-dessus des alpes, donna les pouvoirs aux hommes de matérialiser leurs rêves, mais pas à tous les hommes... C'est ce qu'on appela, il y a des siècles, il y'a plus de 2000 ans en 2045, la Fracture, l'ouverture spontanée et incomprise de la Porte des Rêves. Les mythes et les rêves de l'humanité devinrent réalités, ainsi dragons, dieux, créatures mythologiques autrefois cœur de l'imaginaire surgirent de partout dans le monde et la société humaine telle qu'on l'avait connu s'effondra. C'est le moment aussi parfois retenu comme le "temps du chaos" et c'est alors que ce vortex indestructible devint la source du flux qu'utiliseraient désormais ce que le monde appelait les "Rêveurs" : Rêveurs qui métamorphoseront la société et le monde si profondément qu'on risqua même d'oublier pendant un temps ce qu'était la société humaine avant cet événement.

Notre histoire commence durant le temps de la soumission, un peu moins d'une vingtaine d'années avant le congrès des éminences de Parisis qui mit un terme à la guerre des mille royaumes. Elle se situe bien loin des alpes où se trouve la Porte des Rêves, dans une contrée asiatique, connu de tous aujourd'hui comme l'Empire du Sekaï.



Chapitre 1 : La cité de la joie


Les petites histoires humaines font les épopées les plus réelles. Les incessants conflits du Sekaï prenaient de l'importance, et travaillant pour l'un ou l'autre des camps, je me tenais éloigné des idéologies pour ne chercher qu'à subsister en semant la mort là où on me l'ordonnait. Moyennant finance bien sûr, parce que la gloire ne se mangeait pas, pour autant, je ne me pensais pas plus sale que n'importe quel soldat justifiant sa cruauté sous le couvert des aspirations politiques. Les idéaux sont toujours pacifiques, mais l'histoire elle, demeure à jamais violente. Les batailles se succédant, des villages entiers se trouvaient rasés. On vit à travers montagnes, déserts et forêts des populations suivre un exode vers un camp de réfugiés dont on disait que quel que soit son passé, quels que soient les maux dont on avait souffert, ou dont on souffrait toujours, il y avait une place pour soi et les siens. Perdu dans une sorte de désert rocailleux, l'on disait que le patron de ce camp, surnommé le roi lépreux, était aussi sage que bon.

À moi, il ne me fallait qu'une étape, le temps de manger et boire tout mon argent durement gagné dans le sang et la boue. Ce camp de réfugiés, qu'on appelait curieusement "la cité de la joie", j'avais décidé que ce serait l'endroit où je passerai mon repos. Une étape dont j'ignorais la durée et ce n'était pas l'important. Quand bien même ce camp s'appelait la cité de la joie, je me doutais ne pas y trouver un parterre de fleurs et la porte du paradis. Mais j'étais loin d'imaginer ce qui m'attendait là en réalité.

En passant à versant de colline, je rencontrais finalement, loin en avant, le fameux camp. De bien loin, il paraissait paisible et ordonné. Des allées bien tracées s'y dessinaient et quelques fumées s'en élevaient. De loin, tout est plus beau ai-je déjà entendu et c'était probablement d'autant plus vrai dans le cas présent. La première chose que je me demandais en voyant ce camp, c'était de quoi pouvaient bien se nourrir ses résidents ? Pas de ville aux alentours, pas de champ, peut-être de l'élevage, mais de là où je me trouvais je ne voyais rien. J'espérai une fois sur place, trouver au moins de quoi me divertir.

Un bruit de pas sur mon côté et mon regard se portait sur une toute jeune fille qui me regardait avec ses yeux ébahis. J'en savais la raison, mon apparence ; il était vrai que recouvert de cendre avec une faux tenue sur l'épaule, je ne devais pas inspirer une grande sympathie. Son regard, fixé sur moi, fit qu'elle ne bougea pas et j'en profitais pour faire tomber le masque de cendre que je portais. Mon visage, qui lui, était immensément plus banal et plus doux la fit se détendre un peu. Toutefois, étant donné la cause de tous les malheurs dont étaient responsables les shinobis, rien n'était sûr quant à l'appréciation qu'elle aurait de moi. Je tentais un sourire, puis m'adressais à elle avec respect, ou du  moins, usant de douceur.
-Bonjour, c'est la cité de la joie que je vois là-bas ?
-Oui, me répondit-elle timidement. Mais les shinobis n'y vont pas d'habitude.
-Pourquoi ?
-Les gens, là-bas, ne les aiment pas beaucoup, à cause des guerres.
-Je n'apporte pas la guerre avec moi. Je veux juste un endroit où me reposer quelque temps.

Elle me regardait encore un temps, un temps où je savais qu'elle cherchait à sonder l'honnêteté dans mon regard. Fort heureusement, avec moi qui disais la vérité et qui, hors de mon armure cendrée, étais l'apparence de la tendresse, elle se laissait convaincre et me laissait enfin entrevoir un sourire que je lui rendis rapidement.
-Mon pépé est un peu plus bas, si vous venez avec moi, il voudra peut-être bien vous amener à l'entrée.
-Ce serait vraiment très gentil de votre part.
-Allez-y venez !

Nous descendions ainsi le versant de la pente ouest pour retrouver un vieil homme qui avait l'air très aimable. Son grand-père, je supposais, qui ne se trouvait pas si loin de là que ça. Il m'étonnait justement qu'une si jeune fille se trouvât seule en pleine nature, mais son "pépé" veillait fort heureusement. J'avais rangé dans le dos la faux entre-temps, car je ne voulais pas paraître menaçant. Il m’accueillait d'un sourire, malgré ma tenue clairement militaire, et sa petite fille qui m'annonçait, me présentait à lui sous le nom de "shinobi". Tout enjouée qu'elle était, il me sembla qu'elle avait un lien très fort avec cet homme. Lui se présentait au nom de Zö, et sa petite fille portait le prénom de Jill. Lorsqu'il venait mon tour de me présenter, je préférai comme toujours donner une autre réponse que la vérité. Une habitude prise au cours des différentes missions que j'effectuais. Toutefois, Zö sembla plutôt s'amuser de ma réponse, il respirait en fait la bonté ce bonhomme et cela me déridait autant que cela me mettait à l'aise. Sa petite fille, qui quoique joyeuse, me donnait plutôt l'impression d'être calme et docile, au point qu'elle restait silencieuse le temps que nous parlions.
-C'est que je n'ai pas de nom... On ne m'en a pas donné, alors je laisse les gens me nommer comme ils veulent.
-Et bien jeune homme, on me l'avait jamais faite celle-là et pourtant, j'en ai vu ! Si je dois t'appeler comme je veux, disons que tu seras... mmmh. Attends voir ! Il me fixait un moment, un sourire à peine voilé sous sa barbe blanche. Shino !
-Pourquoi Shino ? Lui demandais-je amusé.
-Parce que c'est plus court que shinobi ! Me répondit-il plaint d'entrain. Alors comme ça, vous souhaitez passer quelque temps dans la cité de la joie ?
-Oui, je vous promets que je ne vous ferais pas de soucis.
-Il y a quelques shinobis qui passent de temps en temps. Mais jamais pour causer des problèmes.
-Votre petite-fille m'a dit que les gens, là-bas, ne les appréciaient pas tellement.
-C'est comme partout, ça dépendra sur qui vous tomberez.
-Il y a un genre d'auberge là-bas ? Ou quelque part où dormir ? J'aimerais manger aussi, j'ai de quoi payer.
-Vous pouvez venir chez moi pour cette nuit, chez moi, la porte est toujours ouverte aux voyageurs.
-On ne rencontre pas beaucoup de gens aussi généreux que vous. Je ne voudrais pas abuser de vos gentillesses. Et puis je ne vous cache pas que j'ai besoin d'un autre genre de compagnie. Lui disais-je presque gêné.
-Haaaa vous les jeunes, vous ne perdez jamais le nord ! C'est peut-être un camp de réfugiés, mais vous y trouverez presque tout ce qu'il y a dans une ville, et même ce que vous cherchez. Allons ne rougissez pas. Vous êtes soldat et j'ai été jeune moi aussi, je sais ce que c'est. Allez venez.

Le camp était, c'est vrai immense, et cela ne m'étonnait guère que les habitants s'y soient finalement si bien organisés. Tandis que j'étais conduit par Zö jusqu'à l'une des entrées, il me présentait l'endroit, en nommant et m'indiquant tous les lieux qui pouvaient présenter un intérêt pour moi. J'évitais de lui poser trop de questions d'un coup, par respect, et parce que j'aimais me faire ma propre idée. J'avais déjà vu des camps de réfugiés, et ce n'était jamais franchement gai. Dans celui-ci, quoique la bonne humeur y régnât en apparence selon Zö, il y avait toujours les mêmes problèmes. Les problèmes sanitaires entre autres, les maladies qui n'étaient pas rares, les difficultés à se nourrir, et tous les habitants n'étaient pas aussi bon qu'il me l'avait affirmé, même ses nuances. Au moins il était honnête. Il était sorti avec sa petite fille pour aller cueillir des plantes. Herboriste, il confectionnait des potions et des baumes capables de soulager certains maux et c'était ainsi qu'il se rendait utile à sa communauté.

Quand nous étions suffisamment proches, j'entendais un chant s'élever au-delà du crépuscule qui venait. Un chant magnifique, remplit de joie et d'une je ne savais quelle "humanité". Il me réchauffait le cœur au point quand j'en étais surpris et Zö, qui le remarquait, en souriait. Jill courait vers l'entrée sans nous attendre pour rejoindre un groupe d'enfants qui devait certainement être son groupe d'amis. L'entrée était gardée par deux hommes en armes, montés sur un cheval. Ils ne nous arrêtèrent pas, en fait, ils ne nous dirent rien du tout, pas même un bonjour, mais je devinais à cela que le camp s'était fait une petite milice. Le maintien de l'ordre uniquement ? Ou leur protection ? Je l'ignorais, mais je savais que ces gardes n'étaient certainement pas des shinobis. Je voyais déjà la fumée d'un grand feu passer par-dessus les tentes que je découvrais en entrant dans le camp. La vérité était que c'était précaire. Poussière, boue et saleté était clairement le lot quotidien de ces gens. Je savais qu'il n'y aurait pas de sanitaires par exemple et je n'osais pas imaginer jusqu'où les conditions de vie pouvaient être difficile pour eux. Malgré tout, le chant que j'entendais disait exactement le contraire. Ils étaient nombreux à chanter oui, et c'est vers ce chant que me conduisait Zö. Selon lui, j'allais rencontré là la personne que je cherchais....

À une trentaine de mètres de là. Un grand feu avait été fait, comme m'avait-on dit chaque soir peu avant le coucher du soleil. On trouvait autour de celui-ci une bonne centaine de personnes, dont beaucoup chantaient, ce qui expliquait l'harmonie qu'inspirait ce chant à l'unisson. C'était là que m'attendait celle qu'on me présenterait en tant que Thérèse, très respectueusement surnommée "la princesse des putains"... Selon Zö, elle s'amusait de ce surnom et il était mérité de son propre aveu. La jeune femme, pas plus de trente ans, était en effet avec un groupe de filles sous sa garde et sa protection, la pourvoyeuse de plaisir du camp. En d'autres endroits, cela aurait porté à jugement et moult réprimandes moralisatrices, mais ici cela paraissait normal. C'était une curieuse ambiance dans laquelle je me trouvais maintenant. J'arrivais dans une ambiance de fête, où petits et vieux chantaient et dansaient comme pour louer, je ne savais quelle récompense. La nourriture et la boisson étaient distribuées sans que l'on demandât à qui que ce soit de payer. Je ne savais pas d'où cela venait et je n'osais le demander, mais quand j'arrivais et que Zö me présentait, tous, et je dis bien tous, avaient le sourire et la joie de vivre sur le visage. En d'autres temps, j'aurai dit que c'était "un peu trop". Mais vu leur situation, et mon ressenti, je me disais qu'il s'agissait plus d'un moyen d'évacuer tout le malheur auquel devait faire face cette population. C'est là que je la rencontrais, Thérèse. Elle était assise à même la terre, les joues dans les mains avec le regard porté vers les gens qui dansaient et chantaient. Elle me fit un certain effet je ne le cache pas, mais réservé de nature, quand on me présentait, c'était à la voix basse et au regard fuyant que je lui répondais. Elle avait l'air de s'en amuser, mais je ne m'en offensais pas.
-Shino ? Un shinobi ! Je suis enchantée ! Bienvenue à la cité de la joie.
-Merci beaucoup...
-Tu as faim ? Nous avons du saké aussi si tu veux.
-C'est que je ne veux pas abuser.
-Ha ha, c'est moi qui te propose, ce serait mal élevé de refuser. Viens t'asseoir.

Je me défaisais de ma faux, et la posais sur le sol pour pouvoir m'installer à côté d'elle. Elle n'était pas dupe, et je le savais, si Zö m'avait amené vers elle ce n'était pas sans raison. Mais le sujet était bien délicat à aborder et je n'osais pas. Elle ne le faisait pas non plus, au contraire, elle agissait tout autrement, elle ne me donnait pas l'impression d'être un client en fait. Plutôt un invité avec qui faire connaissance.
-Tu viens d'où ?
-Tu veux dire où je suis né ? Ou d'où j'arrive ?
-Les deux pourquoi pas.
-Je suis né à Zhongguo. Mais je viens du nord de Gobi.
-Tu es un mercenaire ?
-De temps à autre. Répondais-je gêné.
-Tu te bats pour qui ?
-Pour celui qui paye... Lui disais-je en détournant le regard.
-Tu ne gagneras pas d'argent ici, tu sais. Me rétorquait-elle amusée.
-Je viens plutôt dépenser celui que j'ai déjà. Lui répondais-je tout aussi amusé.
-Tu comptes rester longtemps ?
-Je ne sais pas. Le temps que ça dure.
-C'est beau, n'est-ce pas ? Continuait-elle en regardant tous ces gens transpirer de bonne humeur.
-Je n'ai pas l'habitude de voir ça, mais c'est vrai que c'est beau. Pourquoi ils sont si joyeux ?
-Le bonheur commence par le sourire, pas l'inverse. Ici, il n'y a que des parias. Soit que leurs maisons sont brûlées par la guerre, soit qu'ils sont au district des malades parce qu'ils ont la lèpre ou la syphilis ou autre chose. Soit ils fuient quelque chose qui ne les concerne qu'eux. Ce n'est pas très beau ici, on le sait tous, mais au moins personne ne cherche à manger personne.

Je tenais mon gobelet de saké entre les deux mains sans ne savoir que dire. Alors je buvais une gorgée et m'efforçais de sourire. Elle ne me regardait pas, elle regardait le vague, veillant sur ce que je pensais être "ses filles". Le regard qu'elle leur portait était plus celui d'une mère qu'une maquerelle, et je trouvais cela tendre. Ainsi, me suis-je dit, que je resterai bien quelque temps ici, parce que le semeur de mort que j'étais ici, n'aurait pas, à semer, la mort... Zö m'avait laissé là pour aller avec les siens, et Jill s'amusait avec des enfants bien loin de là. Je voyais déjà la nuit tomber, mais le feu nous réchauffait et nous éclairait. Manieur de cendre, je trouvais cela d'autant plus beau. Et les chants continuaient, jusqu'à ce que Thérèse se dressât. Elle me tendit la main après s'être placée face à moi, sans un mot. Je posais le gobelet, et saisissais sa main de la mienne en ramassant ma faux de l'autre. Une fois que je me trouvais debout, elle me dit simplement.

-Viens. Me murmurait-elle avec un sourire.
Et je la suivais.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Sam 11 Mai - 10:17, édité 8 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:15
La tente où je passais une agréable nuit était bien tenue. Et quoique je ne fusse pas dupe sur les modalités d'une relation tarifiées, Thérèse savait mettre à l'aise et donner au moins l'impression qu'elle n'avait pas trouvé cela aussi désagréable que cela pourrait l'être. Elle avait été relativement surprise de me voir me dévêtir en laissant seulement tomber au sol la cendre que j'avais sur le corps. Pratique disait-elle, mais gare aux tâches ! Ce dont je m'étais amusé en lui assurant que je n'en laisserai pas une miette le lendemain. Sa tente était l'une des plus grandes, car il y vivait non seulement elle, mais quatre autres jeunes, filles, toutes du même "métier".

Aux beaux matins, nus sur le lit de fortune, nous fumions une cigarette en sirotant un thé qu'elle m'avait servis. Pour peu que l'on ne se trouva pas dans un camp de réfugiés, on aurait pensé qu'elle ne manquait de rien. Nous prenions ainsi le temps de discuter un peu, avant que je cherchasse un autre endroit ou dormir cette nuit, je n'allais pas après tout rester éternellement sur le lit avec elle, même si sa compagnie était apaisante. Elle me parlait avec naturel, et sentait une odeur de sainteté malgré son métier, chose qui me séduisait beaucoup. Suffisamment, pour que nous ayons une vraie conversation qui allait au-delà de la pluie et du beau temps.
-Tu comptes rester toute nue toute la journée ? Lui disais-je comme une taquinerie.
-La robe est plus longue à mettre qu'à enlever, et pour ça on ne s'aide jamais tu as remarqué ? On se déshabille mutuellement, mais jamais on se rhabille.
-C'est moins amusant sans doute.
-Tu sais où tu vas dormir ce soir ?
-Zö m'avait proposé le gîte hier, j'irais à sa tente et après, je verrais.
-Tu peux revenir quand tu veux.
-Ma bourse n'est pas éternelle... Sans mauvais jeu de mots. Ce qui la fit tout de même sourire.
-Tu repartiras à la guerre quand tu te seras assez reposé... On dit qu'elle approche de la fin.
-Après une guerre, il en vient toujours une autre. Mon métier ne connaît pas la crise.
-Pourquoi tu as choisi ce métier ?
-Je n'ai rien choisi, je suis né et voilà ce que je suis.
-À ce compte-là moi aussi.
-Il faudra bien que nous prenions une retraite un jour...
-Hey ! J'ai encore de belles années devant moi, tu sais.
-C'est certain ça, répondais-je amusé.

Les putains de mon point de vue n'avaient que rarement le respect qui leur était dû. Les soldats en étaient des clients friands, car rares étaient les femmes prêtes à construire une vie avec des hommes toujours loin de leur foyer sans jamais l'assurance d'y revenir. De même, elles soignaient les maux du cœur de ceux plongés dans la solitude et l’effroi, ou encore trop laid pour avoir connu de gré la volupté d'une caresse féminine. L'affection était selon moi un besoin vital même si elle ne fut jamais classé ainsi dans la pyramide et pourtant, la majorité de ceux qui fréquentaient les prostitués en avait honte, comme s'il s'agissait d'un aveu de faiblesse, de ne pas obtenir l'amour et la sexualité sans avoir à débourser. Considérant cela, j'aurais aimé que l'on me dise un jour dans quel couple l'homme n'aura pas eu déboursé le moindre talent, notre monnaie, mais enfin, les vertus et la morale possédaient des nuances qui échappaient parfois à toute logique.

Elle ne comprenait pas, je crois que les shinobis naissaient shinobi. Nous n'avions pas le choix de notre vie. Naître avec des pouvoirs destructeurs conduit à détruire, sinon du moins, les clans dans lesquels les enfants naissaient s’employaient à ce que cela se passe ainsi. Le prestige dans la puissance du chakra, enfin, du flux comme ils disent en occident... Thérèse qui couchait sans cause, me paraissait en fait avoir plus de noblesses que ceux qui massacraient au nom d'un idéal.
Nous entendîmes un moment la voix de Zö à travers le tissu de la tente. Il appelait Thérèse et son timbre semblait inquiet. Elle se levait et comme d'instinct je l'aidais à s'habiller. Nous venions d'en parler et je pouvais ainsi lui donner tort. "J'arrive" lui disait-elle et le pauvre devait attendre. Je restais dans la tente quand elle fut prête, toujours nu sur le lit. Zö lui annonçait l'arrivée de deux shinobis de l'alliance qui avaient quelque peu forcé le passage. Moi, je me demandais pourquoi cela la concernait elle d'abord... Mais en sachant que deux shinobis arrivaient, je décidais de m'habiller à mon tour. Rappelant la cendre à mon corps, je n'omettais pas de remettre le casque cendré aussi sur mon visage. Je me saisissais de la faux et je sortais rejoindre Thérèse et Zö.

-Les Gardes n'ont pas osé leur refuser le passage, apparemment, s'écriait Zö.
-Rien d'étonnant, porter une armure et des armes ne fait pas de vous un guerrier, intervenais-je.
Thérèse tournait le regard sur moi et je vis en son œil que dans cette tenue elle m'appréciait différemment. Peut-être prenait-elle un peu plus conscience de ce que j'étais. Ce n'était pas le sujet toutefois.
-Ils ont dit pourquoi ils venaient ? Demandais-je à Zö.
-Simplement se détendre, il paraît, me répondit-il.
-En quoi, c'est un problème alors ? Demandait Thérèse.
-Tu es la sœur du roi lépreux, en son absence, c'est à toi de les accueillir.
La sœur du roi lépreux. Ainsi, j'apprenais que le chef du camp était absent et qu'en plus celle qu'on surnommait la princesse des putains était tout bêtement sa sœur. Là, je voyais sortir de la tente derrière nous une fille blonde, qui tirait par la main une autre que je n'avais pas encore vue, toute bandée de la tête aux pieds et qui paraissait simplette, puisqu'elle ne parlait pas, elle ne poussait que des petits cris et des petits gémissements. Cela m'interloquait, mais je n'avais pas le temps de m'attarder là-dessus.
-Thérèse, si tu veux, je peux t'accompagner. Ce n'est sans doute rien.
-La faux à la main ? Me demandait avec étonnement Zö.
-Les shinobis ont leurs propres manières, lui répondais-je.

La petite blonde nous coupait, en s'adressant à Thérèse. "J'emmène Hélène au dépôt" lui dit-elle. Et Thérèse ne fit qu'un hochement de tête avant de se retourner vers moi.
-Pas de grabuge, s'il te plaît. Me dit-elle.
-S'ils n'ont pas d'intention belliqueuse, il n'y en aura pas. Vous m'avez accueilli, je suppose que vous pourrez en faire autant pour eux.
-Eux sont clairement de l'alliance. On ne veut pas qu'un clan quelconque nous tombe dessus.
À cela, je n'avais rien à répondre. Et fort heureusement Thérèse qui partait me permettait d'éviter d'avoir à le faire. Nous nous dirigions donc vers l'entrée où les deux shinobis en question étaient arrivés. Sur le chemin, je ne pouvais m'empêcher de lui poser cependant au moins une question.
-Il est où ton frère ?
-Parti avec une troupe chercher notre ravitaillement. Il négocie, je ne sais pas comment avec je ne sais pas qui pour que nous ne manquions de rien ou presque.
-Vous manquez de médicaments surtout, je crois.
-Si encore nous avions des médecins pour savoir les utiliser...
Nous tombions là-bas sur deux shinobis en effet monté sur une moto. Je reconnaissais le clan Saïbogu au premier coup d’œil, moi qui fus élevé à Zhongguo, j'avais eu l'habitude d'en affronter et l'usage de cette technologie ne trompait pas. Le deuxième, je ne supposais rien, car je ne remarquais pas de signe distinctif. Je ne faisais pour le moment office que d'escorte à Thérèse, qui était celle à qui revenait d'accueillir ces deux personnes. Sous mon casque de cendre, je ne disais rien pour le moment. Je me contentais de veiller.
-Bonjour à vous ! S'annonçait-elle pleine de joie et d'entrain. Vous avez forcé le passage, paraît-il, ça a fait paniquer pas mal de gens ici. Vous comprenez que les shinobis ne sont pas forcément bien vus dans un camp de réfugiés. Mais s'il est vrai que vous ne venez pas causer de problèmes, vous êtes les bienvenus à la cité de la joie. Je suis Thérèse, et disons que je gère ce que je peux en l'absence de mon frère à qui appartient ce camp.
-L'alliance, n'a-t-elle pas son propre camp ? Intervenais-je alors. J'usais d'un aimable ton, mais je n'oubliais pas, non plutôt malgré moi, il y avait déjà un brin de défiance dans cette question. En effet, il me paraissait curieux que des hommes dont l'allégeance était revendiquée eussent besoin d'aller se reposer dans un camp de réfugiés.

-C'est un fort joli nom en tout cas, je m'appelle Saïbogu Kumiko, enchantée de vous connaître hmm … Thérèse. L'alliance a même plusieurs camps, mais à qui avons-nous à faire ? Vous ne semblez pas être aussi dans le besoin que ces personnes, hm. D'autant plus que l'alliance se bat de toutes ses forces pour que les populations vivent libres. Quelque part, nous sommes dans le même camp face aux autres clans. Nous répondait la Saïbogu.
-Et puis, il n’y a rien d’autre que ce camp à des kilomètres à la ronde, un peu de repos avant de reprendre la route serait salvateur. Mais excusez-moi ma curiosité, vous dîtes que ce camp appartient à votre frère, c’est une façon de dire qu’il est le chef ou il est à l’origine de la création du camp ? Ça n’a pas dû être facile d’organiser tout cela avec le peu de moyen que vous devez avoir, surtout que les clans et l'alliance sont bien trop préoccupés par la guerre pour vous aider vraiment. Ajoutait le shinobi qui accompagnait la Saibogu après un "bonjour à vous".

Je tournais mon regard vers Thérèse, je ne pressentais pas d'animosité de leur part, au point que je laissais la cendre de mon casque tomber pour dévoiler mon visage d'ange aux yeux bleu, dont l'innocence loin de paraître usurpée figurait être un fardeau plus lourd à porter que la faux que je rangeais dans le dos. Thérèse ne perdait pas sa jovialité et s'efforçait d'accueillir ces deux shinobis avec la dignité due à tout être humain. Ils posaient des questions qui selon moi ne les regardaient pas, mais il ne me revenait pas non plus de juger de cela et Thérèse était la seule à pouvoir en définir l'importance. Toutefois, avant qu'elle ne réponde, je me permettais une remarque gratuite certes, mais dont je ne négligeais pas l'importance. Ce n'était pas que je me renfrognais à leur vis-à-vis, c'était que je souhaitais rappeler à une réalité des guerriers qui se pensaient légitimes comme tout ceux qui défendaient une cause.
-Un idéal en réduit toujours un autre en cendres.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Sam 11 Mai - 10:38, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:22
Le ton était doux, fataliste, tandis que je fixais surtout la jeune femme rousse qui avait évoqué son goût de la liberté et son combat pour celle-ci. "Liberté liberté, que de crime, on commît en ton nom", me disais-je cette alors à moi-même intérieurement. Je n'avais de haine pour aucun des deux belligérants pour ma part. Je savais qu'une fois cette guerre terminée, les hommes trouveraient bien une autre raison de verser du sang. Je n'étais pas pourtant le genre à donner des leçons de morale, toutefois leur réaction à cela m'en dirait bien long sur leur personnalité. Thérèse, ne les laissait pas me répondre tout de suite, sans doute, voulait-elle "améliorer" l'ambiance avant. Je savais pourtant, ayant conversé avec elle, que de dire que les réfugiés étaient dans le même camp que les shinobis de l'alliance ne passerait pas. Même si elle ne le ferait sans doute pas remarquer pour ne pas ajouter de la tension là où ce serait inutile, je trouvais cela tout aussi gros pour ma part. Ici, les réfugiés n'avaient pas de camp, et de fait, il ne fallait pas se leurrer, le laboureur exploité par les clans, serait exploité ensuite par le shinobi. Pour lui, cela ne changerait rien, si ce n'est qu'entre-temps, il aura eu sa demeure à reconstruire.
-Vous serez accueilli et vous pourrez vous reposer. Du moment que vous vous montrez assez discrets pour ne pas attirer les soldats des clans ici. Vous avez dû le remarquer, ce n'est pas notre petite milice qui saurait arrêter des hommes entraînés et déterminés. Mon frère est effectivement le créateur de ce camp, et il en est devenu plus le protecteur que le chef pour être honnête avec vous. Mais il n'est pas là pour le moment, il sera revenu dans quelques jours au plus tard. Hô, et voici Shino, que nous avons accueilli également hier.

Redressant le regard tant vers eux que Thérèse, je n'oubliais pas d'avoir précisé que je me battais pour celui qui payait quand elle m'avait posé la question. Aussi avais-je combattu pour les deux camps. Chose qui n'était pas certaine de passer. Je ne comptais toutefois pas stopper Thérèse si elle leur en faisait part. Je préférais de loin l'honnêteté et ce n'était pas le lieu, j'espérai qu'ils le comprendraient, pour déclencher un combat entre shinobis.
-Je ne sais pas où vous pourrez passer la nuit en revanche. Si vous trouvez quelqu'un pour vous héberger, ce sera idéal. J'ai plusieurs tentes pour ma part où nous logeons avec mes filles. Mais les nuits y sont payantes autant que le divertissement que nous y prodiguons. Concluait-elle.

Quelle jolie formule pour présenter un bordel improvisé me disais-je en moi-même sans pouvoir retenir un sourire. Comprendraient-ils la subtilité ? Ils étaient tous les deux très beaux et bien soignés, et la jeune Saibogu ne paraissait pas faire de grande manière, pas puritaine au premier coup d’œil en tout cas. Mais cela ne me concernait pas. Je voyais une occasion de peut-être trouver du travail en les rejoignant quelque temps quand ils partiraient, mais avant cela, je voulais un peu mieux jauger qui ils étaient. Rebelles combattant pour la liberté, peut-être, mais un assassin demeurait un assassin et tous les principes n'étaient pas les mêmes pour qui jouait autant de l'épée que du chakra.
-Je sais que les dernières batailles ont été éprouvantes pour les deux camps. Je suppose qu'ils voudront surtout manger et se reposer. Ce soir, au feu de camp à l'augure des chants, ils verront bien de quoi faire des rencontres et feront leur choix, tu ne penses pas ? Demandais-je à Thérèse.
-Oui, oui, c'est sûr ! Me répondit-elle toujours la joie sur le visage.
-Il faudrait qu'elle gare son engin aussi. Il y a des enfants qui courent et jouent dans le camp, un accident est vite arrivé et cela pourrait effrayer les résidents. Ajoutais-je.

En quoi cela me concernait après tout ? Moi qui n'étais là que depuis hier... Je me surprenais moi-même à vouloir prendre soin de ces réfugiés, et Thérèse fort heureusement ne semblait pas s'en offusquer. Elle ne me fit qu'un hochement de tête approbatif dont les deux shinobis feraient ce qu'ils voudraient.
-Bien ! Je dois rejoindre deux de mes filles au dépôt. Je vous laisse entre shinobis ! Terminait-elle avant de partir.
Quant à moi, maintenant seul avec eux deux, je ne savais pas vraiment quoi faire ou dire de plus. Alors je laissais le silence s'installer entre nous pendant quelques instants jusqu'à ce que je me décida à le rompre.
-Thérèse n'en a pas parlé, mais ils ont pas mal de difficultés ici, surtout médicales et sanitaire. Si l'un de vous deux a des compétences médicales, je pense qu'aider les résidents de ce camp donnerait une meilleure image des shinobis. Elle n'a rien dit, sans doute, car ce n'est pas parce qu’on a plus rien qu'on a plus de fierté. Il ne me semble pas que le jeune homme, ce soit présenter au fait.

La conversation et la rencontre duraient et démarraient pas si mal que ça. En fait, je pressentais l'envie de s'intégrer chez ces shinobis. Sans aller jusqu'à croire en leur complète innocence, ce qu'ils répondaient à Thérèse me satisfaisait. La jeune shinobi allait même jusqu'à exprimer de l'entrain devant l'idée d'un feu de joie et quoique son compagnon y semblait moins emporté, il ne paraissait pas trouver cela désagréable pour autant. Aussi, me disais-je que même s'ils étaient présents pour une autre raison que le repos, ils ne chercheraient pas au moins à causer du trouble. Était-ce ce camp que je protégeais alors ? Ou ma propre quiétude ? Si l'on lisait en ce moment le récit de ma vie, la question serait légitime, et j'y répondrais sans doute que quelle que soit la réponse, le résultat serait finalement le même. Alors à quoi bon s'en soucier, si moi, le premier concerné, je ne m'en souciais pas, ... Ou pas.

-Vous êtes là depuis longtemps ? Vous prenez à cœur la vie de ces gens à moins que ce ne soit qu'elle ? Me demandait pleine de jovialité Kumiko.
Et je me demandais si elle avait écouté la conversation. Thérèse avait dit que je n'étais présent que depuis hier pourtant, mais l'information avait dû lui échapper. J'en souriais en réalité, autant devant son énergie débordante que de son étourderie. Elle avait rit quand j'évoquais les idéaux cendrés et riait encore de presque tout. Chacune de ses paroles respirait, et inspirait même, un goût de la joie. Cette jeune femme qui avait plus d'un tour dans son sac au vu des fûinjutsu qu'elle avait sur le corps dont un contenait maintenant sa moto, semblait être aussi bienveillante que Thérèse. Bien sûr, cela me ravissait, et quoique je ne fusse pas démonstratif à son point, le regard que je posais sur elle se fit aussi tendre que doux et le sourire que je lui portais se faisait témoin de l'estime grandissante que j'avais d'elle. La réserve ne tombait pas pour autant, car on se refaisait pas... Je n'avais pas le temps de répondre que son comparse intervenait lui aussi, tant pour se présenter que pour me désillusionner quant à leurs compétences médicales.
-Vous avez raison, je m’en excuse, je m’appelle Fujisawa. Avec ce qui s’est passé, j’avais un peu la tête ailleurs. Et personnellement, je n’ai aucune compétence médicale. Je pourrais à la limite aider à faire certains diagnostics, j’ai une bonne connaissance des maladies, mais pour ce qui est du soin, je ne peux rien faire pour vous malheureusement. Ajoutait donc Fujisawa.

Cela me fit perdre un instant mon sourire, il aurait été trop beau que le hasard nous mena des shinobis médecins de toute façon. Connaissant le sens de l'humour noir dont était capable Dieu, cela ne m'étonnait finalement guère. Il était inutile alors de chercher à imposer une aide de leur part à ces résidents. Ils ne les connaissaient pas plus que moi, et hors de l'occasion qui aurait pu se présenter sous leurs talents, ni eux ni moi, n'étions responsables de ces gens-là. Je convenais pour ma part qu'il faille seulement me conduire en bon invité, à la hauteur de la délicatesse de mes hôtes.

Il s'agissait maintenant de répondre, surtout à Kumiko puisque son compagnon ne posait pas tellement de questions. Je baissais un peu la tête timidement, non pas que j'avais honte de ce dont j'allais annoncer, mais que parler de moi déclenchait toujours un certain malaise en moi, et ce, malgré mes efforts pour le contrôler. Moi ? Le sujet qui m'ennuyait le plus. Mais c'était en se montrant honnête avec autrui, qu'on lui donnait le plus de gage de sa bienveillance autant que de sa confiance. Un risque certes, mais je me figurais ne pas risquer le combat, juste, au plus grave, une réticence à mon égard.
-Je ne suis arrivé qu'hier comme Thérèse l'a dit. Avant cela, je combattais pour les clans, et avant cela encore, pour l'alliance, et avant cela encore... Pour l'Empire, et avant cela encore, pour un autre. Je marquais un temps d'arrêt et relevais une œillade désolée et compatissante. Prise de pitié à leur égard ? Bien sûr que non, cela ne serait pas respectueux et ne serait pas mérité. C'était plutôt que je sentais mes principes probablement obsolètes à leurs yeux, ce qui, par avance, développait un sentiment de solitude en moi dont j'étais maintenant coutumier. Ma voix fort heureusement n'était pas celle d'un dépressif enclin au fatalisme le plus complet. Simplement celle d'un homme profondément doux, qui était convaincu de sa propre philosophie.
-Je tente de laisser du bon là où je passe, d'autant plus quand j'y suis bien accueilli comme ici, peu importe devant qui je tombe. Continuais-je. Je suis peut-être un meurtrier à vendre maintenant à vos yeux, mais je n'ai jamais fait de ce métier un plaisir je puis vous l'assurer. Mon ennemi sur un champ de bataille ne l'est que le temps de la bataille. Par habitude, j'ai vu que d'un côté ou de l'autre, c'est toujours la même histoire, les deux camps se disent les plus justes, il n'y a de guerre que lorsque deux partis se disent légitimes.

Je n'avais pas plus développé que cela mes sentiments et mes égards. Ce fut déjà bien assez suffisant pour risquer de me faire haïr s'ils fussent fanatiques. Un camp voulait unifier Gobi et prônait l'ordre, l'autre prônait l'indépendance des clans et voulait la liberté et l'Empire voulait conserver la nation sous sa coupe. Qui était légitime ? Et d'ailleurs rien ne disait que tout cela les intéressait au final. J'en venais donc à un tout autre sujet avant de leur laisser le temps de répondre.
-Je crains hélas que nos compétences réunies ne suffisent pas. C'est un grand dommage pour eux, mais ils ne sont pas de notre responsabilité. Quoiqu'indéniablement, vous et moi avons contribué à conduire ces gens ici.
Un reproche ? Non, un fait, un fait que nous devions porter sur les épaules selon moi, et le porter le plus dignement possible. Eux comme moi, n'avaient sans doute pas choisi leur condition plus que les gens résidents dans ce camp. Nulle innocence pour qui que ce fut en ce bas monde, ainsi juger de la responsabilité des malheurs était bien peu sage pour qui que ce fut. Je pointais alors le centre du camp, où je savais de Thérèse, qu'ils pourraient y trouver le dépôt s'ils avaient des besoins matériels à combler.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Sam 11 Mai - 19:08, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:28
-Là-bas se trouve une sorte de magasin si vous cherchez quoi que ce soit. J'ai aussi ouï dire qu'il restait un peu de place à l'est du camp s'il vous en fallait. Sachez que je ne suis personne ici cependant. Étant shinobi, et craignant que la milice soit dépassée par les talents que nous connaissons, je voulais seulement m'assurer que mon propre repos ne serait pas troublé. J'ai eu, je crois une réponse favorable, finissais-je avec un amical sourire.
Un petit mensonge à moi-même peut-être, car effectivement, la nuance des sentiments que je vouais à ce camp était bien plus complexe.
-Je compte de toute façon m'y rendre, si vous voulez m'y accompagner ?

Vers le centre du campement, une toute jeune femme blonde et frisottée s'évertuait à négocier avec l'un des rares marchands. Il était en réalité le responsable du dépôt qui se permettait de temps à autre de faire du marché noir, et vu la demande, il avait de quoi ramasser un beau pactole. Le dépôt était l'endroit où les provisions, mais aussi absolument tout autre matériel se trouvait. La jeune fille qui négociait, recherchait pour sa part à ce moment-là des médicaments. Pour elle-même, qui craignait les maladies infectieuses et vénériennes à cause de son métier, et pour soigner l'esprit d'Hélène, la jeune femme bandée de la tête aux pieds qui l'accompagnait (et c'étaient précisément ces médicaments-ci que l'homme vendait en sous-main, le reste étant normalement en libre accès). C'était un ordre de Thérèse, qui avait reçu plusieurs conseils susceptibles de rétablir l'état de cette jeune fille. Personne n'avait un grand espoir la concernant en réalité, et tous ceux de ce camp ne l'auront jamais vu autrement qu'ainsi, c'était-à-dire muette, simplette, avec le QI d'un enfant de deux ans... Pour son plus grand malheur, elle avait le défaut d'être magnifique, c'était pourquoi Thérèse la bandait de la tête aux pieds, craignant que les appétits masculins qu'elle connaissait trop bien puissent chercher à disposer de la faiblesse de sa protégée.

L'homme lui réclamait un peu trop à son goût pour les denrées qu'elle demandait, elle se savait pourtant le dos au mur et dans l'obligation de payer. C'était aussi ainsi que les choses se passaient dans le camp de réfugiés. Tous cherchaient à survivre, mais ils y en avaient toujours, même au plus bas de la misère, qui cherchaient à tirer parti des situations sur le dos d'autrui. La petite blonde, chacun ici, et particulièrement les pourceaux, la connaissait. Recueillit depuis quelques mois par le camp, on en savait très peu sur son passé, mais Thérèse l'aura prise sous son aile et ce fut elle-même, qui se présentant sous le prénom de Sibile, décida de faire le même métier que sa protectrice. La corvée qu'on lui imposait à ce moment-là en revanche ne l'enchantait pas, elle avait tendance à considérer Hélène comme une charge, sans oser toutefois en faire part à qui que ce soit de son entourage. Hélène était dispensée de travailler en effet, contrairement à toutes les autres filles sous la coupe de Thérèse, ce qui pouvait provoquer une certaine jalousie. Si les autres filles arrivaient à comprendre la décision de Thérèse, Sibile, qui ne niait pas l'incapacité d'Hélène, n'éprouvait pas moins une certaine aversion mêlée de honte de la ressentir. Hélène en effet, dans sa simplicité, était la tendresse incarnée, l'innocence telle qu'on l'envisagerait en regardant un nouveau-né.

Lorsque Sibile sortait de la tente du dépôt, c'était pour un bref instant de panique, Hélène avait disparu, jusqu'à ce qu'elle la retrouvât en train de jouer avec des enfants. Sautillant dans la boue, elle trouvait là autant de joie et de candeur qu'on pouvait attendre d'une personne aussi simple. La simplicité de l'esprit, avait de cela, qu'elle offrait la vision vraie des plaisirs simples de la vie, une vision qui échappait aux esprits intellectuels et tourmentés par le questionnement. Sibile s'empressait d'empoigner Hélène pour l'emmener. Elle avait avec elle maintenant tout ce que Thérèse lui avait réclamé et devait normalement se rendre directement là où elles dormaient toutes. C'est sur le chemin qu'elle croisait Thérèse, tout enjouée et pleine de bonne humeur comme toujours. Elle, qui prenait la vie comme elle venait, essayant sans cesse de respecter une certaine ligne de conduite qu'elle s'était fixée. Hélène, il était vrai, était la préférée de Thérèse, mais chacune de ses filles avait son affection aussi réelle que sincère, et Sibile n'était pas exclue de cela, loin de là. Thérèse ignorait cependant les ressentiments de Sibile tant la petite blonde savait donner le change.
-Hoy ! S'écriait Thérèse. Alors tu as tout ? J'espère que ce vieux fripon t'as pas pris trop chère !
-Si, je trouve... Répondait doucement Sibile. Surtout, qu'on n'est même pas certaines que ça va marcher.
-S'il y a une chance, on doit essayer.

Mais Sibile n'avait clairement pas le baume au cœur. Quelque chose lui tourmentait l'esprit, lui pesait sur l'âme, Thérèse le voyait clairement dans son regard qui s'assombrissait en s'abaissant. Alors elle lui saisissait le visage entre les mains, pour le redresser, et avec un grand sourire elle lui dit.
-L'être humain est lâche par nature. Il jalouse celui qui n'a, ne serait-ce qu'un peu plus que lui, et au contraire méprise celui qui possède moins. Pour une légère différence, il craint et il hait. Et c'est dur à admettre, mais c'est spécialement lorsqu'il s'agit de parias comme nous. C'est pour ça que nous devons nous serrer les coudes, nous toutes, quoi qu'il arrive. Parce que nous ne sommes peut-être que des putains, mais au moins, nous sommes des putains unies et honnêtes.

Sibile voyait son visage s'éclaircir, sans lâcher prise la main d'Hélène, qui n'écoutait pas vraiment, puisqu'elle voulait attraper un insecte qui passait là, sans même savoir ce qu'elle en ferait si elle l'attrapait sans doute. La petite blonde allait répondre, mais on entendit des cris plus loin en arrière de Thérèse. C'était une autre de leur fille, qui appelait à l'aide. Déjà une petite foule s'était amassée près de là, et à la fois Thérèse, et Sibile qui tirait toujours Hélène s'y rendaient.

Pendant ce temps, je me trouvais toujours avec les deux shinobis qui avaient finalement accepté de m'accompagner, mais avant cela, j'avais dû faire avec les élucubrations de la kunoïchi Kumiko. Elle ne démordait pas de son idéal, cherchant à me convaincre de son bien, et même, elle osait tenter de me recruter. Bien sûr, je comptais peut-être les rejoindre, bien sûr aussi sa joie tant que son entrain me séduisait, mais de là à croire en leur cause... Si elle n'avait pas saisi ce que je venais de lui dire, je pensais peine perdue de chercher à répondre à ses affirmations et son argumentaire. Fou des clans ? Les exactions guerrières étaient des deux côtés. Elle croyait certainement que c'étaient les régimes qui faisaient les hommes, que la brutalité et la médiocrité résultaient des dirigeants qui faisaient les lois. Or, je l'avais vu de mes yeux, ce sont les hommes, et rien que les hommes, qui sont responsables de leurs actes et de leurs répercussions. Les shinobis de l'alliance savaient fort bien faire preuve de cruauté quand ils l'estimaient "nécessaire", et je ne pensais pas que la liberté enveloppée dans un paquet cadeau qui avait singulièrement la couleur du sang, rendait leurs actes plus justifiables que ceux des clans. Quand j'attendais, forcé d'entendre tout cela, je me contentais de regarder droit devant moi, en répondant par un dur silence. Je voulais éviter le conflit avec eux, et je ne voyais que cette solution pour cela.
C'est alors que l'autre shinobi, Fujisawa intervenait, et ce qu'il disait... J'en tournais le regard sur lui un moment, avec le sourire, léger et heureux d'avoir à entendre quelqu'un qui me comprenait sans doute un peu plus, sans pour autant forcément adhérer à ce que je disais. Je me sentais en fait moins "seul". Je lui offrais un hochement de tête approbateur quand il terminait d'ailleurs, tout cela, alors même qu'il ne s'adressait pas à moi, mais à la shinobi Kumiko.
-Tu vois bien qu'il n’est pas touché par l’idéal de l'alliance, je le comprends un peu à vrai dire. Les clans eux-mêmes sont nés d’un idéal qui faisait rêver et on voit bien ce que ça a donné. Et puis faire l’apologie de cette guerre ici, ce n’est pas forcément idéal. Et puis tout le monde n’est pas prêt à combattre les clans uniquement pour ton beau sourire.

À ces bonnes paroles, je m'en retournais, les sachant me suivant vers le centre du camp. Il voulait visiter avait dit Fujisawa. Nous visitions donc. Ce qu'il y avait à voir n'était pas aussi repoussant que les champs de bataille que nous avions dus tous les trois côtoyer, mais ce n'était pas tout à fait l'ambiance du parfait site touristique. Ce que nous avions à découvrir était simplement ce que pour ma part, j'imaginais. Le bonheur du soir au feu de camp, masquait le malheur de la journée. Ces gens voilaient leurs conditions de vie en riant et en chantant. Cela n'effaçait pas la boue, la surpopulation, le manque de soins et d'hygiène. Je ne croyais pas que je pouvais tenir pour responsable de leurs conditions de vie ces résidents. Je n'aimais pas, depuis bien longtemps maintenant, juger des responsabilités d'une situation, du moins je ne me le permettais que rarement. Je ne considérais personne comme innocent, pas même ceux qui souffraient ici même. C'était malheureux ce spectacle, mais d'autres souffraient ailleurs pour d'autres raisons. La vie était ainsi, faites de naissances sous le signe de la fortune tandis que d'autres naissaient dans le caniveau. La chance n'avait rien à voir là-dedans peut-être. Je savais que pour tous les maux, il existait heureusement la certitude que la mort viendrait tôt ou tard les guérir. Je préférais le silence au fil de mes pas, à moins qu'ils n'eussent pas choisi de me parler, je me rompais à l'exercice du roi du mutisme pour ma part. Jusqu'à ce que nous entendions plus loin, vers le centre que nous n'allions pas tarder à atteindre, un homme qui criait à pleine voix, et il y avait vraisemblablement une certaine animation puisque déjà quelques personnes étaient autour de lui et nous dûmes traverser une petite foule pour voir ce qui se passait.

Cette voix était rauque, et sans voir le personnage, je me figurais déjà un ventre bedonnant d'alcoolique notoire. Devinez quoi ? J'étais tombé juste. Là, un homme donc, bedonnant, barbu, sale, et passablement ivre, proférait diverses menaces et accusations envers une jeune fille ensanglantée que Thérèse tenait dans ses bras au sol, comme pour faire barrière de son propre corps à la colère de cet homme. Il tenait à la main un genre de bâton, dont le bout portait encore le sang de la jeune fille justement, un bâton qu'il brandissait de temps à autre.
-Elle ne m'a pris deux fois plus que ce qu'on avait dit ! Il manque au moins douze pièces dans ma bourse ! J'suis sûr que c'est cette garce qui me les a pris ! Criait-il sur elles.
-Mes filles sont honnêtes ! Tu ferais bien de partir et peut-être que mon frère à son retour ne te fera pas chasser d'ici !
-SALE PUTAIN ! PRINCESSE DES PUTAINS ! Sans ton frère pour te protéger les fesses, tu serais ravagée par la moitié des mecs de ce camp ! Les femmes te détestent ! Et tes filles sont des voleuses ! Je veux mon pognon, tu entends !
-Tu es ivre, je suis sûr que tu l'as perdu tout seul !
-Thérèse... Chouinait la jeune fille entre les bras de Thérèse.

Un peu en retrait, je voyais Sibile qui tenait fermement Hélène. La blonde était apeurée et ne savait que faire, tandis qu'Hélène la bouche ouverte, était complètement à l'ouest et regardait sans vraiment comprendre ce qui se passait. Elle essayait de tirer sur le bras de Sibile pour rejoindre Thérèse, mais la petite blonde la tenait bien pour l'en empêcher.
Intervenir ? Le camp, n'avait-il pas organisé une milice que je voyais là absente ? Cela ne nous regardait pas après tout, mais cet homme avait assez d'aplomb, ou d'alcool dans le sang pour frapper des femmes sans armes... Cela me mettait mal à l'aise en fait. Mais je ne connaissais pas ces filles moi, peut-être que l'homme disait la vérité... Quand bien même, frapper de la sorte n'était pas le châtiment mérité tant qu'aucune preuve de ce qu'il disait ne fût présentée. J'hésitais à m'avancer. Shinobi ? Si j'usais de violence et de chakra maintenant, que penseraient tous ces gens de nous ? Plus de méfiance encore, je le craignais. Cela continuait de hurler, quand l'homme fit un nouveau geste. Il sortait un poignard cette fois de sa ceinture. Je bondissais, d'un seul tenant derrière lui, si vite que les civils ne me virent même pas décoller et je lui saisissais le poignet. Pas de grandes violences en réalité, je ne fis que le lui faire chauffer jusqu'à le brûler au deuxième degré. Il lâchait ainsi, comme je l'espérais, le poignard qui tombait sur le sol. Le silence suivit, excepté de Thérèse qui prononçait mon nom, comme étonné de mon intervention. Mon chakra ressortait de moi instinctivement, quand mon regard croisait celui de cet homme. Ni Lumineux, ni noir, mais autrement plus connu de ceux qui ne connaissaient la saveur et l'odeur de la mort. Le tuer n'aurait en effet provoqué chez moi absolument aucun sentiment, et si je ne le faisais pas, c'était parce que je me trouvais dans ce camp avec la ferme intention d'y rester encore quelque temps. Je ne me rendis pas compte pourtant de la quantité de chakra que je dégageais, comme si cet imbécile aurait pu le sentir comme un avertissement de ce qui l'attendait s'il se rebiffait.

La milice intervenait tandis que je restais d'abord silencieux. Ils sortaient de la foule, trois hommes, dont j'étais sûr qu'ils se cachaient jusque-là. Drôle de défense et je me devais de le faire remarquer.
-Vous attendiez plus de sang pour intervenir ?
-C'est que....
-Que ? Insistais-je un peu sèchement.
-Les meilleurs combattants sont avec le roi, on n'est pas vraiment formé à ça.
-Si tu ne sais pas te battre, ça ne t'empêche pas d'en avoir le courage quand c'est nécessaire, je crois. Sinon donne tes armes à quelqu'un qui aura ce courage.
-Shino... Intervenait Thérèse, une fois qu'elle s'était levée avec sa fille dans les bras et que les miliciens avaient attachés l'homme ivre qui braillait d'avoir mal au poignet. Emmenez-le à l'écart et ne le détachez pas. Nourrissez-le bien, mon frère verra ce qu'il lui arrivera. Terminait-elle.

J'abaissais le regard, quelque peu honteux d'être intervenu si gratuitement. Je remarquais le silence dans la petite foule, et j'en craignis d'instinct qu'ils me craignissent tous à leur tour. Mais je n'osais encore pas croiser leur regard pour vérifier. La jeune fille dans les bras de Thérèse, se mit à pleurer, pas à chaudes larmes, mais des larmes sincères malgré tout, et ce que je l'entendis dire me fit grand mal au cœur.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Sam 11 Mai - 21:59, édité 2 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:33
-Quelquefois, je voudrais être morte... Le monde se fou déjà de nous, maintenant même les nôtres nous veulent du mal...
-Maëlis... S'attristait Thérèse en essayant de la consoler comme elle pouvait.
-S'il te vient l'idée de te suicider, ne le fais pas, car si aux yeux du monde, tu n'es rien, aux yeux de quelqu'un, tu es sans doute le monde entier. Intervenais-je en m'adressant à elle en toute honnêteté. Ce que j'ignorais alors, c'était que celle qui fut la plus frappée par cette phrase, c'était Sibile, que je ne regardais pas.

Cette Maëlis redressait le regard vers moi, tout comme Thérèse, mais elle n'était pas tout à fait convaincue, je le voyais, comme j'avais vu en elle le véritable désir de mourir, tant le poids de la vie pesait sur ses frêles épaules. Le suicide, c'était l'espoir de ceux qui n'en n'avaient plus, et cet espoir, je le vis dans beaucoup de regards durant ma courte vie. Toutefois, je savais, que nul en ce monde ne pouvait être détesté de tous et aimer de tous aussi, cette jeune fille avait forcément quelqu'un pour l'aimer, ou avait connu quelqu'un qui l'aimait, et dans son regard, c'était l'idée que je voyais émerger en elle, celle précisément que j'avais voulu faire éclore. Je lui fis un petit sourire certes forcé, mais sincèrement compatissant malgré tout. Et alors que Thérèse me souriait à son tour, nous entendîmes un cor sonner au loin. Puis un cri.
-LE ROI EST DE RETOUR !
Le surnommé, Roi lépreux, rentrait dans son domaine.

Thérèse consolait sa protégée tandis que les miliciens de fortunes conduisaient l'ivrogne violent, je ne savais pas où. Certainement dans un endroit où il pourrait décuver et prendre conscience tant de la gravité de ses actes que de l'absurdité de la situation. Toutefois, ce qu'il avait dit, je ne l'avais pas ignoré. Les femmes détestaient Thérèse ? Les hommes la ravageraient ? Qu'est-ce que cela sous-entendait sinon qu'il y avait bien plus de tension que la "cité de la joie" voulait bien l'admettre. L’intervention de Kumiko qui suivait, quoi qu'inutile dans cette affaire, était pourtant de mon point de vue normale, quand elle venait le gifler tandis qu'on l'emmenait. Une solidarité féminine peut-être ? Même si la provocation qu'elle avait employée m'avait paru surfaite. Son compagnon était toujours plus discret, et me paraissait aussi, plus lucide d'une certaine façon. Je croyais pouvoir supposer que cet homme avait un passé lourd, bien plus que la fanatique de la rébellion qu'il accompagnait, peut-être était-ce pour cette raison, sans pouvoir l'expliquer, que le courant passait mieux entre lui et moi qu'entre moi et elle.

La foule se dirigeait vers l'entrée pour accueillir le "fameux" roi lépreux. Un homme que j'avais hâte de rencontrer, je ne le cachais pas. Thérèse avait la mine sombre, et ne semblait pas vouloir s'y rendre. Sibile, traînant encore Hélène, la rejoignait silencieusement et je supposais sans me tromper qu'elles rentreraient toutes vers leur tente. Cette Hélène, qui en me voyant, je ne savais pas pourquoi, serrait les dents comme si elle devait se méfier d'un animal dangereux. Une surprise dans le regard de Thérèse et de Sibile sur une attention qu'elles ne relevèrent pas, sans doute pour ne pas me froisser. La simplicité instinctive de cette jeune femme sans voix et sans réflexion avait peut-être ressenti en moi le goût de quelque chose que je cherchais pourtant à me cacher....
Pour ma part, je rejoignais les deux shinobis, et je commençais par faire un sourire à Kumiko.
-Merci... Lui disais-je sourdement. Je vais aller voir ce fameux roi pour ma part. Si vous voulez me suivre...

Merci pour quoi ? Elle en jugerait d'elle-même, ce mot de gratitude était pour moi la simple récompense devant une action humaine. Le genre de chose qui pouvait m'émouvoir tant je n'en avais pas l'habitude. La complexité de la nuance de mes sentiments n'avait d'égal que ma capacité à tuer sans ressentir de culpabilité, mais cela, la pauvre, ne pouvait pas le savoir.
J'avais ignoré volontairement leurs commentaires, que ce fut sur ce qu'il venait de se passer ou sur le roi lépreux. Ces choses-là ne m'intéressaient pas. En revanche, je ne cachais pas mon intérêt pour celui-ci, et je tentais de les inviter à me rejoindre pour aller à sa rencontre. Peut-être se ficherait-il de nous, mais le voir m'intéressait. Je m'y rendais donc sans vraiment me presser.

Là-bas, plus en avant du camp, lorsque je dépassais l'entrée, je vis alors descendre de la vallée désertique une cavalerie, il fallait bien le dire ainsi, transportant dans des chariotes d'énormes caisses. Sans doute le ravitaillement tant attendu par le camp de réfugiés. De loin, on y aurait presque trouvé de la grandeur, avec ces drapeaux blancs tâchés de sang flottant au vent sous le soleil. Un drapeau blanc tâché de sang, quel symbole criant cela me paraissait... Mais leur équipement était loin d'être celui d'une glorieuse armée. Il m'apparaissait clairement que tout cela tenait plus de la récupération de champ de bataille et de bricolage qu'autre chose. Ils étaient nombreux. Sans pouvoir dire combien, je voyais tout de même une partie armée se dessiner dans l'horizon. Mais une armée de civil. Combien d'entre eux, même tous ensemble, feraient le poids face à un shinobi dépassant le titre de génin ? Était-ce de la parade, où se croyaient-ils sincèrement convaincus de pouvoir faire face ?

À leur tête passait l'homme que je voulais voir. Et Dieu que je n'étais pas déçu. Je voyais une hauteur telle que je l'aperçus que rarement chez un homme. Monté sur son cheval, ce roi lépreux semblait réellement posséder la dignité d'un prince. Était-ce sa tenue ? Son masque d'argent ? Son cheval noble ? Non, c'était autre chose. Voyant les gens s'écarter lorsqu'il rentrait dans le camp, on sentait tout le respect d'une population pourtant rustre et à bout de nerfs, comme si par sa présence, l'ordre et la quiétude s'installaient dans les cœurs. Il était accompagné de ses gardes, mais l'un d'eux particulièrement, un homme immense, encapuchonné et engoncé dans une armure paraissait veiller sur lui plus que de raison. Je restais à l'écart, sachant bien qu'il ne valait mieux pas se montrer pour le moment. Je me tenais toutefois suffisamment près pour le voir. Il avait le corps entièrement recouvert, même sa gorge était bandé. On fit abaisser son cheval pour qu'il puisse en descendre, mais je savais à sa façon de se tenir que ce n'était pas le respect dû à un roi, c'était qu'il n'aurait pu en descendre lui-même autrement. En effet, quoiqu'il fît tout ce qu'il pouvait pour paraître digne et accepter son sort, on y ressentait toute la douleur que pouvait contenir un homme dévoré jusqu'à l'intérieur même de sa chair, et je savais que ce masque d'argent, si beau qu'il fut, visait à masquer la déformation que la lèpre avait dû causer à son visage. Il était calme et paisible, et une autorité sage émanait naturellement de lui. Depuis quand était-il lépreux ? Sans doute longtemps vu son état et pourtant, il n'avait pas l'air d'avoir plus de 18 ans...

Le ramassage du ravitaillement s'organisait de lui-même. On vit chacun trouver sa place et la répartition vers le "dépôt" s'opérer sans difficulté. Cependant, absolument, personne n'osait le toucher, et de cela, je doutais que ce fût par simple respect... Zö, le vieil homme qui m'avait accueilli, vint à sa rencontre, et après s'être parlé un bref moment, le roi lépreux s'adressait à son garde le plus proche, l'homme immense en armure, qui criait alors ensuite.
-Où sont les shinobis ?!
Quelle voix tonnante, mais qui ne m'effrayait pas pourtant, pas plus que l'épée massive qu'il portait dans le dos. Je m'avançais pour ma part calmement, sortant de la foule, et tous les visages se tournèrent fatalement vers nous, les shinobis. Le roi se tournait lui aussi vers nous, et moi, qui m'avançais sans faire de grandes manières.
L'homme au masque d'argent se présentait, et à sa façon de se tenir, je savais qu'il n'attendait pas que je m'inclinasse, mais qu'il attendît malgré tout un respect dû à tout homme. Ce visage, et surtout ce regard, à moitié aveugle, je le voyais, qui me regardait avec une certaine nonchalance princière, me faisait pourtant l'impression d'être justifié.
-Je m'appelle Bohémon. Me dit-il d'une voix basse. J'aimerais beaucoup parler avec vous. Si vous me faites cet honneur. Shino, n'est-ce pas ? Vous et vos amis, voudriez-vous m'accompagner dans ma tente ?

Je le regardais un instant encore, comme si je sentis un appel de quelque chose de plus fort encore. Ne résistant pas, je répondais finalement.
-Je vous accompagne pour ma part. De la réponse des autres, je ne peux me prononcer.

Je ne ressentais aucune agressivité chez cet homme. Rien de plus qu'amour et compassion. Dans son regard, je me sentais percé de quelque chose, comme s'il lisait en moi ce que je voulais étouffer en temps normal. Le privilège de la douleur peut-être ?
Combien pourraient le prendre en pitié, tant on lisait le mal de vivre et le poids des responsabilités en lui. Toutefois, je n'allais pas m'abaisser à m'incliner. Nul ne me soumettait plus depuis longtemps et quoi qu'il m'inspirait un grand respect, je pouvais au mieux estimer sa spiritualité à la même hauteur que la mienne. Il ne nous traitait ni ne nous regardait comme le reste des siens. Lui qui avait un shinobi face à lui, il ne me semblait regarder qu'un homme, du moins, un homme représentatif de quelque chose.

Alors que les deux shinobis et moi-même faisions la rencontre du roi lépreux, Thérèse et ses filles étaient parvenus à leur tente. La première chose que fit Thérèse, fut de s'occuper de la plaie à l'arcade de la petite jeune qui avait pris un coup de bâton. La blessure n'était pas si atroce que ça et un peu de désinfectant avec une aiguille stérilisée et un fil suffiraient à rendre le visage de la belle comme neuf. Sibile traînait encore une fois Hélène vers un autre coin de la tente pour lui administrer plus tard le remède qu'elle était en train de lui préparer. La blonde frisottée le faisait, il était vrai sans grande conviction, mais respectait toutefois autant les ordres que les espoirs de Thérèse, qu'elle considérait, d'une certaine façon, comme la mère qu'elle n'avait pas eue. Le plus drôle, ou ironique plutôt, était qu'Hélène n'avait même pas conscience des efforts que faisaient l'une et l'autre pour elle. Elle n'avait nullement conscience de sa propre condition, peut-être même ignorait-elle jusqu'à sa propre conscience. Or, c'était sans doute ce qui la rendait si innocente.

Cela n'empêchait pas Sibile de rechigner à la tâche, sans le dire tout du moins. Elle était alors avec la mine basse en train de verser dans un flacon le contenu du remède que l'on avait conseillé pour soigner l'esprit d'Hélène. Son esprit à elle, Sibile, était ailleurs en effet, vers de plus sombres questions et de plus sombres pensées qui ne concernaient en rien Hélène. Hélène, qui la regardant malheureuse, entrouvrait la bouche en laissant s'échapper un son qui tenait plus de gazouillis d'un nourrisson que de celui d'une belle fille. La jeune femme à l'esprit perdu posait la main sur la tête de la blondinette et la caressait pour la consoler. Un geste simple, comme celui d'un enfant. Simple et innocent, mais surtout sincère. Sibile, relevant le regard sur elle, en était terriblement touchée. "Je me fiche de toi, et tu cherches quand même à me consoler" pensait-elle alors jusqu'à ressentir une certaine culpabilité. C'était ainsi qu'elle tendit son flacon à Hélène, mais cette fois, avec le sourire. Un sourire amical, comme la récompense juste du geste d'affection qu'Hélène avait eu pour elle. Thérèse terminait de recoudre l'arcade de son autre fille pendant ce temps, celle-ci ne se plaignait pas, quoique cela ne fût logiquement pas franchement agréable. Même si Maëlis ne se plaignait pas, cela ne l'empêchait pas de grimacer de temps en temps, mais lorsqu'elle ouvrait les yeux, c'était pour trouver le regard concentré et le sourire consolateur de Thérèse, ce qui lui donnait suffisamment de courage pour continuer de recevoir les soins sans se plaindre.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:39
-Ce que le shinobi a dit... Sur la personne pour qui on serait le monde entier... Tu crois que c'est vraiment possible ? Demandait timidement Sibile en regardant Hélène prendre le flacon. Thérèse ne répondit pas au tac. Elle prenait le temps de la réflexion, sachant que Maëlis semblait tout aussi intéressée par la question.
-Pourquoi tu doutes que ce soit possible ? Demandait enfin Thérèse.
-Est-ce qu'un homme peut vraiment ressentir ça pour une prostituée... Répondit Sibile, plus comme une affirmation que comme une question.
-Ils n'ont pas l'air méchants les shinobis qui sont là. Ajoutait innocemment Maëlis. Cela donnait un rictus à Thérèse d'abord, qui répondait à Maëlis que cela avait l'air d'être le cas effectivement, puis tandis qu'elle terminait ses soins elle continuait.
-L'amour ne fait pas de discrimination. On aime sans savoir vraiment pourquoi on aime. On sait juste qu'on aime. Alors oui, c'est possible, même pour des prostitués.
Sibile baissait la tête, il était alors facile de sentir que quelque chose d'intérieur la troublait très fortement. Hélène pendant ce temps, tenant le flacon dans la main, paraissait ne même pas savoir à quoi ça servait et encore moins comment l'ouvrir et le boire. Maëlis, cependant, sautait sur le silence pour poser ses propres interrogations.
-Pourquoi tu n'es pas allée voir ton frère ? Il vient de rentrer ! Et pourquoi qu'on laisse ces shinobis dormir dans le camp. C'est à cause d'eux qu'il y a la guerre ! Même s'ils ont l'air gentils, c'est à cause d'eux qu'on est tous là !
-La mort non plus ne fait pas de discrimination... Ajoutait gravement par-dessus Sibile.
-Hola Hola, s'amusait Thérèse. Un seul homme ne peut pas être responsable de tous les malheurs du monde et je devais m'occuper de toi et d'Hélène avant d'aller voir Bohémon. Thérèse caressa la joue de Maëlis ensuite. Les shinobis naissent soldats, leurs propres parents les élèvent seulement pour ça. Leur vie n'est pas préférable à la nôtre. Un lourd silence suivait...

Thérèse se relevait pour aller voir Hélène qui se dépatouillait avec son flacon comme un jouet. Sous l’œil de Sibile et Maëlis, elle tentait de le lui faire boire, mais à peine le liquide passait dans la bouche de la simplette qu'elle le lui recrachait littéralement au visage sans cacher qu'elle l'avait trouvé dégoûtant. Thérèse, maintenant trempée, comme les bandages d'Hélène, eut un moment de flottement, puis se mit à rire à plein poumons.
-Ralala ! Tu m'auras tout fait toi ! Et Sibile et Maëlis rirent avec elle.
Thérèse se débarbouillait d'abord, avant de retourner vers Hélène afin de lui défaire le bandage. Une fois fait, elle découvrait le visage d'une très jolie jeune fille et commençait à l'essuyer. Maëlis et Sibile restaient attentives et en retrait pendant ce temps. Thérèse, avant de refaire les bandages, prit le temps de contempler Hélène, le regard bienveillant qu'elle lui portait prouvait sans le moindre doute toute l'affection qu'elle lui vouait.
-Normalement, ici, tout le monde gagne sa croûte d'une façon ou d'une autre. Mais toi hélas, tu ne peux rien faire... Une aussi jolie fille dans ton état ne peut pas montrer son visage. Les hommes sont trop dangereux, ils chercheraient à en profiter. Si seulement tu pouvais parler, que je sache ce qui t'a conduit à ça... S'il te plaît, si tu peux m'entendre, s'il te plaît, ne fais pas de bêtise.

Mais Hélène se contentait de la regarder d'un air niais. Sibile et Maëlis, toujours intriguées qu'elles furent par cette jeune femme ne purent s'empêcher de commenter.
-Quand je l'ai trouvé près du carrefour, elle bavait dans ses haillons et mourrait de soif. Tu crois qu'elle a été abandonnée ? Demandait Sibile.
-Je ne sais pas. Répondait bassement Thérèse. Mais si c'est vrai, abandonner à son sort un si petit ange est un crime.
-Elle ? Pour qui elle serait le monde ? Aucun homme ne peut la toucher sans qu'elle hurle à la mort. Elle ne sait pas ce que veut dire aimer ou être aimée. Ajoutait Sibile.
-Qui sait... Rien ne m'étonnerait plus maintenant... Lui répondait comme une fatalité Thérèse.
-En tout cas le remède n'a pas l'air de marcher ! S'exclamait Maëlis.
-Haa, soupirait Thérèse. Peut-être une autre fois !

Sibile se levait et se dirigeait vers le dehors, sans oser regarder les trois autres. Thérèse qui se parlait plus à elle-même qu'autre chose interpellait sans le vouloir Sibile qui se stoppait, de même que Maëlis.
-Elle s'est méfiée du shinobi en serrant les dents tout à l'heure. C'est la première fois que je l'ai vu faire ça. C'était très étrange.
-Peut-être qu'elle a senti qu'il était méchant ! Affirmait Maëlis.
-Shino n'a pas l'air comme ça. Sibile se retournait vers Thérèse en entendant cela et Maëlis fit de grands yeux, mais Thérèse n'avait pas terminé. Il a l'air simplement malheureux, continuait-elle. Très malheureux. Un peu comme s'il refusait qu'on l'aime, ou peut-être que...
-Il te plaît hein ! Tentait de la taquiner Maëlis. Il m'a sauvée, peut-être que je suis sa préférée même si je l'ai jamais eu comme client !
-Hola ! S'étonnait-elle en rougissant. Qu'est-ce que je vous ai dit à propos des clients ?
-De pas... Commençait Maëlis, avant d'être coupée par Sibile.
-Je sors.
Et Sibile sortit...
-Elle est vraiment bizarre en ce moment... Commentait alors Maëlis.

Sibile comptait se rendre vers l'unique puits du camp, avec peu d'entrain sachant la queue qui l'y attendrait, mais après une dizaine de pas, au détour d'une tente, un homme, blond, un peu timide et pas très grand lui saisissait le poignet. Une surprise d'abord qui s'apaisait dès qu'elle croisait son regard en se retournant.
-Joshua ! S'écriait-elle. Tu m'as fait peur...
-J'ai envie de te voir...
-Je ne peux pas pour le moment. Ce soir, au feu de camp. Il lui lâchait la main et détournait le regard.
-Tu as réfléchi à ma proposition ? Insistait-il tout aussi timidement dans un murmure.
-Ce n'est pas aussi simple ! S'emportait-elle avant de "s'enfuir" en le plantant là.
Elle fuyait, non pas vers le puits, car d'avoir vu cet homme l'avait tourmentée plus qu'elle ne l'aurait soupçonné. Alors, courant autant qu'elle pouvait jusqu'au-dehors du camp, vers un coin à l'abri et reculé, elle défaisait son corset et sa robe jusqu'à se retrouver complètement nue, bien à l'abri des regards. Là, elle avait le "loisir" de vérifier ce qu'elle pressentait depuis un moment. L'apparition d'un chancre ; une lésion rosée, indolore, non-inflammatoire, propre, bien limitée devenant dure, laissant sortir un liquide clair. Au niveau des parois de son vagin... Les larmes coulèrent malgré elle, tandis qu'elle se tenait debout, la main collée contre la roche qui la maintenait à l'ombre.
-La syphilis... Qu'est-ce que je vais faire... Qu'est-ce qu'il va dire... Qu'est-ce que je vais lui dire... Sibile, dressant les yeux vers le ciel, comme ce que font ceux dont le malheur n'a d'égal que la solitude dans laquelle celui-ci les plonge, espérait qu'un Dieu lui réponde. Mais la seule réponse, fut le silence le plus total, le plus angoissant.

Bien avant cela, le roi lépreux Bohémon accueillait Kumiko, Fujisawa et moi-même. Kumiko fut la seconde à s'amener, bousculant un peu la foule qui lui bouchait le passage, elle affirmait sa manie de se faire "un peu trop voir" à mon goût. Cette rouquine à la poitrine proéminente savait fort bien jouer de ses atouts féminins et se trouvait trop excentrique pour moi décidément. Les Saibogu, le clan maître des techniques technologiques, disait-on, était pourtant un clan "relativement" secret, compte tenu de la protection de son savoir qu'il gardait jalousement. Elle se présentait à Bohémon fort heureusement avec respect, et sans en faire trop. Cela ravivait l'estime que j'avais pu lui porter.
-Bonjour monsieur Bohémon, moi c’est Saibogu Kumiko de l'alliance. Avec Shino, nous ne sommes pas tellement liés, vous savez, les guerriers de l'ombre sont une grande famille pleine de cousins éloignés que l'on ne connaît pas. Bien entendu oui. Répondit-elle ensuite à la proposition du Roi. Nous présenter dans ce camp est la moindre des choses.

Je restais silencieux, le visage baissé vers d'autres pensées et en proie à une forme de discrétion latente. Bohémon ne paraissait pas désappointé de ses manières. Je ne décelais pas non plus d'entrain ou de joie, ni même un sourire sous son masque. Rien qu'un respect et une dignité à toute épreuve. Elle n'avait rien caché de son allégeance. Si avoir notifié que nos rapports étaient beaucoup moins importants que l'avait supposé le roi lépreux ne me faisait rien, clamer à nouveau cette allégeance avec autant de fierté commençait à m'exaspérer, quoi que ce fut un bien grand mot. J'avais seulement envie de lui dire ; du fanatisme à la barbarie, il n'y a qu'un pas... Mais je m'en gardais bien vu la situation.
-Enchanté Saïbogu Kumiko. Répondait simplement Bohémon sans ne rien relever.
-Bien le bonjour à vous ! Vous nous accueillez dans votre camp, c’est bien le minimum que d’accepter de vous rencontrer. Ajoutait Fujisawa dès qu'il nous rejoignit.

Nous nous faisions guider par Bohémon, escortés de près par son immense homme de main, qui lui, le visage caché sous l'ombre de la capuche, ne décrochait jamais un mot. Partout où l'on passait, il était salué, et les résidents s'écartaient à son passage sans qu'aucune demande n'en fût faite. Insuffisant, pour que je me laissais impressionner, car ce n'était pas le premier homme de valeur que je rencontrais, mais il fallait tout de même admettre que c'était admirable. Admirable compte tenu de l'homme qu'il paraissait être. Roi ? Quand bien même, il régnait sur un camp misérable et lui demeurait un lépreux que je soupçonnais déjà plus proche de la fin que du début...
-Si tu n'étais pas surnommé roi, je dirais qu'ils craignent la lèpre à s'écarter comme ça à ton passage. Osais-je affirmer pour le tester, même si j'y mettais la forme du respect dans le ton. Bohémon en avant de nous tirait un peu la tête vers l'arrière sans cesser d'avancer pour me répondre.
-Il y a certainement de ça, je reste lucide. Me répondit-il d'une voix douce, presque plus que la mienne...

Quand nous arrivâmes à sa tente, nous découvrions un endroit bien mieux tenu que la moyenne ici, preuve qu'il n'était pas n'importe qui une fois de plus. D'ailleurs, le mot "tente" n'était pas vraiment représentatif, puisqu'une grande partie de son endroit était en dur, fait de bois, posé là depuis clairement bien plus longtemps que le reste du camp. Si l'extérieur comme l'intérieur restait sobre et modeste, la propreté et l'entretien s'y ressentaient. À peine éclairé par de nombreuses bougies, car il y faisait sombre sans fenêtre, lui se posait sur son propre fauteuil. Je voyais peu de dossiers sur le bureau, j'étais surtout plus étonné d'y trouver un jeu d'échecs occidental. Je ne préférai pas m'asseoir pour ma part quand il nous le proposait, présentant des chaises archaïques face à son bureau et je le lui signifiais en secouant une seule fois la tête.
-Tu crains d'attraper la lèpre ? Me dit-il en me provoquant à son tour.
-Je crains d'être à l'aise. Lui répondais-je avec la même douceur dont il avait usé précédemment.
-Pourtant, tu me tutoies alors que tes comparses shinobi ne le font pas.

Je ne répondais rien à cela. Je sentais bien en le voyant qu'il jaugeait les personnes qu'il avait en face de lui, et nul ne juge, nul ne jauge, si ce n'est pas dans une intention de demander quelque chose derrière. Bohémon s'installait plus confortablement dans son fauteuil, son garde debout à côté de lui. Là, je m'attendais à un grand discours. Pourtant, que ce fut au timbre grave de sa voix ou aux mots qu'il choisissait, je trouvais là plutôt le désespoir que la manipulation.
-À 14 ans, j'ai vaincu une escouade shinobi avec quelques hommes. Ce jour-là, je m'imaginais vivre 100 ans de plus. Maintenant, je sais que je ne dépasserai pas la trentaine. Nous disait-il comme une fatalité.
-Comment tu l'as attrapé ? Lui demandais-je naturellement.
-Lorsque j'avais 8 ans, ma maison a été prise au milieu d'une bataille. Je ne sais pas qui combattait qui et quelle importance ? Mes parents morts, ma sœur, alors très jeune, a empilé les cadavres sur nous, pour que les shinobis ne nous trouvent pas. J'ai attrapé la lèpre sous ces cadavres.

Je froissais le regard en imaginant toute la culpabilité qu'elle devait ressentir, et légitimement, je me demandais s'il avait pu lui en vouloir pour ça. Je ne ressentais cependant pas assez de gêne pour ne plus poser plus de questions. Dans le malheur, j'étais comme chez moi, c'était la joie et le bonheur qui m'étaient dérangeants.
-Tu lui en as voulu ? Lui demandais-je donc clairement.
-Non. Me répondit-il au tac au tac en sachant d'instinct de qui je parlais. Elle l'a fait pour que je vive, pour qu'elle puisse vivre aussi. Qui aurait pu prévoir ça ? Personne. Je suis lépreux, mais peut-être que si elle ne l'avait pas fait, je ne serais rien du tout... Nous avons vécu de mendicité et pour me nourrir, elle s'est prostitué. Jusqu'à ce que nous trouvions ce désert, avec une oasis, et un simple puits, où nous nous sommes installés. C'est là que les shinobis ou les hommes en général d'ailleurs, quand ils s'arrêtaient dans leur voyage, payaient pour ses services, pendant que je servais l'eau et la nourriture, nous avions monté une sorte d'auberge en quelque sorte. J'étais assez fort jusqu'à mes 16 ans, j'ai pu donc bâtir cet endroit où vous vous tenez.
-Et tous ces gens ? Comment ils sont arrivés là ?
-Zö, un vieil homme, est venu un jour avec un bébé dans les bras. Il cherchait un abri, et nous le lui avons donné. Puis une autre famille de sa connaissance est venue, puis encore une autre, jusqu'à ce que vous avez vu aujourd'hui soit sorti de terre. J'ai fait ce que j'ai pu, jusqu'à maintenant, pour donner un peu de dignité à tous ces oubliés du monde. Mon surnom est venu après mon combat contre l'escouade. Et ce sont les gens eux-mêmes qui ont appelé cet endroit, la cité de la joie. Aujourd'hui, ils sont près d'un millier à fuir la guerre ici.

Zö, le vieil homme qui m'avait accueilli, et je présumais que le bébé dont il parlait était la petite fille ; Jill, celle que j'avais rencontrée en arrivant. Thérèse était donc une prostituée par nécessité et ne sachant faire autre chose de sa vie, elle avait continué. C'est ce que je supposais. Devais-je ressentir de la peine pour eux ? J'aurai dû, et pourtant, je ne ressentais rien, ce qui me faisait me sentir honteux, comme si ce fut mal de ma part. Je tentais de ne rien en montrer, à savoir si cela était réussi... Être glacial, ce n'était pas aussi simple que de le dire... Mais tout cela, nous trois, shinobis, ils ne devaient pas nous le raconter pour le seul plaisir de parler de son histoire... Avant que mes comparses ne posent leurs propres interrogations, ou pas d'ailleurs, je n'avais pu retenir ce que je considérais comme l'essence même de son histoire.
-La mort est assise sur ta couronne, roi lépreux. Lui disais-je bassement, en le regardant droit dans les yeux l'air sincèrement désolé.
-C'est pourtant toi, qui portes une faucheuse dans le dos, shinobi. Me dit-il, et cela me surprenait, tout aussi désolé que je l'étais.
-C'est que j'espère un jour faucher le blé plutôt que des hommes... Finissais-je tristement.

Forcé de baisser la tête, je me sentais oppressé par une force obscure. Je n'avais pas le sentiment que c'était Bohémon, mais la situation, qui me compressait pour me pousser vers je ne savais encore quel malheur. Toujours, lorsque j'éprouvais de l'affection ou du respect envers une personne, tôt ou tard, il advenait un événement tragique et je sentais, avec le temps, qu'une nouvelle mauvaise expérience pointerait bientôt le bout de son nez. Je me fixais dans le silence, tant ce dernier échange m'avait laissé dans le doute. La jeune Kumiko n'était cependant pas en reste. Je me doutais que les autres shinobis présents auraient sûrement leurs propres questions. D'autant que si Bohémon nous avait entraînés ici, et nous dotait à la fois d'autant d'intérêt et de considération, ce n'était certainement pas sans raison.
-C’est quoi ce truc ? Demandait Kumiko en faisant allusion au jeu d'échecs.
Bohémon regardait un instant le jeu, et je sentis sans même le regarder que cela lui fît un grand plaisir qu'on le lui demanda. Il cherchait à le cacher, mais j'étais de nature à sentir les élans du cœur et de l'âme assez facilement. Cela dépendait de qui j'avais en face de moi, et aussi de quelles choses il s'agissait, mais parfois, allez savoir pourquoi le cœur "sait" sans que la raison ne lui ait soufflé sa logique.
-Un homme qui était venu ici, l'a fabriqué pour moi. Il m'a dit l'avoir rêvé, dans un monde unique, où les dieux sont des hommes qui écrivent sur des pages. Commençait-il presque amusé. Ce jeu ressemble au shogi, mais il est plus simple, et surtout, dans celui-ci, le retour en arrière n'est simplement pas possible, la stratégie fonctionne ou ne fonctionne pas et c'est tout. C'est une chose que j'ai appréciée. Terminait-il sur un ton à la limite de la gravité.
-Il s'agit d'un jeu d'échecs, c'est assez peu populaire ici, mais c'est sympathique. Commentait sur le moment Fujisawa.
-Ainsi, les rêves peuvent se partager. Répondait étrangement Bohémon au shinobi.
-Et ils ont dormi dans ta maison et tu les as égorgés dans leur sommeil ? Parce que sans être vexante, comment un enfant de quatorze ans sans préparation pourrait réussir un tel exploit ? Reprenait Kumiko en faisant allusion au récit précédent de Bohémon.
Cela faisait se redresser le roi lépreux, qui prenait soudain une posture plus haute. Comme un sage qui voudrait donner une leçon à son élève.
-Des genins comme vous dites chez les vôtres, je crois savoir que rares sont ceux que vous classez au-delà du rang B, encore plus au rang A. La force brute à elle seule est capable de bien des prouesses. Mais allié à cela, dit-il en pointant sa tempe du doigt, faisant logiquement allusion à l'esprit humain. L'être humain, même sans le pouvoir de faire sortir un volcan du sol, peut tout réussir. Un homme, pour peu qu'il ait foi en ce qu'il fait, peut réaliser autant de miracles qu'un shinobi. Ce n'est que le chemin qui diffère, le début et la fin sont la même chose, ce qui importe, c'est toujours, le chemin.
-Et que comptez-vous faire pour votre sœur une fois la guerre finie ? Ajoutait Kumiko sans que je ne prenne le soin de jauger sa réaction.
-Je crois, hélas, que cette décision lui incombera, car je doute de voir moi-même la fin de cette guerre.

Bien défaitiste, me disais-je en entendant cette réponse, mais toutefois, pouvait-on dire aussi qu'il n'était pas réaliste ? Redressant le regard sur lui, je me disais qu'il tentait de jouer un jeu qu'il ne maîtrisait déjà plus. Je préférai en effet confirmer ou infirmer, ce que mon instinct me disait.
-Pourquoi tu ne dis pas simplement ce que tu nous veux...
Il me regardait, bien étrangement, ce n'était pas tant que je le voyais réclamer de la compassion, mais je le sentais dans le besoin, je sentais, qu'il se forçait à devoir répondre alors que l'envie n'y était pas forcément.
-Vous n'êtes pas les premiers shinobis à venir dans ce camp. Je sais qu'il y en a eu d'autres, peut-être en ce moment même. Mais vous êtes les premiers à l'avoir dit honnêtement. Mes éclaireurs m'ont fait savoir que la division blanche clanique cherche le groupe qui fait des coups de main sur les convois des clans qui passent par les routes non loin d'ici, à environ 100 kilomètres. Mon, ... Groupe. Ils ne sont pas gardés par des shinobis, les civils sont toujours bassement considérés par les vôtres et vos stratégies n'engagent pas d'attaque des convois de ravitaillement curieusement...
-La division de la mort... Ce n'est pas une armée de soldats, mais de bouchers, je les connais. Disais-je gravement en forçant le regard sur Bohémon.
-S'ils nous trouvent, ils raseront le camp, ils feront pire même... Je crains déjà qu'il puisse y en avoir parmi nous. J'ai besoin de protection... Mon camp, a besoin de protection.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 5:10, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:47
Enfin, l'homme qui se tenait à côté de lui intervenait. Sa voix était celle d'un homme d'âge mûr et rompu à la violence, mais il émanait de lui une certaine forme d'honneur, même si je ne savais pas dire si ce fut dans le ton ou la posture de celui-ci.
-Nous avons une véritable armée prête à se battre. Ce ne sont peut-être pas des shinobis, mais notre cavalerie est capable de se battre correctement si elle est bien menée.
-La division Blanche n'est pas à prendre à la légère. Il s'agit d'un grand nombre de shinobis. Des genins majoritairement certes. Mais des monstres. Ce sont eux qui sont responsables du massacre d'Orandour. Ai-je besoin de rappeler ce qu'ils ont fait à leurs habitants ? Répondais-je gravement.
-Je croyais que vous étiez de l'alliance, comme vos homologues shinobis ici présent. Me dit-il sur un ton que je prenais comme une provocation.

Là-dessus, je tournais un instant le regard vers Kumiko et Fujisawa. L'homme qui venait de s'affirmer avec tellement de confiance était immense, et on pouvait malgré tout se demander comment il parvenait à soulever l'énorme épée qu'il avait dans le dos. Quoiqu'il fût vraisemblablement un civil, j'allais jusqu'à supposer qu'il fut meilleur que pas mal de shinobi en taïjutsu. Néanmoins, que lui fut un bon guerrier, ne faisait pas que son armée l'était tout autant. Quant à savoir si j'étais prêt à affronter une division clanique....

Thérèse comptait maintenant se rendre chez son frère, ne se doutant pas qui elle y trouverait en arrivant. Elle était inquiète pour de multiples raisons, la première étant en ce moment la façon curieuse d'agir qu'avait Sibile. Elle avait bien une petite idée, mais elle était loin du compte. En bonne mère qu'elle se pensait être, elle savait parfaitement quelle relation Sibile entretenait avec Joshua. Un client trop tendre et régulier pour que ce fut anodin. Si la visite qu'elle rendait à son frère n'avait rien à voir avec ce sujet, c'était pourtant ce qu'elle avait en tête tout le long du trajet. Elle avait laissé Hélène aux soins de Maëlis le temps qu'elle prendrait pour faire part de ses autres inquiétudes à Bohémon. Elle pensait, en effet, que la venue des shinobis, quoi qu'ils fussent tous aimables, ne présageait pas forcément que du bon. Aussi, elle voulait l'entretenir à propos de l'incident qu'il y avait eu avec l'homme en état d'ivresse.

Elle devait passer entre les tentes, mal agencées, entassées même parfois, avec les regards froids et livides qui se mêlaient à ceux de joies et d'espoirs. Comme si le rêve et le cauchemar s'entrechoquaient furieusement dans la cité de la joie. Les provisions que son frère avait ramenées faisaient remonter les mines. Mais chacune des personnes qui avaient fui ici, ne souffrait pas que de la faim ou de la maladie. Il y avait de ces maux, qu'aucune nourriture ou aucun médicament ne savaient guérir. Sibile n'était pas encore rentrée, sans doute, avait-elle besoin de se retrouver avec elle-même, de se confronter à sa solitude pour trouver le courage nécessaire à la parole qui lui manquerait certainement à son retour.

Thérèse, qui ne tarderait plus à atteindre le baraquement de Bohémon, fut cependant retenu par l'un de ceux qui causait tant de soucis. Joshua, se présentait à elle, mal fagoté, l'air fatigué et triste. Ce qui avait toujours interpellé Thérèse, c'était que malgré sa tenue et ses airs honteux, il avait l'air en parfaite santé et très bien nourri, comme si le jeune homme ne venait pas du même "milieu" que la plupart des gens de ce camp. À peine leurs regards se croisaient-ils, que le jeune homme baissait le sien, en retirant son chapeau. Thérèse, qui se fit droite et posais sur lui un regard inquisiteur, ne dit rien sur le moment. Elle croisait les bras, et attendait simplement que Joshua osa parler. Ce qu'il fit après un court instant.
-Tu sais pourquoi je suis là ? Commençait-il bassement sans oser encore croiser le regard.
-Bien sûr. Tu veux emmener Sibile loin d'ici avec toi ? Répondait vivement Thérèse.
-Oui... J'aimerais que tu lui parles. Elle a l'air d'hésiter. Continuait-il en s'affirmant un peu plus.
-C'est à elle qu'appartient la décision ! Lui répondit-elle comme un ordre.
-Tu veux la garder avec toi ?
-Elle ne m'appartient pas. Si elle doit trouver son bonheur avec toi, je ne la retiendrai pas. Finissait-elle en baissant tristement le regard.
-Elle sera plus heureuse loin d'ici... Vous tous en fait. Vous devriez quitter cet endroit. Ensemble ou séparément. Mais vous devez le faire. Disait ensuite mystérieusement Joshua.
-Qu'est-ce que tu veux dire ? Demandait alors avec surprise Thérèse.
-Les clans vont vous tomber dessus. Crois-moi, il va le faire. Lui disait-il cette fois en la regardant droit dans les yeux.
Thérèse était perplexe, elle ne le comprenait pas vraiment, et sentait qu'il n'y avait pas besoin d'insister pour en savoir plus, car le jeune homme n'allait certainement pas lui en dire plus. Elle avait raison. Il ne pouvait pas de son point de vue et il s'y serait refusé.
-Et toi, tu vas la protéger ? Lui rétorquait-elle alors comme une provocation.
-Je suis plus à même de le faire que n'importe qui ici.
-Je ne me mettrais pas entre vous deux. Mais ce camp, c'est celui de mon frère. C'est celui de tous ceux qui y vivent en fait. Les clans n'ont que faire de nous.
-Ton frère a joué avec le feu. Demande-lui d'où il tire son ravitaillement et tu verras.
Thérèse souriait à cela, trop confiante peut-être. Elle avait pourtant parfaitement compris l'allusion que venait de lui faire Joshua. Elle le soupçonnait déjà depuis très longtemps. Comment lui le savait en revanche, était trop étrange pour qu'elle ne tilt pas. Pourtant, elle ne comptait lui en demander plus à ce propos, trop accrochée au principe du droit au secret et à l'intimité qu'elle était. Elle se retournait pour repartir avant de conclure pleine d'assurance.
-Mon frère nous protégera tous, et si nous devons partir pour notre sécurité, il l'ordonnera.

Pendant ce temps, dans le baraquement avec Bohémon, son acolyte et les deux autres shinobis, je me retrouvais dans une fâcheuse situation. Je m'étais fixé dans le silence, tel que je le pensais, les deux autres shinobis auraient leurs mots à dire. Je prenais le temps que me concédaient les palabres de Kumiko à me confondre avec moi-même. Elle parlait du jeu d'échecs, et faisait référence aux rêves qui auraient soi-disant inspiré la création de ce jeu. Mais le véritable intérêt était qu'elle se sentait, en bonne fanatique de l'alliance, tant investi d'une mission qu'elle concluait, comme Bohémon le présageait, à une aide nécessaire qu'elle serait en mesure de fournir.
-Je pense que votre sœur vous écoute plus que ce que vous semblez penser. La guerre ne dura pas tant que cela, et se pousser soi-même dans la tombe n'est pas une bonne idée. Les autres le font déjà bien assez, je vous rassure. Commençait-elle en revenant sur les idées noires du roi lépreux.
Mon visage se durcissait, car après cette guerre, la prochaine viendrait, pensais-je en me rappelant les discours des clans de l'époque. Elle était bonne, fondamentalement bonne, et quoique je n'arrivasse pas à la suivre sur les chemins sinueux et dangereux des idéaux fallacieux qui prônent toujours la paix en finalité, son bon cœur résonnait dans le timbre de sa voix comme une mélodie du courage. Les autres se poussent bien assez dans les tombes, clamait-elle. Mon Dieu qu'elle avait raison sur ce point... Toutefois, le roi lépreux ne répondit pas à cela. Il attendait, je pense une tout autre réponse de sa part. Et la jeune femme n'avait pas terminé.
-Voilà qui est très courageux de votre part en effet de combattre les clans dans vos conditions, car je doute que les clans hésitent une seconde à massacrer tout le monde présent ici. Surtout que ce camp n'est guère très mobile, alors quand vous deviendrez trop encombrant, on enverra quelqu'un avec mes capacités pour vous traquer. Continuait-elle tandis que Bohémon restait parfaitement immobile et silencieux. Je pense que si nous avions pu voir le visage derrière le masque d'argent, il aurait souri. Mais nous avions pour le jauger que ce regard marqué par la lèpre dont un œil était sans doute aveugle....

De mon point de vue, il ne s'agissait pas de courage. Et ce, devait être sans doute la vérité qui faisait se taire le roi. Il s'agissait bêtement de survie. Lorsqu'un chien crève la faim, il se nourrit par tous les moyens, est-ce du courage pour autant ? Je ne crois pas. Elle mettait dans un camp un homme qui n'avait pas d'autre camp que le sien. Mais pour la convaincre, il devait garder le silence, je ne l'en blâmais, sans doute en aurais-je fait autant.
-Je vous arrête, mais si je me bats, ce n'est pas uniquement pour moi, mais également pour ceux qui ne le peuvent pas. Je ne peux pas accepter que les clans puissent imposer leur loi cruelle sur notre pays. Continuait Kumiko, plus durement, et cela me surprenait de voir un élan de lucidité venant d'elle, quoique je restasse toujours silencieux dans mon coin. Tuer des shinobis ayant rejoint l'armée confédérée est-il vraiment une mauvaise chose ? Vous vous rendez bien compte que nous sommes uniquement de passage ? Nous ne resterons pas, nous avons une guerre à gagner. Cela ne me dérange pas d'aider un peu, mais ce n'est pas mon combat, je suis vraiment désolée. Je vous aiderai, mais d'une manière ponctuelle.

En réalité, ce n'était pas un refus catégorique, mais ce n'était pas non plus accepté ce que Bohémon nous avait demandé. Elle les aiderait donc, mais sans encore avoir dit comment. J'abaissais le regard, sentant déjà en moi quelques remous dont je me serai bien passé. Le garde du corps tournait son regard vers Bohémon, qui pour sa part, se décidait enfin à répondre. Il le faisait encore avec la voix fataliste, mais toujours si emprunte d'une certaine... Comment dire... Vérité.
-Le moins que vous puissiez donner sera toujours le mieux que nous pourrons accepter. Je vous remercie infiniment.
Enfin, le compagnon de Kumiko intervenait. Cette fois, je bondissais hors de mes pensées tant, le discours qu'il tenait me paraissait le plus réel de tous ici. Il était dur, mais plein de lucidité à mon avis.
-Une armée ? Qui se bat correctement ? N’allez pas prendre la grosse tête parce que vous avez réussi à détourner des convois de marchandises ou à éliminer quelques shinobis imprudents, si la division blanche venait à apprendre que cet endroit et ses habitants sont responsables, le camp sera rasé avant la fin de la semaine. Notre aide n’y changerait rien. N’allez pas croire que je vous sous-estime, mais il faut être réaliste, dans un affrontement direct, vous n’auriez aucune chance. Si l'alliance a évidemment envie d’annihiler cette division, je doute que ses hautes sphères aillent se décider à bouleverser leurs stratégies pour venir sauver un camp de réfugiés, surtout si celui-ci s’est mis dans cette situation par ses propres moyens. Après, si mademoiselle a envie de vous aider, soit, on peut essayer de voir ce qu’on peut faire, mais honnêtement, je serais vous, je commencerais à préparer un déménagement en vitesse.

Un moment de silence flottait dans l'air, ce bref moment, paraissait bien plus long qu'il ne l'était réellement. Il était à la fois lourd et pesant. Bohémon fixait le shinobi Fujisawa sur l'instant. Sans colère, mais on y ressentait tout de même une profonde réflexion et une mise aux défis. Le garde du corps à son côté, qui devait se taire uniquement par respect demeurait plus agité, cela se ressentait. Pourtant, ce qu'avait dit Fujisawa était vrai. Aucune armée civile digne de ce nom, jusqu'à preuve du contraire, ne saurait défier une division shinobi. Et trois shinobis dans la balance ne changeraient rien, en vérité, affronter cette division, c'était simplement du suicide... C'était précisément ce qui en moi faisait monter la tension. Je l'entendais me parler, ma conscience et mon instinct. Cette bête monstrueuse, métaphore de ma schizophrénie peut-être, qui réclamait le sang et la saveur de la bataille qui s'annonçait comme désespérée. Je lui disais de me taire, je le lui hurlais, mais elle n'écoutait pas. La mélancolie était le propre de l’homme. Mon propre... Un dieu ne pouvait se l’accaparer ni le comprendre. Cette réflexion sur la recherche d’une conception de la vérité faisait oublier tout le reste et formait un état de tristesse et d’inertie relative à un manque à combler. Entre ce qui existait et ce que l’on concevait par pensée, la frontière n'était pas plus épaisse qu'une feuille de papier. Moi, douceur incarnée, visage d'ange et immaculé, j'étais enveloppé dans les ténèbres. Cette mélancolie, qui me caractérisait, se situait dans la colère et la folie. Relents d'un passé horrifique, dont je savais être la cause de l'enfantement de la noirceur qui m'habitait. Redressant le regard vers le roi lépreux, je vis qu'il avait déjà commencé à me fixer lui-même.

Je formais un mudra, tout tranquillement, tandis que je voyais ce moi intérieur sourire en dévoilant ses crocs. Ma décision était peut-être déjà prise alors que je n'en avais pas conscience. Puis cherchant, sondant, je l'annonçais en soupirant.
-Il y a quatre chakras shinobi dans ce camp hormis nous trois... Bien, Je vous aiderai. Mais vous, vous devez écouter le shinobi. Vous devez partir. Et nous allons avoir beaucoup de choses à nous dire.
Je vis par son regard le soulagement du roi lépreux, et son acolyte qui se détendait enfin. Comme si de nous avoir tous les trois était le sauvetage inespéré... En vérité, nous courrions peut-être à notre perte. Bohémon se fit alors entendre, et je sentais qu'il parvenait difficilement à dissimuler son soulagement, cela sans même relever que je venais bien de ressentir le chakra d'autres shinobi, donc possiblement, ... Des ennemis.
-Je suivrai en partie vos conseils. Je réunirai sous peu, un conseil militaire, si tant est que l'on puisse le nommer ainsi.

Là, on vit entrer Thérèse, qui ne cachait pas sa surprise de nous trouver tous là.
-Ha ! Je vois que vous faites connaissance !

Peu avant que Thérèse arrive, Kumiko n'avait pu s'empêcher de faire une proposition par-dessus la réponse du roi lépreux. Cela imposait le silence tant à moi que son compagnon, et je devais dire, que, quoi qu'elle y mît du rire et de la bonne humeur, je trouvais cela aussi excessif qu'il m'apparaissait présomptueux de faire sa proposition. Nous avions bien trop peu d'informations pour envisager un plan concret et j'avais pour ma part, beaucoup d'interrogations encore. Elle m'apparut alors aussi impétueuse qu'imprudente en vérité.
-J'imagine qu'ils sont là pour récupérer des informations, et notre arrivée n'était pas des plus discrètes. La rumeur a dû se propager partout que l'alliance était arrivée, alors j’imagine que si vous désirez être tranquille, on va devoir faire un peu de bruits. Si vous êtes mis dans la case des soutiens à l'alliance, cela ne sera pas beau à voir. Rebondissait-elle. Vous n'avez pas beaucoup de choix possible. Soit vous jetez à la mort les combattants de ce camp, soit vous faites comme rester neutre dans cette affaire, soit vous aidez les clans, mais c'est peut-être un peu trop tard pour cela. Il est important de comprendre, que ce camp, tout ça, ce n’est pas grand-chose, inutile de prendre des grands airs. Je ne peux que vous conseillez de rester en dehors de cela, que vous refusiez la proposition de l'alliance. On fait péter des trucs à droite et à gauche, on en profitera pour éliminer les ninjas qui ne pourront pas rester cachés bien longtemps et on repart. Les gens de ce camp doivent partir par la suite. Après, si vous désirez vraiment vous battre alors, il faudra en assumer les conséquences. Concluait-elle enfin.

Je vis la tête du garde du corps s'abaisser, comme s'il connaissait par avance la réponse de son maître, qui lui, n'avait pas l'air des plus enchantés à l'idée que son camp soit le théâtre d'un affrontement direct entre des shinobis. Il m'avait regardé tout à l'heure et reportait le regard sur moi de la même façon, comme s'il sentait le désordre intérieur qui me tourmentait toujours, je m'en sentais d'ailleurs mal à l'aise même si je me faisais probablement des idées.
Je ne lui laissais pas le temps de répondre, pas plus qu'à Fujisawa, que je sentais aussi peu enclin que moi à donner suite à cette proposition. Je me montrais tempéré dans le discours et le ton, mais il était clair à la forme de mon regard que j'étais bien convaincu de ce que je disais.
-Un affrontement dans le camp pourrait simplement détruire le camp. Nous sommes des shinobis je vous rappelle. Je m'y oppose, et j'ai encore beaucoup à demander à Bohémon avant de savoir comment agir. Soudainement, après cela, j'avais l'air désolé, tant dans le timbre que le regard que je tournais encore plus précisément sur Kumiko.
-Les shinobis sont toujours de bons guerriers, mais décidément de mauvais stratèges. Les combats au milieu de ces civils n'engageraient rien de bon, et si ce sont des ennemis que j'ai sentis, ce qu'on ne sait absolument pas, à leur place, c'est précisément des civils dont je me servirai comme bouclier face à des rebelles. La division blanche est une division de sadiques, certes, mais pas une division stupide. C'est ce qui les rend si dangereux d'ailleurs.

J'allais reprendre, mais je n'en eus pas l'occasion, car cette fois la voix de Bohémon retentissait avec force, non pas qu'il hurlait, ou s'emportait, car on entendit son souffle malade en souffrir. C'était bien qu'il y avait du cœur dans ce qu'il disait, du cœur, autant que de la fermeté. Son garde du corps redressait la tête dans le même temps, comme galvanisé par le simple discours de Bohémon.
-Quand bien même ce camp n'est pas grand-chose, commençait-il en relevant la remarque de Kumiko, il reste le mien. Il est hors de question que des shinobis s'affrontent en son sein.

Là, on vit entrer Thérèse, qui ne cachait pas sa surprise de nous trouver tous là. Cela coupait court à la discussion, il était évident que chacun doutait qu'elle fût introduite dans les manigances de son frère et on ne voulait pas faire une gaffe.
-Ha ! Je vois que vous faites connaissance !
-Oui, c’est tout à fait cela ! On en est presque à boire un thé ensemble en se tapant dans le dos ! Lui répondait directement Kumiko.
-Je n'en aurai pas pour longtemps, mais je peux repasser, même si je préférai régler une affaire tout de suite.... Demandait Thérèse à son frère avec un sourire gêné .
-Nous pouvons sortir s'il le faut. Proposais-je immédiatement après.
-Au contraire, vous êtes concernés, me rétorquait Thérèse.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 5:46, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:53
Bohémon penchait la tête sur le côté, tandis que pour ma part, je tournais mon regard sur lui. Il était clair que nous n'allions pas évoquer les soucis précédents devant Thérèse. Il ne lui répondit pourtant pas, d'un regard, ils communiquaient tous les deux, prouvant de fait leur complicité, ce qui l'invitait à dire simplement de quel problème il s'agissait. Thérèse se grattait le menton alors, en reprenant...
-Un homme ivre a tenté de tabasser au bâton une de mes filles. Ce sont les shinobis ici qui l'ont empêché finalement. Il accuse Maëlis de lui avoir volé plus qu'il ne lui devait pour sa passe.
-Elle l'a fait ? Demandait simplement Bohémon.
-Bien sûr que non ! Tu sais que tout ce qu'on récolte est redistribué au trésor pour la totalité du camp.

Voilà qui me fit un drôle de remous. Elle ne m'en n'avait rien dit. Pourquoi l'aurait-elle fait au final. Ainsi Bohémon, récoltait les bénéfices de Thérèse pour les réinvestir dans le camp. Je ne savais que penser de cette méthode. Mais alors, cela sous-entendait-il que l'homme ivre se volait en quelque sorte lui-même ? Bien étrange situation dont nous étions témoins.
-Que faisaient les gardes que j'ai laissés ? Demandait ensuite Bohémon.
-Pardon ? Demandait Thérèse à son tour avec surprise.
-Tu as dit que ce sont les shinobis qui l'ont empêché de vous battre. Que faisaient les gardes ?
-Ils... Dit-elle hésitante.
-Où est cet homme maintenant ?
-Au poteau, les gardes sont finalement intervenus à la fin.
-Qu'il choisisse, l'exil ou la lapidation.

Thérèse fit de grands yeux, la nouvelle ne lui convenait certainement pas. Pour ma part, je tournais un regard tout aussi surpris vers Bohémon. Une telle réponse m'étonnait de lui, jusque-là, je l'imaginais comme un homme doux et sage, mais là, nous avions clairement une preuve de cruelle fermeté. Je n'avais pas à m'en mêler. Mais la sentence me paraissait à moi tout aussi rude. Thérèse, qui restait elle-même, ne comptait pas en rester là cependant.
-C'est trop ! Tu ne peux pas lui infliger ça. Tu sais qu'il préféra la lapidation. L'exil pour nous c'est comme condamner à la famine !
-Je dois maintenir l'ordre dans un camp sans discipline. Les gens ici ne sont pas des mêmes villages, des mêmes pays. Si je suis laxiste, ce sera bientôt l'anarchie.
-Il était ivre bon sang ! Ce n'était pas sa faute.

Le regard de Bohémon changeait du tout au tout, je sentais alors en lui, une force aussi profonde que tranquille, une volonté de fer en fait, je sentais en fait, que rien ne pouvait plus atteindre cet homme sur qui la mort planait déjà, d'autant plus, lorsqu'il lui répondait en préservant sa fermeté.
-L'ivresse est une folie volontaire, il est responsable des pintes qu'il s'est mis dans le gosier. Ma décision est irrévocable.

Thérèse, qui ne cachait pas son mécontentement au regard, ressortait directement ensuite sans dire un mot.
-Ce soir, le feu de camp sera le moment de la festivité, mais cet après-midi cet homme devra subir sa sentence. Dès demain, si vous l'acceptez, je vous ferai chercher pour tenir ce conseil militaire. Nous disait-il enfin en reprenant sa tempérance des débuts.
Je le regardais un instant, lui et son garde du corps, je n'étais pas choqué à l'idée qu'un homme soit lapidé, mais je l'étais à l'idée qu'il le soit pour si peu. À moins que je me trouva sans savoir comment, soudainement plus clément. Je ne lui fis qu'un hochement de tête en signe de réponse positive pour ma part, avant de sortir du baraquement. Certainement que les deux autres shinobis et moi aurions besoin de discuter un peu entre nous avant de le revoir demain, ou même ce soir...

Bien avant cela, tandis que j'effectuais ma détection, Joshua venait de quitter Thérèse. C'est là qu'il sentit mon chakra perturber le sien et le détecter. Un vent de panique le saisit directement au cœur. Il ne savait pas que c'était moi qui venais de le découvrir, tout comme je ne savais pas que c'était lui que je venais de découvrir. Pourtant, alors qu'il était au beau milieu du camp, ce n'était pas aux shinobis récemment arrivés qu'il songeait, c'est-à-dire nous, mais bien à la division blanche. "S'ils m'ont retrouvé, ils vont tout brûler ici !" S'écriait-il intérieurement en se mettant à courir à toutes jambes. Il se dirigeait vers la sortie du camp, c'est là qu'il croisait Sibile, qui elle, y retournait.
-Sibile !
-Joshua...

L'un était en panique complète, en sueur, tant il avait peur, tandis que l'autre, était complètement désarmée et en dépression à cause de ses tourments. Mais Joshua lui attrapait le bras et la tirait en dehors du camp. Il le fit quelque peu violemment, et Sibile, qui criait, jusqu'à attirer l'attention de quelques résidents d'ailleurs, ne comprenait pas cette façon d'agir, d'un homme qui l'avait si bien traité jusque-là qu'elle en tomba amoureuse.
-Mais tu me fais mal ! Tu es fou ! Lâche-moi ! Lui criait-elle alors que lui continuait de la tirer pour l'obliger à courir loin du camp.
-Il faut qu'on parte, dès maintenant ! Tout de suite, tu entends !
-Ce n'est pas aussi simple, je t'ai dit ! Mais tu vas m'écouter à la fin !
-Dépêche-toi, je te dis !

Ils couraient assez longuement et il la lâchait enfin, une fois suffisamment loin du camp. Sibile, en larmes, le giflait directement, mais il ne répliquait rien du tout, se contentant de baisser les yeux devant elle, sans pouvoir retenir la tristesse et la honte sur son visage. Sibile, qui en ignorait la raison, elle, n'avait que sa maladie en tête, et se mit à lui hurler dessus tant il lui fallait lâcher la tension qu'elle avait dans le corps.
-Mais qu'est-ce qui te prend ?! Tu es fou ! Hurlait-elle.
Là, il levait les yeux sur elle, elle y lisait tellement de honte que cela lui en glaçait le sang. Et c'est alors qu'il laissait s'échapper sa révélation, avec la peur au ventre que cela détruirait tout ce qu'il avait pensé construire avec elle.
-Je suis déserteur de l'Empire...
Sibile sentit le monde s'effondrer autour d'elle. Son esprit fut paralysé, incapable sur le moment de savoir que répondre. Sous son silence, Joshua continuait.
-Je crois qu'ils m'ont repéré. Si on ne s'enfuit pas maintenant, ils vont tomber sur le camp, et quand ils verront que Bohémon attaquait les convois de ravitaillement de l'armée, leur punition sera terrible. Il faut partir ! Je t'en prie, viens avec moi, je t'en prie. Je ne suis pas comme eux. J'ai déserté parce que je ne voulais plus faire...
-Je...Je... Bafouillait-elle.
Il lui attrapait les deux mains, quand il sentit ses hésitations, n'ayant pas un seul instant conscience de tout le dilemme qui lui faisait presque perdre la raison. Il lui saisissait les deux, et les plaquait contre son cœur.
-Je te jure que c'est pour toi qu'il bat. Je suis shinobi, avec moi, tu t'en sortiras toujours ! Je t'en prie, ne me quitte pas.
-Je...Je suis... Commençait-elle.
-T'es sacrément dans la merde. Fut-elle interrompue par une voix étrangère. Une voix, qui glaçait le sang de Joshua, et jusque dans son œil, on vit une frayeur comme rarement il fut possible, quelque chose de tétanisant. Mais il n'osait encore pas se retourner. Sibile, relevait-elle le regard vers les hauteurs des immenses rochers qui les entouraient, ceux derrière Joshua, les mains toujours sur le cœur de son amant, qu'elle sentit battre si fort, qu'il ne l'aurait pas étonné qu'il explosât. Elle vit là-haut, juchés sur les rochers, quelques hommes, quatre hommes, étrangement vêtus, avec un masque blanc décoré d'une larme de sang. L'un d'eux, avec une voix grave, reprenait, alors que Joshua et Sibile étaient figés dans le mutisme.
-On chasse le coyote et on trouve un déserteur. Un déserteur, et une femelle. Le boss ne va pas être déçu et nous non plus.

Joshua baissait la tête et serrait les dents sans se retourner. Il avait parfaitement reconnu l'une des voix qui s'était fait entendre. Sibile le regardait, pleines de questions, et déjà effrayée elle aussi, mais ne bougeait pas, ni ne s'enfuyait, comme si le corps de Joshua était un obstacle suffisant pour sa sécurité. Joshua, était alors convaincu d'être le responsable de la venue de ce qu'il savait être des claniques confédérés. Cependant, ce qu'il venait d'entendre vint lui mettre un doute. "On chasse le coyote et on tombe sur un déserteur ?" Avait-il entendu. Était-ce une plaisanterie ou bien étaient-ils vraiment ici par hasard ?
-Joshua... Murmurait Sibile fixée sur lui, à demander des réponses et une solution.
-Surtout, ne dis rien ! Ordonnait en murmurant Joshua à Sibile. Il lui fit un sourire rassurant, qui voulait surtout lui confirmer qu'il n'allait pas l'abandonner. Puis il se retournait. La peur le saisissait fermement au cœur, mais derrière lui, il sentait la chaleur de Sibile, qui lui donnait le courage. C'est ainsi donc, il pensait "le pourquoi de ce qui protège qui vit plus longtemps". Redressant le regard vers les quatre hommes masqués, il répondait enfin, imitant comme il pouvait la confiance qu'il aurait en lui.
-Je vous suivrai, mais la fille vous la laisser partir. Dit-il en s'adressant directement à celui qui avait la voix la plus grave et la plus rauque.
Les quatre hommes masqués n'ajoutèrent rien sur le moment. Le regardant silencieusement, et en particulier celui à qui s'adressait Joshua. L'un d'eux sautait du rocher et fit quelques pas vers eux, mais en conservant une distance de sécurité raisonnable. Son œillade se portait vers le camp de réfugiés, que l'on voyait plus loin à l'horizon et dont quelques fumées s'élevaient déjà.
-Avec les coups de main de l'alliance sur les convois de ravitaillement, on crève la dalle. Ils en ont peut-être eux de la bouffe ! Dit-il sans quitter le camp de réfugiés des yeux.
-Si ça pouvait nous éviter de chasser dans le désert... Commentait un autre d'un timbre plus aigu.

Sibile comprenait alors toute la gravité de la situation, et quoique la sécurité du camp l'importât, elle s'en voulait de vouloir à tout prix sauver sa propre vie d'abord. Joshua, qui préférait éviter le pire, intervint assez maladroitement pour dissuader les hommes d'une attaque.
-Ce sont des réfugiés de guerre... Ils crèvent la dalle encore plus vous !
-Et comment tu sais ça toi hein ? Demandait l'homme masqué à la voix rauque. On sentait déjà l'accusation, et même la réponse, dans le ton qu'il avait mis dans la question. Il suspectait en effet déjà Joshua d'y avoir séjourné. C'est de là que tu viens pas vrai ? Alors c'est là que tu te cachais tout ce temps. Continuait-il. Un shinobi, planqué parmi des civils. C'est comme un dieu qui se cacherait parmi les mortels. Peut-on faire plus bas...
Sibile saisissait le bras de Joshua, qui lui était maintenant de dos. Mais lui ne dévisageait que l'homme à la voix rauque.
-Depuis quand tu as rejoint les escouades d'éclaireurs ?
-J'aime changer de section, ça rend polyvalent. Lui répondit-il.
-Finissons-en avec lui, il sera exécuté de toute façon. Quant à sa femelle... Les coupait un autre homme masqué.
Joshua savait parfaitement ce qui attendait Sibile s'il l'abandonnait ou mourrait. Mais il savait aussi que ces hommes, quoi qu'il ne les connût pas tous, risquaient de le tuer plus facilement qu'il ne l'espérait. L'homme à la voix rauque, qui après avoir longuement observé le camp renvoyait ses yeux sur Joshua répondait finalement à ses hommes.
-La fille, ne la tuez pas quand vous aurez fini, vos camarades seront sans doute ravis du cadeau.
Il y eut un moment de flottement silencieux, comme ce qui arrive souvent, lorsque l'on sait que le combat est inévitable. Joshua s'était déjà préparé à un plan paniqué, mais qu'il jugerait efficace. L'un des hommes masqués lançait un simple kunaï, histoire de commencer. Celui-ci ne devait servir que de distraction à un autre des hommes masqués, mais Joshua répondit promptement d'une technique. En joignant les mains, il fit s'élever du sol, tout autour de lui, un cocon de sable.
-Salopard ! Criait l'un des hommes masqués. Empêchez-le !
-Foutu Sabaku. Rageait un autre en crachant de ses yeux de senbon de sang qui n'eurent aucun effet. Putain ! Commentait-il d'ailleurs en voyant cela.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 6:15, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 5:58
Joshua et Sibile étaient rapidement plongés dans le noir du cocon de sable. Aucune lumière ne passerait, mais la protection était suffisante pour les maintenir en vie, lui n'avait qu'à rajouter du chakra pour combler les brèches que les hommes masqués pourraient faire. L'homme masqué qui avait la voix rauque, demeurait plus calme, il semblait plus vieux et plus expérimenté que les trois autres. Il n'avait pas bougé et réfléchissait encore quelques secondes tandis que les autres continuaient de faire leur programme.
-Tu as du Suiton toi ? Pour mouiller sa saleté de sable.
-Non...
-Personne dans l'escouade n'en a.
-Fais chier ! On va quand même ne pas se barrer et les laisser hein !
-On ne peut pas tout faire sauter avec les sceaux de Shidoshi non plus. Ni utiliser aucune technique trop bruyante, on risquerait de se faire repérer par le camp et ils décamperaient. C'est au moins du A ce dôme. C'est la merde quoi.
-Shidoshi. Appelait l'homme à la voix rauque en coupant la conversation.
-Oui ?
-Envoie un oiseau de papier à Serafi. Qu'il fasse venir tous les éclaireurs. Et un autre directement à l'armée principale, je suis sûr que le boss en a terminé avec l'armée rebelle au nord. Et explique leur bien la situation, y compris la présence du camp.
-Mais... Ça va leur prendre des heures, de tous se réunirent ici. Ils ne seront pas là avant le crépuscule.
-Fais ce que je te dis. Ce soir, avec un peu de chance, ce sera orgie ! Et pense bien à donner les coordonnés du camp, qu'ils puissent l'encercler directement. Avec toute l'armée à nourrir, je suis certain que le boss va sauter sur l'occasion de ce camp.

Le Hakushi qui venait de recevoir un ordre de l'homme à la voix rauque s'exécutait donc. Il écrit un grand nombre de messages sur des feuilles, un petit paquet, qui une fois pliées en oiseaux par son chakra, s'envolèrent pour transmettre les messages aux différents destinataires.
Dans le cocon de sable. Sibile larmoyait, alors que Joshua réfléchissait. Il avait entendu tout ce qu'il venait de se dire à l'extérieur, et savait donc l'attaque du camp imminente. Un Ketsueki, un Hakushi de présent, et l'homme à la voix rauque, qu'il connaissait celui-là, le seul méritant le rang de Chunin dans le groupe qui les encerclait. Il était d'ascendance Akuzu, et l'un du plus sanguinaire de l'armée clanique. Heureusement, Joshua se savait proche du rang A, donc suffisamment fort pour repousser beaucoup des claniques de la division qui ne dépassait pas le rang C. Ce n'était que quatre shinobis qui leur faisaient un siège, assis autour du cocon de sable en attendant que leurs alliés arrivent. Pourtant, cela suffisait à maintenir Joshua et Sibile terrés comme des lapins dans leur tanière.

Joshua, tentait de rassurer Sibile, qui ne pouvait pas s'empêcher de chouiner. Elle s'inquiétait pour elle, pour Thérèse, pour ses amis, pour le camp. Elle sentait la peur et le désespoir au fond d'elle. Avec la maladie qui lui rongeait encore le corps, une maladie dont elle n'avait toujours pas pu lui parler. Joshua, la prenait dans ses bras dans le noir, lui disait des mots rassurants, lui promettait que tout allait s'arranger. Cela alors qu'il n'y croyait même pas totalement lui-même.
-Ils voulaient me violer... Finit-elle par lui murmurer avec gravité.
-Je ne laisserai personne te toucher vivante. Lui affirmait fortement Joshua.
-S'ils me violaient tous, l'armée clanique... La guerre serait peut-être finie. Répondit-elle tristement.
-Mais qu'est-ce que tu racontes ?! S'emportait-il.
-J'ai la syphilis... Tu risques ta vie pour une morte en sursis. Concluait-elle en baissant le regard, les yeux, comme la voix, pleins de fatalité.
Les lèvres de Joshua se décollaient, ses jambes en tremblaient, et titubant, sans ne plus pouvoir se tenir, il tombait assis contre la paroi du cocon de sable. Il devait digérer le choc. Il devait trouver quelque chose. Mais quoi ? Sibile, elle, alors qu'il ne la voyait pas, lui souriait, pleine de peur, mais sa plus grande peur n'était pas la guerre, l'armée clanique, ou qu'elle se fasse violer. Sa plus grande peur était que Joshua décide de l'abandonner. Joshua, se mit alors à rire, rire à plein poumons, nerveusement, et à pleine joie. Sibile ne comprenait pas, et n'y répondait pas, puis il lui répondit enfin.
-Les shinobis ont de bons médecins, les baiser ne les tuerait pas ! Lui lançait-il comme plaisanterie.
-Je...
-Tais-toi ! La coupait-il alors qu'elle allait reprendre.
-Pour le moment, on survit ! Et on le fait ensemble !
Ce n'était pas la réponse qu'elle attendait, même pas du tout, et pourtant, elle ne put l'empêcher, ce petit sourire, lui réchauffait un peu le cœur.

Dans le camp, je crois que tous, nous étions loin de nous douter de ce qui se tramait si loin de là. Nous venions de sortir, avec Kumiko et Fujisawa, congédiés par Bohémon. Nous venions d'en apprendre beaucoup pour si peu de temps en comparaison, et pourtant, en réalité, il me semblait que nous en savions encore si peu. À peine étions-nous sortis, que Bohémon, fixé sur son fauteuil, s'adressait directement à son garde du corps.
-Tu leur fais confiance ? Lui demandait-il sans cacher le doute à son timbre.
-Je n'ai confiance qu'en toi. Répondait aussi sec le garde du corps. Pourquoi tu as inventé cette histoire d'éclaireur ? On n'a pas de nouvelles de nos espions depuis des mois. On en sait rien si les clans nous traquent.
-Je crois que le shinobi cendré a soupçonné ça. Les clans nous tomberont tôt ou tard dessus, et la division blanche est bien sur ces terres. Ils pourraient nous massacrer juste par plaisir, je devais trouver une raison.
-Quand ils l'apprendront, il se peut qu'ils nous abandonnent.
Bohémon, regardait son jeu d'échecs sur la table. Une partie y était en cours, une partie qu'il n'avait jamais terminée, avec l'homme qui lui avait taillé dans la roche les pièces de ce jeu, tandis qu'il avait réalisé lui-même le plateau.
-Va les escorter jusqu'à leurs tentes s'il te plaît. Concluait Bohémon sans quitter du regard son jeu.
Et le garde du corps se rendait à la sortie.
Dehors, je m'attendais à ce que les deux autres shinobis s'adressent directement à moi, mais Kumiko préférait s'attarder sur Thérèse, qui était encore là, à réfléchir. La shinobi sortit une bourse et la tendit à la putain. J'en inclinais la tête, en me demandant sur le moment s'il n'était pas finalement de l'autre bord, et donc que je m'étais trompé sur ses relations avec Fujisawa. Mais avant que je ne me dis qu'elle touchait à la fois au chocolat et la vanille, ce qu'elle disait à Thérèse en lui donnant cette bourse me donnait des réponses à mes questions.
-Tiens, va acheter des provisions à votre magasin et propose lui de partir avec ça à la place de mourir, il devrait se diriger davantage vers le pays du feu, c’est tout de même plus vert qu’ici....

Ce souci de l'autre qui caractérisait de plus en plus cette Kumiko. Elle me faisait maintenant penser à un chien de berger qui se cacherait sous la peau d'une lionne. Elle n'avait donc pas pu s'empêcher de vouloir s'en mêler, pour sauver un homme qu'elle avait pourtant repoussé pas plus tard qu'aujourd'hui. Je tournais mon regard sur Thérèse à cet instant, intrigué de voir comment elle prendrait la proposition, et si elle prendrait l'or du moins. Et souriant, elle prit la bourse. Cela m'étonnait sur le coup, mais lorsqu'elle répondait à Kumiko, je l'étais bien moins.
-Vous avez vécu dans une famille aisée ? Les gens riches de naissance pensent toujours que l'or suffit à réparer, à soigner tous les malheurs. Si je lui donne cet argent, qu'il s'enfuit, qu'est-ce qu'il fera ? Il le dépensera en boisson dans le premier village venue, et finira tout aussi mal qu'il le pourrait ici. Et quand bien même, il cesserait de boire, où il irait ? Les gens qui viennent ici y sont parce qu'ils n'ont plus nul part où aller. Vous croyez qu'une somme d'argent va changer cela ? Cet argent ira au trésor commun, je vous remercie pour votre don. Quant à cet homme, il choisira son destin, jamais, je n'irais contre la décision de mon frère, jamais.
Thérèse s'était adressée à Kumiko avec bien de la douceur, celle si simple et si naturelle qui faisait la séduction de ces femmes légères, au point qu'elles délestaient les hommes de leurs malheurs intérieurs. Difficile d'argumenter contre elle à cet instant, quoi que ce n'était pas impossible. Je n'allais pas en laisser le temps à Kumiko pourtant, préférant pour couper court à cet "aimable échange", en répondant à la remarque qu'elle m'avait faite. J'ouvrais alors les lèvres, mais comme si elle m'avait devancé, elle me parlait directement. Laissant Thérèse, avec sa bourse dans la main qui n'était pas moins intéressée par ce que nous nous racontions.

-Vous savez, que vous le choisissez ou non, si ce sont des shinobis et qu’ils se sentent repérés, ils se pourraient qu’ils agissent immédiatement. Alors il vaut mieux être l’instigateur que de se faire attaquer par surprise. Il vaut mieux toujours choisir son champ de bataille plutôt que de se le faire imposer par l’ennemi. Je suis consciente qu’il y a des civils partout dans ce camp, je le sais bien.
Je plissais le regard sur Kumiko quand elle terminait, mâchant patiemment ma réponse, mais Fujisawa intervint à son tour sans se faire attendre.
-Une chose est sûre, tout le monde dans le camp a dû finir par entendre parler de notre arrivée. Trois shinobis en deux jours, s’il y a vraiment des infiltré dans votre camp, ça devrait accélérer les événements à suivre. Cependant, je reste sceptique sur l’identité de ces shinobis intrus, je ne vois pas l’intérêt pour l’armée impériale d’envoyer des hommes en infiltration ici. S’ils avaient le moindre problème avec vous, ils auraient déjà rasé le camp, ils ne sont pas du genre à prendre des pincettes. Mais comme vous l’avez fait remarquer, il s’agit là de son camp et de sa décision.

Doubles réponses pour le shinobi Fujisawa. Bien de subtilités, j'entendais là étant donné la situation. Il était clairement plus proche de ma façon de penser que ne l'était Kumiko. Mais là, on vit sortir le garde du corps du baraquement de Bohémon. Cet homme, immense, dont l'épée dans le dos, caché derrière sa cape, sonnait aussi lourdement que son armure. Il nous découvrit tous les quatre, Thérèse, Kumiko, Fujisawa en pleine conversation, mais ne semblait pas y accorder une grande importance. Pas plus qu'à la bourse que tenait dans les mains Thérèse.
-Bohémon me demande de vous escorter jusqu'à vos tentes. Nous dit-il simplement.
-Je dors chez Thérèse ce soir. Et je doute qu'un de nous ait besoin de l'escorte d'un civil. Lui disais-je aussi honnêtement qu'avec un brin de provocation. Je souriais en même temps en effet, un très léger sourire, car il me tardait de vérifier quelque chose que je soupçonnais. Il ne perdait pas immédiatement son sang-froid et je n'en attendais pas moins de lui, mais il ne cachait pas son mécontentement autant du timbre que par le verbe.
-Vous les shinobis. Toujours au-dessus de tout et de tout le monde. À tondre les civils comme des moutons. Jamais vous ne donnez la pièce après vos passages et vos aigreurs. Me dit-il en me fixant du regard sous sa capuche, car même si on ne voyait pas son visage à l'ombre de celui-ci, je savais qu'il me fixait. Ce que je ne me privais pas de faire moi-même encore, tandis que sans perdre mon propre sourire, je lui répondais comme une leçon que je donnais.
-Quand il dévore le mouton, le loup ne demande pas pardon.

Il dégainait aussi sec son arme. Une épée bien trop énorme pour être qualifiée d'épée, tant ni la taille ni le poids n'auraient dû la rendre maniable par un simple civil. Sa portée fit qu'il n'eut pas à bouger pour m'atteindre. La brandissant et frappant par-dessus moi comme une épée de Damoclès. Je portais ma faux en avant, confiant, pour parer son épée du dos sa lame en la tenant debout. Mais ce fut une surprise, une énorme surprise. J'avais dû utiliser mon chakra pour contenir la violence de son coup, si puissant, que je l'aurai classé en A. Malgré mon boost de force, le pied de ma faux se plantait légèrement dans le sol sous l'impact qui fit sonner les deux aciers comme une cloche d'église, et je relevais un regard étonné, vers l'épée, bloquée sur ma faux, et sur cet homme. Un petit nuage de poussière s'était soulevé à l'impact, défaisant sa capuche et nous le dévoilant. Mais moi, sur le coup, au-delà de la violence qu'il avait réussi à mettre, je ne pensais qu'une chose "Pas de chakra ?!" Ce coup était porté à la seule force brute de cet homme. Ce qui le rendait en quelque sorte "surhumain" il fallait dire.

Il me fixait, avec violence, l'envie du sang, la soif de combat et de mort, je la sentais sur lui comme on sentait l'alcool sur un soûlard. J'aimais ça à un point qu'il n'imaginait pas. Sans bouger ma faux, j'approchais mon visage de sa lame, sans qu'il ne bougeât lui-même plissant un regard intrigué sur ce que je faisais, puis je soufflais dessus jusqu'à faire de grands yeux. "La cendre nanoscopique ne passe pas dans son acier, elle est parfaite !" M'étonnais-je sur son épée. Là, Bohémon sortit, sûrement qu'il entendit le tintement des deux aciers. Thérèse, portant la main à la bouche lors du moment du choc, n'avait d'ailleurs pu s'empêcher de crier.
-Non pas ici !

La cendre de mon armure, sans que je n'aie reformé le casque, brûlait très légèrement tant ce gaillard-là m'excitait. Un civil de cette trempe ! Combien j'en rencontrerai dans ma vie ! Il avait donc réellement senti la bête ? Il avait entendu en moi le loup noir grogner de plaisir ? J'en doutais, mais il avait senti quelque chose.
-Je t'ai demandé de leur montrer leur tente... Pas de te battre contre eux. Lui dit-il ennuyé et ferme.
-C'est ma faute, intervenais-je. Je retrouvais aussi rapidement que je l'avais perdu mon calme et ma nonchalance apparente. Puis je continuais de m'adresser à Bohémon. Je voulais tester la bête désolé.
Thérèse faisait alors des mouvements de mains pour attirer notre attention et forçait le sourire comme le ton vers la détente, car elle visait sensiblement l'apaisement de chacun.
-Houlaaaa y a beaucoup trop d'hormones là calmez-vous messieurs !
Mais j'étais déjà calmé. Ce que je pensais alors, c'était que ce n'était donc pas cet homme dont j'avais ressenti le chakra. Mais même si cela aurait soulevé bien d'autres questions, force était d'admettre que mes instincts ne voulaient plus qu'une chose, le voir ou l'affronter en combat ; il fallait que je m'éloigne et vite....

-J'imagine que cela va mieux ?
Nous commentait finalement la situation Kumiko, alors que Batzu et moi-même avions déjà remis l'arme au fourreau. Le chien de garde, le chien de berger, peut-être, venait de faire une démonstration au loup que j'étais. Chien de berger, le loup est dans le pré ! Et le chien montrait les crocs comme il le disait, pour dissuader le loup de dévorer les moutons. Mais je n'étais pas de cette meute-là. J'étais le loup solitaire, aux crocs bien plus acérés que ceux de la basse extraction, j'étais le loup fou, le loup sombre et ténébreux, au poil hérissé, qui s'assouvissait à se repaître de créatures toujours plus imposantes. Les loups qui se nourrissent de moutons ne sont pas des vrais loups. Les vrais loups chassent en solitaire, des sangliers, des ours, et d'autres loups, ou enfin, d'autres chiens ; ceux qui errent depuis l'enfance, ceux qui luttent pour leur survie, ceux, qui sont seuls, à savoir, ce qu'est de vivre réellement, combattant la charge ; de la vie. C'est bien ça, que je reconnaissais dans ce civil, qui tuerait sans difficulté la plupart des shinobis. C'était ça que je reconnaissais, la survie ! Ce chien de guerre rendu docile par ce roi malade, était l'expression de la violence au moins autant que je l'étais. Une violence différente néanmoins, mais présente. J'en éprouvais des envies de cannibalisme !


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 6:36, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 2 Avr - 6:03
Le paradoxe trouvait bien d'expressions en un instant si étrange. Tous les six réunis proche du baraquement de Bohémon, il y eut un instant de silence, mis à profit par le chien et le loup qui s'observaient en remuant de la queue, battant le vent de celles-ci, et se tournant autour, comme deux animaux en chasse. Bon Dieu, que j'avais en soi uniquement soif et faim que de vie, et c'était sa vie à lui, tout de suite, que je voulais dévorer. J'ignorais le commentaire de Kumiko, et Bohémon en fit autant, nous regardant tour à tour Batzu et moi. Mon instinct qui le réclamait pour lui seul, je le réprimandais en sachant que j'allais m'en aller pour éviter un carnage. J'envisageais déjà de repartir avec Thérèse vers sa tente à fin d'y décharger le trop de tension que j'avais dans le corps, tant je puais la mort et l'envie de tuer, que cela ne pouvait sur le moment selon moi se résoudre que par cette basse mais efficace solution.
-Je croyais que c’était ce soir les festivités, je ne me suis pas encore échauffé moi, gardez en pour tout à l’heure ! Intervenait Fujisawa pour rompre le silence, lui aussi sur un brin d'humour.

Le rire enlevait sa gravité à bien des drames, le rire et l'humour faisaient se soigner les torpeurs, les peurs, les malheurs, et les folies. Mais le rire et l'humour pouvaient aussi être aussi noir que la nuit pleine. Ainsi, quand je souriais diaboliquement en regardant encore Batzu, qui me toisait désormais calmement, sans se cacher au regard de n'éprouver pour moi, sur le moment, que du mépris, c'était en songeant à quel plaisir j'éprouverai en le perçant de ma lame. Toutefois, et heureusement, je gardais encore le contrôle, et commençais, tandis que je détournais mon regard de lui, à me diriger vers Thérèse pour lui dire que je l'accompagnais.
Tout cela n'avait pas échappé à Thérèse, et quand nos regards se croisaient, je vis pour la première dans son œil l'incompréhension, qui écrasait sa simplicité et sa bonne humeur habituelle. Kumiko s'en allait alors murmurer quelque chose à son comparse Fujisawa, une chose que je ne pouvais pas entendre, et ce murmure n'échappait à personne. Il fallait dire qu'elle n'y avait pas mis beaucoup de discrétion. Fujisawa lui répondait lui aussi en murmurant, ajoutant de la suspicion dans le regard de Bohémon, de Batzu et de Thérèse. Moi en revanche, je m'en moquais, sachant ces deux-là proches, je trouvais normal qu'ils aient leurs petits secrets et je doutais qu'il s'agissait d'un plan machiavélique, ce n'était pas le genre de Kumiko de ce que j'avais pu déceler chez elle, même si Fujisawa me paraissait être capable de bien plus viles machinations.
-Pourquoi ne pas directement nous indiquer où c’est ? L’heure de dormir n’est pas encore arrivée et je n'arrête pas d’entendre parler d’un feu de camp et de festivités, je n’ai aucunement l’envie de louper cela ! J’espère qu’il y aura des joueurs prêts à parier ! Quoique, ici, ça ne doit pas voler bien haut niveau mise… Ajoutait enfin Fujisawa avant de rire un peu, il fallait dire tout seul.

Je me redressais sur le coup, plus qu'intéressé par ce que je venais d'entendre. Une facette du shinobi qui m'intéressait au plus au point, et alors que je n'étais même pas parvenu jusqu'à Thérèse, que je me retournais vers lui tandis que Bohémon lui répondait et que Batzu et Thérèse en buvaient de facto les paroles.
-Le camp est grand, très grand, vous risqueriez de ne pas trouver et de vous perdre. Escorter était un mot mal choisi pardonnez-moi et Batzu également. Il ne doit vous accompagner que pour vous indiquer l'emplacement et je vous prie d'excuser son attitude encore une fois, c'est un homme qui a vu beaucoup de choses dans sa vie, il est parfois un peu sanguin.
Thérèse, me voyant me retourner, allait m'interpeller, mais son frère parlant, elle perdit son attention de moi qui me rendait directement vers Fujisawa. J'en avais oublié le garde du corps même. Thérèse en rajoutait par-dessus son frère le temps que je me rende à lui. Des paroles prononcées sur le ton de la douceur et de la bonne humeur, égale à elle-même en somme.
-Il semblerait que les mâles soient un peu trop d'humeur à la confrontation des excès de virilité. Je pourrais peut-être m'en charger à la place de Batzu ?
-Fais comme tu veux. Répondait à cela indifféremment le garde du corps et l'on pouvait alors deviner le sourire apaisé de Bohémon.
Moi, j'atteignais Fujisawa, me rendant à lui d'un pas décidé et nonchalant, le sourire sur mon visage n'était plus diabolique, mais provocateur, une sorte d'amusement malsain transpirait, tout emprunt de la sainteté innocente qui rayonnait sur les traits fins et purs de mon visage accompagné de ce regard bleu brillant de malice. Ainsi, le paradoxe se confirmait, en faisant du morbide une idée sainte de l'existence.
-Tu aimes parier ? Demandais-je innocemment. Jouons un peu, j'ai une mise à la hauteur des espoirs de tous les vrais joueurs qui aiment le frisson.

Je fouillais rapidement mon armure de cendre, pour en sortir une pièce, somme toute banale, mais très usée. D'un coup de pouce, je la fis voler entre Fujisawa et moi, et l'attrapais dans son vol aussi sec. Quand la pièce fut enfermée dans mon poing, je sourirais encore, mais en plongeant mon regard dans celui de Fujisawa. Je n'avais pas pu me retenir, je voulais le tester lui aussi, et c'était ainsi que ma folie ressortait le plus gravement, car bien que je sourisse et que j'avais l'air plus qu'enjoué, il était clair au ton que j'étais tout à fait sérieux.
-Moi aussi ! Quand j'ouvrirai la main, face, je te tue, pile, tu vis. Disais-je en laissant un instant de silence flotter avant de reprendre en penchant la tête tandis que j'exultais. Quand tu joues avec la mort, il n'y a qu'une seule mise possible. La vie a un prix, vois-tu, mais elle ne peut le payer qu'une seule fois.
-Shino... Tu t'emballes là, ça ne va pas ? Osait me demander Thérèse craignant, pour sa part, que la face apparaisse lorsque j'ouvrirai la main. Mais je l'ignorais, ne lui répondais pas, et faisais fit même du jugement que me porterait chacun de ceux présent, à commencer par Fujisawa, que je ne quittais pas du regard pour voir comment il agissait face à la possibilité de devoir réellement risquer sa vie sur un simple pari.
-C'est bidon, lui, il ne risque rien... Commentait à son tour Batzu, que j'ignorais aussi. Seul Bohémon, qui sans trouver cela particulièrement excitant, était fortement intrigué par le discours que je tenais à propos de ce jeu en apparence des plus stupides.
-Jouer de l'argent, c'est facile. Surtout pour un shinobi qui en a. L'argent ça se refait, mais la vie, ça, c'est du sérieux. Qui est assez fou ou courageux pour jouer sa vie pour rien ? Le courage hein, il n'y a que face à la mort qu'on sait ce que veut dire le mot courage, ce genre de paris, on est bien peu à le faire. Disais-je alors beaucoup plus sérieusement sans quitter Fujisawa du regard. Batzu, qui jusque-là trouvait cette démonstration stupide, était maintenant beaucoup moins catégorique, il saisissait parfaitement ce que je venais de dire, et comme Bohémon, il plissait le regard sous le poids d'une vérité qu'il ne connaissait que trop bien. Alors, j'ouvrais la main, lentement, en souriant.
-Pile... Dieu, destin, providence, chance, statistique, peu importe le nom, est de ton côté aujourd'hui. Je rangeais la pièce dans l'armure de cendre en perdant le sourire et retrouvant mes airs tout à fait calmes et désintéressés.

Thérèse perdit de sa joie et de sa bonne humeur, découvrant la folie sous ce nouveau jour dont j'étais capable autant que d'amour et de tendresse. Insaisissable que je lui apparaissais, je ne pouvais voir son regard me prendre en pitié, car elle se trouvait dans mon dos. Une pitié qu'elle me portait d'autant plus en murmurant, juste assez haut pour être entendu de Kumiko, mais pas de nous autres.
-Il faut être sacrément seul, pour accorder si peu d'importance à la vie d'autrui, ou à la sienne... Il me fait de la peine. Elle avait en effet compris, pour sa part, que je n'accordais pas la moindre importance à ma propre vie, que j'étais capable de la mettre sur la table du jeu de la mort sur un coup de tête, pour le goût du risque, ou parfois même pour des raisons bien plus obscures que je ne partageais jamais.
-La faucheuse ne tue donc pas au hasard ? Se permettait alors comme une allégorie peu subtile Bohémon.
-Des études très sérieuses ont montré que si tu manges sainement, fais du sport et ne consommes ni drogues, ni alcool... eh bien, tu mourras quand même... Le hasard n'a pas de certitude, or, la mort, est, une certitude. Lui répondais-je tout à fait sérieusement malgré l'ironie de la phrase.
-On devrait y aller, Shino... Tes amis sauront bien se débrouiller seuls, je pense... Tentait de temporiser Thérèse.
-Je vais les accompagner moi-même finalement. Dit finalement Bohémon faisant allusion aux tentes qu'il avait assignées à nous autres les shinobis. S'ils le veulent bien.

Batzu me regardait, alors que je me détournais déjà de Fujisawa pour retourner vers Thérèse, que je comptais de toute façon suivre quelles que soient les décisions des deux autres. Le garde du corps accompagnerait de toute façon Bohémon, c'était une certitude. Retrouvant un peu mes esprits d'une certaine façon, je savais qu'il me fallait me calmer, et calmer surtout les instincts. Je venais de me laisser un peu trop aller et je le savais. Un brin de folie, même si tenter sa chance était toujours un peu de folie, je savais que j'aurai dû me contenir mieux que cela, sombre assassin et imbécile que j'étais.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 8:35, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:18
Chapitre 2 : La division Blanche

Pendant ce temps, alors que la cité de la joie "continuait sa vie" ; en plein désert, loin de là, une bataille venait de se dérouler entre la division Blanche, et un régiment de l'alliance. La messe avait été vite dite pour le régiment hélas, et après les sons et les humeurs de la bataille, les aigreurs de la victoire y firent place net en laissant dans leurs sillages les gémissements des blessés et les odeurs du début de leur pourrissement tandis que les shinobis de la division blanche commençaient, comme de coutume, le dépouillement de leurs biens des cadavres et des blessées laissées sur le champ de bataille. Une coutume exercée cette fois avec une grande minutie, car depuis quelque temps, l'attaque des convois de ravitaillement de la division, outre le manque d'armes et de munitions que cela supposait, causait la faim dans la troupe. Plusieurs jours avec des rations minimales et plus aucun village à piller à la ronde dans un désert immense et inhospitalier rendaient les hommes de la division encore plus mordants que d'habitude. La faim les tiraillant, on murmurait qu'ils cherchaient déjà à dévorer les blessés, prisonniers et morts laissés sur leur champ de bataille. Nourrir mille hommes n'était pas une affaire des plus simple, mais si en plus il n'y avait pas de réserve, cela devenait d'autant plus compliqué. La guerre qui se nourrit de la guerre qui plus est, ne pouvait s'appliquer que difficilement dans les régions nord de Gobi, qui avait déjà du mal à se nourrir elle-même en temps normal.

La division Blanche était très bien organisée, et hélas, s'il n'y avait eu leurs exactions commises pour entacher leur réputation, ils seraient sûrement reconnus comme de formidables soldats de l'armée clanique. La qualité de leur combattants n'avait hélas d'égal que leur cruauté et leur fanatisme. Ils considéraient les civils, comme des inférieurs, du bétail à exploiter ou bien destinés à leur divertissement, et Dieu sait qu'en cette matière, ils ne manquaient pas d'imagination. Shinobis souvent de pure souche, et/ou issu de clans prestigieux, avec une manie du "sang pur", ils considéraient les sangs mêlés comme des inférieurs à peine plus valeureux que les civils dépourvus de l'usage du chakra. Ne considérant pas réellement les civils comme des êtres de leur hauteur, il leur devenait beaucoup plus facile de les traiter sans la moindre considération, et cela envoyait de fait, à leur capacité de cruauté sans égal envers ceux qu'ils croisaient.

Contrairement à ce que l'on pouvait penser, les clans n'aimaient pas savoir qu'une de ses meilleures divisions soit responsable des atrocités qu'on lui rapportait. Au-delà de la guerre à gagner, il fallait gagner la paix comme on disait, et laisser cette division agir selon son gré n'était pas bon pour la réputation clanique qui prônait l'ordre et l'union contre la liberté et l'indépendance de l'alliance. Il y a de ça environ quatre mois, on décidait dans les hautes sphères de remplacer l'officier en charge de la division par un nouveau. Un homme prénommé Shigurui, Jônin Momoru, qui prit les commandes accompagné de deux autres membres de son clan dont il était proche, Serafi, un homme puissant, Jônin également, qui se vit confier les larmes de sang (c'est-à-dire les escouades d'éclaireurs) et Iliana, une belle jeune femme très étrange qui servit dès lors d'intendante à Shigurui. Les trois shinobis avaient le visage plus ou moins masqués, les deux hommes, par un casque de métal qu'ils ne quittaient que rarement, tandis que la jeune femme, elle, avait les yeux masqués par un diadème qu'elle ne quittait jamais. Il ne s'agissait pas que de protection ou de coquetterie, mais bien de masquer leurs yeux rouge sang, causé par l'usage de leur pouvoir bien connu des Momoru, à tel point qu'ils étaient eux-mêmes bannis avec une grande partie de leur clan par ceux aux yeux bleus, qui se considéraient d'essence bien plus sage que leurs homologues.

Ce jour de bataille avait été mené par Shigurui et Iliana, Serafi était en effet à la tête des éclaireurs bien plus loin de là, pour tenter d'organiser une chasse qui serait susceptible de nourrir au moins en partie la division blanche. Shigurui, quoique ne possédant que des hommes affamés, était néanmoins aussi puissant shinobi qu'il était un excellent tacticien, et sa récente victoire ne fit que conforter ses hommes dans cette idée. Cependant, il eut la fâcheuse tendance à leur interdire leurs petits jeux habituels sur les civils, et cela ruinait l'estime acquise de ses hommes qu'il obtenait par sa valeur guerrière. L'Empire l'avait cependant envoyé là justement pour cette raison, ce qui n'empêchait pas la mission d'être difficile, c'était en effet, comme devoir empêcher des tigres d'être carnivores... Invocateur de démons, comme ses deux proches, ce n'était pas un homme qui appréciait la cruauté gratuite, non qu'il était fondamentalement contre celle-ci, mais uniquement si cela s'avérait utile pour un objectif quelconque, effrayer un ennemi pour éviter une coûteuse bataille par exemple. Mais pas stupide, il savait qu'agir toujours en monstre ne voulût plus rien dire au final, et que les adversaires avaient alors tendance à préférer se battre toujours jusqu'à la mort plutôt que de se rendre à un ennemi qui se montrerait de toute façon aussi horrible qu'implacable.

Shigurui me ressemblait beaucoup par bien des façons. Par exemple, c'était un homme qui avait beaucoup d'humour, un humour très noir, mais en même temps capable de l'ignorer complètement comme je l'avais fait quand Kumiko avait tenté de calmer la tension entre Batzu et moi par ses remarques infantiles et innocentes. Il avait également un certain rapport avec la mort, et se trouvait convaincu qu'un jour prochain, les démons que les siens invoquaient auraient le droit de passer de l'au-delà au monde des vivants. Bien que ce jour ne soit pas encore arrivé, c'était son but le plus cher et le plus secret, qu'il ne confiait qu'à quelques privilégiés qu'il appréciait. C'était un homme complexe, aussi imperceptible que je l'étais.

Tandis qu'il observait le champ de bataille, il ne paraissait pas trouver plus de plaisir qu'Iliana à le contempler. Ce spectacle horrifiant pour la plupart des gens, il y était accoutumé, mais jamais il ne songea à trouver de la gloire en cela. Quand il regardait ses hommes, fouillant les cadavres qui s'étendaient jusqu'à l'horizon, lui ne songeait qu'à trouver une solution concernant les attaques des convois qu'ils subissaient depuis un moment. Ces attaques étaient très bien orchestrées et ne laissaient aucun témoin vivant pour en faire les récits. C'était d'ailleurs ce qui lui avait fait supposer qu'il s'agissait d'attaques venant de l'alliance. Sachant que les convois n'étaient que mal protégé par l'armée que ce soit dans un camp ou l'autre. Une nouvelle forme de guerre lui apparaissait par ce procédé, moins glorieux, mais terriblement efficace, car par ce biais, son armée ne tarderait pas à s'étioler, voire pire, se mutiner. Un instant, il se fixait sur un des drapeaux de la division. Il y avait certes les symboles claniques qui flottaient souvent au-dessus des hommes, mais le drapeau blanc flottait bien plus souvent. Drapeau blanc, de la paix, une ruse que la division avait inventée pour amadouer les adversaires qui pensant qu'ils se rendaient, ne se méfiaient plus et se faisaient massacrer derrière. Plus personne dans l'alliance ne se laissait prendre par cette ruse aujourd'hui, car trop connue, mais la division par cela avait fini de pervertir ce symbole de paix pour en faire son propre étendard, un drapeau blanc... D'où la division blanche.

Iliana, qui accompagnait Shigurui et qui remarquait qu'il regardait très attentivement ce drapeau décidait qu'il était alors temps de rompre le silence qu'ils s'étaient imposés tous les deux jusque-là.
-Ce n'est pas ton symbole, mais le leur. Je sais qu'il ne te plaît guère de le voir assujetti à une si basse ignominie. Mais tu n'y peux rien.
-Un drapeau rouge de sang conviendrait mieux à toutes ces bêtes qui sont sous mes ordres.
-Il va peut-être falloir que tu lâches ces bêtes hors de leur cage. La forteresse est loin d'ici, tu as forcé la marche de la division, et maintenant nous savons que ce n'était pas ce régiment rebelle qui faisait les mains mises sur les convois. Tes hommes risquent de mal le vivre... Les ramener en arrière ne changera rien, tu dois permettre le pillage, tu n'as pas le choix.
-Une énigme qui va de plus en plus m'obséder, je le sens. C'est une idée simple, et c'est pour ça qu'elle est géniale. C'est à se demander, non, même se sentir honteux, qu'aucun officier clanique n'y a pensé avant.
-Nourrir tes hommes est la priorité. Avant qu'ils ne deviennent cannibales, j'ose espérer. Nous pouvons toujours invoquer des démons mineurs pour qu'ils les mangent.
-Mes créatures ne servent pas de bétail aux shinobis. Je préfère les voir tous crever de faim plutôt que de sacrifier mes bêtes à leur estomac.
-Quelle idée tu as eu de nous faire engager par les clans aussi.
-Ne sois pas dupe. L'Empire, c'est déjà fini, il va s'écrouler, nous ne sommes là que pour le temps que cela va durer encore, mais sa défaite est inexorable. Les nations ne sont pas encore prêtes pour l'union. Les clans ne le sont pas, pas encore...
-Nous aurions mieux fait de nous débarrasser de l'autre branche du clan.
-Nous n'en avons pas les moyens et tu le sais.
-Alors ? Qu'est-ce que tu vas faire ?
-Je sais qu'ils vont se jeter sur les blessés pour les manger. Du moins certains d'entre eux. Je regarderais les cartes ce soir, même si je sais qu'il n'y a pas vraiment de villages dans cette région. Les peuplades de Gobi ont déjà du mal à se nourrir elles-mêmes, alors une division entière...
-Tu pourrais simplement retourner vers les bases claniques...
-Et admettre mon échec à la face de tous ces dandins de l'état-major. Les Momoru sont bien assez humiliés comme ça par leur soi-disant chef. Je m'y refuse, je reste.
-Tu ne digères toujours pas d'avoir été chassé... Je comprends, mais ça t'empêche d'avoir l'esprit clair.
-Au contraire, il est limpide.

Là, un shinobi s'approchait d'eux, un peu effrayé, il s'agenouillait tout en tendant un petit papier à Shigurui sans oser croiser son regard.
-Un message pour vous des larmes de sang.
-Qu'est-ce qu'il dit ? Demandait immédiatement Iliana.
Le shinobi qui avait porté ce message n'attendit pas qu'on le lui demande pour partir, il le fit directement alors que Shigurui, qui l'avait simplement ignoré en saisissant le message, paraissait plus qu'intéressé par ce qu'il était en train de lire. On l'aurait vu sourire, s'il n'avait pas eu un casque pour masquer et protéger son visage.
-Peut-être la réponse à nos soucis. Répondit-il à Iliana d'un ton satisfait.
-Comment ça ?
-Les éclaireurs ont trouvé un camp de réfugiés, à une trentaine de kilomètres au sud d'ici.
-Tu crois vraiment qu'ils auront de quoi nous nourrir. Si tu lâches les hommes sur eux, dans l'état qu'ils sont, ça va être monstrueux, tu ne les tiens pas encore vraiment, tu le sais.
-C'est toi qui as dit que je n'avais pas le choix. Je doute qu'ils soient si bien fournis que ça, mais ce sera mieux que rien, et je préfère les voir se déchaîner sur des civils plutôt que de se mutiner contre moi. Un homme qui ne connaît que la peur et la faim ressemble à une bête. C'est normal, je ne leur en veux pas, je les trouve juste primitif. Nous allons nous y rendre à ce camp de réfugiés. Fais préparer l'armée, qu'ils se mettent en formation et en marche.
-Ils viennent de se battre, et de marcher pendant des heures... Ils ne vont pas aimer ça.
-Promets leur un festin. On trouve tout bon quand on a faim. Ils ne réfléchiront même pas à quels mets les attendent.
-S'il n'y a rien là-bas, tu vas te faire lyncher...
-Ils sont comme des chiens affamés, ils aboient, muent par la faim qui les tiraille et l'envie de sang qu'ils ont éprouvée jusqu'à la racine, mais s'ils tombent sur un ours, alors ils reculent. Pour eux, je suis un ours, ils ont vu nos invocations, et quand bien même la folie les pousserait à nous attaquer, un risque possible, je n'aurai pas de scrupule à me montrer encore plus cruel qu'ils le sont avec les civils pour dresser une bonne fois pour toute ceux qui survivraient.
-Et les larmes de sang ?
-Elles s'y rendent déjà, Serafi a été prévenu, il est en route. Ils vont encercler le camp, et nous arriverons par le nord. Ce camp n'aura pas la moindre chance, soit, il coopère, soit je le livre à la division. Nous y serons pour le crépuscule. Va maintenant.
-Bien....


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 10:20, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:21
Une certaine vertu habitait les aspirations de Bohémon pour son camp. Il espérait que celui-ci un jour peut-être, disparaisse et ne soit plus appelé "camp de réfugiés". Il aspirait à une cité mouvante et nomade, qui s'organisera d'elle-même, sans avoir à faire avec des instances politiques ou militaires supérieures. Quoi qu'il savait qu'il ne vivrait pas assez longtemps pour voir ce jour venir, il y travaillait d'arrache-pied avec le peu des moyens qu'il parvenait à mobiliser. Bien des domaines pourtant importants à ses yeux faisaient encore défaut dans sa cité de la joie. L'un d'eux était l'éducation. Très peu de ses résidents avaient un niveau d'instruction suffisant pour faire de l'enseignement dans ce camp. Et quand bien même quelques-uns auraient pu s'y essayer, il y avait beaucoup trop d'enfants pour le peu qu'ils étaient. Ceci-dit, on comprenait que la majorité des jeunes enfants de la cité de la joie étaient livrés à eux-mêmes une grande partie de la journée.

Jill, qui n'était pas toujours sous la garde de Zö, avait son petit groupe d'ami proche, une bande d'une douzaine de bambins assoiffés d'aventures et de jeux divertissants. Ils savaient s'occuper seuls le plus souvent en gambadant à travers le camp et aux alentours. Ce jour-là, Jill était proche de l'une des sorties du camp, où avec ses amis, elle aperçut Sibile et Joshua se disputer puis sortir du camp en courant. La petite fille aux beaux cheveux blonds des blés, de la même couleur que ceux de Sibile, mais raide et avec de grands yeux verts pétillants, était la chouchoute de l'un des garçonnets de sa fréquentation. C'était celui-ci, qui en voyant son inquiétude, proposait à toute la troupe de suivre discrètement Sibile et son amant pour voir s'il n'allait pas lui faire du mal. Jill connaissait très bien Thérèse et ses filles, et quoique son grand-père n'aimât pas toujours la savoir proche de celles-ci, il savait qu'elles étaient toujours tendres et amicales avec elle. C'est la raison qui fit que Jill, en voyant le visage crispé de Sibile et que Joshua l'avait traînée de force hors du camp, s'en retrouva inquiète et acceptait la proposition de son camarade.

Ils avaient conservé une certaine distance, pour ne pas se faire voir de Sibile et Joshua, et fort heureusement pour eux, les deux amants étaient bien trop pris par eux-mêmes pour se savoir suivis. La douzaine de bambins rasaient les rochers et s'abritaient sous l'ombre de la paroi pour être encore plus discrets, Jill et son camarade téméraire en tête, ils n'étaient cependant pas assez près pour pouvoir les entendre. Témoins de la scène que vivaient les amants maudits, ils ne prirent pourtant pas peur, et Jill renvoya la moitié de son groupe vers le camp pour prévenir Thérèse et son frère. Elle et les autres, resteraient là pour observer, convaincus que les shinobis, "les larmes de sang" ne pouvaient pas les repérer. Il était vrai, certes, que les shinobis étaient complètement accaparés par le dôme de sable qui les empêchait de jouir de leur proie du moment. Ceux-ci étaient assis, à fixer le dôme de sable. Ils savaient qu'ils ne tarderaient pas à recevoir un renfort, peut-être Serafi lui-même. Ils ignoraient encore que la moitié des enfants courraient vers le camp pour amener leurs propres renforts si on osait dire.
-J'ai une putain de dalle sérieux... Se plaignait Shidoshi.
-C'est ton bide qu'on entend là ? Enchérissait un autre.
-Bah ouais... Rétorquait Shidoshi sans gêne.

Leur chef était plus silencieux et plus concentré, malgré les difficultés, il espérait encore trouver un moyen de percer le dôme avant l'arrivée des renforts. Il s'agissait pour lui de prouver son efficacité en vue d'une montée en grade. Hélas, il avait beau y mettre tous ses neurones, aucune idée ne lui venait. À côté de cela, Jill et cinq de ses amis, cachés derrière des rochers observaient fixement la scène. Ils n'étaient pas complètement confiants, mais en même temps bien trop jeunes pour avoir conscience de la gravité de leur propre situation. S'ils se parlaient, c'était à voix très basses, de peur que l'une des larmes de sang les repère. Jill était une petite fille débrouillarde, empreinte de cette innocence qu'on connaissait chez les enfants. Son camarade en réalité, lui, était bien plus intéressé par elle, que par les shinobis qui assiégeaient Sibile et Joshua. Il la regardait plein de convoitise, sans vraiment comprendre la cause de ces désirs ou leurs raisons. Il ne faisait que répondre à une pulsion, sans en comprendre toutes les subtilités. Hélas, pour lui, Jill n'avait pas les mêmes pulsions, elle était bien plus innocente et moins pervertie. Une jeune fleur pas encore cueillie d'une certaine façon. La pudeur et l'innocence étaient pour elle ce que sont des compagnes inséparables ; comme la petite fille qui, pour recevoir son déjeuner, les fruits que lui présente sa mère, trousse ingénument sa chemise, a bien plus de pudeur que la fille de quinze ans qui rougit, parce que sa jarretière s'est détachée. Jill était cette petite fille, mais dans l’œil de son camarade, elle serait plutôt le fruit...

-J'espère qu'ils vont faire vite... Murmurait un instant Jill.
-Le temps de les trouver, qu'ils se préparent et qu'ils viennent, il sera peut-être déjà trop tard. Lui répondait aussi bassement son camarade.
-Tu ne vas pas faire de bêtise hein Théo ? S'inquiétait-elle soudainement en voyant la malice dans le regard de son ami.
-J'ai un plan t'en fais pas.
-Mais non ! Tu ne bouges pas de là !

Mais Théo avait déjà pris sa décision, il voulait être le héros de la belle, et c'était encore mieux si ce fut sous ses yeux. Rien de plus lointain qu'une femme qui s'installait dans un nouvel amour. Une extraterrestre, un doux monstre distrait dont le visage, proche et déjà méconnaissable, provoquait une attirance exacerbée, torturante et vaine, car Théo ignorait que l'amitié était le seul pas de franchise que ne lui accorderait jamais sa belle. Un amour sincère dépourvu de cette attirance aliénante, qui conduisait aux jeux d'adultes et obsédait au premier soufflé de l'adolescence.

Théo n'écouta pas son amie, et bondit hors de sa cachette pour attirer l'attention des shinobis, il espérait qu'ils le poursuivent, pour permettre à Sibile et Joshua de retourner au camp. Il se croyait assez rapide pour leur échapper, et assez courageux pour oser le faire. Il se croyait assez chanceux pour réussir, et assez fougueux pour conquérir le cœur de Jill avec ceci. Malheureusement, en sortant de sa cachette, il se fit bien repérer par les shinobis, qui ne prirent pas la peine de lui courir après. Le chef de la petite escouade levait la main et l'abaissait aussitôt vers lui. L'une des larmes de sang décocha une flèche, qui se plantait dans le crâne du jeune garçon. Théo s'effondra sans même un cri, ni sans avoir pu sentir la douleur.
-C'est quoi ce babouin ? S'étonnait le chef de l'escouade sur le moment.

Quand la flèche touchait Théo, le petit groupe de Jill se prit de panique, et malheureusement, comme tous les soldats le savent bien, c'est un sentiment contagieux... L'un d'eux bondit aussi de sa cachette, effrayé, il tenta de s'enfuir vers le camp.
-Mais qu'est-ce que ! Putain Nalaad ! S'écriait le chef. Et Nalaad, qui venait déjà d'abattre d'une flèche un jeune garçon, en abattait un autre de la même façon, d'une flèche dans la tête.
Les enfants se mirent à hurler, à courir dans tous les sens, à l'exception de Jill, qui loin d'être impassible, était en fait complètement tétanisée. Des jutsus fusèrent aux côtés des flèches, faisant de l'allée un véritable bain de sang. Le soir commençant à tomber et emportés dans l'élan, les shinobis n'avaient pas réellement remarqué qu'il s'agissait d'enfants et d'adolescents. Jill se recroquevilla sur elle-même, en priant de tout son cœur que les larmes de sang ne pensent pas à vérifier maintenant s'il y en avait d'autres. Dans le dôme, le son des jutsus interpellaient Joshua et Sibile, qui croyaient à une intervention du camp, loin de se douter du drame qui se déroulait autour d'eux.
-C'est Bohémon, tu crois ?! S'excitait de joie Sibile.
-Je ne sais pas le sable étouffe le son, j'ai du mal à entendre. Répondait prudemment Joshua qui collait son oreille au mur de sable.

Joshua ne pouvait se permettre de faire tomber son dôme, car rien n'était sûr pour le moment et il envisageait une fourberie de ses anciens camarades de combat. Et de toute façon, s'il l'avait fait, qu'aurait-il pu changer ? Le chef de l'escouade des larmes de sang ordonnait ensuite à Shidoshi de vérifier s'il n'y avait pas quelqu'un d'autres. C'est alors qu'en s'approchant, le shinobi comprit qu'il ne s'agissait pas d'ennemi, mais d'enfants et d'adolescents.
-Bordel ! Mais ce n'est pas des soldats. Ce sont des mômes ! S'étonnait-il.
-Ils venaient sûrement du camp. Rétorquait le chef.
-Si ça se trouve ils allaient partir les prévenir, intervenait Naalad.
Un seul homme de la troupe, resta silencieux, quelque peu troublé d'avoir été le témoin impuissant du meurtre de jeunes enfants. Mais il n'allait pas relever cela devant les autres, de crainte qu'il ne fut regardé de travers par des camarades beaucoup moins humains que lui. Le chef en particulier n'en éprouva pas la moindre gêne, ces enfants n'étaient pas ses premiers. Jill à ce moment, toujours pétrifiée, entendait les pas d'un homme qui s'approchait d'elle. Derrière son rocher, elle se plaquait les mains sur les oreilles, et fermait les yeux, comme une autruche se croyant en sécurité la tête dans le sable. Puis, elle sentit que la chaleur du soleil se dérobait, une silhouette la lui bloquait.
-Y en a une autre ! S'écriait Shidoshi. Une gamine !

Peu de temps avant que Jill et son groupe d'amis décident de suivre Sibile et Joshua, dans le camp, Fujisawa appréciait toute la saveur du défi que je lui avais opposé. Je cherchais à en apprendre plus sur lui, ce soldat de l'alliance. Un homme très grand et fin, plus que moi encore, proche des deux mètres, arborant un visage fermé sur des traits aux lignes carrées qui enfermaient ses yeux en amande. Sa longue chevelure attachée en queue-de-cheval qu'il avait la discrète manie de refaire souvent en tirant sur le nœud, était soyeuse et d'une couleur corbeau. Il me paraissait d'un tempérament moins exubérant que la Kunoïshi qui l'accompagnait, qui elle, avec sa teinte rousse et son décolleté donnant à sa protubérante poitrine toute la hauteur d'une arme de persuasion, était plus encline aux grands élans.
Fujisawa était resté strictement silencieux face à la démonstration et au défi que je lui lançais. Il était intéressé par le résultat, car je vis l'esquisse d'un sourire au coin de ses lèvres se dessiner un bref moment, et quand le résultat fut en sa faveur, alors seulement, il se permettait de répondre. Il avait bien sûr attendu que Bohémon termine, sans doute par respect pour le maître des lieux et alors que je m'éloignais à nouveau vers Thérèse, j'entendis dans les vibrations de son timbre ce que j'espérais trouver ; un calme prononcé, un calme qui me transperçait comme une préface à l'indifférence.
-La prochaine fois, s'il y en a une, met quand même un peu de talents en jeu.
-Haaa les hommes, clamait alors Kumiko. Moi, je préfère jouer ma vie tous les jours pour une cause qui me tient à cœur plutôt que pour rien ou des futilités. Il y a trop de manières de mourir dans ce monde pour jouer à ce point avec la seule chose que l'on ne contrôle guère.

J'étais alors proche de Thérèse, que je voyais me regarder tristement, me faisant éprouver par la sorte une certaine gêne, car je savais que ma démonstration ne lui avait pas inspiré de la sympathie, et vu l’œillade qu'elle me portait, je ne vis en réalité que de la pitié. Nous nous regardions elle et moi à ce moment, et sans que je ne susse pourquoi je n'arrivais qu'à être désolé. Comme si, alors que la pitié m'exaspérait, m'en sachant la cause, j'éprouvais de la peine de lui avoir donné une mauvaise image de moi. C'est alors que j'entendis Kumiko parler. Un bref regard tourné vers elle fut la seule réponse que je lui octroyais. Son point de vue ne m'indifférait pas, je l'avais entendu seulement trop souvent pour voir que la finalité demeurait à jamais la même. Sa cause... Son idéal... Outre que je fus convaincu que les claniques allaient gagner cette guerre et que ses espoirs me paraissaient donc inutiles, les idéaux m'épuisaient, et elle ne semblait vraiment pas le comprendre. Les hautes natures, alors qu'elles paraissaient briguer nos applaudissements, ne songeaient qu'à nous offrir un idéal. Elles ne demandent rien, elles donnent, comme ce que Kumiko semblait arguer à chaque fois qu'elle parlait de ses aspirations. Mais ce n'était qu'une réalité qui lui était propre, intérieure et intériorisée. Tout idéal qui ne répond pas à une forte réalité intérieure n'est qu'un mensonge, aussi, je savais qu'elle en était sincèrement convaincue, mais néanmoins très éloignée des réalités.

Je baissais les yeux vers le sol à cet instant, suivant de mon visage tout entier le geste de mes pupilles. Bohémon et Batzu de leur côté, se dirigeaient vers les deux mercenaires pour les conduire enfin à leur tente, car ils finirent par accepter la proposition du roi lépreux. Thérèse, me frôla le gantelet du bout de son petit doigt, me faisant relever le regard vers elle avec étonnement. C'est alors que plusieurs enfants vinrent vers nous en courant. Ils criaient "Bohémon ! Bohémon !" tout en courant. Ils étaient épuisés, et avaient l'air complètement paniqué. Nous tous, les accueillons avec étonnement, Bohémon en tête qui se dirigea vers eux calmement, tout aussi calmement qu'il leur répondait.
-Un seul à la fois, que se passe-t-il ?
-Des shinobis ! Ils ont attaqué Sibile et un autre garçon !
Tous, nous fûmes saisis de torpeur par la nouvelle. Mais il n'y eut pas de moment de silence. Bohémon restait calme, digne d'un chef, alors que Batzu, très nerveux, me semblait déjà prêt à partir. Je restais attentif, pour en apprendre un peu plus avant de décider ce que je ferais, mais je vis dans les yeux de Thérèse une immense inquiétude qui me prit étrangement au cœur. Les deux autres mercenaires, sur le moment, je ne m'en occupais pas vraiment.
-Où ça ? Demandait Bohémon toujours paisiblement à l'enfant.
-Vers la sortie qui mène à la vallée des saints !
-Ils sont nombreux ? Demanda alors Fujisawa.
-Ils sont quatre ! Ou peut-être cinq. Mais Jill et des amis sont là-bas pour surveiller !

Thérèse portait la main à la bouche inconsciemment et sans doute sous l'emprise de la frayeur. Un petit "ho" s'était échappé de ses lèvres avant qu'elle ne se reprenne et clame fortement.
-Zö ne doit pas le savoir pour l'instant ! Il serait complètement paniqué !
-Batzu va y aller avec quelques hommes. Lui répondit Bohémon gravement.
-Inutile de mobiliser vos hommes. Je vais avec lui. Ajoutais-je bassement.
-Nous pouvons venir aussi ! S'emportait Kumiko.
Fujisawa la regardait un moment avant de lui faire un non en secouant la tête. Je savais que ce n'était pas par lâcheté avant même qu'il explique son refus. Il était plus un officier qu'un soldat, et cela se ressentait d'autant plus dans ce genre de situation.
-Le camp doit conserver quelques bons soldats pour mener les hommes en cas de problème. Batzu et Shino ont l'air d'être de bons guerriers, pour cinq hommes, cela pourrait suffire.
-Mais on ne sait même pas qui il y a là-bas ! Continuait de s'emporter Kumiko.
-Raison de plus pour rester prudent et ne pas sacrifier tout le monde.
-Pendant que vous causez, on perd du temps. Intervenait Batzu d'une voix rauque et brutale. Je pars maintenant, vous vous faites ce que voulez.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 11:19, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:28
Il commençait alors à courir, en ignorant chacun de nous, et qu'il courrait vite ! Une telle masse douée d'une telle détente avait de quoi surprendre. J'allais me mettre en route aussi, tant pis pour le cheval, j'irais moi aussi à pied et en courant, mais avant de m'élancer, ma main fut enserrée dans celle de Thérèse, qui me fit une supplication dans le regard. Une supplication à laquelle je répondais par un sourire confiant et rassurant. Ce n'était pas pour ma propre sécurité, qu'elle suppliait, c'était pour celle de Sibile et de Jill, du moins, c'est ainsi que je le concevais. Nous disparaissions donc rapidement tous les deux, Batzu et moi, sous les regards graves de Bohémon, Thérèse et des deux autres mercenaires. Nous avions agi dans la précipitation, une chose qui ne me ressemblait pourtant vraiment pas. Bohémon, ne nous voyant déjà plus, ne perdit pas ses réflexes et retournait ses mots vers les mercenaires.
-S'il y a des shinobis là-bas, il y en a peut-être d'autres proches d'ici. Il nous faut préparer notre défense, voire notre fuite.
-Je suis d'accord. Lui répondait Fujisawa, on va vous aider.

Je rattrapais Batzu, qui ne manquait pas de souffle, et alors que j'arrivais à sa hauteur, courant aussi vite malgré le poids de l'armure, tous les deux nous n'avions pour objectif que d'atteindre le plus vite possible le bout de cette route que l'enfant nous avait indiquée. Sans capuche, et prenant le temps en courant de le regarder plus attentivement, outre sa masse musculaire importante, je remarquais que sa teinte de peau était rougeâtre. Alors seulement, je commençais à comprendre d'où pouvait lui provenir sa force, l’adrénaline nourrit à la fureur. Je ne lui en fis pas part, car comme lui, j'avais d'autres choses en tête, à commencer par me "mentaliser" pour l'affrontement que se profilait sans aucun doute. Nous avancions à l'aveugle, mais lui, à la différence de moi, ne semblait marcher qu'à l'instinct. Je ressemblais en courant à un faucon fusant sur sa proie, alors que lui était plus un chien enragé qui galopait vers la soif de sang...

Nous n'étions partis ni ne courrions assez vite hélas pour éviter un traumatisme à Jill. Toujours recroquevillée sur elle-même, les oreilles bouchées par les mains et les yeux fermés, elle n'avait même pas entendu le shinobi hurler qu'il l'avait découverte. Ses pensées tumultueuses assourdissaient sa logique et sa réflexion, et sa tétanie l'empêchait tout autre moyen de défense. Le shinobi la saisit au col, et la soulevait sans difficulté pour la passer par-dessus son rocher et la jeter en avant, pas beaucoup plus loin. Elle tomba dans la poussière et déjà les yeux larmoyants accompagnaient des lèvres tremblantes. Se redressant, assise sur les genoux, elle croisait les bras pour s'embrasser elle-même, formant instinctivement un bouclier qui ne la protégeait finalement de rien. Naalad et Shidoshi la regardèrent un court moment sans ne dire mot. Les deux se sourirent alors, l'un d'eux en particulier, se mordant les lèvres sans s'en rendre compte. Il tourna le regard vers le chef de l'escouade, celui qui avait la voix rauque. La pauvre enfant n'avait en effet même pas un visage auquel se raccrocher. Il n'y avait autour d'elle, que des masques blancs, décorés d'une larme de sang. Le chef répondait à la question posée par le regard de Naalad.
-Elle n'a pas plus de quatorze ans. Même pour toi, c'est encore jeune.
-On peut y aller par ordre de grade. La hiérarchie avant tout.
-Ça ne m'intéresse pas. Mais vous allez y si vous voulez, ça vous occupera le temps que les renforts arrivent.

Jill ne comprenait pas ce qui était sous-entendu là. Son esprit n'avait pas encore toute la lubricité qui corrompt les âmes si tôt. Mais quand Shidoshi s'approcha d'elle tranquillement, elle sentit dans son aura, qu'il était mal intentionné. Il chercha une fois assez proche à la happer, mais elle se débattit et chercha à s'enfuir. Agrippé au haut de sa tunique, il la déchira pour qu'elle s'en retrouvât le haut nu, dévoilant les jeunes attraits d'une féminité pas encore totalement formée. Elle hurla, mais il n'en eut cure, il courra un peu pour la saisir au bras et la plaquer au sol. Se débattant en criant, il en fut agacé, et lui décollait deux coups-de-poing.
-Plus tu vas résister plus tu vas déguster !
Elle tourna le visage, pour ne pas le regarder, et serrait ses lèvres et ses dents, pour contenir ses gémissements de peur. Lui, glissait la main sous sa robe, tandis qu'elle invoquait toutes les forces supérieures qu'elle connaissait pour être sauvée.
-Vas-y mollo quand même, ne me refile pas un cadavre. Demanda gentiment Naalad.
-T'en fais pas. Lui répondit Shidoshi.
Un cliquetis métallique interpella cependant Shidoshi, qui embrassait avant cela la poitrine de la petite fille en collant le masque froid de son visage sur elle, et relevant la tête, il n'eut pas le temps de discerner ce qui fut la cause de ce bruit. Ma faux le décapitait. Hypnotisé par l'attrait sexuel, il en avait oublié d'être sur ses gardes, la plus grande et première faiblesse des mâles, fut sa propre perte.

Tous les hommes ne sont pas des monstres. L'humanité, non pas un don, une nature, ou un poids, est surtout une dignité à conquérir. Parmi les shinobis présents, il y en eut un qui avait ses propres limites. Il était un soldat discipliné et n'hésitait certainement pas à se montrer cruel avec ses ennemis, mais lorsque les enfants furent abattus, ou encore lorsque le viol de Jill commençait, il se sentait terriblement sale. Il ne protestait pas, car il savait comment cela se passait. Malgré tout, il n'oubliait pas ses propres enfants, qu'il avait laissés avec son épouse depuis bien longtemps pour partir en campagne. Les shinobis des clans confédérés n'étaient pas avides d'une conquête parce que le passé faisait de tout ce monde des ennemis ancestraux, c'était aussi une question de survie, les terres arides et reculées de Kaze no Kuni devenant insoutenables, les shinobis devaient s'imposer ailleurs. C'était donc aussi pour offrir une vie meilleure à sa famille, que cet homme-là se battait contre les indépendantistes.

Alors quand il nous vit nous approcher en courant Batzu et moi, il ne dit rien. Il ne dit rien parce qu'une force plus haute que sa volonté, voulait que nous empêchions Shidoshi d'aller au bout de son fantasme. Son chef et les autres hommes avaient le regard ailleurs et heureusement pour nous. Certainement, qu'ils voulaient laisser un peu d'intimité à leur compagnon. Cet homme, qui nous laissa nous approcher jusque-là sans intervenir, se savait alors en danger lui aussi, car nous ne ferions pas la différence entre lui et les autres. Quand bien même, il ressentit une satisfaction, de savoir la fleur de la petite fille intacte. Il savait, quels que soient ses propres travers, que l'innocence était une couleur si blanche qu'il fallait un grand soin pour ne pas la tâcher.

Je n'avais pas hésité un seul instant quand je vis ce que faisait ce shinobi à Jill. Je n'avais pas vraiment réfléchi. Sa tête m'indifférait, son acte pour beaucoup moins. Jill ne comprit pas sur le moment ce qu'il passait, elle n'entendit que le son net de la chair tranchée alors qu'elle regardait le sable sur le côté. Tournant le regard, elle remarquait ce corps sans tête assis sur elle, qui tombait en un bref instant. Son regard se remplit de vide, et tournant encore la tête de l'autre côté, elle vit la tête de Shidoshi, dont le faciès de l'étonnement était figé sur ses traits par la mort prompte que je lui avais offerte. Je venais retirer le corps allongé sur elle. Elle était inerte, un œil gonflé et un filet de sang à la commissure des lèvres à cause des coups que le shinobi lui avait donné.
Les larmes de sang réagirent promptement. La faux dans une main, j'utilisais l'autre pour dégager l'enfant tandis que le chef de l'escouade et Naalad nous tirèrent dessus, l'un d'une flèche, qui me fit tituber une seconde en rebondissant sur mon armure, et l'autre en envoyant plusieurs pics de roches qu'il fit jaillir de ses mains. Batzu fit tonner comme une cloche sa lourde et large épée en la plantant dans le sol devant nous, s'en servant ainsi de bouclier contre les pics qui n'entamèrent aucunement son acier.
-C'est quoi ça encore ?! S'énervait Naalad qui se sentit coléreux en voyant l'état de son ami Shidoshi.
-En formation ! Ordonnait puissamment le chef de l'escouade. Formez un cercle autour d'eux ! Préparez-vous allez !

Tenant Jill par la ceinture de sa robe, celle-ci se montrait parfaitement docile. Elle ne pensait à rien et en rien, à tel point qu'un court instant, je doutais qu'elle ait préservé encore tous ses esprits, tant je voyais le néant habiter le creux de ses pupilles. À l'abri derrière Batzu, je la déposais un peu en arrière, vers le rocher où elle s'était cachée. Une fois déposée délicatement, je revis la vie pétiller à petites lueurs dans ses yeux. Nos yeux se croisèrent, et je tentais un sourire réconfortant tout en m'adressant à elle.
-Reste derrière ce rocher, on va s'occuper du reste, tout va bien maintenant. Si tu vois que nous avons des problèmes, sauve-toi vers le camp.
Elle ouvra à peine la bouche, mais aucun son ne sortit de ses lèvres. Je glissais alors le pouce sur la commissure pour l'essuyer sans perdre le sourire, puis je passais ma cape sur ses épaules pour recouvrir sa nudité. Je ne le savais pas, mais alors, elle me contemplait, avec une certaine admiration que je lui avais dérobée par l'instant qui m'y favorisa. La niaiserie d'une petite fille qui idéalisa l'image du preux chevalier qui vint à son secours. Hélas pour elle, je n'étais ni preux, ni chevalier, le niais qui courait après l'admiration était comme l'idiot qui courait après l'esprit : tous deux n'embrassaient que des nuages. Sous cette armure cendrée, au casque imitant le crâne du phœnix, se cachait un triste personnage très éloigné de l'idéal qu'elle se construisait. J'éprouvais malgré tout, et cela, si j'y avais réfléchi, je m'en serais immédiatement rendu compte, une profonde empathie pour sa douleur, que j'aurais souhaité partager, voir la porter à sa place, si j'avais pu, mais je ne le pouvais pas.

Les shinobis ne nous avaient pas tout à fait encerclés. Ils formaient plutôt une tenaille autour de nous, sachant peut-être que nous ne les aurions certainement pas laissé prendre nos arrières. Batzu et moi, qui m'en retournais à lui d'un pas lent et gracieux, remarquions depuis un moment ce dôme de sable. Mais aussi les cadavres des enfants parsemant le lieu. Batzu, qui avait retiré sa puissante épée du sol pour la poser sur l'épaule, conservait le visage grave et animal. La tension sur la mâchoire et le regard qu'il renvoyait aux shinobis étaient sans équivoque sur ses intentions, et la vue des cadavres n'allait pas le faire changer de tempérament. La faux sur l'épaule, je me portais à côté de lui et me présentais aux shinobis avec une hauteur et une confiance que je savais mimer sans problème. La main gauche au sabre de ma ceinture, je nous voyais déjà devoir nous battre à deux contre trois. Ce n'était pas si inégal pour le coup, mais rien ne disait que nos adversaires ne nous étaient pas supérieurs. Ne voyant pas Sibile ni le garçon censé l'accompagner, je décidais de m'adresser directement à eux, ce que je fis d'un ton aimable, calme et mélodieux.
-Nous devions trouver une femme et un homme ici. Sauriez-vous où ils peuvent être ?
Batzu était étonné, dans le mauvais sens du terme, de me voir prendre des gants avec eux. Mais il attendait qu'ils répondent, il attendait d'un air menaçant, soupçonnant déjà comme moi la possibilité qu'ils furent cachés dans le cocon de sable qu'il n'y avait pas si loin de nous.
-Ils sont là-dedans. Nous répondit paisiblement le chef de l'escouade en pointant le cocon du doigt. Et vous vous êtes qui ?
Naalad, qui bandait son arc en direction Batzu, ne pouvait s'empêcher de regarder cette énorme épée, bien trop longue et large pour être qualifiée d'épée en fait. Et alors que la tension montait, il se permettait une remarque.
-C'est une épée ça ?

Batzu, qui ne démordait pas de l'envie de trancher tout sur son passage, sourit pourtant en montrant les dents, comme le ferait un chien. Il tenait plus à cet instant, du démon que de l'homme. Et alors à moi-même, la brève pensée que son sang de chien fou faisait des échos me traversait l'esprit et son sourire retomba dès qu'il répondit.
-Elle me sert aussi de plaque de cuisson de temps à autre.

L'officier clanique, celui avec la voix rauque cherchait alors à gagner du temps. L'observant fixement, je voyais que quelque chose clochait, ce n'était pas sa supériorité numérique, ou sa position qui le rendait si confiant, il y avait autre chose, mon instinct me criait de me méfier, mais j'ignorais encore de quoi il pouvait s'agir. Ils n'attaquaient pas, et nous non plus, c'est ce qui arrivait plus souvent qu'on pouvait le penser, quand deux forces s'opposaient au début. Elles se jaugeaient, se chargeaient, se portaient en réflexion et supputations sur le déroulement du combat à venir.
-Vous êtes des salopards. Rompait finalement le silence Batzu d'une voix grave et tremblante de fureur. Vous butez des gosses et violez des fillettes. Vous n'êtes pas des soldats, vous êtes des animaux ; et je suis en chasse.
Je figurais impassible durant ce laps de temps. Appréciant le retour que renverraient les shinobis à la rancune que leur exprimait Batzu. Si le chef et un autre shinobi ne répondirent rien, Naalad se mit à rire, légèrement, mais assurément et sincèrement, tout en répondant, non sans une certaine arrogance.
-Les vrais guerriers savent qu'à la guerre, il n'y a que des coupables. Enfants, soldats, shinobis, civils, nobles ou gueux, quelle différence ? À la guerre, ceux qui échouent meurent, c'est la seule vérité du champ de bataille.
-Je te tuerais en premier alors. Répondait Batzu en s'efforçant de se contenir.

Pendant que nous nous trouvions dans l'impasse, sans ne savoir que faire pour sauver à la fois Jill et Sibile et le garçon qui l'accompagnait. Bohémon avait réuni dans son baraquement ce qu'il avait d'officiers compétents. C'était-à-dire lui-même, Fujisawa et Kumiko. Thérèse était également présente, et bien qu'elle n'eusse pas de prédispositions pour les arts militaires, elle connaissait le camp et ses résidents mieux que Bohémon. Bohémon avait sur son bureau une carte des environs, la vallée des saints, et une carte du camp. Il ordonnait depuis déjà bien longtemps que celui-ci, après chaque déplacement, soit monté selon les dispositions qu'il avait ordonnées, et ce, à fin de faciliter une fuite ou une défense en cas d'urgence.
Bohémon était assis à son bureau, alors que les trois autres étaient debout, jusqu'à ce que finalement Fujisawa vînt s'asseoir à côté de lui. Il n'y avait pas encore de véritables urgences pour eux, car qu'il y avait quelques shinobis non loin de là ne voulait pas nécessairement dire que toute une division s'approchait. Bohémon savait cependant que la division blanche n'était pas loin d'ici, et qu'il y avait de grandes probabilités pour que les shinobis déjà présents soient de cette division. Le débat n'était pas houleux, mais chacun n'était pas d'accord sur les dispositions à prendre. Kumiko désirait que l'on entame l'établissement de solides défenses pour être en mesure de soutenir un siège. Elle considérait qu'une fuite vers les montagnes de la désertique vallée des saints enverrait la cité de la joie dans un coupe-gorge. Les petites routes et les passages escarpés qui jalonnaient la région étaient il était vrai idéal pour des embuscades. L'autre solution était de fuir par le sud, vers les marais infestés de stakatos, ces insectes immenses qui risqueraient de faire encore plus de victimes que la division blanche. Et comme le soulignait Fujisawa, pourtant partisan de la fuite stratégique, il n'y avait aucune chance pour que le monastère du silence à l'est offrit son soutien. L'ouest, enfin, était tenu par les familles claniques, adeptes de l'esclavage et qui pourraient se servir des réfugiés comme du bétail.

Fujisawa, à l'inverse de sa maîtresse et amie, souhaitait plutôt une fuite dans les montagnes de la vallée des saints justement. Il arguait qu'à défaut d'être une zone idéale pour la défense, les réfugiés pourraient dans le pire des cas se disperser à travers celles-ci et qu'il y aurait l'assurance d'avoir des survivants parmi eux. Bohémon se sentait divisé, mais s'efforçait de ne pas paraître tourmenté par le doute. Derrière son masque, son visage dévoré par la lèpre laissait tout de même entrevoir au creux de ses yeux l'inquiétude qu'il éprouvait pour tous ceux qu'il considérait comme ses enfants ; les réfugiés du camp. Organiser une défense, c'était séduisant, s'il pouvait faire assez mal à la division blanche, peut-être qu'elle abandonnerait tout espoir de pillage et de conquête du camp. Mais avec quels moyens ? Ses forces n'étaient absolument pas prêtes à affronter une armée professionnelle, équipée et entraînée. Thérèse, avait l'esprit ailleurs alors que les trois autres tergiversaient. Elle n'avait en tête que Sibile et Jill, leur santé, et s'imaginait le pire de ce qu'il aurait pu leur arriver en priant que Batzu et moi parvenions, sans encombre à les ramener. Il arrive un moment où ceux qui vivent ensemble depuis de longues années cherchent des motifs de querelle et d'inquiétude dans les plus petites choses pour mettre de l'intimité et de l'intérêt dans ce qui est mort définitivement, or, ici l'inquiétude résultait justement de la crainte d'une mort définitive de ce qu'elle considérait intime et important depuis de toutes aussi longues années.

Pendant que Thérèse cherchait à se concentrer sur la conversation sans y parvenir, il était maintenant question des fortifications possibles à mettre en place autour de la cité. Kumiko y croyait fermement, arguant qu'avec les charrettes, les chevaux, les tentes, et des sacs de sable bien disposés, il était possible d'imposer une résistance acharnée aux shinobis, mais Bohémon et Fujisawa semblaient beaucoup moins convaincus par cela. Là, on toquait à la porte, et le garde en station devant celle-ci fut invité à entrer par Bohémon.
-Excusez-moi Sire. Bafouillait le garde. C'est Zö, il est dehors et il voudrait parler à Thérèse. Je lui ai dit qu'elle était très occupée, mais apparemment, il s'inquiète à propos de sa petite fille, il ne la trouve pas.

Zö attendait qu'on le reçoive. Il était effectivement très inquiet ; inquiet de ne pas savoir où se trouvait sa petite fille et bien loin d'imaginer le drame qui ne tarderait pas à entamer la poésie de la cité de la joie. L'inquiétude d'un grand-père, qui avait sur les épaules la charge du père et de la mère, était difficile à entendre, si ce n'était pour ceux qui en connaissaient le poids. L'anxiété de l'inquiétude était plus poignante encore que l'angoisse de la douleur. Quand le malheur était accompli, l'irréparable nous courbait sous la soumission. L'inquiétude en revanche était la crainte tempérée par l'espérance, l'espérance illusoire que sa petite fille était intacte dans le cas présent. Zö ne bougerait pas du pas de la porte, tant qu'il ne serait pas reçu, et chacun de ceux présents dans la pièce, Bohémon et Thérèse en tête, en avait conscience. Quel ton fallait-il employer pour lui dire la triste vérité ? Que seule la vérité était coupable peut-être.

Certains shinobis de la confédération clanique avaient une chanson bien à eux. Ils la chantaient quand ils marchaient, ils la chantaient depuis qu'ils étaient dans l'obligation de quitter leur sol, leurs terres... Les shinobis n'étaient en effet pas seulement des envahisseurs, ils étaient aussi des expatriés. Personne ne savait vraiment qui était l'auteur de la chanson, même pas depuis quand elle existait, mais tous les shinobis la connaissaient, d'autant plus depuis qu'ils étaient en guerre pour la conquête d'un nouveau territoire où s'implanter. Dans le noir complet, Joshua l'avait chanté, un peu avant notre intervention à Batzu et moi. N'entendant plus aucun bruit, à cause de ce que le sable empêchait le moindre son trop bas d'entrer, il s'assit et chanta. Sibile, se rapprocha de lui, pour se réchauffer, et silencieusement, craignant aussi en même temps d'être rejetée, se pressa contre lui. Il ne la repoussa pas, et l'entoura de son bras pour la serrer dans celui-ci contre sa poitrine. Sa voix, avait pour elle quelque chose d'apaisant, il lui faisait oublier sa situation. Elle entendit dans cette chanson un écho à sa propre condition. À la condition de tous les résidents de la cité de la joie ; l'idéal d'un autre royaume, d'une autre terre, sans guerre et sans malheur, un sol sans tache, l'idéal qui n'était qu'un songe, mais un songe qui l'emportait sur toutes les pauvretés du réel. Elle ressentait le même idéal en Joshua, et se dit alors, que les shinobis n'étaient pas d'une certaine façon, si différents des hommes.
-Ces temps-là ;
Des forêts et des prés ;
Non loin des longs, rivages oubliés ;
De l'aube voilée, s'en est allée ;
En quête de l'Homme ;
Lumière enchantée ;
Les cimes frémissaient ;
Larme d'Éther ;
Les pousses s'élevaient ;
En brisant l'hiver ;
Donne le feu ;
Aime nos alleux ;
Flamboie nos armes ;
Vaincu la misère....

-Tu crois qu'on va nous sauver ? Demandait peu convaincue Sibile quand il terminait de chanter.
Mais Joshua ne lui répondit pas. Il préférait se lever pour aller de l'autre côté du dôme.
-Qu'est-ce que tu fais ?
-Ça fait un moment qu'on n'entend plus rien, je veux laisser passer un petit trou pour voir de l'autre côté. Et puis si ça pouvait m'aider pour entendre ce qu'ils se racontent aussi...
-Pourquoi tu n'as pas fait ça dès le début ?
-Parce que je l'ai encore jamais fait. Je ne veux pas faire tomber tout le dôme parce que je contrôlerais mal mon chakra.
-Je n'avais jamais vu de shinobis utiliser le chakra.
-Nous ne sommes pas vraiment différents des humains, tu sais, nous avons tous du chakra...
Désorienté d'abord, Joshua ne vit que la paroi d'une roche, la montagne qui bordait le chemin vraisemblablement. Mais parvenant plutôt facilement à faire ce petit trou de serrure par lequel il pouvait observer, et ce, sans que son dôme s'effondre, il décida de recommencer à un autre endroit de celui-ci, et là, il tombait sur nous, Batzu et moi, en train de discuter avec les shinobis. Il reconnaissait Batzu immédiatement.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Mer 22 Mai - 11:58, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:37
-C'est Batzu ! S'écriait-il. On est venu nous chercher ! Il y a un autre type en armure à côté de lui.
-Laisse-moi voir ! Criait Sibile à son tour en courant vers Joshua pour regarder dans le trou. C'est Shino !
-Qui ça ?
-Un mercenaire qui venait d'arriver dans le camp. Ils ont l'air de discuter avec quelqu'un.
-Les larmes de sang sans doute.
-Qu'est-ce qu'on fait ? Tu ne vas pas les aider ?

Joshua avait manifestement mieux regardé que Sibile. Il avait vu le cadavre de l'un des enfants non loin de nous. Sibile était tournée vers lui, pressante, il fallait dire, et quoiqu'il hésitât à lui dire ce qu'il avait vu et pas elle, il préférait finalement se taire à ce propos pour lui répondre.
-Reste derrière moi quand le dôme tombera, et dès que la voie est libre, tu cours te mettre à l'arrière de nous d'accord ?
-Je ne suis pas une guerrière... Je ne peux que fuir, tu le sais.
Joshua se prit à sourire, alors que Sibile ne pouvait le voir, curieusement, elle "entendit" ce sourire et y répondit instinctivement avant de reprendre.
-Tu fais attention à toi. D'accord ?
-Mmh... Je ne suis pas suicidaire. Et on a encore beaucoup de choses à nous dire.
-Comment ça ? Demanda-t-elle sachant pourtant la réponse.

Joshua s'approchait d'elle, et durant un très bref instant, lui volait un baiser. Elle se laissait faire, sentant l'amour l'envahir, et l'assurance d'une solitude comblée, où le malheur de sa maladie n'aurait aucune emprise. Lui ne craignait pas de l'embrasser, il ne craignait pas de l'aimer, parce qu'il se sentait plus honteux qu'elle d'être ce qu'il était et que cette femme, qui était encore loin de tout savoir sur son compte, ne l'avait pas repoussé alors qu'il était un shinobi de la division Blanche. Tous deux se trompaient sur les sentiments de l'autre, chacun s'imaginant être le fardeau, alors que les deux se sentaient honteux et soulagés de ne pas devoir continuer ; l'un sans l'autre. De là, l'amour naissait et ne périssait pas, un besoin impérissable de soutien, dans la douleur et l'épreuve, la maladie de l'une et la rédemption de l'autre.

Nous allions charger, et nous battre, parce qu'il n'y avait plus que ça à faire. Batzu était déjà prêt, et se mettait en position en soulevant son impressionnante épée au-dessus de sa tête. Moi, je n'avais pas le même élan qu'il semblait avoir, j'étais prêt, mais je pressentais qu'il ne fallait pas, je ne me sentais pas pleinement confiant, et ce, sans vraiment savoir pourquoi. Cependant, le dôme de sable se désagrégea sous nos yeux à tous, laissant apparaître, Sibile, et Joshua derrière lui. "Il était temps", me disais-je intérieurement à moi-même en laissant échapper un sourire. La blondinette marquait un arrêt, et on entendit un petit cri s'échapper d'elle, quand elle découvrit le carnage qu'avaient laissé les shinobis avant notre arrivée. Il était vrai et hélas, que la guerre ne s'apprenait point dans les livres, ni dans le silence des retraites. En faire l'expérience d'aussi proche, n'était jamais sans étonnement et la dureté du caractère n'y changeait rien. Joshua ne la laissait heureusement pas s'éterniser sur cette macabre scène, "Aller !" Lui ordonnait-il pour la réveiller, et elle s'enfuit rapidement vers l'arrière, où elle trouvait la petite Jill, complètement amorphe et recroquevillée sur elle-même. Voir Sibile saine et sauve ravivait un peu l'enfant, qui se laissait prendre dans les bras de Sibile, qui découvrait les marques sur son visage et son état. Elle ne lui dit rien, et se contenta de l'envelopper de son corps. Jill voulait malgré tout, maintenant qu'elle se sentait un peu moins déboussolée, voir ce qui se passait au-delà du rocher et emprisonnée dans les bras de Sibile, elle dressa un peu la tête par-dessus le rocher pour y voir. Sibile aurait voulu lui dire quelque chose, la rassurer, trouver les mots justes, mais elle se sentait impuissante, et n'aura su lui offrir que cet ultime geste d'affection dans le silence, en attendant que les Batzu, moi et Joshua, puissions enfin faire demi-tour.
Les shinobis n'intervinrent pas. Cela aurait déclenché de facto un affrontement, dont ni eux ni nous n'étions certains de sortir vainqueur. Nous étions maintenant numériquement égaux, mais je ne connaissais pas le talent de Joshua, alors je ne comptais pas vraiment dessus. Naalad commentait la scène d'un "enfoiré !" Sans agir plus que cela. Les deux autres observèrent silencieusement, restant sur leurs gardes.

De l'autre côté dans le camp, un vieil homme attendait qu'on le fasse entrer. Fujisawa et Kumiko se sentaient relativement éloignés de cela, quoique la jeune kunoïshi était plus fébrile à l'idée de devoir être témoin de la scène que pourrait faire Zö. Thérèse regardait un moment Bohémon, une façon de le questionner dans le silence, et celui-ci lui répondit tout aussi silencieusement d'un hochement de tête. "Fais-le entrer s'il te plaît", dit-il au garde après cela d'une voix posée, et le garde s'exécuta. Zö entrait dans la pièce, le visage inquiet, mais pas accablé, pas encore.
-Je suis désolé de vous déranger, je voudrais juste demander à Thérèse si elle n'aurait pas vu Jill. Elle est de plus en plus aventurière et personne n'a su me dire où elle était, je suis allé voir où nous allons cueillir habituellement et elle n'y est pas non plus. Finit-il légèrement crispé.
Zö, vit alors tous les visages grave devant lui, les visages qui annonçaient qu'il n'allait pas lui plaire d'avoir à entendre la réponse qui l'attendait. Le mensonge n'est pas si aisé pour la plupart des gens, quand il s'agit de devoir dire une évidence, le mensonge est une des constantes nécessités de la vie ; sans le mensonge, il n'y aurait au monde ni art, ni beauté, ni amour. Mais ces mensonges-là se savent mensonges, le mensonge dans le visage d'un homme peut se lire, s'il se sait lui-même mensonger. L'intention de Thérèse qui se sentait un devoir de répondre, était un habillage de la vérité, pour éviter que Zö ne s'emporte. Les mots justes, pour une réaction juste, étaient, comme très souvent, la finalité du mensonge.
-He bien... Commençait-elle sans conviction alors que la panique sur le visage de Zö se lisait déjà.

Sur le faciès de Zö s'inscrivait la fatalité, mais au-dehors, un puissant brouhaha intervenait pour attirer l'attention de chacun. Une dispute, un homme, plusieurs hommes, une femme, plusieurs femmes, qui se querellaient avec le garde présent. La voix du garde qui s'étouffait sous celles de ceux qui jouaient d'invectives sur sa personne inquiéta les cinq personnes présentes. "Je vais voir" dit calmement Bohémon qui se levait pour se diriger vers la sortie. Fujisawa et Kumiko l'accompagnaient, alors que Zö, suivant du regard Kumiko qui ne lui avait toujours pas répondu, n'insista pas pour les suivre lui aussi. Il redoutait finalement tellement la nouvelle qu'on allait lui annoncer, qu'il préférait la repousser. Cela ne l'empêchait pas de voir dans les yeux de Thérèse lorsque celle-ci croisait son regard, toute la gravité de la situation qui pesait sur chacun d'entre eux.

Dehors, une petite foule s'était réunie, surtout des familles. On retrouvait, entre pères et mères, quatre des enfants qui étaient revenus au camp pour prévenir des malheurs de Sibile et Joshua. Ignorés dès qu'ils livraient leurs informations, ils ont couru à leurs parents pour le leur répéter, créant un relatif mouvement de panique. La foule s'épaississait et bientôt, tandis que Bohémon, Thérèse, Zö, Fujisawa et Kumiko se retrouvaient devant elle, on ne pouvait plus déceler la moindre phrase dans le bruit ambiant. Bohémon se savait, ou du moins se jugea responsable de la situation, il avait en effet oublié les enfants et n'avait pas pensé à devoir rassurer les résidents de son camp avant d'entamer une réunion en vue de prendre la meilleure décision. Jamais la voix de Bohémon n'aurait tonné assez fortement pour passer au-dessus d'eux tous, il était bien trop faible pour le faire. Le garde essayait bien de calmer tout le monde, mais n'y arrivait clairement pas. Cela durait quelques secondes, jusqu'à ce qu'un homme, tenant son jeune fils par l'épaule interpellât directement le Roi lépreux.
-Bohémon ! Mon fils m'a dit que les shinobis étaient là ! Nous savons tout ! Il y a des parents inquiets pour leurs enfants ici, certains ne sont pas revenus ! Tu comptais nous le dire quand au juste ?
Nul dans le camp n'aurait touché à Bohémon, il avait encore le respect de chacun. Alors, quand le père s'adressait directement à lui, on entendit dans la foule quelqu'un hurler "laissez-le répondre bon sang !", "Oui ! Dis-nous Bohémon !" Hurlait alors un autre.

Le visage de Zö devint blafard et effrayant, car pas dupe, il comprenait soudainement la gravité de la nouvelle que devait lui annoncer Thérèse. Il tournait un regard grave et accusateur sur elle, qui ne pouvait que baisser les yeux devant les siens alors même qu'elle n'était pas responsable.
-J'étais en train de chercher la meilleure décision à prendre à ce propos. Répondit calmement Bohémon. Nous avons envoyé des hommes pour aller chercher vos enfants. Nous attendons maintenant qu'ils reviennent. Je vous promets que je fais ce qu'il faut pour que vous restiez tous en sécurité.

Le calme dont faisait preuve Bohémon impressionnait Fujisawa et Kumiko. Ils connaissaient plus d'un chef qui aurait élevé le ton, crié sur tout le monde pour les mettre au pas, ou bien qui se retrouverait complètement paniqué devant la masse qui hurlait. Bohémon avait alors, aux yeux des deux shinobis, véritablement la dignité d'un roi. Il se tenait droit devant tous ceux dont il avait la responsabilité, et leur faisait face sans s'abaisser d'aucune façon. Sa voix écrasait de sa noblesse, non de sa hauteur, les premières appréhensions qu'on lui opposait. Pourtant, Thérèse en particulier, remarquait très bien qu'il était épuisé et ne voyait qu'à peine les gens qu'il avait devant lui. Zö se sentait soulagé, mais pas encore complètement rassuré. Sachant Batzu absent, il se doutait qu'il fût de ceux envoyés pour sauver sa petite fille. Cependant, dans la foule, tout le monde n'était pas convaincu par la réponse de Bohémon. Ce que les gens ignoraient, c'est qu'ils faisaient perdre un précieux temps d'organisation à Bohémon et ceux qu'il avait choisis pour l'aider. C'est la pensée qui traversait Fujisawa, quand il regardait cette foule à la limite du délire, et dont il n'avait pas vraiment cure finalement. À ses yeux, ces gens malheureux et inconscients étaient ce monde complotant constamment contre les braves, comme un combat ancestral - le rugissement de la foule d'un côté - et la voix de votre conscience de l'autre. L'individu dans la foule se laissait rapidement entraîner dans l'hystérie, emporté dans la folie, c'était le risque qu'il fallait surtout éviter.
-Et si vos hommes échouent Bohémon, vous ferez quoi ? Demandait le même père en tête de la foule.
Bohémon ignorait encore la réponse et n'ayant que le silence à offrir, C'est dans le plus profond silence qu'on entendit ce que disait le silence, à savoir l'ignorance. Quelques instants de plus dans le baraquement et il aurait peut-être eu quelque chose de concret à répondre, mais à cet instant, il se savait lui-même incapable de donner une assurance à cette foule que la peur contaminait un peu plus à chaque minute.
-Si vous nous laissiez nous préparer, on aurait une réponse concrète à vous donner. Intervenait sèchement et indifférent Fujisawa.

Renvoyer d'un coup sec les hommes à leurs propres fautes n'était jamais la meilleure solution. Fujisawa, ne fit que s'élever les rancunes au-dessus de la peur qui était grandissante. Bohémon, cherchait à créer une cohésion, et devant les brimades que la foule renvoyait à ceux qui se démenaient pour leur sauvegarde, il se résignait à l'idée qu'il ne fallait pas chercher la cohérence dans les réactions humaines. Le monde n'était pas cohérent, les aspirations n'étaient pas cohérentes, les rapports entre les hommes n'étaient pas cohérents. Les émulations provoquées par les anciens discours de Bohémon n'avaient plus d'effet sur les doutes qui saisissaient aux corps tous ces pauvres gens, ces gens qui ne répondaient maintenant plus qu'à leurs instincts. Au sein même de la foule, dans le brouhaha, on distinguait la dissension se profiler comme un abîme, une fracture, un gouffre, qui se creusait entre ceux qui voulaient encore faire confiance à Bohémon, et ceux qui déclaraient déjà vouloir partir. Les cinq personnes face à elle, cette foule, ne pouvaient rien dire, on ne les aurait ni écouté ni entendu. Pour Fujisawa, ce n'était rien, le camp n'était pas le sien et il comptait le quitter dès qu'il en aurait l'occasion. Kumiko était plus attentive, et passionnée jusqu'au bout des ongles, tentait de ramener l'attention vers elle, pour dissuader ceux qui voulaient partir de le faire.
-Mais vous êtes fou ! Où irez-vous ? Mais écoutez enfin !
Mais personne n'écoutait. Thérèse et Zö se regardaient pendant ce temps. Ils se connaissaient depuis si longtemps et avaient accompli tant de chose ensemble, que Zö, bien qu'effrayé, ne pouvait que s'en remettre au jugement de Bohémon qui les avait mené et gardé en sécurité jusque-là dans un conflit sanglant qui n'épargnait personne. Bohémon était en réalité bel et bien résigné, jamais il n'avait forcé qui que ce soit à le suivre et n'allait pas commencer maintenant. Cependant, quand ceux qui voulaient partir réclamèrent des provisions pour leur voyage, leur fuite en somme, les esprits s’échauffaient d'autant plus. Une étincelle, une seule, qui embrasaient les passions et réveillaient les vieilles horreurs, celles des shinobis qui marchent sur les villes, villages et cités, et voilà que la foule sombrait. Un meneur pour lancer quelques slogans bien percutants, ce père de famille à la voix portante, et la foule se rappelle qu'elle n’a pas d’autres lois que les exemples de ceux qui commandent.

Le stock de vivre appartenait au camp, et cela, Bohémon n'y dérogerait pas. On le vit se dresser un peu sur lui-même malgré la douleur, et regarder froidement le père du jeune garçon qui menait la danse contre lui, accompagné en plus de sa femme encore enceinte qu'il s'estimait un devoir d'éloigner de cet endroit qui devenait trop dangereux à son goût. Ils n'étaient qu'une cinquantaine à le suivre dans sa folie, mais c'étaient cinquante bouches de moins à nourrir, pensait avec pragmatisme Fujisawa. Voyant que l'échauffement dégringolait vers l'altercation et que les hommes d'armes présents n'arrivaient pas à séparer ceux qui allaient en venir aux mains, Zö fit quelques pas en avant, très calmement. Cela étonnait Thérèse, qui ne l'avait jamais vu d'un air si ferme et décidé, lui qui n'était d'ordinaire que simplicité et tendresse. Il lui sembla être un tout nouvel homme et sa vieillesse passait pour le montrer rajeuni par un affermissement de sa personne. Il dépassait Fujisawa, puis Bohémon qui n'était pas moins étonné que Thérèse, puis arrivait vers Kumiko, qui s’époumonait toujours à tenter de calmer les résidents. Là, il posait une main ferme sur son épaule pour l'inviter à cesser de crier pour rien, puis levait l'autre main, dont un halo scintillant chatoyant jaillit, une décharge de chakra en suivit et le silence fut imposé à la foule par un jutsu. Ce fut un choc pour la foule, mais surtout pour Bohémon et Thérèse. Stupéfaits d'apprendre finalement que Zö était un shinobi, certainement de très longue date, car ils le connaissaient depuis des années.
-Ici, la liberté prime sur tout, ceux qui veulent partir le peuvent, imposa de sa voix ferme le vieux Zö. Mais les provisions du camp appartiennent au camp. C'est Bohémon et les hommes d'armes qui les ont trouvés, aucun d'entre-vous. Si vous nous prenez ces provisions, c'est du pillage et vous ne valez pas mieux que les shinobis.

Et d'un. Se disait intérieurement Fujisawa en souriant. J'avais ressenti quatre chakras dans le baraquement, Fujisawa en découvrait un et c'était un soulagement pour lui, comme pour Kumiko, quoique cela soulevât beaucoup de questions, de savoir qu'il s'agissait d'un des résidents et non d'un shinobis étranger caché dans le camp. Zö fit un autre geste de main, et chacun dans la foule retrouva sa voix. Couper les cordes vocales d'autant de monde exigeait un énorme talent, et laissait comprendre pour tous qu'il était un shinobi à ne pas prendre à la légère.
L'argument de Zö, sa démonstration de l'usage du chakra, et le soutien des parents qui attendaient le retour des enfants qu'ils ne savaient déjà mort, eurent raison des réclamations de ceux qui désiraient partir. Cependant, le père de famille continua, plus posément, d'affirmer qu'il partait, suivi par la cinquantaine qui était déjà convaincue avec lui de devoir le faire pour éviter que les shinobis ne les ravagent en arrivant au camp. Absurdité, quand on savait que nul ne pouvait affirmer que la division blanche était déjà en route. Mais la peur n'est que rarement la bonne conseillère et supplante tant la raison que les bonnes intentions. Bohémon et Thérèse n'eurent d'autres choix que d'accepter, et de voir partir ces personnes avec tout ce qu'elles possédaient. La tristesse au cœur, ils montèrent vers le nord, à l'opposé de la direction vers laquelle les enfants avaient croisé les shinobis, ainsi, sans le savoir, ils se jetaient dans la gueule du loup.

Loin dans le nord, pas si loin en fait, Shigurui avait déjà divisé sa division pour que chacune des cohortes prenne le chemin le plus rapide vers le campement et opère dès qu'ils seront arrivés un encerclement. Il avait donc un effectif réduit, mais pouvait tenir une bonne heure de combat avant d'être rejoint en cas de problème. L'échelon des corps appliqué à une division en somme, en réduisant l'écart des temps de trajets entre les cohortes à une heure plutôt qu'une journée. Cela permettait de rendre les déplacements de sa division difficilement prévisible et de moins facilement jauger son effectif. Il ne comptait pas envoyer directement ses hommes au combat, plusieurs heures de marche ajoutées aux heures de combat précédentes, et il tuerait beaucoup d'hommes inutilement. Lui, qui n’aimait pas le gâchis, considérait la valeur du sang avec intérêt. Une nuit de plus autour du camp, pensait-il, ne changerait pas les moyens qu'avait à disposition le camp qu'il s'apprêtait à frapper.

Les chants de la mère aimante berçaient les horizons fantasques d'une jeunesse innocente pendant ce temps chez les fuyards du camp. Un Amour au creux des bras et du sein nourrissant pour masquer les ténèbres qui enveloppaient le lointain, un déclin, qui brisait l'onirisme utopique d'une espèce enclavée dans les malédictions qui paraissaient devenir, au temps passant, sempiternelle. Une haute famille pourtant que celle de l'homme fuyard et meneur, qui conduisait cette fuite et l'avait initié, fidèle parmi tous à la dignité shinobi autrefois, il s'était détourné de cette voie pour se voir sacrifier sur l'autel de la haine à l'ennemi ancestral, un ennemi que ce père de famille avait désigné ; "haine". Shinobi, hommes corrompus à leurs vues, malédiction de l'ouest, et l'enfant choyé finit entre les mains de cette corruption, le sort en fut jeté, mais ce sort ne fut pas décidé par qui se pensa au-dessus des lois de la causalité, du destin, de la volonté et de la loyauté... Il ne suffisait pas de torturer le cœur et l'âme pour faire de l'innocence une démonie. Cet enfant, Tenshi, s'il avait su ce qui l'attendait, n'aurait certainement pas, avant de partir, raconté ce qu'il avait vu au sud du camp à ses parents.

Ce que les shinobis commandés directement par Shigurui firent, et ce qu'ils n'auraient pas dû faire, c'est de ne pas jouer avec l'enfance comme on joue avec une balle. C'est de ne pas briser la psyché comme on brise la vitre d'une fenêtre. C'est de ne pas croire en la docilité, comme on dresse celle d'un chien. L'être, dans son ensemble est à la naissance une coquille à peine remplie, qui se comblera de la somme de ses expériences ; et bien peu sage celui qui pense pouvoir prévoir ce que le monde peut faire d'un individu, tant la somme de toutes ces influences, est susceptibles à chaque essai, d'engendrer une parfaite unicité de l'être. L'Unique, est, sa propriété, au monde. Ainsi se régit, une loi naturelle de l'existence, de la vie, et du temps.

La guerre, fléaux du temps et de l'âge, poursuivant la pureté par-delà les mers et les océans, ne devaient jamais rompre l'équilibre psycho-affectif de son premier fils, s'exclamait le digne père sur son bel-enfant, quand il le voyait dormir sur les genoux de sa mère. L'enfant, prit d'un amour immensurable, une fierté familiale, n'avait alors pas conscience de quelles brutales et tristes vérités, l'on cherchait à le couper. Il eut donc le loisir de grandir, jusqu'à aux moins ses huit ans, dans le cocon familial idyllique et idéal, comme tous ceux qui n'avaient pas connu l'enfance joyeuse, l'auraient souhaité. Le père n'était pourtant pas sans lucidité, et n'ignorait pas quelle torpeur pesait sur les siens, tout autant, sinon plus, que le danger qui courait la nuit et le jour, dans les contrées aussi sauvages que civilisées du monde shinobi. C'est pour cette raison que lorsque l'armée clanique commençait à s'effondrer, il quitta son village pour rejoindre le camp de Bohémon, qu'il croyait être le dernier relent de sécurité existante.

Mais comme si souvent dans les mondes où la violence est monnaie courante, où les institutions sont archaïques, où les idéaux raciaux poussent à l'autarcie, l'étatisme, et au mutisme social, le destin, la main des esprits que l'on ne saisissait pas, et que l'on nommait sous bien des noms, avait choisi un tout autre chemin pour l'enfant Sainan Gi. Tenshi. La guerre, monnaie courante, toujours, fut si longue qu'elle en devint synonyme de banalité. Ce voyage conduisit finalement la famille loin dans la vallée désertique des saints, qu'elle espérait traverser pour atteindre au terme d'un très long chemin Gao Yanshi, terre natale, pour le moment encore à peu près épargnée par les combats entre les partisans de l'ordre et les partisans de l'indépendance ; les shinobis.

Par son lourd sommeil, Tenshi fut épargné des premières horreurs de la vérité du monde. Il n'oubliera pas qui sait, plus tard, de remercier sa mère pour la potion de sommeil qu'il reçut peu avant cette journée tragique. Car la candeur ne durerait pas, où dans leurs marches, les shinobis de la division blanche guettaient les occasions de pourfendre, de dévorer et de massacrer les êtres pour lesquels ils avaient une aversion totale et quasi-génétique. Faire des prisonniers oui, mais la guerre était aussi l'anéantissement de l'ennemi. Une résistance virulente fut orchestrée par les fuyards, qui n'aura eu d'héroïque qu'un triste récit bien trop sale pour en faire l'étalage.
Tenshi, alors découvert dans son sommeil, fut comme une occasion bénie pour les shinobis qui trouvèrent là, selon eux, le moyen d'envoyer un message clair au camp. Shigurui en était l'habile initiateur.
Emporté là, loin de chez lui, au gré des massacres perpétués sur des civils, des enfants, des hommes et des femmes, l'enfant risquait fort bien de découvrir trop brutalement de quel malheur son espèce fut la semence, car l'ignorait-il encore, lui aussi était fils de shinobi. L'enfant se trouvait les mains attachées dans le dos avec une corde, balancé sur le dos d'un cheval au pas, avec les jambes attachées, elles aussi, à la selle par une corde. Il avait un sac sur la tête, qui lui masquait la vue, et qui lui étouffait le bruit. Il avait peur, son instinct ne lui commandait qu'une seule chose ; "gagne du temps..." Mais la réflexion à cet âge se limite à la primitivité de la survie. "Gagne du temps... Où suis-je ? Qui sont-ils ? Où sont mon père et ma mère ?" Et l'expérience de la peur entamait les premiers contrecoups de ses conséquences sur le cœur pur et innocent de l'enfance. Il tremblait, il transpirait, la paralysie ne déclenchait pas qu'une catalepsie du corps, mais provoquait jusqu'à l'asphyxie de la pensée. Le souffle haletant était la seule expression dont fut alors capable le petit homme, captif des shinobis. Les larmes, ainsi, coulaient malgré lui, sur ce petit être, qui n'était plus qu'une proie, une proie reléguée au rang de jouet du vice et de la servitude en un instant.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:42
Autour de lui, il entendait des mots, des mots qu'il ne comprenait pas. Il entendait les sons, des sons qu'il ne connaissait pas. Son sentiment premier, une profonde solitude. La solitude, tout l'enfer est dans ce mot, dans l'autre et dans le corps, la solitude rompt la sensation de sécurité et fait se plonger en soi, comme pour, par dissociation de l'être, trouver au tréfonds de son cœur l'ami qu'il nous manque pour nous sentir bien. Ainsi réagit-on lorsqu'on est trop tôt extirpé de son cocon. Cette langue étrange, qui n'était pas la sienne, l'effrayait d'autant plus, que certains mots lui avaient été contés par ses parents comme l'expression du blasphème à ne jamais commettre. Des minutes durant l'enfant chevauchait sans savoir où il allait, et sans oser le demander non plus. Lui, et une trentaine de shinobis, débouchèrent à la lisière d'une forêt, une forêt qui lui aurait été familière s'il n'avait pas eu un sac sur la tête pour la lui masquer. Il sentait alors que le cheval s'arrêtait, enfin, et quelqu'un vint lui détacher les jambes. Il le saisit par le col, porté comme un sac, il finit après quelques pas, finalement, jeté violemment au sol.

Il tombait dans la boue, la peur devenait insupportable, et le faisait passer à la frontière de la folie, jusqu'à provoquer chez lui l'aphasie. À genoux qu'il était, il se trouvait gisant comme prostré, jusqu'à ce qu'enfin, on lui ôtât le sac qu'il avait sur la tête. Il découvrait cette petite prairie, pas très loin de vallée des saints et qui n'avait rien du palais enchanté de ses rêves d'avant. Devant lui, se tenait un homme de haute stature, qui imposait par sa seule présence tout le respect dû à la dignité de la noblesse. Un paradigme étrange, quand on pressentait en lui aussi, tout ce que le vice et le mal avaient de nuances monstrueuses. Le silence autour de l'enfant s'imposait d'abord, quand lui, remarquait la trentaine d'individus qui lui paraissaient totalement différents, et pourtant aussi semblables et étranges. Il n'osait toujours pas prononcer le moindre mot, la paralysie continuait d'opérer. Et sur le visage de l'homme qui se tenait debout devant lui, on lisait la froideur jubilatoire et forcée qu'il faisait s'écraser sur le corps frêle de son otage. Le silence durait, mais l'inaction ne suivait pas. Le shinobi brandissait la main, et pointait du doigt sa gauche... Alors Tenshi tournait le visage à sa droite, et là, ses yeux s'ouvrirent en grand, sa bouche, suivait du même mouvement... Il y avait là un arbre, un très grand arbre, un arbre mort et sans feuilles, sur de nombreuses branches, y pendaient des cadavres des fuyards du camp. Vêtu en haillons, déformés par la douleur, la torture, la peur, et l'horreur. On y voyait et entendait les corbeaux, qui se délectaient de la chaire pas encore pourrissante. Tous les pendus étaient morts, sauf une... Une femme enceinte, qui gesticulait des jambes, étouffée peu à peu, au rythme de ses sanglots qu'elle ne pouvait retenir. Tenshi voulut alors détourner le regard, car ce qu'il voyait pendu, le hasard fit que c'était sa propre mère, mais le shinobi face à lui l'y obligea en faisant tonner sa voix grave.
-Si tu ne regardes pas, je te ferai pendre avec eux sur cet arbre.

Alors l'enfant regarda, il regarda, jusqu'à s'uriner dessus. La femme pendue à la mort, accouchait tandis qu'elle trépassait. Elle cherchait à s'agripper à la corde qu'elle avait autour du cou, car on ne lui avait pas attaché les mains, et cherchant d'instinct le sol, elle poussait de son corps sur le vide en tressaillant, et poussant, elle accouchait finalement dans la plus grande douleur. Autour de Tenshi, on entendit quelques rires, mais rien de semblable à des éclats, ce n'était qu'un "petit jeu entre amis". Et lui, pauvre enfant, regardait toujours, parce qu'il avait peur, de ne pas regarder... La pauvre malheureuse ne pouvait même pas hurler, car le peu qu'elle arrivait à lâcher était entravé par la corde qui lui serrait la gorge. Cela durait longtemps, très longtemps... Le shinobi qui lui avait ordonné de regarder était d'autant plus intéressé par les réactions de Tenshi. Il y trouvait un certain plaisir, à le voir trembloter des genoux dans la boue, trempé dans sa propre pisse. Jusqu'à ce qu'un bébé tombât de sous la robe de la femme, accrochée au cordon ombilical, dernier lien l'unissant à sa mère maintenant bel et bien morte d'épuisement et de souffrance. On entendit naturellement le bébé pleurer, pleurer à chaudes larmes dans la boue et le sang. Le placenta suivait en lui tombant dessus, et Tenshi regardait toujours, l'esprit embrumé pars, il ne savait plus quel tourment.
-Regarde-moi maintenant. Ordonnait à nouveau le shinobi.

Et Tenshi tournait le regard tel qu'on venait de le lui ordonner. Il vit ces yeux hauts sur lui, sans compassion, mais ardent d'un désir morbide et malsain. Il écoutait, docilement, les mains toujours attachées, car il n'avait que ça à faire... À côté, il entendait toujours les cris du nourrisson qui venait de naître, mais qu'aucun des shinobis ne semblait vouloir, faire, taire. Bien au contraire, ils l'ignoraient tout simplement.
-J'ai toute ton attention ?
-Oui... Répondit Tenshi dans un sanglot.
-Doit-on tuer cet enfant ? Ou le laisser vivre ? Demandait froidement ensuite le shinobi.


Tenshi sentit l'intérieur de son corps en ébullition, le plexus vibrer sous il ne savait quelle violence incontrôlable. La décision de la vie d'un bébé, un frère ou une sœur, lui appartenait, mais alors, malgré lui, il ne cherchait pas la réponse la plus juste, la plus noble, il cherchait la réponse qui assurerait sa propre sécurité. La pression qu'il sentait sur ses épaules risquait à tout instant de lui faire perdre tout le sens du bien commun, qui se trouvait déjà bien fragile à son jeune âge. Ses lèvres tremblaient, il claquait des dents tandis qu'il cherchait dans le regard du shinobi la réponse qu'il attendait. Mais ne parvenant pas à y trouver quoi que ce soit tant le marbre et le voile sur son masque opacifiait toutes les possibilités d'empathie à son encontre, Tenshi se sentait désarmé. Tardant à répondre, un shinobi vint en marchant derrière lui, pour lui écraser la tête dans la boue. Le bébé pleurait encore, et quoique la tête de Tenshi y fût plongée jusqu'aux oreilles, la boue ne suffisait pas encore à étouffer le son des cris du nourrisson qui le prenait au corps comme autant d'expressions de la peine qu'il devait accepter d'entendre.
-Si tu tardes à répondre, tu les y rejoindras vermine. Lui dit alors froidement le shinobi tout en retirant le pied de sur sa tête.

Tenshi relevait le regard sur celui qui lui faisait face, désormais glacée jusqu'au os, et le visage couvert de boue. Le shinobi lui esquissait cette fois un sourire, compatissant... Il se penchait un peu sur lui, Tenshi qui sans grimacer, laissait pourtant couler à flots toutes les larmes que pouvaient contenir ses yeux, comme autant de saignement du cœur. Le shinobi lui saisit délicatement la joue, comme un geste de tendresse qui contrastait totalement avec le ton qu'il avait imposé jusque-là.
-Face à la mort, il ne faut pas mentir. Et je suis, pour toi, maintenant, la mort. Alors, lui laisse-t-on la vie, ou devons-nous l'abréger ? La vie ou la mort ? Réponds tout de suite.
-La mort... Répondit Tenshi comme un réflexe qu'il n'avait su contenir.


Le shinobi ne dissimulait pas sa satisfaction. Le sourire qui n'était jusque-là qu'une esquisse se prononçait désormais plus sadiquement à travers ses yeux. Avec le pouce, il débarbouillait un peu la joue de Tenshi, complètement docile et terrifié finalement. L'enfant n'en éprouvait pourtant pas moins de terreur, de honte, et le flot d'émotions qu'il ne savait saisir, n'en était pas moins troublant, à tel point, qu'il n'était plus très sûr lui-même si ce qu'il venait de faire était bien, ou mal...
-Brave petit. Concluait le shinobi.
Le shinobi relevait le regard vers l'un des siens, et lui fit un tout autre sourire en l'invitant d'une inclinaison de la tête, vers le bébé encore larmoyant, de s'y rendre pour achever la besogne. Le soldat qui reçut l'ordre sortait un kunai et se dirigeait alors vers le nourrisson. Tandis que son maître, saisissait fermement le menton de Tenshi, pour lui tourner la tête vers la scène. Là, il vit le bébé se faire couper cordon qui le reliait à sa mère. Il pleurait toujours, et Tenshi, honteusement, se savait-il déjà, était soulagé d'entendre encore ses cris... Le shinobi, qui lui tenait toujours le menton, lui retournait enfin le regard sur lui, et se redressait après l'avoir lâché.
-Je suis Shigurui. Et toi ? Lui demandait posément le shinobi.
-Sainan Gi Tenshi. Répondit bassement le petit homme.
-Tu sais où son tes parents ? Continuait le shinobi.


Tenshi ne fit que secouer lentement la tête pour signifier qu'il l'ignorait. Les yeux grands ouverts, comme si le temps et l'espace lui furent un instant suspendus. Il pressentais en fait, pour sa survie, qu'il devait mentir, et ne surtout pas dire qu'il avait déjà comprit et encore moins que c'était sa propre mère qu'on venait de pendre sous yeux.
-Ils sont mort. Ils sont tous morts, toi et ce bébé, c'est tout ce qui reste.
Et Tenshi, qui bien que jeune n'était pas stupide, comprenait que sa famille, passée entre les mains de ces monstres qu'il découvrait, n'était plus... L'innocence fut ainsi rompue, mais pas tant que cela. Imprégné d'une haine lancinante, le garçonnet se savait maintenant devoir survivre dans un monde qui n'était pas le sien. L'instinct de survie, primait sur les incapacités des jeunes âgés, et déjà, la bonté en lui devenait la source de son désir de vengeance, un désir, qui bien qu'existant, n'était pas encore clairement défini certes dans son esprit, mais cela n'allait pas tarder. Shigurui, ordonnait ensuite à son soldat d'apporter le bébé, pour le remettre dans les bras du petit garçon. Là, le chef de guerre perdit son sourire, et devint tout à fait glacial.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:45
-Vous étiez du camp de la cité de la joie. L'un des hommes me l'a dit. Tu sauras y retourner ?
-Oui... Répondit tristement le garçonnet.
-Ce bébé que tu avais condamné. Ramène-le là-bas. Et dis leur bien que s'ils ne se rendent pas, ce bébé sera l'unique survivant de ce camp. Entendu ?
-Oui...

Shigurui savait alors, et c'était son espoir, que voyant l'horreur et le traumatisme dans les yeux de Tenshi, les résidents du camp sauraient qu'il ne plaisantait définitivement pas et qu'ils se rendraient sans résistance. Il misait sur une idée bien connue de ceux de sa condition ; celle que la peur était contagieuse.

Au camp, bien avant l'interception des capons par Shigurui, on ne pleurait déjà plus les fuyards. La priorité rappelait à l'ordre chacun des décisionnaires et la question de ce qu'il fallait faire ou non demeurait. Ceux de la foule qui étaient restés l'avaient fait soit par confiance aveugle en Bohémon, soit parce qu'ils attendaient leurs enfants pas encore rentrés. Sachant que Batzu et un shinobi étaient partis les chercher, Bohémon, Fujisawa, et surtout Zö qui était directement concerné, parvinrent à les convaincre de patienter jusqu'à notre retour. La réunion avait alors repris dans le baraquement, mais cette fois en présence de Zö, qui avait étonné tout le monde par ses talents de shinobi. Poser des questions était délicate, pour Fujisawa et Kumiko qui ne connaissaient certainement pas le vieux bonhomme, mais pour Bohémon et Luca, le choc était rude. Voilà des années que Zö leur avait caché ce qu'il était en réalité. Si comme pour Fujisawa et Kumiko, cela soulageait Bohémon que Zö était le possesseur d'un des chakras que j'avais ressentis, cela ne disait rien sur les trois autres. C'est en évoquant ce sujet, que Bohémon, de nouveau assis au fauteuil de son bureau, espérait obtenir des réponses. Une manière détournée qui ne tromperait pas Zö, mais qui avait le mérite d'être moins abrupte.
-Jill aussi ? Demandait le lépreux à Zö.
-Non. Lui répondit-il simplement. Je ne lui ai jamais enseigné le maniement de son chakra.
-Shino avait détecté quatre chakras dans le camp, hormis le sien et ceux de Fujisawa et Kumiko. Tu es l'un de ceux-là. Si Jill n'en développe pas assez pour être détectée, qui sont les trois autres ?
-Je l'ignore. Répondit-il encore simplement.
-Cela fait déjà un moment que Shino et Batzu sont partis d'ailleurs. S'ils tardent, nous n'aurons jamais le temps d'organiser un départ de tous les résidents du camp. Intervenait dans la conversation Fujisawa.
-Je continue de penser qu'il faut organiser une défense. Juste au cas où. Enchaînait Kumiko avec plus de véhémences.


Bohémon, le menton reposé sur les mains jointes hésitait, mais face à l'évidence, il semblait à chacune des personnes présentes qu'il dut se résigner à accepter cette dernière solution. Monter la défense du camp en si peu de temps exigeait une prouesse dont il ne pensait pas capable sa milice, pourtant, Batzu et moi tardant toujours, il ne voyait pas d'autres solutions. Sur le visage de Thérèse, on lisait une inquiétude qui grandissait à la hauteur du silence qu'affligeait Bohémon à l'assemblée. Les yeux du lépreux se tournèrent alors vers les shinobis Fujisawa et Kumiko.
-Pouvons-nous repousser la division blanche, si ce sont vraiment ses shinobis qu'il y a au sud ?
-Si ce sont vraiment eux, on ne va pas tarder à le savoir. Lui répondait fatalement Fujisawa.
-Toi qui aimes jouer, ce jeu-là, c'est du sérieux... Commentait Kumiko.
-C'est un jeu qui conviendrait plus à Shino. Lui rétorquait-il.
-Je vous aiderais, je suis vieux, mais j'ai encore de la ressource. Intervenait Zö.
Thérèse qui contenait la tourmente et faisait pourtant bonne figure se fixait sur les deux shinobis.
-Comment vous remercier ? Vous pourriez partir maintenant tous les deux... Comment vous remercier ?
-La division blanche est notre ennemie de toute façon. Les événements font qu'au final, un jour ou l'autre nous aurions eu à les affronter. Aujourd'hui ou demain... Lui répondait en souriant Kumiko. D'ailleurs Monsieur Zö, quel type de shinobi êtes-vous ? Cela nous serait utile de le savoir pour préparer notre défense.
-Je suis adepte du genjutsu, versé dans l'art du doton.
-Je sais que vous devez penser à votre petite fille, lui soufflait Fujisawa. Mais je vais avoir besoin que vous restiez concentré.
-Batzu est avec elle, je garde confiance. Lui répondit-il.


Mais Batzu n'était pas seul, j'étais avec lui, et nous avions maintenant le jeune Joshua pour nous épauler. Somme toute, de notre côté, la situation n'avait pas évolué d'un pouce. Nous trois protégions Sibile et Jill en faisant fermement face aux trois shinobis de la division blanche qui imposaient autant le mutisme que nous le faisions depuis déjà quelques secondes. Nous nous regardions, nous nous jaugions. En moi-même, je voyais déjà un désavantage, eux étaient dans la même équipe et sûrement depuis longtemps, ce qui n'était pas notre cas. Très bassement, presque inaudible, Joshua nous fournissait alors quelques précieuses informations. Outre qu'entendre quelqu'un parler et avec confiance de surcroît pouvait nous détendre, c'était avec une certaines joie que j'accueillais toutes ces informations pour ma part alors que Batzu, les dents serrées dans sa grosse barbe fixait le shinobi à l'arc bandé, déjà prêt à lui bondir dessus.
-Le boss est un Akuzu. Son corps tout entier réagit comme du caoutchouc. L'autre utilise le sang et celui à l'arc, je ne le connais pas, mais je peux vous dire aussi qu'aucun d'entre eux n'a du suiton.
-Tu es l'un des shinobis que j'ai sentis. Comment ça se fait que tu connais ces hommes ? Demandais-je à Joshua calmement sans quitter les impériaux du regard.
-C'est compliqué... Me répondait-il alors.

Je sentis une fébrilité, une gêne, une honte dans son timbre à ce moment, me laissant entrevoir un mensonge à demi-mot, par une vérité qu'il souhaita assourdir. Le mensonge souligna et aggrava le tort qu'il espérait cacher. Ce passé que j'ignorais ne m'aurait pas choqué s'il avait osé me le dire simplement. Mais l'imagination faisait sa besogne. Je n'avais pas le temps ni les moyens de me pencher sérieusement sur ce qu'il cherchait à taire, mais cela ne mettait pas en confiance. Bien sûr, je comprenais par là qu'il avait quelque chose à voir avec la division blanche, mais jusqu'à quel point ? N'étais-je pas, comme lui, dans ce cas ?...
-Vous causez trop, nous coupait lourdement Batzu. On devrait cogner à deux alors qu'un autre accompagnerait Sibile et Jill.

Un rictus m'échappait. Il était décidément du genre à agiter l'épée et réfléchir seulement après. Cependant, pour cette fois, je ne pouvais pas lui donner tort. Joshua n'y répondit point. Sa pensée était accaparée par la faute qu'il se croyait avoir commise, en fuyant alors que mon chakra le détectait. Il cherchait déjà sa responsabilité dans le drame que nous vivions, alors que si j'avais su ce qui avait motivé sa fuite, je ne me serais pas sentis coupable moi-même. Sentir sa responsabilité, c'est sagesse, mais penser qu'on peut l'assumer seul ne serait qu'une déraison. Un regard extérieur trouvera la culpabilité bien ailleurs que là où nous la jugerions.
J'allais faire part à Batzu de mon approbation, mais je n'en eus guère le temps. Nous avions en effet beaucoup trop tardé, et un nouvel invité entrait dans la danse. La nuit n'était pas encore tombée, quoique proche, ce qui me permettait, plus loin de là derrière nos ennemis, de voir arriver un homme que je connaissais. Accompagné lui-même de trois shinobis. Je souriais beaucoup moins, je n'étais plus confiant et pourtant, je bouillonnais. Nos adversaires s'en trouvaient ravivés, non pas seulement à cause d'un apport de soutien significatif, mais parce que la personne qui parvenait à nous en courant, c'était Serafi, le chef des larmes de sang. Cela ne déclenchait pas un assaut, mais j'abaissais ma faux, la tenant plus fermement en main. Batzu remarqua dans mon regard et celui de Joshua une inquiétude plus grande encore que précédemment.

Serafi, un homme au masque de larme de sang, mais bien plus impressionnant que ses homologues. Une voix gutturale qui ne souffrait d'aucune demi-mesure, qui s'affirmait à chaque son comme une force tranquille. Sa stature s'affirmait avec tout autant de hauteur, car bien que de taille normale, ses larges épaules en imposaient plus que son élancement. Je le reconnaissais à sa tenue, et à sa façon de se mouvoir. Quand il atteignit ses compagnons, ceux-ci ne manquèrent pas de le saluer docilement, comme des chiens s'écartent à l'approche du maître, mais il ne répondit pas à leurs politesses. Il appréciait la scène, la mort d'un de ses hommes, les cadavres d'enfants qui parsemaient le lieu, puis portait son regard directement sur moi, ce qui ne m'étonnait pas. Joshua le connaissait de réputation et de visu, mais lui et Serafi ne s'était jamais parlé. Ce n'était pas mon cas.
-Katerik. Me dit-il gravement. Te trouver, là, face à nous. Tu travailles pour la cité de la joie maintenant ?
-Non, je suis en vacances. Lui répondais-je dédaigneusement.


Joshua ouvrit grand les yeux sur moi tandis que Batzu ne saisissait guère ce qui se passait. "C'est toi Katerik ?!" S'étonna-t-il à la nouvelle et il ne fut pas le seul. Je ne lui répondis pas, concentré que j'étais sur Serafi. Les autres confédérés claniques, ceux qui accompagnaient Serafi et ceux déjà présents étaient tout aussi surpris. Serafi dressa la tête plus haute encore quand je lui répondis. Je faisais l'arrogant, mais intérieurement, je n'en menais pas large. Je savais que s'ils nous bondissaient tous dessus, s'en était fini de nous.
-Repartez. Vous trois, et vos deux femelles civiles. De toute façon vous serez tous mort d'ici demain, et je ne veux pas sacrifier plus d'hommes que nécessaires.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:51
Un soulagement prenait au cœur Joshua, Sibile et Jill qui assistaient à la scène de leur côté. Batzu en revanche plissait un regard violent sur Serafi en s'efforçant de ne rien dire de plus. Il nous laissait repartir au campement, mais pas dupe, je savais que c'était parce que celui-ci était déjà encerclé, ou n'allait vraiment plus tarder à l'être.
-Je vais rester surveiller que les autres puissent partir tranquillement. Disais-je en souriant exagérément.
Serafi abaissait le visage sur moi, et je pouvais alors voir, même à cette distance, qu'il n'appréciait pas l'initiative.
-Tu crois que je vous frapperais dans le dos ? Me lançait-il comme un défis.
-On ne sait jamais, ta clique n'est pas la plus honorable que je connaisse.

"Mais il est fou !" Pensait fortement Joshua, tandis que Batzu se sentait galvanisé par la confiance que j'opposais à l'arrogance de Serafi.
-Dans ce cas... Mes hommes vont repartir. En même temps que ceux-là. Annonçait-il en levant à peine le doigt vers Batzu, Joshua, Sibile et Jill. Mais toi et moi, nous allons rester. Shigurui ordonnait que l'on ne te touchât pas quand tu as rompu le contrat qui te liait à nous. Mais maintenant, tu es un ennemi, régler ce vieux contentieux lui fera plaisir, je pense. Il aura au moins une tête à donner à nos démons ce soir.

Ma faux s'abaissait plus basse encore alors que je me dressais sur moi-même, et je lui souriais les dents aussi serrées que ma voix se gravissait. Joshua n'en croyait pas ses oreilles, et Batzu ne bougeait pas d'un poil, espérant pouvoir rester avec moi sans doute. Sibile sortait enfin, avec Jill à la main, de derrière son rocher.
-Mais les enfants ?! S'écriait-elle en faisant allusion aux cadavres.
-Pour honorer les morts, il faut être vivant. Lui répondais-je en levant le ton. Partez ! Concluais-je enfin.

Nous ne pouvions nous attarder sur des cadavres. Exiger de tous les emporter n'était tout simplement pas raisonnable. Batzu empoignait plus fortement son arme, et voyant cela, je retenais difficilement mon ordonnance au timbre.
-Toi aussi Batzu.
-Je ne t'obéis pas à toi shinobi. Me répliquait-il sèchement.
-Moi personne ne m'attend là-bas. Et toi ? Tentais-je de le convaincre.

Batzu souriait alors, et me gratifia d'un "t'es un vraiment un malade" tandis qu'il se retournait vers Sibile et Jill. Les hommes de Serafi, commencèrent à en faire autant, chacun ne pouvant s'empêcher de passer l’œil par-dessus l'épaule "juste au cas..."
Après quelques bons mètres pour nous séparer, Batzu se retournait une dernière fois vers moi, qui ne lui offrais plus que mon dos. "Crève pas ! C'est moi qui dois te tuer le shinobi !" Me lança-t-il. J'en lâchais un sourire malgré moi. Puis paisiblement, tous finirent par sortir de notre chan de vision.
-Tu te sacrifies pour rien, tu sais... Un shinobi de pure lignée qui va mourir pour des civils. Tu fais honte aux nôtres.
-Même les démons peuvent avoir de l'honneur. La preuve, tu es là et tu as choisi de l'être seul. Tu vas m'envoyer tes bestioles ?
-Les démons invoqués seront inutiles contre toi. Je te prépare d'autres surprises.


Ce combat serait peut-être mon dernier, et bien qu'il s'avérât franchement inutile, je n'avais pu retenir mes hideuses passions sanglantes. La bête en moi réclamait du sang, et qui fut mieux choisi alors que cet homme, ce Momoru, capable des pires ignominies que l'homme pouvait procréer. J'avais quitté la division blanche parce que je ne supportais pas leurs agissements sur les civils. Dès que je l'ai découvert, j'ai rompu mon contrat. Cela ne faisait pourtant pas de moi un ange. Je ne me battais pas en cet instant pour protéger un camp, une femme, un idéal... Je me battais parce que j'en avais besoin, mon sang le réclamait, mon âme et mon cœur le commandaient, j'en avais besoin, de la semer, la mort, de m'y confronter. Serafi n'était qu'un prétexte. Je me suis toujours considéré comme un guerrier, je suis né pour ça, hélas en chemin, j'ai oublié mon honneur, mais fort heureusement qui ne peut vivre dans l'honneur peut mourir dans l'honneur.
-Tuer ne m'a jamais dérangé. Mais je dois avouer qu'avec toi, je vais prendre un certain plaisir, lui disais-je en commençant à m'étirer.
-Les hommes t'ont regardé avec admiration pour ça. Le guerrier cendré, qui tue si facilement qu'on le confondrait avec la faucheuse. Tu n'as donc jamais assouvi ton appétit ?
-L'appétit de la mort est insatiable. Toi qui invoques des démons tu l'ignores donc ? Que si la vie regarde la mort avec effroi ; la mort regarde la vie avec appétit ?
-J'espère que tu es vraiment un démon, comme ça si tu meurs, je pourrais peut-être t'invoquer directement des enfers.
-Les vrais démons ne se soumettent pas aux mortels. On ne pactise pas avec des inférieurs.
-C'est ce que nous allons voir. T'affronter, je dois te le dire, est un honneur, et je vais y prendre autant de plaisir que toi.


Une odeur de nacre et d'honneur environna jusqu'à la moindre parcelle d'air du futur théâtre de notre combat. En dévoilant les maux de mon âme, j'avais atteint celle de mon futur adversaire. Sa réponse suivit son inclination et elle fut positive. Nous nous découvrîmes une soudaine passion pour la gloire et la paix. Sans être impressionné, il n'y avait pas de spectateur autour de nous aujourd'hui. Il n'y avait que lui et moi. Nul ne savait ce qui se tramait pour sauvegarder leur destin à ce moment....
Le respect était de mise et sa réponse solennelle me fit entendre une expression des plus familières. Le vent nous glaça et le silence rompit toute conversation. Les oiseaux fuirent le désert à haut vol et les animaux s'écartaient de la montagne en hâte. Comme si leur instinct leur annonça le drame qui s'annonçait.
L'heure n'était de toute façon plus aux paroles, mais aux actes. Son regard me le fit comprendre. Et tandis qu'il se saisissait de kunaïs, je me permis de lui lancer une ultime marque de gratitude...
-Merci...

Ses kunaïs fusèrent sur moi avec arrogance. Se doutait-il sûrement que cela ne m'inquiéterait aucunement. Je levais alors la main simplement et fis jaillir de mes doigts des senbon de cendre qui vinrent heurter ses armes de jet pour les dévier. Mais cela fut suivi par une technique doton. Je me doutais qu'il s'agît d'une attaque qui lui permettrait de me prendre au corps-à-corps. Je ne réfléchis pas longtemps, le temps me dire "bien, c'est ainsi que nous commencerons". Un souffle sur la terre pour m'empêcher d'être aveuglé et le voilà qui jaillit hors de ma technique pour en découdre aux poings et pieds contre moi et ma faux. Le bref instant où nos regards se fixèrent l'un dans l'autre fut d'une intensité à briser les miroirs d'illusion. Mes iris bleuâtres scintillèrent avant même que nos coups commencent à fuser puis le premier ton fut donné.

Nous étions comme dans un ballet dansant, où tout était orchestré pour que nul ne puisse prendre le pas sur l'autre. Sans chakra, sans technique, cela paraissait être un entraînement de combinaison prévu à l'avance, dont la maîtrise des pas et des coups s’entrechoquant avec une prévisibilité et une rapidité telle que la beauté du combat reflétait le talent de chacun. il était rapide et puissant, je sentais mes os vibrer à chaque parade et moi, j'étais souple et adaptable, contournant comme je pouvais sur l'instant ses coups. Il était clair, que nous ne trouverions pas d'issu si nous ne mettions pas un cran au-dessus de la difficulté. J'attendis donc dans ce cercle de terre qu'était le lieu de notre combat le moment propice. Puis ce fut un saut accompagné d'un silence. J'aurais presque pu voir au ralenti cette scène épique. Je me retrouvais dans les airs, légèrement au-dessus de lui, mais toujours à une proximité très dangereuse. Je m'étais servis de l'un de ses coups et d'une impulsion fûton pour décoller. Je n'attendais pas grand-chose du futur enchaînement qui allait suivre. Mais je lui signifiais là qu'il fallait se montrer plus hargneux. Un coup de pied circulaire suivit mon saut. Le Konoha Dai Senpu et tandis que je tournais, je me saisissais de mon sabre encore dans son fourreau pour lui décocher un coup bien de chez moi. L'art de dégainer le sabre allait être le véritable tintement de cloche annonçant un combat rude. Puisque du sabre dégainé avec violence sur sa personne suivit le fourreau pour le cogner juste après le lancer de ma faux. La vitesse d’exécution était parfaite, le tout étant sous l'impulsion de la rotation du coup de pied. Mais nul doute qu'elle serait en mesure de contrer cette petite mise en bouche. J'allais de toute façon bientôt retrouver le sol pour atterrir et me préparer à un contre qui serait sans doute aussi violent que le mien.

Quel adversaire grandiose j'avais là. Nous n'en étions qu'à l’échauffement et pourtant, je sentais déjà mon corps et mon âme vibrer comme ce ne fut plus le cas depuis longtemps. Hoo oui Serafi, tu aurais dû attendre d'avoir réveillé un guerrier qui se trouvait en mal d'adversaire digne de lui redonner la passion du sang. L'espoir de paix ou d'honneur devenait maintenant secondaire. Nous n'étions plus que deux adversaires s’affrontant pour le plaisir du sang.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:54
Chapitre 3 : Le ballet des lucioles

Un bref instant de complicité, cela pouvait être annoncé ainsi. Mon adversaire ne se fit pas prier pour me rappeler, comme je m'y attendais, qu'il n'était pas n'importe qui. Je découvrais en même temps que ses actions la fureur d'un kinnegan parfaitement maîtrisé. C'était là, la grande surprise de le voir le posséder, mais aussi, de souvenir si loin pouvait-il remonter, aucun des adversaires possédant ce dojutsu n'avait une réactivité aussi poussée. Je n'avais hélas pas le temps de savoir comment il avait bien pu se le procurer...

Mon premier coup de pied fut évité sans difficulté puis dans mon élan je vis Serafi disparaître littéralement sous mes yeux, mon sabre, ma faux et son fourreau ne fendant dans leurs sillages qu'un nuage de poussière. J'étais toujours en lévitation à ce moment, et même mon regard eut du mal à entrevoir cette soudaine virée en arrière. Ce fut un bruit sourd qu'il laissa devant moi, rien de plus. Et force est d'admettre qu'il avait sans doute compris que ce combat allait être un peu plus robuste. Ma pensée se fit précise et alors que mon arme ne me servit qu'à frapper du vent, je lâchais une simple pensée "impressionnant". Je compris alors, qu'il était manifestement plus talentueux que moi aux corps-à-corps, car j'étais incapable d'atteindre une telle vitesse sans un minimum de préparation. Lui, il n'avait qu'à le décider pour que cela soit effectif.

Cependant, il y eu quelque chose qu'il n'avait sans doute pas remarquée, mais avant cela, tandis qu'il esquivait mes attaques, en utilisant des techniques d'espace-temps, l'image se troubla pour moi. L'univers dans lequel nous nous trouvions devenait en quelque sorte instable, et sa logique ne se maintenait plus que difficilement. Je savais pourquoi personnellement, mais lui, sans doute pas. Il mit alors fin à mon stratagème sans même s'en rendre compte. J'aurais pu mettre cela sur le compte de la chance, mais dans un monde comme le nôtre, la chance fait partie du talent, c'est ainsi que le destin le choisit. Son lancé de kunaï en ouvrant un portail d'espace-temps, une stratégie absolument exceptionnelle. Mais tandis que je vis ces portails s'ouvrirent, tout autour de nous devint tremblant, instable, les rochers se pliaient, les sons se mélangeaient et quand le kunaï sortit du deuxième portail, il était trop tard. Le genjutsu était brisé. Tout autour de nous, se tordit et comme un miroir se brisa littéralement sous nos yeux pour laisser reparaître ce qui était réel.

Sa technique avait échoué. Puisque rien de tout cela n'était réel. Nous nous retrouvions de nouveau l'un en face de l'autre, comme lorsque notre affrontement aux poings avait seulement commencé. Tout l'épuisement et la consommation de chakra devinrent effectifs d'un seul coup et cela me fit même trembler des jambes. Alors que nous n'étions à ce moment qu'à moins d'un mètre l'un de l'autre, je bondis vers l’arrière pour m'éloigner de lui. Je me trouvais alors à environ cinq mètres de Serafi. Soupirant, bien que sans tomber dans l'incapacité, je me devais alors de lui expliquer ce qu'il venait de se passer.
Cela méritait un petit retour en arrière, car pour lui, tout cela devait être tout bonnement impossible. Et avec explication, il saurait sûrement comprendre quand tout cela avait commencé.

Le temps de retrouver chacun notre souffle et de se remettre des effets secondaires du genjutsu et je m'adressais à lui le plus simplement possible. Je serais sûrement mort si je n'avais pas utilisé ce stratagème, rien que par cela, il y eu une sorte d'admiration dans mon intonation, il allait aussi désormais comprendre quelle était ma véritable vocation, où se trouvait la véritable menace. Mon regard était toujours celui qu'il avait découvert au début de notre rencontre, cependant, le fait que mon arme était revenu dans son fourreau et à ma ceinture, plus le fait que le monde qui nous entourait venait de s'effondrer devait lui laisser entendre une partie de ce que j'allais lui expliquer.

-Tu es un shinobi exceptionnel. Cela ne fait aucun doute. J’espérais que mon petit stratagème durerait plus longtemps. Je pense que tes techniques d'espace-temps ont dû briser le genjutsu en créant des sortes de... D'altérations de sa logique. Je ne saurais pas l'expliquer. Tout ce que nous venons de faire, dès le moment où nos poings et pieds se sont croisés, n'était qu'illusion... L'Udaï. Tu es le premier à l'avoir brisé aussi facilement, je te félicite. Ce que tu ressens, c'est l'accumulation de la fatigue et de la consommation de chakra qui t'a frappé d'un coup quand le genjutsu est tombé. En réalité, il ne s'est écoulé qu'une seconde, depuis que tu m'as atteint au corps-à-corps. Serafi, tu es l'adversaire que je ne pouvais espérer que dans mes songes... Je peux t'affirmer maintenant que quelle que soit l'issue de ce combat. Je suis honoré d'avoir pu en découdre avec toi. Mais il est temps de passer aux choses plus sérieuses.

Reprenant son souffle et ses esprits, à cela, Serafi ne fit que se dresser fièrement et ne me répondit rien. Cette fois, nous étions bien dans le réel. À cinq mètres l'un de l'autre, désormais toute action serait sans doute irréversible. Je défaisais les brassards de mon armure. Laissant ainsi apparaître les sceaux ornant l'intérieur de mes poignets. C'était sans doute le signe que ce qui allait suivre allait être d'une intensité incomparable. Je laissais tomber au sol mes deux morceaux d'armure cendrée et me fixai dans une posture aussi déterminée que résolue. Mes yeux se fermèrent un instant. À fin d'apprécier le vent et le froid de la soirée qui s'installait. Malheureusement, même les yeux fermés, je voyais... Ironie plus funeste qu'il y paraissait. Le silence suivit. Et tandis que je rouvrais les yeux face à lui, je lui adressais une dernière fois la parole avant d'agir, mon ton se fit plus menaçant, mon regard lui aussi avait changé, plus guerrier qu'au début. Il me faisait vibrer et galvanisait mon âme d'une façon que je ne saurais pas décrire, cela devait pourtant se retranscrire dans mon regard et dans mon ton aussi respectueux que décisif.
-Je vais pouvoir déployer toute la puissance dont je dispose avec toi. Vois, et fais-moi frissonner.
-Je ne te répondrai que la même chose, Katerik.


Je n'avais pas crié. Je n'avais pas menacé, tout était intérieur. Je formais alors un unique sceau et deux clones de cendre apparurent en l'air de chacun de mes côtés. Il ne lévitait pas. C'était pour réaliser quelque chose que je n'avais pas eu employé depuis bien longtemps. La rapidité d'exécution était parfaite. Les deux clones à peine créés n'avaient même pas encore touché le sol qu'ils avaient déjà commencés à composer des mudras en même temps que moi. Cette technique était une formation spéciale, dont Serafi pourrait sûrement se sortir, mais avec certainement plus de difficulté que lors de notre affrontement précédent. De son côté, il devait voir trois "moi" alignés composant des sceaux en même temps. Puis une fois les sceaux rapidement terminés. Nous trois dans une harmonie parfaite prononcèrent le nom de la technique employé par chacun.
-Kasumi Enbe !
-Goukakyuu !
-Ninpo Kokuyou !


Le mur de flamme infernal. C'était le nom de cette formation. Mon clone de droite crachait un brouillard inflammable tandis que celui de gauche crachait un liquide inflammable. Les deux clones s'arrangeant pour le cracher sur une longueur fine au lieu d'un large périmètre.
En face de moi, les deux substances se croisaient légèrement pour que je puisse, moi au centre avec ma boule de feu faisant trois fois la taille d'un homme, la projeter en enflammant le tout au passage. La combinaison des trois techniques créait un mur de flamme d'environ quatre mètres de long sur trois de hauteur, tandis que la boule de feu après avoir tout enflammé jaillissait du mur de flammes pour foncer sur l'adversaire. Cette formation très coûteuse en chakra avait l'avantage de me protéger modérément de face tout en attaquant l'adversaire qui ne pouvait donc voir qu'un mur de flamme d'où sortirait une boule de feu. La réalisation de la formation prenait à peu près entre cinq et dix secondes, entre le temps d'invoquer les deux clones et de faire le reste.

Seulement, même dans le désert, cela faisait aussi des dégâts collatéraux, heureusement nous étions encore dans l'espace vide, le mur de flamme ne ferait donc pas flamber le peu de végétation qu'il y avait, mais pour la boule, c'était une autre histoire. Il s'agissait vraiment de donner le ton avec une technique assez impressionnante et surtout très dangereuse, Serafi méritait sans le moindre doute que j’use d'un tel niveau de toute façon.
De plus, depuis mes derniers entraînements, heureusement pour moi. Le mur de flamme ne me cachait pas mon adversaire. Je pouvais donc apprécier sa réaction en m'en délecter. Car oui, au-delà de la puissance destructrice, que c'était beau... Détendu, après avoir lancé cette boule, alors que je paraissais sans doute blasé, j'étais en réalité en joie. La seule difficulté de ma psyché, désormais, était de ne pas perdre le contrôle de moi-même, que la violence et la bestialité ne prennent pas le pas sur le plaisir du combat....

L'enfer était en marche devant moi. Et de l'homme que j'étais naquit le démon qui sommeillait. L'adversaire qui s'opposait à moi me fit sombrer dans une folie meurtrière finalement, j'étais vraiment incapable de me maîtriser... Mon regard brilla de toute son intensité tandis que je me délectais du spectacle. Les flammes embrasaient le sol et l'air devint empoisonné. Mais Serafi fit face avec un courage et une noblesse comme on en voit qu'une seule fois dans une vie. Je m'attendais à une technique puissante pour repousser le tout, je m'attendais à une esquive digne de la vitesse surnaturelle réputée du kinnengan. Mais il n'en fit rien. Je vis à travers les flammes un mur de terre se former. Un mur ridicule comparé à la puissance de la technique katon. J'avais peine à y croire et redressant ma tête pour ouvrir grand mes yeux, mes clones eux-mêmes firent un pas de recul tandis que je voyais le Momoru se lancer corps et âme dans les flammes pour m'atteindre. Quelle fureur, quelle passion ! Quelle gloire ! Je devins totalement épris de ce guerrier qui me fit définitivement retrouver le goût du combat. Il bravait les flammes au péril de sa vie, et nul doute qu'à son arrivée face à moi, son corps fumant et brûlé partiellement le rendit plus épique que jamais. Mes sens avaient pourtant vu la trajectoire, j'aurais pu anticiper son mouvement, mais je ne le pouvais pas, j'avais envie de sentir son impact, pourquoi je l'ignorais. Quelque chose venant de lui se répercutait sur moi avec ténacité.

Je le vis alors jaillir de mes flammes pour me décocher plusieurs coups d'une rare violence au ventre. Nos yeux se fixèrent à nouveau et je voulus lui faire découvrir toute la hargne qui m'habita soudainement. Ses coups furent si puissants, qu'ils brisèrent mon armure cendrée. Celle-ci se fissurant sous leurs impacts. Moi, je tombais à genoux devant lui, crachant au passage quelques gouttes de sang au sol. Mes clones ne bougèrent pas, ils étaient comme tétanisés par la scène et se trouvaient désormais le regard effrayé devant ce guerrier suicidaire. Je pouvais dès lors ressentir les effets de sa technique aussi fourbe qu'efficace. Le temps pour moi devenait effectivement plus long. Il pouvait me porter maintenant le coup fatal, mes clones n'auraient fait que la ralentir si je le leur ordonnais, mais il y eu un côté plus mystique en cet instant. Ce même côté qui me poussa à agir autrement. Ce n'était plus une question de paix, ce combat devait devenir une légende, il devait rester gravé à jamais dans les mémoires, je voulais marquer même la terre de ce qui se produisait ici. À genoux donc, je lâchais quelques mots d'une voix tremblante de fureur. Comme si une sourde colère difficilement tenable me compressait jusque dans le cœur.
-As-tu déjà vu la mort Serafi ? C'est moi ! La mort ! Sokubaku Jigoku !
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 6:57
Serafi, l’ignorait, mais en me frappant si rapidement à plusieurs reprises, il m'avait offert un contact physique assez prolongé pour que je puisse utiliser l'un de mes genjutsu les plus terribles. Je n'avais qu'un seul sceau à former, alors, même avec sa technique, cela allait rapidement faire effet. Je ne connaissais que trop les effets de ce genjutsu par cœur, donc en relevant le visage transpirant et en proie à une aliénation démesurée, je pouvais voir son flux de chakra être troublé à un point tel qu'il m'était même difficile de pouvoir le distinguer précisément. La douleur qui devait l'emporter devait être terrible. Je me redressais alors à une vitesse déconcertante d'indolence, toujours à cause de sa technique que j'avais prise de plein fouet. Je n'avais pas de temps à perdre, cependant, je savais que ce genjutsu était quasiment incontrôlable bien que limité dans le temps. Je pris donc tout le loisir de lui faire face en me tenant totalement droit devant lui, lui offrant mon regard plus animal qu'humain et mes lèvres ruisselantes de sang. Et tout en préparant ma prochaine attaque avec une lenteur abusive, je lui parlais le plus simplement du monde encore, bien que cette fois-ci, mon timbre était plus grave, plus acerbe et passionné.
-De la part des civils.

Le coup-de-poing chargé allait frapper de plein fouet le Momoru. Je faisais durer notre plaisir à chacun. Il y avait aussi une volonté d'économiser le chakra et l'influence du temps qui m'était imparti à cause de sa technique dans tout cela évidemment. J'avais chargé mon poing grâce à un technique futon, lui offrant une vitesse normalement cinq fois supérieure à la normale, et usant de mes capacités sensorielles, je frappais le centre de la poitrine pour l'empêcher de malaxer son chakra à cet endroit, et étant un centre important, l'empêcher de malaxer son chakra pendant un certain temps, ou du moins lui rendre cela plus difficile. L'impact fut d'une violence inouïe. Puisqu'il était assez puissant pour le projeté vers l'arrière comme un ballon de foot. Heureusement, pour moi-même peu à peu, je sentais les effets de sa technique se dissiper. Il était pourtant évident qu'il n'était pas vaincu par ce coup si dérisoire.

L'air prenait feu peu à peu, mais je ne m'en souciais absolument pas. J'envoyais d'abord mes deux clones vers le Momoru pour l'occuper le temps que je puisse préparer ma seconde formation. Ils ne lui feraient sûrement pas face bien longtemps, mais l'occuperaient assez et c'est tout ce que j'attendais d'eux désormais. Ils foncèrent donc à toute allure vers lui, et moi, les lèvres dégoulinant de sang, je composais quelques sceaux pour ensuite frapper le sol de mes mains. J'étais déjà un peu mal au point, et pourtant, je me trouvais plus déterminé que jamais. Lorsque je prononçais ma technique. Je savais que j'allais créer là l'enfer sur terre. Même si cela ne serait que sur une toute petite parcelle. Ce ne fut qu'un murmure à peine audible, pourtant toute l'intensité de cette technique se ressentit comme une prophétie désastreuse.
-Jimen'Jigoku...

Petit à petit, tout autour de moi émanait du sol sur environ cent mètres carré un parterre de cendre incandescente. Celle-ci imprégna bientôt notre atmosphère et forma une sorte de dôme aux contours irrégulier dont j’étais le centre. Dans ce dôme de cendre incandescente, l'air n'était plus réellement respirable, c'était comme pénétrer dans une vision apocalyptique où la chaleur était partout. Où la terre et l'air étaient faite de braise. Il ne s'élevait pas sur une grande hauteur, une dizaine de mètres à peine, mais cela était suffisant. De l'extérieur, les oiseaux fuirent d'encore plus loin le désert en hâte et manifestant par leurs sons acerbes comme des fous leurs peurs. Les animaux aussi quittèrent à grande course les alentours de la zone de combat. Ce fut comme un avènement terrible, où la folie des hommes s'était subitement retrouvé dans le combat entre deux guerriers maudits. Le Momoru et moi-même n'étions que le reflet des années de guerre et de haine accumulés, et c'était par notre sang que nous tentions d'y mettre fin. Mais tout cela semblait nous échapper en vérité, tout cela paraissait n'être devenu que secondaire, comme si nous étions dépassés par notre propre destin qui pesant si lourdement sur nos épaules, nous faisait perdre toutes raisons....

Je croisais maintenant les bras. Totalement à l'aise dans mon environnement infernal. Sûrement pourvut d'une arrogance déplacée, mais que m'importait, ce combat allait peut-être être le dernier ma triste vie. La formation du nuage infernal était en marche. Car toute cette cendre était sous mon contrôle dans un unique but. Former des bras de cendre au hasard dans celui-ci. Quiconque tenterait d'y pénétrer se risquerait aux bras infernaux. Je fermais les yeux alors. À fin de me concentrer totalement sur mon environnement. Mes capacités sensorielles me permettaient une vision à 358 degrés, soit une vision quasi parfaite de l'ensemble. Plus la prévisibilité des mouvements dûs aux émanations de chaleur que produisait un corps. Jamais encore, je n'avais pu tester en combat ce stratagème, J'attendais maintenant du Momoru quelque chose d'inoubliable.

Sur le chemin du camp, Batzu, Joshua et Sibile s'en allèrent relativement vite jusqu'aux portes qui leur donneraient leur salut. Ils se sentaient, particulièrement Joshua et Sibile, soulagés d'être enfin sortis de leurs guêpiers. Jill aussi se sentait maintenant plus en sécurité, mais elle souffrait pour sa part d'une autre inquiétude.

Batzu tournait ses pensées plutôt vers moi, il était étrangement inquiet à l'idée que je me fasse abattre. Songeant en lui-même, qu'il considérait ma décision comme un sacrifice pour leur survie et pour la communauté de la cité de la joie, alors que ce n'était que mes instincts qui avaient pris le pas sur ma raison. Je me battais comme un enfant jouait à la balle, et eux trouvaient cela tragique. Je pense que si j'avais su cela, en ce moment même, cela ne m'aurait pas fait rire.

Joshua avait confiance, en partie, car lorsqu'il apprenait qui j'étais, il avait l'espoir que je sorte vivant de ce combat. Connaissant une part de ma réputation et de mes actes que la division blanche avait faite tourné parmi les siens, il considérait que cela m'était possible. Cependant, une chose reliait chacune de ses trois personnes alors qu'elles fuyaient silencieusement mon champ de bataille. La culpabilité. Batzu pour m'avoir laissé à l'arrière, sans participer à l'affrontement, et de n'avoir pu arriver à temps pour sauver tous les enfants. Joshua et Sibile se sentaient coupables pour les enfants qui les avaient suivis, et qu'ils n'avaient pu ramener ni vivant ni mort, et enfin pour m'avoir laissé à l'arrière. Jill culpabilisait enfin pour tous ses camarades morts laissés derrière, parce qu'elle s'était laissé emporter dans une aventure plus dangereuse qu'elle ne l'aurait jamais supposé, avec par-dessus cela, la crainte que le preux chevalier qu'elle idéalisait, moi, ne revienne pas.

C'est tout naturellement donc, que c'était dans un profond silence, que tous avançaient, chacun avec sa voix enfermée, qui n'osait dépasser l'horizon de la pensée. Sibile tenait la main de Joshua et Batzu portait Jill dans ses bras. Ils ne pouvaient se regarder, pas plus que se parler tandis qu'ils avançaient rapidement dans le sable jusqu'au camp. J'aurais voulu alors je le sais, leur crier de ne pas pleurer si c'était ce qui risquait d'arriver. Que personne parmi eux, pour quelques raisons que ce fut, ne pouvait se sentir coupable de quoi que ce soit. Qui était coupable de tout cela ? Si l'on se résignait à déclarer les responsabilités de chacun comme de coutume, qui méritait parmi nous tous d'être punis ? Bohémon pour avoir pillé des convois afin de nourrir ses résidents ? Moi en détectant le chakra de Joshua ? Jill en suivant par inquiétude une femme qu'elle aimait ? La division blanche pour être empreinte d'une idéologie eugéniste ? Qui était coupable ?! Les hommes cherchent sans cesse des raisons à ce qu'ils vivent, ils cherchent des coupables à blâmer, alors que ne sachant pas vivre, ils ne se posent ces questions qu'une fois la mort proche. Personne n'était coupable, ou alors, nous l'étions tous depuis toujours... Cette culpabilité n'est que du poids pour les hommes, le cruel repentir comme premier bourreau qui dans un cœur coupable enfonce le couteau. Et si dans mon malheur, parce que je choisissais de vivre sans culpabilité, je découvrais que le vice a beau se cacher dans l'obscurité, son empreinte demeurait sur le front des coupables, alors si je devais survivre, ce serait pour voir un visage sans culpabilité.

Durant ce temps, au camp, Bohémon, Thérèse, Fujisawa, Kumiko et Zö eurent le temps d'entamer les fortifications. Ils n'allaient plus tarder à savoir quelle importance cela pouvait avoir désormais. Il commençait à faire très sombre, quand la compagnie atteignit l'entrée sud du camp. Zö avec son doton avait creusé un petit fossé tout autour de celui-ci, permettant l'érection d'une palissade de roche et de terres, suffisamment haute, environ deux mètres cinquante, pour donner l'illusion d'une véritable fortification. Cela lui avait coûté cependant un effort considérable et le pauvre n'avait même pas terminé. Fujisawa l'avait accompagné dans cette tâche, s'efforçant de renforcer les dites palissades par des pieux de roches et de terres également. Kumiko, Thérèse et Bohémon s'occupaient surtout de la logistique, du renforcement de la surveillance, de la préparation de la milice à intervenir d'un côté ou l'autre du camp.

Ces fortifications nouvelles, Batzu, Sibile, Joshua et Jill pouvaient les apprécier un peu avant de passer par la petite entrée qu'avait laissée Zö pour permettre le passage. Elles ne leur firent, malgré le travail accompli, pas plus grand effet que ça. Ce qui était à mettre sur le compte de leur état moral bien sûr. Il y avait quatre gardes qui restaient plantés là normalement pour la surveillance, mais dès qu'ils virent la troupe se pointer, l'un d'eux filait immédiatement retrouver Bohémon pour le prévenir, "Batzu est de retour !" Comptait-il annoncer plein de joie. Une joie qu'on pouvait trouver, mais difficilement, sur le visage de ces rescapés.
Ce pas-de-porte, tous, hésitaient à le franchir, retenus sans savoir vraiment pourquoi, peut-être que de rentrer, les empêchait simplement de porter un dernier regard en arrière. Jill fut déposée au sol, toujours emmitouflé dans ma cape et le visage abîmé, et là, chacun d'eux se regarda, ils se regardèrent tous frappés de mutisme, même Batzu, normalement rude, n'arrivait pas à lâcher le moindre son, pas plus qu'à passer cette fichue entrée.

Serafi et moi, qui n'étions pas si loin, avions déjà commencés depuis un moment, et de là où ils étaient, l'on pouvait entendre sourdement le choc de notre affrontement. Pas de cris encore, pas encore... Seuls des sons, lointains, qui faisaient pourtant vibrer le sol. Et sentant cela sous leurs pieds, ils n'en éprouvaient qu'encore plus de difficultés à continuer, chacun désemparé par son propre doute. Les miliciens présents à l'entrée sentaient que quelque chose n'allait pas, déjà où étaient les autres enfants ? C'était que comme avec la tension qui retomba, avec cette retombée se répandait le mal-être. Rapidement, leur camarade revint, apportant avec lui, Thérèse, Bohémon, Fujisawa, Kumiko et Zö.
En voyant son grand-père, Jill ne dit rien, mais son visage cabossé que les larmes mouillaient sans qu'elle ne pût les retenir lui disait tout ce qu'il fallait savoir. Il ne marquait pas un arrêt, et l'on vit un vieillard trottiner de toutes les forces qui lui restaient, bien au-delà de son épuisement pour la saisir contre sa poitrine. Aucun mot n'accompagnait cela. Il en va souvent ainsi, que c'est dans le silence que se retrouvent les gens qui s'aiment si fort que leur amour, au moment des retrouvailles, devient un monde à part entière.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:00
Bohémon portait un regard sur Batzu. Il en voyait que Jill, ce qui l'inquiétait, mais voyant la gravité dans les yeux de son garde du corps, rien qu'à sa posture, on devinait l'abattement. Comme si un poids cette fois trop grand lui pesait sur les épaules, jusqu'à le vieillir et l'écraser finalement de honte et de dégoût. Thérèse durant ce temps, laissait passer un sourire vers Sibile et Joshua qui le rendirent fébrilement. Elle avait pourtant elle aussi le cœur serré pour les enfants, mais loin de se laisser abattre comme son frère sur le moment, elle s'en alla poser la main sur l'épaule de Batzu.
-Je sais que tu as fait ce que tu as pu. Mais... Où est Shino ?

Chacun des cinq qui était venu à la porte dressa la tête à cette question. Les enfants étaient morts, alors cela voulait-il dire que Shino était passé ad patres avec eux ? Jill se mit à pleurer à chaudes larmes dans le vêtement de son grand-père, et l'effroi toucha si fortement Thérèse qu'elle s'en étonnait.
-Non attendez... Intervenait Kumiko. Ces chakras... Il est encore là-bas ?!
Fujisawa durcissait son regard, mais ne sembla pas prendre la nouvelle aussi gravement que chacun des autres. Il était touché, mais ne s'emportait pas, il conservait la dignité d'un soldat, qui savait là une fatalité qu'il aurait été difficile de soumettre à sa volonté.
-Il joue le jeu qu'il aime le plus... Concluait-il, pas comme une plaisanterie, mais une fois encore, avec fatalité.
-Ce sont ça les vibrations qu'on sent dans le sol ? Demandait Thérèse qui commençait à paniquer.
-Sûrement. Lui répondait docilement Fujisawa.
-Et toi ?! S'emportait-elle vers Batzu. Pourquoi tu es là ?! Pourquoi tu n'es pas resté avec lui ?!
-J'ai voulu le faire. Lui répondit-il glacial. Mais il a refusé, il voulait son duel avec un des chefs de la division blanche. Il m'a dit que moi des gens m'attendaient ici, alors que ce ne fût pas son cas.


Là, à l’horizon, la pénombre qui tombait ne pouvait qu'aider à voir la luminescence flamboyante que mon nuage de cendre répercutait dans le lointain. Si loin, c'était un spectacle à la fois terrifiant et magnifique, comme si des milliers de lucioles rouges éclairaient la nuit juste avant qu'elle ne finisse de tomber. "On dirait que des lucioles dansent" avait commenté Kumiko. Thérèse voyant cela au loin, et en entendant ce que venait de lui répondre Batzu, serra un poing sur son cœur et son deuxième poing se serrait sur celui qui serrait ce cœur... Ce geste n'échappait pas, en particulier, à Bohémon, qui n'avait que très rarement vu sa sœur perdre le sourire, ou l'espoir pour quoi que ce soit. Toujours, elle relevait les autres, lui le premier, mais cette fois, c'était elle qui paraissait avoir besoin d'un soutien. Il s'en étonnait. Cela ne lui paraissait pas logique, cela lui paraissait trop, précipité.
-Mais pourquoi aucun de vous ne va l'aider ?! Hurlait-elle à tout le monde d'un seul tenant.
-C'est un shinobi, dans un duel, c'est une question d'honneur. Et c'est lui qui l'a voulu. Lui rétorquait avec un peu plus de force Fujisawa.
-D'honneur ?!

Un cri retentissait dans le lointain, puis un second, des cris qu'il était impossible de définir comme étant les miens. Et à peine tonnèrent-ils dans l'air que Joshua, tenta de rassurer Thérèse, sinon au moins de la calmer.
-Ce n'est pas n'importe qui ce type... Je sais qui c'est. Il peut y arriver.
-Il peut ?! S'emportait-elle contre Joshua.
-Peut-être...
Lui répondit-il fébrilement.
Thérèse se reprenait, mais ne desserrait pas son cœur. Elle se tournait vers là où nous nous battions, puis se fixait comme une statue, à attendre. Bohémon s'approcha d'elle pour lui prendre l'épaule, mais avant qu'il ne le fit, elle baissait la tête et lui dit aussi lentement que tristement.
-Laisse-moi Bohé, s'il te plaît... Laisse-moi.
-Tu ne sais même pas s'il va revenir, et nous avons encore beau de chos...
-Il reviendra.
Le coupait-elle sans lever le ton et pourtant avec conviction.
Alors Bohémon et les autres entrèrent dans le camp, et elle à l'entrée, attendait, patiemment. "Quand le ballet des lucioles prendra fin, je saurais", pensait-elle alors.

Peu avant que Batzu terminait de conduire nos rescapés au camp, moi, j'entrais dans une nouvelle étape de mon duel contre Serafi. J'étais immobile, les yeux fermés et concentré sur les mouvements de mon adversaire. Il fit preuve de toute la maîtrise de son art, avec mon sonar de chaleur, je voyais comme des centaines de traînées de chaleur qui se mélangeaient les unes aux autres, m'offrant ainsi le spectacle le plus époustouflant qu'il m'était donné de voir, même en connaissant à l'avance ses mouvements, mes bras de cendre se trouvaient incapables de le saisir ou de le toucher, tout au mieux de lui rendre la tâche extrêmement difficile. Combien de temps encore ce petit jeu allait-il durer, nous nous trouvions une fois de plus dans l'impasse et moi qui ne faisais aucun mouvement, protégé par un ninjutsu de maître, je devais lui faire face à lui qui était sans cesse en mouvement totalement maître du Taijutsu, c'était comme voir deux forces d'égale importance et pourtant opposées s'affronter, l'ombre et la lumière, la terre et le ciel....

D'abord, je me demandais pourquoi il insistait à ne pas vouloir invoquer l'un des démons dont il était le légal dépositaire. C'était un Momoru après tout, alors pour se retenait-il. Puis, contrôlant moins les pensées, j'ignorais pourquoi pas, je commençais à me demander ce que je faisais là. Comment j'en étais arrivé là. Soudain, je me rappelais, la promesse, à Thérèse, une promesse que je n'avais pas su tenir, avec tous ces cadavres d'enfants calcinés désormais autour de nous... Étais-je réellement si médiocre, pour n'avoir connu que trop la mort au point de ne me sentir vivant qu'à travers elle ? Peut-être était-il temps, osais-je laisser s'échapper une seconde en pensée, que je trépasse à mon tour. Un assassin de moins sur cette terre serait un malheur de moins pour bien des gens...

Et lui Serafi... Il transpirait, il raillait, , mais quelle vitesse, ... Il était comme insaisissable et, peut-être comprenant que de cette façon, ni lui ni moi n'arriverions à prendre le dessus, il décida de mettre un nouveau cran au-dessus l'épopée de ce combat déjà si terrible. Ma vision, me prévint de ce qu'il se passait, et c'est toujours les bras croisés que mes yeux se rouvrirent pour se redresser vers les hauteurs. Mes bras cendrés étaient toujours en action, je venais de déformer le paysage de façon significative, mais il parvint à trouver le moyen de donner un nouveau sens à ce combat. Mon regard se figea et mon nez se plissa devant de ce que je voyais. Son clone bondit hors du dôme et l'un des bras tenta de la saisir comme il pouvait, mais il était trop haut et se désagrégea avant d'y parvenir. Pendant ce temps, le vrai Serafi se démenait toujours pour éviter les autres bras infernaux. Je voyais tout cela, je le voyais, pourtant, il était toujours trop rapide... Je restais immobile, attendant de voir quel serait l'utilisation de ce clone de terre. Puis je le vis engagé sur le combat sa trentaine de colombes de flammes. Mon regard se froissa de fureur, mais mon corps ne bougea pas.

Les trente colombes foncèrent sur moi à vive allure. Le clone en retombant se fit saisir par un bras de cendre qui l'envoya se projeter contre le sol et le détruisit du même coup. Je n'avais pas vraiment le temps de faire grand-chose. Je savais d'avance que si Serafi avait fait cela, c'est qu'il y avait un autre but. Il me fallait de la cendre, et de cela désormais, je n'en manquais pas. Je joignis mes mains en prière pour rassembler une certaine quantité de la cendre présente autour de moi. Elle enveloppa mon corps de façon significative m'offrant ainsi la création de mon armure infernale. Une armure de cendre, prenant l'aspect d'une aura de chaleur et de braise virevoltante tout autour de mon corps. Le fait d'utiliser la cendre présence plutôt de recréer l'armure de toutes pièces, me permit de gagner considérablement du temps, et d'économiser autant de chakra que je pouvais, seulement, ma réserve commençait à vraiment à m'inquiéter, nous approchions de la fin de ce combat, c'était évident. Je voyais en plus le Momoru augmenter sa vitesse de façon fulgurante. J'ignorais alors totalement ce qu'il prévoyait, mais pour le moment, je ne bougeais pas, et décidais de prendre de plein fouet avec mon armure active les trente colombes de flamme. Mon regard, figé sur lui, ne put qu'être admiratif. Et tandis qu'elles me percutèrent je tombais à genoux à nouveau sous la force de leur impact. Les premières avaient augmenté la puissance de l'armure pour me permettre de résister au mieux aux dernières. J'étais sauf, mais l'armure elle, était presque devenue inactive et il m'aurait fallu un certain temps pour la recharger. Je n'en avais pas hélas pour moi, Serafi avait prévu tout cela... Pendant l'impact des colombes, j'avais oublié l'espace d'une seconde le contrôle de mes bras infernaux et quand je relevais la tête, à peine les colombes m'avaient-elles frappé, que je pris dans le visage une volée de cendre. Ce fut si rapide que j'eus du mal à y croire, j'activais alors mes capacités sensorielles plus intensivement pour voir, mais la seule chose que je vis, c'est le Momoru me frapper au visage avec toute la hargne qu'il avait dans l'âme.
-Les Momoru sont faits pour dresser les démons pas les combattre ! M'a-t-il alors très vite lancé.

Le coup provoqua un effet de recul improbable, et je sentis presque ma mâchoire se détacher de mon visage malgré l'armure encore active, celle-ci s'estompa d’ailleurs sous l'impact de ce premier coup, puis vint un second tout aussi puissant dans la poitrine qui me mit définitivement au sol à plusieurs mètres de lui. Je n'avais pas su contenir un râle de douleur cette fois.
Nous nous trouvions alors encore dans ce dôme de cendre, nous approchions de la fin, je le sentais. Je sentis le sang couler sur mon visage, mon arcade était ouverte, et des éclats d'armure sur ma poitrine s'étaient enfoncés dans le corps. Cela devenait plus que dangereux. Croyait-il que cela se terminerait ainsi. C'était impossible. Pas comme ça. Il n'eut pas le temps de vouloir m'achever, qu'alors que je me trouvais encore un genou à terre à cracher et tousser tout ce que je pouvais de sang, je fis quelques mudras en hurlant. Pourquoi je hurlais comme cela... Un seul mot. Une seule folie. Un son dans mon oreille. La voix des gens qui m'étaient chères. Ils disaient tous, "pas encore". Face à la fin, je l'avais découvert, ce n'était pas à moi, mais à ceux au loin, qui peut-être finalement, je l'avais espéré sans y croire, m'attendraient.
-RRRRRRHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
-RRRRRRHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Hurla-t-il aussi juste un peu après moi.


À peine mes mains finirent leurs sceaux que dans le hurlement, je frappais le sol avec. Il jaillit alors un loup, d'une magnificence et d'une prestance sans pareil. Lui aussi à peine lorsque sa tête apparut hurla. Ce hurlement typique des loups pouvait s'entendre sur une large distance, son écho parvint sûrement plus loin encore. Le dôme de cendre virevolta quand sa tête en sortit comme un démon venu des enfers. Ce n'était qu'un effet d'optique, mais il paraissait envelopper lui aussi de la cendre, tout son poil en était imprégné, il était glorieux, monstrueux et beau à la fois, son cri, était comme l’annonce de la mort, d'une tristesse à faire sangloter le plus heureux des hommes. Puisque c'était un genjutsu dont l'effet se voulait pour celui-ci. Dans le dôme et ayant la tête hors de lui, le loup ne pouvait voir le Momoru, seul son hurlement pouvait avoir de l'impact. Il y eut quelque chose d'étrange... Je pleurais des larmes de sang, cela était tout à fait normal, car c'était l'effet secondaire de mon immunité à ce genjutsu, mais je sentis comme l'air lui-même sombrait dans la mélancolie, comme si ce que nous respirions était tout aussi désastreux et funeste que ce que nous entendions, les rochers firent craqueler leurs enveloppes, pleurant en cœur avec nous, il n'y avait plus un animal présent sur le champ de bataille, car vu l'état de l'air de combat, c'était bien ainsi que l'on pouvait le décrire... Un champ de bataille.

Nous en étions au début de la fin. Je me redressais aussi difficilement que je pouvais. Mon état s'annonçait difficile et mon chakra était quasiment épuisé. La vérité, c'est que j'avais déjà un pas dans l'autre monde... Plus mort que vivant. Je fixais le Momoru avec mélancolie. Comme si je paraissais subitement m'en vouloir à moi-même. Ce combat fut pour moins le plus intense, le plus grand de tous ceux que j'avais connu. Mais il fallait une fin. J'avais un curieux sentiment de joie mélangé au regret. Et l'adversaire qui était en face de moi, sûrement totalement désarçonné par le genjutsu de mon invocation, je le trouvais magnifique... De véritables larmes se mélangèrent à celle de sang. J'invoquais dans ma main le sabre stocké dans le sceau de mon poignet. J'activais une technique futon pour augmenter son tranchant. Je la tenais en main. Je paraissais hésiter... Je paraissais ne pas vouloir en finir. Peut-être voulais-je inconsciemment lui laisser assez de temps pour reprendre ses esprits... Derrière moi, se trouvait l'imposant buste du loup. Je me trouvais entre ses pattes en fait. Il n'était qu'à quelques mètres. Le dôme de cendre ne ressemblait plus à grand-chose. Vidé partiellement et le sol en était recouvert. Nous étions marchants dans la braise comme deux fous. Autour de nous, et sous nous, le sable rougeoyait. Nous avions créé l'enfer au sens propre...
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:02
Derrière, je vis toutes les âmes que j'avais emportées dans les limbes. Mon visage laissa entrevoir que pour moi, ce fut incompréhensible. Ils me tendaient tous la main, comme pour m’appeler. Que ce soit le fait que je perde la raison, ou que ce soit une prophétie m'annonçant enfin la fin. Je me pris à sourire. Simplement, j'allais pouvoir me reposer. J'allais pouvoir mettre fin à tout ça.
Je me saisissais alors avec mes deux mains de mon épée, elle était entourée de son aura bleuâtre futon, je dirigeais sa pointe vers Serafi. Puis je m'élançais vers lui en courant. Il était abattu par le genjutsu, tétanisé et en larmes, la douleur que le cri du loup imposait au cœur n'était supportable que pour très peu de personnes, quelle que soit leur imperméabilité émotionnelle. Il me voyait pourtant venir, et aurait bien voulu me contrer d'une façon ou d'une autre ; "Bouge bordel ! Se criait-il en lui-même", mais la douleur de l'âme n'était pas une mince affaire, ce n'était pas sans répercussion sur le corps, il y a de ces douleurs si aiguës pour l'esprit, qu'elles s'en ressentent physiquement. Il était ainsi à ma merci, et je lui plantais mon sabre dans le corps, sur toute la longueur de la lame. Là, j'entendais un grondement de douleur. La sienne. Ses yeux me fixèrent intensément, et j'en appréciais toute l'expression durant ce très court instant, jusqu'à ce que le sang coulât sous son masque, le long de sa gorge ; sur cette lame, sur mes mains, qui touchaient sa plaie tellement je l'avais enfoncé jusqu'à ne plus pouvoir.

Il portait sa main sur mon épaule, et le laissant faire, poussait dessus pour s'extraire de mon sabre. Je pouvais le sentir grimacer, et toute sa difficulté à la lenteur de son geste. Une fois fait, il tituba, il tangua, jusqu'à tomber dans la braise et le sable brûlant. Cela le brûlait, et je sentis sa chaire fumer, cuire sur place. Pourtant, il ne poussa aucun cri à ce moment, c'était comme s'il avait dépassé le stade de la douleur. Je n'étais pas si loin du même point que lui quand je plantais le sabre dans le sol pour m'appuyer dessus. Des plaies dans la poitrine me faisaient perdre pas mal de sang, il m'avait brisé une cote et presque brise la mâchoire, sans compter une arcade ouverte. Mais tout cela n'était rien en comparaison de la sensation d'épuisement. Je prenais une décharge d'endorphine à calmer un toxicomane en état de manque. Je fis des pas vers lui, m'appuyant sur le sabre à chaque fois pour ne pas m'écrouler. Je voyais à sa poitrine un souffle haletant et irrégulier qui lui promettait une mort certaine et en peu de temps. À côté de lui, je lui ôtais son masque avec mon sabre pour découvrir son visage. Un visage osseux et un menton puissant, et un large nez au milieu. Il avait une physionomie froide, sur un teint blême. Son regard évitait le mien, il regardait l'horizon, le vide. Là, il me parlait, très bassement, je crois qu'il avait du mal à lâcher des mots à cause de la douleur et de la fatigue.
-Je ne regrette rien.
-Tu ne les vraiment pas invoqué... Lui répondais-je tristement.
-J'ai passé ma vie à invoquer des démons. Je voulais savoir si je pouvais en tuer en moins un...


Il faisait face à la mort et à son choix dignement. Même s'il était de ceux qui écrasaient le plus faible, qui avaient toujours considéré les civils comme du bétail, il y avait de la force d'âme en cet homme. Si avant ce combat, j'aurai acquiescé quand on m'appelait démon, allez savoir cette fois, cela ne sonnait pas juste à mon oreille. Je me sentais simplement un homme. Je tentais, non sans douleur, de me redresser sur moi-même, et là, je voyais autour de nous les cadavres calcinés des enfants, la cendre incandescente qui voletait en tous sens, puis je voyais ma faux. Je renvoyais le sabre dans son sceau, et non sans difficulté, me tenant la poitrine d'une main, je la rejoignais, laissant s’éteindre Serafi pour de bon, seul et sans un mot de ma part. Le loup disparaissait dans la cendre, mon chakra épuisé et lui n'ayant plus besoin de me soutenir repartit de son propre chef de là d'où je l'avais invoqué.

L'acier de la faux avait rougi dans le sable brûlant, et quand j'en saisissais le manche, cela me brûlait la main, mais je ne la lâchais pas. Il me fallut tirer à plusieurs reprises pour l'extirper du sol, mais quand j'y parvenais enfin, une pensée me frappait l'esprit. "Je suis en vie"... Quelle chance m'avait permis de le rester ? Qu'avais-je fait pour le mériter ? Quelque chose remua en moi, un soulagement, et boule de noirceur, un funeste passager, qui devait sortir à tout prix. Cela me comprimait la poitrine, si fort, que j'en pleurais, il fallait que ça sorte, toute cette douleur, toute cette frustration, il fallait que ça sorte. Alors je hurlais au ciel cette douleur, un cri de victoire, de colère et de rage, je hurlais au ciel, que j'avais gagné, que j'étais toujours vivant. Un cri, puis un autre, quelques larmes, voilà, c'était sorti. Que faire maintenant ? La nuit était tombée... Je devais, rentrer.

À l'entrée sud du camp, Thérèse avait fait ce qu'elle avait décidé. Elle avait attendu que le ballet des lucioles cesse, et il n'avait pas encore cessé. Au loin d'elle, dans la nuit presque noire, à la lueur d'un quart de lune, l'incandescence éclairait encore de ses petites lanternes. Patiente et déterminée, elle n'allait pas prier une force quelconque pour lui exhausser son souhait, elle se contentait d'y croire envers et contre tous et ainsi, comme la vie le lui a toujours appris, son désir serait peut-être exaucé.
Fixant le chemin, elle discernait dans le trouble de la pénombre une silhouette qui s'avançait vers elle. Ses lèvres se désolidarisaient, et elle prit le temps de regarder, afin d'être certaine qu'il ne s'agissait pas d'un mirage. Un homme, moi, peinant à faire chaque pas en m'appuyant comme un vieillard sur ma faux. Je regardais le sol, pas le lointain, et je ne pensais plus à rien, de peur qu'une seule pensée de plus, ne m'avale le peu de force qu'il me restait. Thérèse discernait bientôt une masse de cheveux gras, sombre et luisant de saleté sous la lune. Un homme à la stature qu'elle reconnaissait autant que l'arme qui lui servait d'appui. Son sang lui souleva autant le corps qu'il la fit rougir sous la chaleur et l'adrénaline. Elle s'élançait, en courant vers moi, elle courrait comme si sa vie en dépendait jusqu'à ce qu'entendant des pas, j'entendis aussi sa voix.
-Shino !

Je redressais le regard, et ce furent mes lèvres qui se désolidarisaient cette fois. La trouver là. Mais que faisait-elle ? Je voyais dans ses yeux, malgré le sang qui avait coulé sur les miens, qu'il y avait quelque chose que je ne saisissais pas encore, passant à travers elle, jusqu'à moi. Une étrange sensation. Une sorte de chaleur humaine, je n'aurai pas su clairement l'exprimer. Elle semblait heureuse, follement heureuse, et en même temps, très en colère. Elle allait me gifler, je crois, mais voyant mon état, elle s'était ravisée.
-Je t'avais dit de faire attention ! J'étais morte d'inquiétude ! Mais qu'est-ce qui t'a pris enfin ?!
-Tu... Tu... Tu m'as attendu ? Déclarais-je ému, tant que ma voix en devin plus aigu.


Mon regard s'illuminait d'étonnement et Thérèse prit d'instinct une inspiration qu'elle ne relâcha pas. Sans s'en rendre compte, elle se saisissait à nouveau le cœur. Et moi, je pensais, "c'était à moi qu'elle avait dit de faire attention, c'était à moi..." Le silence flottait entre nous, et nous nous regardions. Nous ne pouvions nous quitter des yeux. Était-ce tout cela, tout ce qui se passait, qui nous conduisait là, était-ce que nous avions cet élan malgré nous ? C'était absurde, nous ne nous connaissions pas, et pourtant, elle s'était inquiétée pour moi. Pourquoi cela me touchait tellement. Et face à ses yeux larmoyants, je m'en sentais presque coupable.
-Shino, personne ne peut passer tout une vie complètement seul. Il est possible de ne rien haïr, mais jamais de ne rien aimer. Me lançait-elle gravement.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:04
Là, j'étais désorbité... Je me sentais à nu, je me sentais découvert. Elle n'avait pas été la première à me dire cela, mais quand c'est elle qui prononçait ses mots, sous son timbre, sous ce regard, j'étais percé de plein fouet. Sur mon visage, le faciès de ceux qui pleurent se découvrait d'abord, puis les premières étoiles de ces larmes brillèrent. J'avais honte, mais plus elle me regardait, plus cela passait. Elle prit mes joues entre ses mains et s'approcha de moi. Alors, désarmé, une barrière, la dernière, était franchies.
-Je m'appelle Katerik... Lui soufflais-je comme une déclaration.
Elle me sourit, et collait son front contre le mien. Seulement ça, et nous restions ainsi, bêtement, simplement, ce petit geste, me paraissait plus intense encore qu'un baiser. Pour la première fois de mon existence, je me sentais lié à quelqu'un, pour la première fois de mon existence, je voulais, me donner à quelqu'un.
Là, elle se glissait sous mon bras, pour que je me soutienne sur elle d'un côté, et sur ma faux de l'autre.
-Allez viens. Me dit-elle. Et nous rentions dans la cité de la joie.

Dans le camp, Sibile et Joshua nous apercevaient alors que Thérèse me ramenait à sa tente. Ils étaient proches du puits où ils s'étaient rencontrés, et dans une nuit complète, à peine éclairée à la lueur de quelques torches que les miliciens avaient disposées, Joshua avait tout de même pu remarquer mon état qui ne l'étonnait pas. Sibile se sentit soulagée, mais trouvait tout de même étonnant pour sa part que Thérèse se trouva si attentionné envers moi. Sibile assise entre les jambes de Joshua et prise entre ses bras, là où elle se sentait le plus en sécurité n'avait pu s'empêcher de le remarquer et d'en faire part à son amant.
-Elle nous avait dit de ne jamais faire de sentiments avec les clients. Que c'était dangereux. Lui dit-elle.
-Je crois qu'elle n'est pas la seule à n'avoir su suivre ses propres conseils. Lui répondit Joshua un peu amusé.
-Même une prostitué peut trouver l'amour. Lui annonça Sibile avec soulagement.
-Tu parles de toi ? Ou de Thérèse ?
-Des deux. J'espère qu'il ne lui fera pas de mal.
-Il a rompu son contrat avec la division blanche parce qu'il ne voulait pas participer à leurs atrocités sur les civils. On le savait tous là-bas. C'est un assassin, mais paradoxalement, ce n'est pas un homme mauvais.
-Tu le connaissais bien ?
-Non, seulement de nom. Il devait assassiner des chefs de l'alliance surtout, alors on ne le voyait presque jamais. Mais on savait tous que c'était un shinobi très compétent. Même le chef de la division le respectait, il parait.
-Ce soir, nous sommes tranquilles. Mais demain, Bohémon voudra te parler, tout le monde voudra te parler. J'ai peur de ce qu'ils pourraient te faire.
-Tu penses qu'ils me puniront ?
-Je ne sais pas, tu comptes faire quoi toi ?
-Vous aider... Je crois, non, je sais, que je dois le faire. J'ai beaucoup à me faire pardonner.


Sibile serrait les bras de son amant plus fortement contre elle. Les aider, elle savait ce que cela impliquait, le risque que cela engendrait. Mais elle n'osait pas lui demander le contraire. Qu'il apporte son aide pourrait jouer en sa faveur pour Bohémon et les autres. Il était déjà miraculeux que Bohémon ne le mettait pas au poteau, ou que Batzu ne l'aura pas coupé en deux. Pour cette nuit ils étaient en paix, tous, même si les miliciens, Fujisawa et Kumiko continuaient d'organiser les défenses, tout le reste était au repos, y compris Batzu et Bohémon qui étaient partis se coucher. Zö veillait dans sa tente le sommeil de Jill, qui bien qu'elle ne lui décrochât pas un mot depuis son retour, avait un sommeil réel et paisible, de quoi le rassurer. Sibile pensait aussi aux enfants dont il fallait annoncer la mort aux parents le lendemain. Ce qui causerait encore des troubles.
-Et après ? Lui demandait-elle timidement.
-Après ? La questionna-t-il non sans étonnement.
-Après tout ça... Tu feras quoi ?
Il poussa un rictus.
-Je te conduirais à un shinobi médecin. Et on te guérira. Répondit-il enfin simplement.
-Tu crois vraiment ça possible ?
-Ce n'est pas une maladie insurmontable pour un shinobi. T'en fais pas, on s'en sortira. Tout ça ne peut pas finir mal.
-La division arrive, n'est-ce pas ? Ils vont nous attaquer...
-Ils encerclent probablement le camp pour le moment. On saura bien assez tôt ce qu'ils prévoient....
-Ils sont si terribles que ça ?


À cette question, la gorge de Joshua se serrait. Il ne savait que trop bien de quoi la division était capable. Lui y aura participé. Il se souvenait de ses rires, de ses peurs, de ses dégoûts, de ses plaisirs coupables, de toutes ces choses qu'il avait faite là-bas et qui lui était impossible de décrire à la femme qu'il aimait. En soldat trop humain qu'il était, il ne pouvait plus accomplir son œuvre : la vue du sang et des larmes ; les souffrances de la guerre, les cris de douleur l'arrêtant à chaque pas, détruisaient en lui ce qui fait les conquérants, race dont, après tout, on se passerait volontiers. La cause de ses combats, il ne l'avait que trop entendu. Toujours le même discours, pour la paix, l'ordre et l'union, quand son ennemi, protecteur des civils qu'on lui avait appris à mépriser, criait lui aussi paix, mais aussi indépendance et liberté... Un bien étrange combat que celui-ci. Sa culpabilité l'obligeait, à devoir racheter ses actes, parce qu'il ne s'estimait pas encore digne de l'amour sincère d'une femme, même une civile, cette civile, qui lui aura appris que mépriser un homme, pour quelques raisons que ce soit, n'était jamais sage.
-Oui, ... Ils le sont. Disait-il en cachant son visage dans le creux de l'épaule de sa belle. Et Sibile, sentant en lui le mal-être, passait sa main dans ses cheveux, un baiser sur la tempe, et le silence pour sa consolation.

Entre-temps, j'étais déjà arrivé dans la tente de Thérèse. Personne ne savait que j'étais revenu, mais que Thérèse fut la seule à m'avoir attendue ne m'avait pas offensé. Je ne crois pas que j'eusse agi différemment des autres, pour le moindre d'entre eux, sauf désormais, pour Thérèse. Ses filles étaient endormies, je crois en fait qu'il y avait eu tellement de tension durant cette terrible journée, que tout le monde se sentait épuisé et s'était couché tôt... Thérèse m'avait dévêtu, nettoyé et bandé toutes mes plaies, tout cela, sans jamais se plaindre... Elle conservait sur le visage un sourire tendre, une douceur qui endormait tous mes démons. J'étais bercé, par son odeur, cette aura de compassion qu'elle dégageait. Elle ne parlait pas beaucoup, et seulement pour de l'utile. Elle me promettait de demander à Zö quelques herbes pour mes blessures par exemple, tout en s'occupant de tout ce que je n'eus rien à demander. J'en étais presque gêné, de dormir sur son lit, sans qu'elle me demandât de payer pour cela...
Je n'avais pas prononcé un seul mot durant tout ce temps... Je ne savais pas quoi dire. Et quand elle eut fini, elle me demandait directement cette fois ; tu veux quelque chose ? Demain la journée d'être longue, tu veux peut-être dormir. Dans ton état, tu en as besoin.
-Sers-moi quelque chose de fort si tu as s'il te plaît. Répondais-je sans oser la regarder.
Elle s’exécutait, me ramenant un gobelet remplit de je ne savais quel tord-boyaux. Puis lorsqu'elle me le tendit, notre regard se croisait à nouveau. Dans mon état de fragilité, c'était de trop...

J’avais perdu pied… J'étais à cet instant pas si particulier, plus maître de moi-même. Tremblotant toujours. Comme un petit-enfant dans le noir. L’alcool, le remède du malin, le remède maudit, j’allais m’en abreuver lâchement. Puis une lumière vint. Une lumière appelée Thérèse. Si belle. En cet instant si pur et si saint, je redécouvrais mon être aimé. Pleine de douceur. Pleine de bonté. Comme un soleil à l’heure de l’aube qui efface la pénombre et avec elle la mélancolie. Me voici donc, ignorant de mes sens, soumis à sa tutelle. Par ses gestes. Me sauva-t-elle de la solitude. Par ses mots. M’enivra-t-elle de bonheur. Les tremblements cessèrent incessamment. Mes mains manipulées et mon corps, s’accordèrent à sa volonté sans protestation. Car il lui apparaissait, tant à lui, ce corps, qu’à mon cœur, que le chemin de la plénitude se trouvait désormais dans le regard de cette femme si précieuse à mon âme. Elle me bénissait avec silence. Par ce bien si précieux qu’était l’union de son propre symbole et du bien. Tels des amants, elles nous liaient à jamais par l’ornement dont elle disposait, son affection, sa sincérité, elle-même. Puis sans le dire, sans l’affirmer, avec une subtilité pourvue de la plus édulcorée des féminités. Elle me le fit entendre. Sentir jusqu’à la chaire et jusqu’à l’os. La force de notre union.

Mon visage se dressait alors. Je sentais ma peau échapper de mon contrôle. Une main dans les cheveux. Un baiser sur le front. Le temps d’un frisson. Le temps de l’unisson. Nos visages entremêlés, collés l’un à l’autre se trouvaient alors comme une seule entité. L’accomplissement d’une nouvelle étoile, d’un nouveau récipient pour accueillir notre découverte. Celle de l’amour… Oui. L’amour… Curieuse sensation, entre le réel et l’irréelle, entre le palpable et l’intouchable, entre la folie et la conscience. Il me fallut alors tant de force. Tant de difficulté pour parvenir à ouvrir mes lèvres. À lui exprimer ce que je pouvais sans savoir d’avance ce qui en était réellement. Car dans mon âme tourmentée, elle avait placé une lueur fébrile mais si importante. Je n’avais alors rien à lui offrir. Les mots ne suffisaient pas. Alors je les accompagnais de gestes. Pas un, je t’aime. Mais un murmure tellement plus intense. Sans crier, je parvins à exprimer l’ardeur. Ma joue vint à caresser la sienne. Mes mains à parcourir son visage, sa chevelure. Comme un aveugle qui découvrait le visage de sa femme. Un soudain ballet dansant. Des lèvres entrent effectivement en danse. Sans folie. Sans précipitation. Avec douceur et ardeur, les faciès accompagnant le plaisir d’un contact plus prude qu’à l’apparence pourtant si trompeuse.

Son bonheur. À jamais je le porterais. Il n’était plus un ornement. Car de ma faiblesse elle fit naître ma désormais plus grande force. Ce bonheur était de moi. Autant qu’il était d’elle. Je ne pouvais plus le laisser passer. Un membre incrusté à ma chair et ma personne. Pour que jamais je n’oublie ce moment si inouï et impensable pour de jeunes gens comme nous. Un nouveau murmure. Simple. Naturel. Sans ordre. Il paraissait aussi évident que le matin qui se lèverait. "Viens " lui dis-je… Et je la pris sous les bras. Pas tel l’objet de mes fantasmes. Mais tel l’objet de ma rédemption. Comme un trésor. Si fragile. Si précieux, qu’il m’aurait été impardonnable de ne serait-ce que de le bousculer. Je la conduisis alors. Sans qu’elle ne proteste. Sans délier mon regard du sien, trouvant des étoiles et merveilles en son sein. Nos lèvres, aimantées, poussées par une puissance qui dépassaient de loin celle du vice, jusqu’à faire paraître cette idée tellement odieuse même. Tout ceci, me fit penser que ces quelques mètres vers la couche, me prirent le temps d’une vie tout entière. Pour cette nuit, il n’était pas question de gâcher ce moment si important par la fusion des sens, emplit de luxure et d’animosité primaire. Mais de pureté, de partage, de béatitude. Une récompense autant à elle qu’à moi. L’heure, et même le ciel étoilé en témoignaient, nous la méritions et nous devions nous y soustraire. Quand elle fut alors déposée avec toute la délicatesse dont je fis preuve. Je demeurais debout à la contempler. Comme une œuvre d’art. Éperdue, sous le joug de ma propre niaiserie. Alors à peine conscient de la chance que j’acquisse ce jour béni, où un ange croisa mon chemin damné. Je restais immobile. Le visage doux et saint. Sans sourire. Harmonieux. Voilà quel était le mot définissant tout cet instant magique. Harmonieux… Enlacé dans les bras l'un de l'autre, nous nous endormions ainsi, sans mauvaise pensée, à nous regarder et rien d'autres. Ce moment passé avec une femme dans un lit, sans la moindre sexualité, ce fut le meilleur moment de ma vie.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:07
À l'entrée nord, quatre autres miliciens gardaient le lieu. Ils n'étaient pas en charge d'une ronde, seulement de surveiller l'entrée et de prévenir en sonnant un corps, si une attaque advenait. La charge ne les ravissait pas, devoir veiller toute la nuit comme ça. Mais cela ne les empêchait pas de tenter de faire bien leur travail, même s'il n'avait rien de glorieux ou de compliqué. Ils parlaient de tout et de rien quand l'un d'eux entendit de ne pas approcher. Si aucune silhouette ne sortait encore de la noirceur, leur torche n'éclairant pas assez loin, ils se trouvaient déjà très inquiets de ce qui pourrait arriver.
-Qui va là ?! Grognait l'un d'eux pas vraiment rassuré.

Mais aucune réponse ne vint. Seuls des bruits de pas dans le sable. Les gardes portèrent la main à leurs armes, prêt à en découdre, sauf un, qui saisissait son cor pour le faire sonner dès qu'il aurait la confirmation d'une attaque. À la lueur de leur torche, une silhouette sortait enfin de la nuit, mais les garde étaient surpris par sa taille.
-Qu'est-ce que c'est ? Demandait l'un sans obtenir de réponse.
Tenshi apparaissait à la lueur des torches, un bébé dans les bras et serré contre lui. Un bébé qui n’émettait pas le moindre son, il paraissait inerte. Tenshi, avait le regard livide, et le teint blafard, sa chevelure argentée scintillait à la lumière des torches. Il avait l'air épuisé et absent, tout en avançant comme un automate jusqu'à se trouver à quelques pas des gardes.
Le garde le plus en avant s'approchait de lui jusqu'à poser un genou à terre, pour se trouver à sa hauteur.
-Qu'est-ce que tu fais tout seul dehors à cette heure toi petit ? Tentait-il d'appréhender Tenshi qui continuait de garder le silence. Quel âge tu as ? Continuait le garde pour insister. Mais rien ne venait encore. Je peux le voir le bébé que tu tiens ? Finissait-il pour le faire réagir.

Là, tout au loin de l'horizon noirâtre, des petites lumières perçaient comme des étoiles le voile de la nuit, beaucoup, de petites lumières... C'était la division qui installait l'un de ses camps, elle précédait de peu le garçon à la chevelure argentée, Tenshi. Le garde à genoux devant l'enfant, voyant cela, trouva une certaine beauté, entre les torches illuminant la désuétude d'un enfant, qui derrière lui paraissait amener des centaines d'étoiles.
-C'est quoi ça ? Demandait un autre milicien plus en arrière.
-Ce sont eux... Il faut sonner le cor. Lui répondit tristement celui qui était à genoux. Enfin, il tendit les bras vers Tenshi. Tu veux bien me le confier ce petit ? Lui demandait-il prudemment.
Tenshi réagissait enfin, fixant dès ses yeux bleus immaculés et reflétant la lumière des torches, comme autant d'étoiles que son regard larmoyant mimait, l’œillade compatissante du garde qui lui tendait les bras pour recueillir son paquet. Puis le cor sonnait, ameutant toute la cité de la joie qui se réveillait en sursaut, presque paniquée. Un second sonnement, puis un troisième, alors que derrière Tenshi, les lumières devenaient de plus en plus nombreuses, comme des lucioles, mais des lucioles qui annonçaient le malheur avec elles. Ces lucioles au loin, qui se déplaçaient en même temps que les miliciens, et les shinobis, accourraient à l'entrée, ces déplacements n'étaient que des songes résiduels, une rémanence physique du traumatisme que Tenshi amenait avec lui, comme l'escomptait Shigurui. Toute existence connaissait son jour de traumatisme primale, qui divisait la vie en un avant et un après et dont le souvenir même furtif suffisait à figer dans une terreur irrationnelle, animale et inguérissable. Ce que la littérature fait, en grande partie, ce que raconte l'écrivain sous sa plume, ce qu'il essaye de faire entendre à son lecteur, c'est simplement cela, trouver quelques mots justes, quelques mots dont la justesse, que ce soit pour décrire un abominable traumatisme, une abominable douleur, ou la quiétude d'un paysage ou d'un visage, provoque de l'étonnement, du ravissement — de la beauté. Car, et c'est une triste vérité, même dans l'horreur, peut sommeiller, dans une latente fascination, une véritable beauté.

Tenshi consentait, et tendit le bébé qu'il portait vers le garde qui le prit avec grande délicatesse. Derrière lui et ses compagnons, arrivaient des habitants de la cité de la joie, mais aussi Batzu, Fujisawa, Kumiko, Sibile, Joshua et enfin Thérèse. Elle m'avait laissé dans la couche, sachant que me lever aurait été très difficile, elle jugea bon de me laisser dormir quand elle se rendit compte que le cor n'avait pas suffi à me sortir de mon sommeil. C'est son absence auprès de moi, sa chaleur qui m'avait quitté, qui je crois, m'avait finalement réveillé. Je me levais donc, difficilement, sans vraiment comprendre ce qui se passait, puis je décidais de me porter sur ma faux pour retrouver Thérèse où qu'elle fut.

À l'entrée nord, quand le garde prenait le bébé, il se rendit compte que celui-ci était inerte, pour ainsi dire quasiment mort. Tenshi n'avait pas l'air d'y avoir prêté attention, mais ce qui intéressait le plus les villageois et les principaux protagonistes, c'étaient toutes ces petites lumières qui perçaient la nuit loin dans l'horizon derrière Tenshi.
-Mais... Qu'est-ce que c'est que ça ? S'effrayait un des villageois en voyant le spectacle, particulièrement ce regard livide et mortifère, de Tenshi.
-La division blanche ! Ce sont les shinobis confédérés ! Répondait un autre réfugié plus perspicace.
-Nous sommes perdus ! S'emportait une autre réfugiée.
-Je ne crains pas de la lumière dans l'obscurité. Intervenait Batzu en passant au milieu de la foule, accompagné de Sibile et Joshua, puis rapidement de Thérèse ensuite.


La montagne qu'était cet homme fendait la foule comme l'eau creusait le lit des rivières, même sans son arme et habillé d'une petite chemise de nuit, il impressionnait les réfugiés par sa seule stature. Le passage ne lui fut donc pas difficile jusqu'aux gardes.
Le garde qui tenait le bébé se redressait, et là, se tournant vers le monde derrière, il semblait désarçonné.
-Je crois qu'il est mort...
Chacun remarquant qu'il tenait un bébé dans les bras, les regards horrifiés se propagèrent dans la foule comme une lèpre supra contagieuse. Sibile et Thérèse coururent vers le garde pour lui prendre l'enfant, Thérèse poussant un "passe-le-moi !" Relativement vif en même temps. Joshua plissait un regard désolé, alors que Fujisawa, placé discrètement avec Kumiko au milieu de la foule, laissait s'échapper un furtif et fugace petit sourire de ses lèvres. Kumiko, avait l'air déjà furieuse et inquiète, mais ne chercha pas à s'en mêler. Tenshi réagissait cependant cette fois quand il entendit que l'enfant était certainement mort. Une larme se déversa de son œil le long de sa joue, mais aucun geste, aucune parole, n'accompagnait cela.
-Batzu ! S'emportait une femme dans la foule ! Si tu es rentrée... Mais ?! Où est mon garçon ?!
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:10
Là, pères et mères se regardèrent, où regardèrent Batzu non sans crainte de la réponse. Celui-ci leur tournait le dos, alors que Thérèse arrachait dans le même temps le nourrisson des bras du garde. Batzu se tenait fièrement, mais n'osait pourtant faire face à la foule. "elle est vivante !" S'écriait Thérèse avec soulagement, "Ils sont mort...", annonçait Batzu gravement. Sibile et Joshua éprouvaient un certain soulagement, tout comme Kumiko, alors que Fujisawa, que la nouvelle du nourrisson indifférait, se trouvait plus intéressé par ce qu'aurait à répondre la foule à l'annonce que venait de faire Batzu. Batzu, n'ayant pas le temps de s'attarder sur l'état de la petite sœur de Tenshi, s'attendait plutôt à devoir endosser l'échec de la survie des enfants face à une foule qui ne tarderait sûrement pas à se mettre en colère. Tenshi avait l'air soudainement profondément soulagé, comme si un énorme poids sur ses épaules venait d'être retiré. Mais Thérèse n'en restait pas moins inquiète et regardant vers Sibile, elle lui parlait durant le court silence que la foule, sous le choc du deuil, prenait pour parvenir à encaisser la terrible nouvelle.
-Elle est très faible. On dirait qu'elle vient de naître. Il faut la réchauffer et la nourrir ! Tu peux t'en charger Sibile ? Lui pressait-elle.
-Oui, donne-la-moi ! Joshua, viens, on rentre à la tente, je dois avoir du lait maternel là-bas.
-Je sais pas si je serais bien uti...
-Viens je te dis ! Se faisait couper, Joshua par Sibile.


"Assassin !", "Oui assassin !", "C'est votre faute !", commençaient à s'élever de profondes voix colériques dans la foule. "Heureusement que Bohémon est trop faible pour pouvoir se lever et devoir subir cela", se disait alors Batzu.
-Mais non ! Mais vous ne comprenez pas ! Ce n'est pas... Commençait à s'élever Kumiko. Mais Fujisawa lui saisit le bras, et lui faisant un sourire accompagné d'un dodelinement de la tête, il l'invitait à rester en retraite de cette histoire. Elle se tue, quoique rougissante de fureur. Il semblait que Fujisawa, assez malsain personnage en réalité qui n'éprouvait que peu d'empathie pour autrui, devenait soudainement plus humain au contact de la rouquine. En effet, si savoir qu'un bébé était mort ne l'affligeait absolument pas, que Kumiko puisse être prise à partie par la foule sonnait très différemment dans son esprit. Il ne croyait toujours pas en la défense de ce camp, il ne croyait toujours pas que ce camp valait même la peine que l'on se batte pour lui. Mais pour Kumiko, il était là, et ferait ce qu'il pourrait pour qu'elle s'en sorte malgré ses passions altruistes qui l'emmenaient dans des situations aussi fâcheuses que celle-ci.
La foule s'élevait de plus en plus contre Batzu, mais ce n'étaient encore que des chiens qui aboyaient, car aucun d'eux n'auraient véritablement osé en venir au sang face à cet homme-là, et si Batzu le savait, cela ne l'empêchait pas de recevoir chacune des invectives sans broncher. "Ils devaient en passer par là de toute façon, laisse les brailler, ça ne changera rien" murmurait Fujisawa à Kumiko pendant ce temps.

Thérèse se penchait elle, pendant ce temps, vers Tenshi, qui regardait Sibile et Joshua ignorer la foule et emporter sa petite sœur sans que personne ne lui demandât son avis là-dessus. Il avait encore l'esprit embrumé, il était trop faible, trop effrayé, trop - absent, pour réellement réagir.
-Tu as l'air épuisé. Tu veux venir avec moi pour manger quelque chose ? Tu viens d'où comme ça, tu veux me raconter ? Tentait Thérèse alors penchée sur lui, le regard bienveillant et maternel. Mais Tenshi, ne semblait pas la comprendre, il avait l'air de parler une autre langue, comme si les sons et les mots ne pénétraient plus son esprit. Thérèse devant cela s’inquiéta, mais ne lui en montra rien. Avec la foule derrière qui continuait d'accuser Batzu de la mort de leurs enfants, cela n'arrangeait rien à la tension qui grimpait il fallait dire.
-Ils étaient morts bien avant notre arrivée. Coupais-je fermement les brimades de la foule en faisant mon entrée.

Les mauvaises humeurs se tarirent alors. Visages tournés sur moi, je fendais la foule à mon tour, difficilement, chaque pas porté sur ma faux servant d'appui, j'étais bandé, et dans un sale état, mais hors de danger. Je n'étais pas aussi connu que Batzu, mais je supposais que remarquant mon état de santé et mon état de shinobis, la raison de l'extinction des voix se trouvait là. Fujisawa souriait alors de plus belle, car il découvrait que j'avais survécu et s'en amusant, il pensait "coriace la bestiole". Kumiko laissa seulement s'échapper un "Shino..." Quelque peu choquée, comme si elle venait de voir un fantôme. J'avais l'air sévère, tout en avançant, et profitais du relatif silence pour continuer de parler tandis que je marchais, mais aussi, tout en parlant, je pensais pour me convaincre moi-même de ce que je disais, "tous ces instants se perdront dans le temps, comme les larmes sous la pluie".
-Batzu n'a pas pu échouer, car il n'y avait plus rien à sauver quand nous sommes arrivés. Et qui est responsable ? Celui qui se bat envers et contre tout pour vous, ou ceux qui laissent leurs enfants partir à l'aventure dans le désert et sans surveillance ? Si vous devez absolument cracher votre douleur, crachez-la là où nul n'aura à en souffrir avec vous plus qu'il n'en souffre déjà.

Une accusation difficile pour des parents en deuil, mais la vérité avait la force d'un coup-de-poing parfois. Batzu se retournait alors, quand je prenais sa défense, et les visages coupables s'abaissaient à mon passage, parce qu'on ne peut s'élever contre un homme qui peine, ne serait-ce qu'à marcher. Fujisawa s'amusait de ma réaction, et de la réaction des gens, et Kumiko, même si elle n'aimait pas qu'on ne plaigne pas la douleur de parents face à la réalité, ne pouvait s'empêcher d'adhérer. Sibile et Joshua étaient déjà partis, et Thérèse tournait un regard mécontent vers moi, tandis que je rejoignais Batzu. Elle m'en voulait de m'être levé dans cet état, mais si une alerte était donnée, je ne pouvais rester sans ne rien faire. En arrivant jusqu'à Batzu, je lui posais une main sur l'épaule, lui offrant en même temps un regard compatissant. Il n'y réagissait pas, conservant sa fierté comme je m'y attendais, mais je pensais, et j'avais raison, que ce geste le toucherait. Puis je portais mon regard vers Thérèse.
-Pourquoi tu te lèves ?... Tu cherches à rouvrir tes plaies ? Me dit-elle gravement.
-Ça va aller. Répondais-je simplement.

Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:14
Mon attention se portait alors vers ces lumières à l'horizon, dont je savais sans mal l'origine. Cette fois, nous étions véritablement encerclés, et ce n'était pas la perte de Serafi qui allait mettre un terme à cela. Je contemplais ce ballet de lumière, derrière un petit garçon bien étrange, où je reconnaissais dans le regard quelque chose de glacial. Nous yeux se croisèrent, et les miens s'agrandissaient sur les siens qui se rapetissaient. Je découvrais un garçonnet aux yeux encore plus bleu que les miens, purs comme de l'eau et à la chevelure argentée. Il voyait devant lui cet homme en triste état que j'étais, tenant une faux à la main, et je ne savais pourquoi, ce fut court, mais je ressentis quelque chose en lui, de terriblement semblable à ce que j'avais en moi.
-Il ne parle pas beaucoup. M'annonçait Thérèse qui se redressait pour venir s'attacher à mon bras. Un geste qui n'échappait pas à Batzu, Fujisawa et Kumiko, qui savaient tous par là quel rapprochement Thérèse et moi avions consenti l'un pour l'autre.
Je commençais à fouiller dans le chakra du garçon en bas de moi, sans le quitter des yeux, et alors, je découvris une force fébrile en sommeil, qui venait, je crois de se manifester, sinon depuis très très peu de temps. Mon regard se plissait sur lui, qui sembla quelque peu effrayé par cela, mais qui ne bougea et ne parla toujours pas. Thérèse me reprit alors.
-Ne le regarde pas comme ça, tu lui fais peur.
-C'est un shinobi. Annonçais-je bassement.


Je relevais mon regard vers l'horizon, où scintillaient les lumières, puis je le rabaissais vers l'enfant. Je commençais à supputer quelque chose en pensée, mais je ne pouvais encore en être certain. Lui, il me regardait encore, un peu effrayé, alors Thérèse, très attentive à son regard, commença à douter qu'elle le ne connût pas. Son visage lui disait finalement quelque chose, mais il ignorait pourquoi sa mémoire lui jouait ainsi un tour.
-Tu en es sûr ? Me demandait alors Batzu qui était surpris par la nouvelle, une nouvelle qui intéressait autant Kumiko et Fujisawa qui se disait dans le même temps "et de trois", concernant le fameux chakra que j'avais détecté. Mais un enfant seul ? Lui le premier se demanda comment cela put-il être possible. Un enfant-soldat infiltré ? Un déserteur ? Kumiko le regardait aussi alors avec étonnement tandis que dans la foule, on commençait, sûrement par peur comme toujours, à croire que c'était un mauvais présage et la suspicion s'emparait de la plupart des réfugiés présents.

Ignorant les réfugiés de mon côté, je me tentais à sonder l'âme de cet enfant, au regard si étrange et à la chevelure argentée. Soudainement, Thérèse poussa un petit cri d'étonnement, portant la main à la bouche.
-Mais c'est Tenshi ! Criait-elle ensuite. Mais... Il était brun, ce petit, continuait-elle en se reprenant. Mais enfin ! Personne ne peut changer de couleur de cheveux aussi vite ! Terminait-elle avec encore plus d'étonnement.
-Qui est Tenshi ? M'intriguais-je.
-Un ami de Jill. C'est le fils du Zoboro, c'est...
Et Thérèse se coupait elle-même, alors, je vis dans son regard l'effroi.
Batzu retrouvait lui aussi un visage grave et il y en avait dans la foule pour qui se fut de même. Moi, ignorant de quoi il s'agissait, je fixais Thérèse, en espérant avoir la suite.
-Et bien quoi ? Insistais-je.
-C'est le civil qui a emmené une partie des réfugiés vers Gao Yanshi pour fuir, m'annonçait enfin Batzu.
-Pas si civil que ça apparemment.


Derrière moi, dans la foule, Fujisawa devait se retenir de rire devant l'ironie et parce qu'il savait que Kumiko n'eut pas apprécié, "les cons, ils se sont jetés dans les bras de l'ennemi" pensa-t-il. Puis, parmi les réfugiés qui savaient qui était Zoboro et ce qu'il avait fait, l'effroi se répandit aussi vite que la précédente suspicion. Il ne fallait pas être bien malin, pour comprendre que ces lumières au loin, était la division blanche qui avait intercepté les fuyards et les avait taillés en pièces. Kumiko se sentit profondément coupable, elle qui avait tenté de les retenir sans y parvenir, elle se doutait encore plus du drame qui avait attendu tous ces pauvres gens. Pour Fujisawa, on savait donc qui était le quatrième possesseur de chakra désormais, c'était ce Zoboro, qui avait bien caché son jeu. Moi cela m'étonnait, car le chakra que je ressentais chez cet enfant me semblait aussi fébrile que latent. Je devinais alors, la raison de couleur blanche argentée de ses cheveux, ce changement si rapide. Ce que ce garçon avait dû voir, nous aurions tous ici une grande peine à l'imaginer. Songeant qu'il a dû porter sa petite sœur nouveau-née et presque mourante jusqu'ici... Ce que ce petit avait vu, je ne savais que trop quel résultat cela donnerait sur lui. Surtout si jeune. Gravement, je le regardais, lui, qui se confondait dans le mutisme le plus intransigeant et ce regard amorphe. Sursauts, angoisse, souvenirs obsédants, visions hallucinées, cauchemars, repli sur soi : tels sont les principaux symptômes dont souffrent tous ceux qui ont vécu l'enfer de la guerre. Pour les combattants comme pour les civils, se pose alors toujours la même question : peut-on oublier ? L'innocence sur cet enfant n'était cependant pas encore morte, et déjà à ce moment, j'éprouvais l'envie, comme pour me guérir moi-même, tel que Thérèse avait déjà commencé à l'accomplir sur moi, de lui préserver cette innocence enfouie dans son cœur, avant qu'elle fût consommée par son horreur.
-Rentrez, rentrez tous, demandais-je alors tranquillement aux réfugiés présents. La division n'attaquera pas ce soir, sinon elle l'aurait déjà fait. Il faut rassurer les gens qui ont entendu l'alerte. Allez rentrez tous.
-Je vais aller prévenir Bohémon de la situation. Intervint Batzu tandis qu'il quittait l'entrée.


Un nouveau trop plein d'émotion pour les réfugiés, ils ne protestèrent pas et s'en retournèrent vers leurs tentes. Fujisawa et Kumiko en firent autant, discrètement, préférant passer une bonne nuit ensemble parce qu'ils savaient que le lendemain, risquait d'être l'une des journées les moins joyeuses qu'ils auront connues. Nous nous retrouvions alors en petit comité, avec Tenshi, Thérèse et les quelques gardes de la porte. Je savais par avance que Thérèse ne pourrait pas laisser cet enfant livré à lui-même, et je ne comptais pas le faire non plus. Cependant, à l'inverse d'elle qui ne répondait qu'à un profond instinct maternel, je savais qu'il ne serait pas aisé d'apprivoiser ce curieux animal. Je pouvais en effet déceler au fin fond de ses pupilles, toute la souffrance qu'il enfouissait déjà en lui et qui pesait sur ses frêles épaules.
-On l'emmène, n'est-ce pas ? Me demanda Thérèse le regard perçant.
-Oui bien sûr. Mais avant j'aimerais lui poser une question. Lui répondais-je élégamment.
-Laquelle ? Me demandait-elle ensuite avec étonnement.


Tenshi relevait le regard sur moi. Il y perdit le soulagement de savoir sa sœur entre les mains de Sibile et Joshua, car, me voyant la faux à la main, l'observer comme un inquisiteur jugeait un coupable, il sentit la peur en lui monter. Mon regard était le même que Shigurui, et cela lui rappelait ce terrible moment. Je n'étais pas bête au point de croire que Shigurui l'avait laissé en vie sans raison. Je connaissais cet homme et je savais qu'il ne faisait rien sans espérer en obtenir quelque chose en retour.
-Qu'est-ce qu'il t'a dit ? L'homme au masque.
Le visage de Tenshi se figeait littéralement dans la neutralité, et pourtant, une larme coulait le long d'une de ses joues. Je l'obligeais malgré moi à revoir ce qu'il avait vécu, ce qu'il avait dû décider. Thérèse allait me rabrouer les oreilles, mais je l'ignorais, car je voulais savoir.
-Il a dit que ma sœur serait la seule survivante de ce camp s'il ne se rendait pas.


Je comprenais, et Thérèse portant la main à la bouche, sous le poids de l'horreur, en comprenait autant. J'avais finalement bien fait de renvoyer les réfugiés, entendre cela n'aurait rien ajouté de bon au moral de la cité qui était déjà plus que chambranlant. Thérèse se tournait une seconde ensuite vers les miliciens qui devaient garder cette entrée.
-Vous ne devez parler à personne de ça d'accord ? Leur demandait-elle avec douceur.
Ils lui rendirent des hochements de tête et des regards approbateurs. Ils n'avaient pas vraiment le choix honnêtement.
-Tu veux bien nous suivre ? Nous ne te ferons aucun mal, tu seras en sécurité avec nous. Disais-je à Tenshi aussi tendrement que je savais le faire.

Il m'observait alors, comme pour sonder l'honnêteté au centre de mes rétines, et nos yeux ainsi mêlés, nous liaient un bref instant dans une douleur commune, celle de la guerre et de son traumatisme. J'escomptais me charger de ce mal qui le pesait à un moment, mais pas encore, et lui savait, inconsciemment, que j'étais en mesure de comprendre ce qu'il ressentait, sans qu'il n'eût besoin de m'en peindre le détail.
-D'accord. Me répondait Tenshi en baissant la tête. Là, Thérèse lui tendit la main et le saisissait, comme s'il fut son propre enfant, et silencieusement, nous nous dirigions à nouveau dans la cité de la joie, jusqu'à notre tente. Nous pénétrions, Tenshi accrochant fortement sa main à celle de Thérèse, qui de l'autre côté, s'accrochait à mon bras. Marchant à rythme lent, parce que je ne pouvais avancer bien vite, de loin, peut-être aurions pu dire, que se trouva là une bien étrange, mais réelle et soudée famille.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:18
Si on pouvait détruire des souvenirs avec une baïonnette, le poids du deuil s'en trouverait certainement bien moins lourd à porter, sinon fut-il moins pénible à endurer. Hélas, pour Shigurui, le souvenir périssable de Serafi ne serait pas abattu d'un coup de lame et déjà se trouvait-il le cœur percé en apprenant la perte de l'un de ses plus proches. Tandis que Tenshi rejoignait la cité de la joie, lui en effet recevait la nouvelle de la mort de son parent. Inquiet qu'il avait été de n'avoir reçu aucune nouvelle, lorsqu'il apprit que Serafi avait choisi de m'affronter en combat singulier, il craignit, à juste titre, que le combat tourna en sa défaveur, et de toute façon, organisant dès le soir de l'arrivée de la division blanche, l'encerclement du camp, il devait envoyer des troupes achever cet encerclement par le sud. On lui rapporta alors par message, que le corps de Serafi avait été retrouvé mort sur un parterre de cendre flamboyante, là, où les larmes de sang avaient, sur son ordre, accepté de le laisser me combattre. Paradoxalement, en forçant Tenshi à se diriger vers une "nouvelle famille", le destin étiolait la sienne. Sur le moment, la colère et le dégoût, que la peine nourrissait avec plus de véhémence, le conduisaient à désirer lancer un assaut sur le camp dès son arrivée. Se ravisant ensuite, il choisissait de s'en tenir à son plan initial, quoi que fortement perturbé par la nouvelle, car au-delà de la mort de Serafi, c'était ma présence dans le camp qui le dérangeait. Non pas que la présence d'un seul shinobi risquait de changer en quoi que ce soit la donne, mais qu'une simple et étrange curiosité mêlée d'une irrépressible envie de me tuer, par purs soucis de vengeance imprégnait désormais son ambition.

Une âme sage, idéaliste, dirait que le pardon vaut mieux que la vengeance : l'un annonce un caractère humain, l'autre, un instinct féroce. La férocité étant pourtant l'apanage des bons et grands guerriers, dans pareille situation et face à si grande perte, Shigurui, guerrier et féroce, ne pouvait plus désirer que ma mort de sa main, sans l'assurance d'y parvenir pourtant. Il aurait été bien étonnant en effet, de me tomber pile dessus d'un assaut où l'on sait comme la mêlée rime si bien avec le chaos.
Shigurui ne s'occupait pas de l'installation de son campement de base, la tâche revenait à Iliana et bien heureusement pour cette fois, car il en aurait été bien incapable dans son état, et Iliana n'avait pas encore été mise au courant de la perte de Serafi. La division s'était divisée en quatre bastions chargés de couper les routes à la cité de la joie si elle cherchait à fuir. Les hommes, après une bataille et des heures de marche avec un ventre trop peu suffisamment sustenté ne pouvaient assumer un affrontement de plus, même avec des civils. C'est la raison qui avait poussé Shigurui à décider de ne pas donner l'assaut dans l'immédiateté. Pour le moment, comme à son habitude, il faisait le tour du camp qui se mettait en place, à fin de jauger l'état moral et physique de ses troupes, du moins habituellement oui, car cette fois la raison était tout autre. Iliana n'avait pas beaucoup de difficulté à organiser le campement pendant ce temps, car les modalités en étaient normalisées et formalisées depuis bien longtemps, pour avoir un camp capable de se défendre promptement en cas de mauvaises surprises et une organisation optimale autant de son personnel que de sa logistique.

La marche représentait l'idée de la "salvation", elle étreignait la douleur de Shigurui, qui dans un profond silence, passait les regards sur des hommes affairés à des occupations routinières. Cette division qu'on lui avait confiée, il n'éprouvait pas une grande estime de celle-ci, pas même un semblant d'affection. Serafi, c'était autre chose, il était un compagnon d'enfance, il avait été banni des Momoru avec lui et Iliana, il était l'un de ceux qui pouvaient le comprendre. Des éleveurs de démons, qui depuis la Fracture, avaient acquis le droit de passage vers les contrées inférieures des cauchemars de l'humanité. Ces démons que les hommes, rêveurs ou civils craignaient, étaient les seules créatures dont ceux de son clan se sentaient véritablement proches, et par extension, des membres de son clan aussi.

Épouser le rythme des saisons, c’est accepter parfois un profond ennui. Ce sont les moments de solitude, perdus en soi. Le temps a l’air doux, tout est calme et paisible. Pourtant, une tension aux épaules ne tombe jamais. Les yeux sont à demi-fermés, par un cœur frappé de plaies qui ne trouvent pas de baume pour se refermer. C’est l’acceptation de tout. La dernière étape du deuil. En ces moments, tout charisme que l’on croit posséder fond au soleil. Mais, qui ne connaît pas l’âme ne saurait percevoir les maux d’un homme refermé.
En passant sous l’ombre des bâtisses militaires du camp, Shigurui n'aspirait qu’à un peu de solitude. Besoin d’être seul pour ne pas avoir à expliquer pourquoi il avait envie d’être seul. Ainsi, tout le paradoxe se formait. Shigurui ne laissait pas passer un sourire, et avançait d'une démarche lente. Il ne regardait même pas les soldats et leurs suivants qui le saluaient. Eux, finalement aussi souvent, ne le regardaient plus non plus. Qu’était-il sans l’attirail ? Sans sa suite pour le servir. Un homme comme tout autre, qui perdait même de sa splendeur. Il n’y a que dans les romans que celui qui souffre est attirant. Le visage de marbre, les yeux sans cesse en état de douleur, l’indolence du corps dans une aura perdue on ne savait où. Tout cela en réalité ne faisait que repousser tout être qui voudrait ne serait-ce qu’un instant s’approcher. Pourquoi vouloir percer la muraille d’un homme qui n’en éprouvait pas le besoin ? De mémoire, loin remontait le temps où il jouissait de tendresse et d’amour.
Ainsi, un homme sans amour devient une coquille vide. Sa puissance naissant paradoxalement de ce vide. Insaisissable, impénétrable. Intouchable.

La fatigue déteignait chaque geste et chaque regard qu'il portait autour de lui, tandis qu'il s’enfonçait dans les allées résidentielles, là où les shinobis logeaient leurs familles et leurs enfants quand ceux-ci les accompagnaient en campagne. À l’heure d'un soleil absent dans une saison qui vivait ses derniers frissons, le froid commençait à se prononcer en cette fin de soirée et hormis pour ceux de garde le sommeil promettait d'être pour bientôt, mais pas nécessairement aux meilleurs auspices…
Il lui manquait quelque chose. Quelque chose qu'il cherchait depuis toujours sans avoir conscience de quoi. Aujourd’hui ne faisait pas défaut à cette idiotie et la perte de Serafi ravivait ce besoin. Sur une passerelle de maison de terre, semblable à une cahute préhistorique et réalisée par le génie de la division, à quelques mètres en avant, Shigurui découvrait une scène qui captiva son attention. Une petite fille pleurait ou presque devant les cadavres de petits oiseaux tombés trop tôt de leur nid. Des petits malins s’étaient sans doute amusé à les rendre encore plus laids en les "découpant". Jeu d’enfant qui tire la queue du lézard… Cette petite, cependant, ne trouvait pas le même amusement à jouir de la mort d’un être vivant, paradoxal, quand on vit au milieu de soldats dont le sport préféré et le mal causés aux civils.
-Ils ne souffrent plus, tu sais. S'annonça tristement Shigurui en parlant à la petite fille.

Elle se retournait vivement vers lui. Mais sans avoir l’air surprise. Le brouhaha du camp ne permettait pas de se plonger en soi si facilement. Ils se fixèrent quelques secondes, se découvrant à peine aux lueurs des torches qui éclairaient les allées du camp. Et voilà qu’elle lui sourit. Il ignorait complètement pourquoi… Il ne lui rendit pas ce sourire. Le mensonge n’était pas son adage et se forcer à sourire, jamais il ne le faisait. Même si, dans le fond, ce regard innocent et compatissant l’attendrit. Elle lui répondit alors, sagement et d’une voix polie.
-C’est mon père qui les a tués. Leur cuis cuis l’énervaient.
-Tu étais là à ce moment ?
-Oui.
-Cela t’a choqué ?
-Non.
-Non ?
-Leur mère les avait abandonnés. Après que je les avais caressés. Je crois qu'ils allaient mourir de toute façon...
-Elle a senti ton odeur dans le nid. Dès lors, les oisillons n’étaient plus les siens à ses yeux.
-Je ne savais pas.
-Chaque chose a une place. Cela vaut pour les hommes comme les oiseaux.
-Les hommes ont des places ?
-Comme les oiseaux.
-Vous n’êtes pas d’ici vous.
-Je ne suis de nulle part.


L'enfant ignorait donc le rang de Shigurui, son statut, et cela lui fit un grand bien sans qu'il ne s'expliquât pourquoi. Il était un très grand homme dépassant les deux mètres, maigrelet, au masque recouvrant le haut de son visage jusqu'au nez et avec une peau de loup lui recouvrant les épaules et une longue crinière bleue partant du sommet de son casque pour descendre jusqu'au bas des reins, mimant une queue-de-cheval. Une apparence d'ordinaire repoussante, mais qui n'effrayait aucunement cet enfant, certainement habituée aux choses étranges si elles vivaient au sein de la division blanche. La pauvre enfant était aussi maigrelette que Shigurui, et cela lui rappelait que les difficultés qu'il avait à nourrir sa division concernaient aussi ceux des familles de ses hommes qui les accompagnaient dans leur périple. Le plus terrible des monstres pour lui qui invoquait des démons, n'était autre alors que cette enfant, dont l'innocence n'était pas encore tâchée des atrocités que ses parents ne tarderaient pas à lui inculquer concernant la condition des civils. Un jour, elle serait en âge de prendre les armes, et alors, elle serait cet ange magnifique que l'existence aura transformé en démon. Les lèvres de Shigurui s'ouvrirent, mais aucun son ne sortit, car devant cette beauté fragile, il se rappelait ce qu'il avait lui-même fait des civils rencontrés encore précédemment. Cette enfant, dont les pouvoirs ne s'étaient pas encore réveillé, était-elle si différente du nourrisson qui naquit de la femme pendue ? Cette horreur à laquelle il avait consentit par soucis militaires, n'avait-elle pas causé la perte de Serafi pour guise d'une punition que le ciel et le destin lui infligèrent ? Le doute le saisit autant que les yeux de l'enfant le soulageaient, et il se sentait tournoyer dans un gouffre informe qui n'avait plus ni queue ni tête.
-Vous êtes venu pourquoi ? Lui répondit-elle
-J’ai besoin d’un marchand bien fourni. Pour nourrir mes gens. Répondait Shigurui, non sans ironie...
-Mon papa a dit que le chef du camp faisait ce qu'il fallait, demain nous aurons une distribution, mais ce soir, il n'y a plus rien, je suis désolé.
-Merci.

Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:21
Il allait se retourner, mais elle l’interpella de nouveau. En levant la main légèrement avec un "monsieur, attendez". Il se tournait à nouveau vers elle, mais pas complètement. Portant un regard d’angle et patient à cet instant. Elle lui saisit alors vivement la main, ce qui le fit se redresser sur lui-même, parcouru d’un étrange frisson. Elle lui sourit de nouveau. Sincèrement et innocemment. Abaissant le visage, il se demandait ce qu’elle faisait. Heureusement, elle rompue le silence avant lui.
-Ça va aller, monsieur, vous savez. Lui annonçait-elle innocemment.
-Qui a dit que j’allais mal ?
-Vos yeux.


Il ne pleurait pas. Il ne souriait pas. Il ne fut pas plus triste qu'il en eût déjà l’air, mais ses yeux scintillèrent. Une luminescence due à quelques flots contenus et sans doute aussi d’instinct conservateur. Elle n’avait rien et lui donnait... "Elle", c'est ainsi qu'il reçut ce geste. Pourquoi des gens si purs, étaient-ils tout ce qu’il y avait de capable de sonder l’âme ? Alors que tant d’autres, à qui l’on donnait tout, étaient incapables d’en décrypter les nuances, se demanda-t-il sur le coup…
Il ne savait que répondre. Mais lui pressait sa main dans la sienne. C’est elle, qui, sans doute, voyant qu'il ne savait pas comment réagir face à cela continua.
-Mon père dit que le temps fait tout.
-C’est un homme sage sans doute.
-Oui.
-Je dois partir.... Dit Shigurui, la gorge serrée. Avant de déranger plus que je ne devrais.
-Ou que vous ne sachiez plus quoi me répondre ?


Silence à nouveau. Un ange ou un démon ? Difficile à dire. Frappant son être de part en part, il aurait saigné de tout son corps si l’âme savait s’exprimer par le sang. Être fort exigeait les sacrifices qui encombraient. Le premier était d’accepter la solitude. Que ce que vous aimiez ne soit à vos côtés. Que vous ne possédiez rien d’autre que votre foi. Si personne ne pouvait pénétrer son cœur, c’est qu'il savait que ce choix incombait aussi de souffrir plus encore que maintenant. Et cela, il s'était résigné à le permettre. Il se défaisait de la main de la petite fille. Passablement. Puis se retournant, il reprenait sa marche en lui répondant de dos.
-Merci.

Shigurui laissait derrière lui l'enfant sans se retourner, mais ce n'était pas de ne plus la voir qui allait lui retirer le goût amer d'un nouvel échec dans la bouche. Son orgueil de Momoru l'empêchait jusque-là d'invoquer des démons mineurs pour nourrir ses hommes, mais il en avait oublié les familles qu'il ne côtoyait pas et qui avaient à souffrir tout autant de la disette. La nuit pour ce chef de guerre s'annonçait rude à souhait, car devant soutenir le deuil de Serafi, il sembla que la douleur de cette perte et la rencontre de cette enfant cumulées le conduisit paradoxalement à plus d'humanisme, sinon de considération des siens. Tandis qu'il prenait une grave décision pour lui-même, et cessait de marcher, il entendit une voix familière qui lui fit redresser la tête droit devant lui. Ilina était là, elle parvint à le trouver dans l'immensité du camp et ce n'était certainement pas sans raison, des raisons insuffisantes cependant, car quand elle découvrit le visage de Shigurui, elle oubliait ces raisons en sachant que quelque chose de grave tourmentait son chef et ami.
-Qu'est-ce qui ne va pas ? Lui déclarait-elle sans détour.
-Serafi est mort. Lui répondit-il lui aussi, sans détour.


Un silence passait alors entre tous les deux, un silence insuffisamment pour étouffer le brouhaha environnant du camp. Iliana demeurait fixe, surprise sur le moment, et Shigurui n'ajoutait rien. Elle se saisit de son diadème ensuite, et s'en défaisait pour que ses beaux yeux rouges n'y soient plus dissimulés.
-Comment ? Lui demanda-t-elle gravement.
-Katerik l'a tué, lui répondit-il simplement.
-Katerik ? Fit-elle avec étonnement. Il est ici ?

Shigurui pointait alors du doigt pendant quelques instants la cité de la joie, dont les torches scintillaient fébrilement dans le lointain de l'horizon, en contrebas, bien au-dessous des étoiles qui éclairaient la vallée juste assez pour discerner une masse informe. Là, Iliana comprenait que l'assassin de jadis qui travaillait pour eux s'était semblait-il rangé du côté de la cité de la joie. Les raisons, tous les deux, l'ignoraient, mais ils n'y accordaient aussi pas la moindre importance.
-J'ai déjà ordonné qu'on nous ramène son corps. Ajoutait Shigurui en baissant le doigt.
Shigurui, ensuite, fixait la tresse blonde passant par-dessus l'épaule d'Iliana, il y fixait son regard et y trouvait une grande beauté, mais c'était là le moyen, déjà, pour lui de fuir une réalité. Iliana ne le laissait pas se perdre bien longtemps dans ses songes cependant, car elle lui répondit d'une grande douceur ce qu'elle pouvait, sans le quitter des yeux pour le coup de son côté.
-Je comprends toute l'amertume de l'affliction que tu ressens, et j'y dois sympathiser d'autant plus vivement, qu'il n'y a pas un degré de la douleur que peut nous causer la perte d'un des êtres de notre affection, que l'expérience ne m'ait appris à mesurer. J'ai toujours éprouvé que le temps et le silence étaient le seul remède. Or, ce remède adoucit seulement, mais n'efface jamais les regrets profonds que le souvenir ne cesse de renouveler jusqu'à ce que la mémoire soit éteinte avec la vie. Tu dois te venger Shigurui.
-Demain, je réclamerais la tête de Katerik en échange de leur survie. J'ai pris cette décision dès que j'ai su.
-Tu ne peux pas nourrir la division et promettre la sécurité à la cité de la joie en même temps. Nous sommes des gens d'honneur chez les Momoru, ne sombre pas dans les travers de ces fanatiques de shinobis en trahissant ta parole donnée.


Shigurui montait le pouce sur son index et forçant sèchement dessus, le fit craquer. Iliana plissa les yeux sur lui, sachant qu'il y avait quelque chose qui avait changé. Elle craignait que le code d'honneur des Momoru fût pollué par les délires fanatiques de la division blanche, mais il ne s'agissait pas de cela. Aux seules lèvres visibles de Shigurui, elle ressentit autant la tristesse que l'adoucissement, ce qui lui procura un sentiment de soulagement mêlée de crainte. Les invocateurs de démons n'étaient pas de ceux qui pleuraient normalement. Shigurui s'en retournait pour marcher un peu, et se fit ainsi accompagner d'Iliana, et longèrent ensemble les allées du camp, dans une direction qu'elle connaissait dès le second virage qu'ils empruntaient.
-Après certains deuils, le cœur se ferme complètement : le mort a emporté la clé. Commençait Shigurui en marchant. Combien de morts avons-nous déjà pleuré ? La perte de Serafi me touche, mais sa perte, m'a conduit à penser qu'il me fallait accepter le sacrifice s'il était honorable. Nous honorerons sa mort par un sacrifice, celui de démons mineurs, qui pourront nourrir la division blanche. Je ne veux pas risquer plus longtemps la mutinerie ou voir d'autres enfants maigrichons dans ce camp. Katerik sera livré par la cité de la joie, et j'aurai sa tête, en attendant, que la mort de Serafi ne soit pas inutile.

Iliana, en avançant, se trouvait grandement surprise de ce revirement, les démons qu'invoquaient les membres de son clan pour le combat étaient sacrés, et quoiqu'elle encourageât de nombreuses fois Shigurui à les sacrifier pour nourrir les hommes, le voir se décider était tout de même étonnant pour elle.
-Après ce que tu as fait aux fuyards que nous avons rencontrés, tu penses vraiment qu'ils se rendront ? Qu'ils te feront confiance ? Lui répondit-elle.
-C'est la confiance de mes hommes et la peur dans ceux de la cité de la joie que je cherchais en me montrant ainsi. J'aurai peut-être dû en garder vivant quelques-uns pour les interroger en revanche, qui sait, peut-être aurai-je su qu'il y avait un guerrier de la trempe de Katerik là-bas si je l'avais fait.
-Et si demain, ils refusaient de te céder Katerik ?
-Je lâcherais la division sur eux, comme des fauves, et je réduirais cette cité en cendres. Je ferais en sorte que tout l'est, que tout ce pays, et même au-delà, je ferais en sorte que l'on sache quel sort fut réservé à la cité de la joie.
-Il va nous falloir beaucoup de démons mineurs pour les nourrir, je vais t'aider...
-Nous les invoquerons pendant que nous brûlerons le corps de Serafi.
-C'est pour ça que tu nous emmènes vers l'enclos à bestiaux ?
-Oui, il est vide, nous allons donc le remplir.


Dans une division, tout le monde se connaît, ces hommes vivants et mourant ensemble, des liens indéfectibles s'y créaient et la nouvelle de la mort de Serafi ne tardait pas à traverser le camp. Tous entendirent le nom du responsable, Katerik. Partagés entre l'admiration pour l'exploit à la colère d'apprendre, la mort d'un officier de valeur, les hommes n'en souhaitèrent pas moins que leur chef une mort douloureuse pour l'assassin. Pour honorer le soldat, on plaçait son corps sur un bûcher, et on y mit le feu. Il était très rare que des morts au champ d'honneur reçussent un tel hommage, mais qu'il fut un proche de Shigurui y fût pour beaucoup. Pour l'occasion, les deux invocateurs Momoru cédèrent donc aussi une pitance bien étonnante. Ils invoquèrent de très nombreux démons mineurs en masse dans un enclos, où les hommes s'employèrent à tuer toutes ses créatures pour les faire cuire et les manger. Que toutes ces bêtes vinrent des enfers ne changèrent rien qu'une fois cuite, elles demeuraient seulement de la viande. Pendant le bûcher, on pouvait donc entendre les hurlements des bêtes, et sentir la chaire à des kilomètres à la ronde. Un hommage sanglant, pour un homme qui l'était tout autant. La plupart des hommes en réalité, quoique désirant la vengeance, se fichaient bien de l'honneur fait à leur officier, bien plus intéressés par le ventre plein que leur chef leur consentait en sacrifiant ce qu'il avait de plus précieux. Ils n'en acquirent que plus de respect d'ailleurs, car pour des shinobis, sacrifier les bêtes avec qui l'on pactisait pour la bataille était une grave offense aux arts militaires qu'ils glorifiaient, ainsi tous ne pouvaient qu'estimer sincèrement ce sacrifice.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:24
Les uns mangeaient donc, tandis que d'autres restaient proches du bûcher, aux côtés de Shigurui et de la froide beauté d'Iliana qui pour l'occasion, chantait un chant de Momoru. Un chant émouvant, qui saisissait au cœur les comparses de circonstance, et qui donnait l'idée à Shigurui que l'âme de son ami trouverait ainsi plus facilement son chemin vers les enfers. La chanson apaisait la colère, et passait par-dessus tous les sons de l'horreur. Le crépitement des flammes, l'horreur des créatures sentant venir leur sacrifice dans un dernier cri, les rires et les sanglots des hommes trop heureux de pouvoir enfin manger à leur faim ou de pouvoir nourrir les leurs.
-Il souffle, il souffle.
Le Conflit est parti.
Il marche sur l'emblème.
Le Conflit s'est enfui.
Tous les hommes ont senti, l'étreinte endormie.

Il pleure, il crie.
Le Conflit est fini.
Même le sang, il nourrit,
Lorsqu'il se sacrifie.
Tous les hommes l'ont encore dit, il sera banni.

Suis-le, écris-le.
Le Conflit nous l'interdit.
Sa patrie, ses martyrs,
Il crut voir faillir.
La vraie liberté des hommes, prend vie.

Il souffle, il souffle.
Le Conflit est parti.
Il marche sur l'emblème.
Le Conflit s'est enfui.
Tous les hommes ont senti, le corps de sa folie.

Il peine, il peine.
Le pauvre petit Conflit.
Il craint, il plaint.
Tous les hommes ont décidé, d'être de magie.
Viens me donner son fruit, que nous y croquions tous le cœur, et son prix.
Il a cru nous avoir vaincus, il a ri.
Notre âme, c'est ce qui le remplit.

Il souffle, il souffle.
Le Conflit est parti.
Il marche sur l'emblème.
Le Conflit s'est enfui.
Tous les hommes le savent, ils rient aussi, ils savent tous, ils savent tous, oui aussi.
Qui leur a menti.

Il souffle, il souffle.
Le Conflit est parti.
Il marche sur l'emblème.
Le Conflit s'est enfui.

Il saigne, il meurt.
Le Conflit est trahi.
Il fuit mon emblème.
Le Conflit s'est enfin enfui.


Ainsi, dans une ambiance malaisante, la poésie trouvait encore de l'écho, et même au sein d'esprits aussi glaciaux que ceux des Momoru, même dans le cœur des fanatiques de la division blanche, quoiqu'une âme simple et pure ne pût saisir la substance de leur saveur, on pouvait entendre et voir une certaine mélancolie, de quoi rappeler qu'il existait de l'humanité, toujours, même au fond de l'horreur la plus sereine. Fille de la férocité, la guerre n'enfante que forfaits, meurtres et cruautés, quelle preuve que ceci encore aujourd'hui, où l'on fêtait la mort dans le sang et la mort, au sens le plus littéral qui fut ? Si devant la peine de Shigurui, et la douleur silencieuse d'Iliana, on n'éprouva pas de pitié, ce n'était pas qu'ils étaient moins humains qu'un autre, même si leurs pouvoirs de shinobis faisaient penser à bien d'autres le contraire. Sachant leur malheur, l'indolence et l'indifférence seraient la réponse de la grande majorité. Parce que la plus grande cruauté envers l'humanité est d'avoir de la pitié pour les méchants, chose à laquelle l'instinct, quoi que l'on fasse, ne s'y trompe ni ne s'y laisse prendre. Tous ces hommes, face au bûcher de leur officier ou ami, et festoyant sa disparition dans une orgie de bêtes égorgées pour être dévorées dans l'instant suivant, n'inspiraient pas plus de clémence parce qu'ils étaient doués de sentiments, car on n'oublia pas la force de cruauté dont ils étaient eux-mêmes capables. La cruauté intentionnelle est l'œuvre d'un démon plutôt que celle d'un homme, ces hommes qui se nourrissaient cette nuit-là de démons justement.

Shigurui et Iliana étaient finalement si différents de ces hommes qu'ils méprisaient pour la majorité ? Ils ne se repaissaient pas des créatures qu'ils invoquaient et pleuraient plus sincèrement que tout autre la perte de Serafi, mais ils n'en demeuraient pas moins les passages vers les portes des enfers, dont ils avaient l'interdiction du franchissement et tout de même le privilège d'en faire ressortir les plus innommables rejetons infernaux. Ce que cette nuit qui mélangeait le deuil et festivité morbide démontrait peut-être, c'était que les hommes restaient toujours, quel que soit le côté de la barrière, quel que soit le point de vue, toujours esclaves avant tout de leurs pulsions. La faim, la peine, la vengeance....

Quand Iliana terminait d'ailleurs sa chanson, elle fut saisie d'une pulsion. Shigurui n'avait pas décroché un mot depuis qu'il avait invoqué les démons. Il fixait le bûcher de son ami, s'y tenant près, les lèvres et le corps immobile, comme si le crépitement du bois et la danse des flammes le transformaient en pierre. Elle aurait voulu l'enlacer, c'était cette pulsion qui la saisissait en effet, mais devant les hommes, elles savaient qu'elle ne le pouvait pas. Alors, elle s'approcha de Shigurui pour se placer à son côté, et avec son auriculaire, elle frôlait la main de Shigurui, tout discrètement. À cela, il ne répondit rien, il restait fixement accroché à la vision de son bûcher, se complaisant dans un silence qui n'exprimait rien de plus que le mal qu'il contenait en lui.
-Nous sommes maudits, lui murmurait-elle alors. On ne peut aimer des gens comme nous.

"Pourquoi me parle-t-elle de cela maintenant ?" Se demanda alors Shigurui. Quel rapport en effet y avait-il avec cet instant ? N'était-elle pourtant pas simplement en train de quémander subtilement de l'attention à celui qui était le plus à même de la comprendre. Sans gêne, il lui saisissait alors la main, ce que dans la pénombre à peine éclairée par le bûcher nul ne remarqua. Iliana ne contint pas l'esquisse d'un sourire devant ce geste, et fut tout ouïe à ce que Shigurui lui répondit alors en même temps.
-Toutes les sociétés harmonieuses englobent toujours un lot nécessaire de maudit.
-Tu trouves notre société harmonieuse ? Tu trouves ce monde cohérent ? Nos histoires cohérentes ? Lui répondit-elle alors avec étonnement.
-L'homme n'a rien de cohérent, dans ses décisions ou dans ce qu'il est,... Je sais seulement qu'il faut des parias comme nous, pour que le reste se sente normal. C'est ainsi. Pourquoi tu me parles de ça ?
-Si je n'étais pas née Momoru de la branche démonique, j'aurais voulu être un ange. Je ne serais pas banni, je ne serais pas ici.
Seulement alors Shigurui tournait la tête vers elle, et se permit de lui sourire tendrement.
-Mieux vaut allumer une bougie que de maudire les ténèbres. Lui répondit-il tout en retournant son regard sur le bûcher.


Iliana ne comprit pas ce que voulait alors dire Shigurui, tandis qu'il regardait à nouveau le bûcher. Elle eut l'impression que son ami se résignait à une destinée ténébreuse, dans laquelle quoique devant faire office de démon et de malheur, il pouvait toujours, parfois au moins, laisser passer de lui la lueur, certes fébrile mais réelle, d'un espoir de meilleur.
-Arrête de croire que nous sommes du mauvais côté parce qu'un instant, nous souffrons ou faisons preuve de cruauté. Tous les hommes souffrent, tous les hommes sont parfois cruels, le bien et le mal sont les deux facettes d'une seule pièce qui ne peuvent se regarder tant elles sont liés. Terminait fatalement Shigurui sans quitter le bûcher des yeux.

Avant que la division blanche n'entame le bûcher de Serafi et le festoiement, à la cité de la joie, on commençait seulement à se calmer. La fausse alerte donnée par les gardes qui rencontrèrent Tenshi, après avoir causé un certain tumulte, s'était radoucis grâce aux gardes et résidents qui firent passer le mot d'une relative sécurité pour la nuit. Pendant que la division blanche se nourrissait, à la cité de la joie, ils y en avaient qui étaient encore à la tâche. Les défenses n'étaient pas tout à fait terminées, et l'urgence de l'événement empêchait certains de trouver le sommeil, une insomnie qu'ils mettaient au service de la confection de ces défenses. Il s'agissait surtout de gardes et de réfugiés de bonnes volontés à qui on laissa des directives. Pendant ce temps, d'autres trouvaient un repos bien mérité, tel que Batzu ou Bohémon.

Dans la tente qui leur fut attribuée, Kumiko et Fujisawa ne se reposaient pas. Alors que le jeune homme souhaitait passer une nuit tumultueuse et passionnée, il devait faire avec les craintes de Kumiko qui n'avait pas du tout l'esprit à des jeux luxurieux. Lui ne se sentait pas si inquiet que cela, pour plusieurs raisons, la première était l'indifférence qu'il vouait au sort de ce camp de réfugiés, la seconde qu'il n'abandonnait pas l'idée d'une fuite si cela devait tourner mal, et la troisième qu'il n'allait pas tarder à raconter à Kumiko si elle ne cessait pas de lui rabattre les oreilles avec tous les doutes qui l'empêchaient de se détendre avec son amant.

La tente qu'on leur attribua était spacieuse, mais très loin d'être confortable, assez grande et large pour s'y tenir debout, mais au mobilier pauvre avec une seule paillasse sur le sol en guise de lit. C'est sur cette paillasse que se tenait Fujisawa en tailleur. Fumant la pipe, il regardait Kumiko faire les cent pas dans la tente tout en parlant tant à elle-même qu'à lui. Ses pensées libidineuses et la conviction de parvenir à ses fins lui donnaient la patience de l'écouter et de la rassurer autant qu'il pouvait. Pour satisfaire leurs désirs, les hommes étaient toujours capables de prendre sur eux-mêmes il fallait dire, surtout un homme patient et réfléchi tel que Fujisawa. Le désir qu'il éprouvait à l'égard de Kumiko n'était pas seulement physique cependant, il ne fallait pas comprendre ce rejet de la gravité de la situation comme seulement l'affaire d'un homme plus intéressé par son membre inférieur que par l'intérêt de la femme portant son affection. Plus le désir a été pressant et puissant, plus la possession de la chose désirée est délicieuse, Fujisawa le savait bien et devoir se la mettre derrière l'oreille jusqu'à mériter mieux faisait selon lui "parti du jeu". Ni cette guerre, ni ce camp, ne l'intéressaient. Il n'était là et n'agissait que pour satisfaire les élans de celle qui parvenait à éveiller chez lui plus de désir qu'il n'en eut jamais connu auparavant, tant et si bien qu'il lui liait consciemment son destin pour satisfaire ses pulsions et en venir à comprendre un jour ce qui causait autant de désir en lui chez cette femme.
-Tu veux bien t'asseoir s'il te plaît ? Lui demandait-il en soufflant la fumée de sa pipe.
-Comment tu peux être aussi calme ?! Nous ne sommes pas prêts, demain, ils vont nous tomber dessus et ce camp sera rasé ! Lui clamait-elle.
-Ce n'est pas toi l'idéaliste ? On peut s'en sortir, ce ne sera pas simple, mais on peut. Répondait Fujisawa avec désinvolture.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:27
Kumiko cessait de tourner en rond, et se fixait un instant tant dans le silence que l'immobilisme. Fujisawa lui rendait alors un aimable et rassurant sourire sans cesser de fumer sa pipe. Cette soirée devait être normalement un moment de festivité, mais les événements avaient relégué tout cela à l'impossibilité, la cité de la joie dans son ensemble, c'était finalement endormie sans s'adonner à ses chants traditionnels autour de son immense brasier. On pensa à peine à se nourrir dans le camp, mais pas tous réunis comme à l'habitude, non, ni jeu ni chanson pour cette nuit marquée par le deuil et la crainte. Fujisawa ne se laissait pas prendre par cela, il préférait continuer de vivre et de profiter quoi qu'il en coûtait, sans se soucier plus qu'il ne fallait des malheurs hypothétiques du lendemain. Kumiko, fit alors quelques pas pour aller s'asseoir en tailleur elle aussi, à côté de lui, mais elle ne démordait pas de ses pensées morbides et de la pression qu'elle se mettait finalement elle-même sur tous ces événements.
-C'est allé si vite... On devait se reposer ici, et nous sommes toujours en guerre. On ne peut pas les abandonner, mais là, je ne vois pas, mille shinobis, c'est perdu d'avance. Lui soufflait-elle.

Fujisawa aurait pu saisir l'occasion de lui proposer de partir, et d'ailleurs l'idée le séduisait. Pourtant il n'en fit rien, une curiosité malsaine le poussait au contraire à rester, pas seulement pour plaire à sa belle, mais parce qu'il voulait voir ce qu'il allait réellement advenir de cette histoire. Vidant sa pipe à même le sol et écrasant un instant la cendre avec son pied, il répondit à Kumiko dans sa nonchalance habituelle.
-Sauf si tes amis arrivent à temps.
-Qu'est-ce que tu veux dire ? Lui demanda-t-elle étonnée.
-J'ai fait envoyer trois cavaliers vers les emplacements supposés de l'alliance. Du moins ceux que je pouvais déduire des déplacements que nous connaissons. Avec de la chance, nous recevrons des renforts dans quelques jours. Il faut juste qu'on tienne bon.
-Ils ne se bougeront pas et ne changeront pas leurs plans pour un camp de réfugiés...
-Non, mais pour détruire une division entière de la confédération clanique il y a moyen qu'ils se bougent. Rien n'est sûr, mais nous avons fait ce que nous avons pu dans le temps qui nous était imparti.
-Comment être sûr que ces cavaliers trouveront les divisions de l'alliance et qu'ils ne fuiront pas ? Et puis comment tu les as choisis d'ailleurs ?
-Autant de questions... Répondit Fujisawa en soupirant. Il faut parfois faire confiance, seulement et simplement confiance. Peut-être que ça donnera quelque chose ou peut-être pas. C'était pendant qu'on préparait la muraille avec Zö, je me suis dit qu'il fallait le tenter. On ne contrôle pas tout, tu sais, on n'y peut rien.
-C'est toi-même qui avais dit qu'il n'y avait aucune chance que l'alliance leur vienne en aide... Et maintenant tu me dis que nous devons avoir confiance.
-J'ai dit aux hommes de mentir... M'enfin, vu la tournure des événements ce n'est plus un mensonge, j'ai parié et j'ai gagné. Je suis assez fier de moi sur ce coup d'ailleurs.
-Qu'est-ce que tu veux dire ?
-Je leur ai dit de dire que la division blanche était déjà là et nous assiégeait. Ce qui est maintenant vrai. Inutile de le dire aux autres par contre je pense. À moins que cela ne soit absolument nécessaire. Je ne suis pas assez fou pour affronter la division blanche avec des civils sans essayer d'avoir une aide de l'alliance... Cela, t'étonne-t-il réellement, franchement ?


Fujisawa ne pouvait s'empêcher alors de sourire très largement de l'ironie de la situation. Si la division blanche n'avait pas assiégé la cité de la joie et que l'alliance avait dépêché une troupe pour rien, il se ferait sans doute exécuter. Un pari très risqué pour le coup, mais il avait choisi de miser sur la malchance et ainsi, ne se trompa pas sur ses prédictions. Il prévoyait au pire de faire enrôler la cité de la joie pour ne pas rendre un déplacement des troupes inutiles, mais ce plan de secours n'avait plus vraiment de sens. Fujisawa, en bon joueur qu'il était, ne misait pas s'il n'y avait une belle récompense à la clé. Cette récompense était le divertissement, et de pouvoir, à cet instant même, obtenir un peu plus d'affections de Kumiko. Joyeuse qu'elle était d'obtenir un nouvel espoir, même minime, elle vint se placer face à Fujisawa qui lui renvoyait un regard coquin. Elle rougit par-dessus ses taches de rousseur, et se sentit plus éprise de lui qu'avant encore. Là, l'amour n'allant jamais sans le désir de plaire, elle découvrit son front en tirant sur ses cheveux pour les passer derrière une oreille.
-Je sais que tu te fiches bien d'eux, tu sais... Mais vraiment, merci de t'investir quand même. Commençait-elle.
-Ce n'est pas pour eux, mais pour toi. Répondit Fujisawa sans la laisser continuer. Maintenant, je peux m'attendre à ce que tu tiennes ta promesse ? Finissait-il sur le ton de la taquinerie.


Le désir d'une femme n'est jamais douteux, puisqu'elle y risque son honneur, quand elle fait la promesse de bonnes et belles faveurs à un homme, c'est qu'elle consent à retenir en elle toutes ses ardeurs. Fujisawa n'était pas l'homme le plus bon qui fut, mais il cherchait toujours sincèrement à satisfaire les besoins de Kumiko, et cela, elle le savait autant qu'elle savait comment le récompenser. Preuve que toutes les histoires d'amour n'étaient pas belles et romantiques, et tenaient parfois plutôt d'un simple rapport d'attirance charnelle ; ces deux-là se complétaient en s'offrant mutuellement la satisfaction d'un besoin primale. Fujisawa n'était pas intéressé par la cause de Kumiko, cette guerre civile n'avait pas plus d'importance pour lui que les morts qui en jalonnaient l'historique. Lui était un outil de plus pour parvenir à la liberté des habitants de Gobi qu'elle désirait plus que tout, et elle lui donnait de quoi assouvir ses besoins masculins et certainement un besoin d'affection qu'il ne reconnaissait pas. Toujours est-il qu'elle lui offrit la nuit qu'il espérait, pleine d'insouciance, capable pour quelque temps, de s'abandonner dans des plaisirs qui ne laissaient aucune place aux malheurs qui pouvaient survenir le lendemain.

Cet ébat se déroulait peu après que Tenshi, Thérèse et moi traversions le camp pour retourner à notre tente. Tenshi n'était pas tellement dépaysé, puisqu'il venait de cet endroit. Sa venue et cette rencontre me firent me poser de nombreuses questions cependant, des questions que je ne soumettais à personne d'autres qu'à moi-même. Puisqu'il était fils de shinobis, et que son chakra était si fébrile qu'on pouvait supposer qu'il se réveillait à peine, qui était le possesseur du troisième chakra que j'avais ressenti dans le baraquement puisqu'il ne pouvait être le sien ? Aussi, est-ce que Shigurui en rencontrant le père et la mère de cet enfant avait conclu que nous avions des shinobis parmi nous ? J'ignorais alors que ses hommes avaient omis de lui dire qu'ils rencontrèrent un shinobi parmi les fuyards, une chance pour nous que j'aurai conclus, si je l'avais su. Je ressentais encore ce chakra inconnu, je pouvais donc aussi conclure que la mère de ce jeune enfant était une civile. Je ne pouvais encore le harceler de question, il n'était pas en état, mais j'avais hâte que nous ayons une discussion, si la division blanche nous en laissait le temps du moins...

La cité était encore quelque peu agitée, et de ci et là nous croisions de ces résidents conversant sur les malheurs qui s’abattaient sur eux. Le calme et le courage n'étaient pas des réminiscences à considérer acquise pour un conglomérat de victimes fatiguées de subir les affres d'un conflit qu'ils subissaient sans s'en sentir concerné. D'ailleurs, tous ici, je crois, n'en comprenaient pas plus que les soldats qui y participaient les réelles causes ou conséquences. Sans doute aussi désireraient-ils s'enfuir loin de la cité de la joie, mais sachant maintenant ce qu'il advint de ceux qui s'y étaient essayé, le bruit de cela se répandant rapidement, même si tard dans la nuit, ils ne pouvaient que s'enfermer dans ses murailles de terres et de roches improvisées en espérant que les teneurs d'armes parviennent miraculeusement à repousser la vague fanatique de la division blanche.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:29
À un moment, Tenshi se stoppait, et fermement accroché à la main de Thérèse, il nous empêchait de continuer d'avancer. Son regard s'était fixé sur un homme à genoux et abattu, les mains fixées derrière lui à un poteau. Voyant cela, Thérèse et moi, nous rappelions l'ivrogne qui avait violenté l'une des prostitués et que nous avions finalement tous oubliés dans la tourmente. Pourquoi le regard de cet enfant était happé par cela ? Je ne le savais pas, mais il ne pouvait s'en détourner. Thérèse me regardait un instant, questionneuse, mais je n'avais pas de quoi lui répondre. Tenshi lui lâchait alors la main, et de lui-même, se rendit vers cet homme. Thérèse allait le retenir, mais je lui saisis l'épaule pour qu'elle le laisse faire. Cela m'intriguait et j'avais le sentiment que nous devions le laisser s'y rendre. Tenshi avait l'allure d'un petit ange perdu sur terre, qui se rendait vers une âme en peine, parce qu'il ne savait et ne voulait rien faire d'autre que d'aller vers ce qui paraissait aussi perdu que lui. Thérèse vint à se blottir contre moi, craignant silencieusement qu'il arrivât quelque chose de fâcheux au petit garçon. Celui-ci s'avançant, étrangement, bien confiant vers cet homme. Cet homme, il était voûté sur lui-même, le visage si bas qu'on ne le voyait plus. Il ne me sembla pas qu'il y eut un danger. Bien au contraire, il me semblait presque halluciner tant ce que je voyais était étrange.

Aucune grâce extérieure n'était complète si la beauté intérieure ne la vivifiait pas. La beauté de l'âme se répandant comme une lumière mystérieuse sur la beauté du corps, Tenshi était par là, à cet instant la quintessence de l'apparente innocence accentuée par sa longue chevelure blanche, qui ballottée par le vent, mimait un nuage juché sur un visage. Cette chevelure épaisse et ondulée, suffisamment pour cacher ses longues oreilles le faisait rayonner comme un astre dans la nuit.
Présentant à l'homme le visage figé de l'innocence et de la fierté, il était pâle, si pâle et sans défaut de peau qu'il en refléterait la lumière dans son entièreté. Il avait la peau d'apparence douce et les lèvres roses et pulpeuses qui s’assombrissaient selon la lumière des torches alentours.
Ses yeux étaient d'un bleu profond et immaculé, ses yeux qui sondaient sans gêne et en toute franchise le regard de l'homme qui s'y attardait quand il se redressait, captivé dès lors, par leur capacité à refléter la lumière eux aussi. Le bleu de ses yeux lui paraissait surnaturel tant, ils accompagnaient des mêmes impressions le visage qui les portait ; une assurance et une fierté qui renvoyait un éloignement total de l'ensemble de son environnement, ajoutant de l'humilité à une stature orgueilleuse de prime abord.

La rencontre d'un ivrogne qui perdit tout espoir de bonheur dans les gorgées d'un breuvage maudit et d'un petit ange nimbé d'une irradiante lumière salvatrice. La tristesse de Tenshi le conduisit au besoin de soigner la moindre douleur qui lui apparaissait, le malheur de l'un poussant à la volonté du bonheur de l'autre, comme ce que la souffrance enfantait la sainteté par excès de désespoir. Le soudard atrabilaire s'adoucissait devant Tenshi, qui se tenait silencieusement à le contempler d'un air désolé et les yeux larmoyants. Thérèse me pressa du regard d'intervenir pendant ce temps, mais je m'y refusais, dodelinant la tête et l'invitant à regarder d'un coup de menton, car je sentais que quelque chose d'important se passait. Cet homme jugé plus tôt ne savait que dire devant ce regard à la fois inquisiteur et compatissant que lui imposait l'enfant, et si d'ordinaire, il aurait sûrement montré les crocs, il se sentait cette fois démunie devant cette tristesse qui surpassait de si haut la sienne, si haute qu'elle paraissait innommable à porter sur de si jeunes épaules, et puis, on ne querellait ni les sourires du ciel, ni les salutations des anges comme celui qui lui apparaissait.
-Qu'est-ce que tu me veux petite ? Se déclarait le prisonnier qui confondit Tenshi avec une petite fille.

Tenshi ne répondit rien, plutôt, il dressait la main et la posait sur la joue de l'homme qui fut parcouru d'un frisson. Une contraction lui saisit le corps, jusqu'au soudain relâchement, comme si la légèreté le traversait d'un doux rebond. Tenshi, sous nos yeux étonnés et Thérèse et moi, le fixait ainsi, d'un regard mélancolique et digne. L'homme se mit alors à pleurer, sans comprendre pourquoi il s'effondrait sur lui-même, laissant ses larmes aller et emportant avec elles la somme de ses malheurs, au moins pour ce petit et étrange instant. La vie de l'homme, quelque longue qu'elle soit, ne lui offrait qu'un tissu de contentements et de peines : de douceurs en supplices, la fortune promenait à son gré le riche et le pauvre, et les mortels n'avaient aucun moyen de connaître ce que le sort leur préparait. Ainsi se soumit-il cette nuit au sort de la lapidation, et trouva le repos de son âme dans le regard douloureusement silencieux de Tenshi.

Tenshi se retournait vers nous, et quoique je trouvasse encore au fond de ses yeux tout le malheur et l'horreur d'une vision cauchemardesque, il me perçait de sa douceur comme une épine en plein cœur. Thérèse s'accrochait à moi, et eut un bref moment peur de lui. Non pour la menace qu'il représentait, mais pour l'incompréhension qu'il faisait ressentir. Là, seulement, Tenshi nous parlait, d'une mélodieuse et androgyne voix, il ne semblait pas comprendre, et exprimer plus qu'une question à travers quelques mots.
-Pourquoi il est attaché ? Nous demanda-t-il.
-Il a frappé une jeune fille, lui répondit Thérèse.
-Qu'est-ce qu'il va lui arriver ? Continuait Tenshi.
-Il doit... N'osait terminer Thérèse, et que pourtant Tenshi comprit sans mal.


Ses yeux tombaient vers le sol, et je me déliais de Thérèse pour me rendre vers Tenshi. Quelques pas y suffisaient et quand je parvins jusqu'à lui, sans détour, je lui demandais ce que je croyais comprendre de dilemme qui passait en lui.
-Tu penses que nous devrions le libérer ?
Son regard brillait soudainement sur moi, et bien que j'y trouvasse encore ce mal qui ne dormait pas, il y eut une fébrile lueur d'espoir et de joie qui scintilla en lui, comme si je le libérais par cette seule question d'un autre poids trop lourd à porter. Il semblait avoir un besoin vital de cette question, et il y répondit sans réfléchir un instant.
-Oui.... Me lâchait-il.
Nos instincts sont égoïstes, ils viennent de la bête, qui lutte pour vivre, et qui sait qu'elle doit mourir. Nos élans sont généreux, ils viennent de l'ange, qui est prisonnier dans la bête, et qui sent qu'il doit survivre. C'est l'honneur de la volonté de faire obéir l'instinct à l'élan, la bête à l'ange. Tenshi choisissait l'ange, et ce même si je pouvais sentir une bête endormie en lui. Pour cette fois, il fallait dire, qu'à la porte de son cœur était toujours le bon ange. Le cas de cet homme m'était tout à fait égal, et si cruel que je puisse paraître, l'exil ou sa lapidation ne me faisaient pas le moindre effet. Pourtant, me retournant vers Thérèse, je lui signifiais du regard que cette décision était, je le craignais, très importante pour l'enfant qu'elle venait de recueillir. Je la sentis hésiter un instant, et savais que ce fut parce que libérer cet homme était de trahir la volonté de son frère. Thérèse se mit alors sourire, aussi tendrement qu'elle savait le faire, cette douceur qui guérissait le cœur et apaisait les sens. Elle hochait enfin la tête, lentement et sûrement sans perdre le sourire, et ce, faisant, illuminait d'autant plus le regard de Tenshi, qui me semblait avoir toujours des difficultés à lâcher quelques mots. Peut-être pensais-je tandis que je faisais le tour du poteau, que la douceur de Thérèse désarmerait sa propre tourmente comme elle désarmait la mienne.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 3 Avr - 7:32
L'homme était surpris, et ne savait que dire pendant que je lui détachais les mains. Tenshi semblait satisfait, mais derrière son imperceptible sourire, je ne découvrais pas encore l'essence de l'enfance immaculée et sans tache de malheur, ce n'était là qu'une sucrerie, qui satisfaisait en peu et pour de temps ce qui l'accablait.
-Comment je peux vous dire merci ? Nous suppliait l'homme que nous venions de libérer.
-Je n'oublie pas pourquoi tu as fini là. Commençais-je à lui répondre. Puisque la douleur toujours victorieuse est notre lot, apprends l'art de la désarmer. Prends exemple sur elle et lui, qui trouvent en toi de quoi mériter le pardon.
-C'est un garçon ? Demanda alors l'homme non sans étonnement.
-S'en est un, lui répondais-je en me rendant vers Thérèse.
-Merci petit...


Mais Tenshi ne lui répondit rien de plus qu'un forcé sourire, dissimulant à peine sa désolation derrière ce visage angélique, voile imperméable et opaque de l'innocence. Il s'en retourna à son tour vers nous, Thérèse et moi, alors que caressant un bref moment la joue de Thérèse, et qu'elle en profitait pour y embrasser ma paume, je ne retenais pas un doute anodin.
-Ton frère ? Lui demandais-je.
-Vu la situation, tu sais... Il a d'autres soucis. Me répondit-elle presque avec amusement.
-Tu changes bien vite d'avis. La taquinais-je. Mais je crois que c'est nécessaire pour lui.
-Tenshi ? Me demanda-t-elle.
-Oui. Toi qui n'irais jamais contre la volonté de ton frère hein...
-C'est mon frère qui m'a dit une fois que la conviction s'ébranle plus difficilement encore qu'elle ne s'établit.
-Quel rapport ?
-Il s'est trompé.


Là, le jeune garçon nous était proche, et quoi que silencieux, pendant que l'homme derrière lui ne savait que faire ni où aller, Thérèse posa son regard sur lui, Tenshi. Tous deux se regardèrent alors sans ne savoir se délirer l'un de l'autre, tant que je me figurais être l'Intrus du tableau. Par leurs yeux, passaient les grâces de la douceur et de la bienveillance. Thérèse ne me répondit donc pas. Occupée qu'elle était à prouver que la douceur supporte les défauts et les mauvais procédés du prochain pour l'attirer par ces égards, à la connaissance et à l'amour des Dieux. Je me rendis alors seul et le premier vers notre tente, considérant qu'il nous fallait dormir, et ne pas chercher davantage de réponse. La nuit était celle de ceux épuisés qui devaient recouvrer un peu de force pour un lendemain incertain. D'autres veillaient toujours, à l'œuvre pour que les défenses tiennent bon. Quelle nuit aurait pu donc bercer les songes que nos malheurs allaient maintenant inspirer ?



Chapitre 4 : Le drapeau blanc

La vie n’est que le songe d’une nuit, et le songe d'une nuit abrite un rêve. En rêve, un espace et temps ne sont que des symboles... Ni le temps, ni l'espace n'ont une réelle emprise sur les matières de l'invisible et de l'impalpable.
Tenshi, il s'était laissé emporter par des enfants qu'il avait vu jouer au-delà de sa fenêtre dans une ville occidentale, bien différente de ce que l'on trouve dans le désert de gobi, dans le pays du vent. Amusé et intrigué, il passa la porte à la barbe de sa mère Thérèse pour aller rejoindre les enfants dans leurs jeux. Il devait être pas loin de midi à ce moment, car le soleil approchait de son zénith. Les enfants jouaient à cache-cache, à la balle au prisonnier, à la marelle, jusqu'à ce que l'un d'eux se présente avec un petit jouet — un pantin articulé.

La totalité des enfants se disputèrent pour l'avoir, sauf un, Tenshi, qui ne faisait que regarder le pantin de bois être agité dans tous les sens par les enfants qui se le disputaient. Soudain, les yeux de Tenshi changèrent, ils se mirent à luire au soleil, reflétant de splendeur cet astre en leurs centres. À ce moment, les cloches sonnèrent dans les nuages, les nuages tintèrent de leurs sons jusqu'à ce que l'atmosphère fût pensante et le soleil démarrait sa descente vers la nuit, bien trop rapidement. Tenshi s'illumina de l'intérieur, comme la lueur dans la pénombre croissante. Plus sa lumière était forte, plus les ténèbres qui l'entouraient se devaient d’être épaisses. Il voyait soudainement le monde complètement différent, plus sombre, plus froid plus — brutal.

À force que les enfants se disputèrent le jouet, il en fut sévèrement abîmé, puis jeté au sol. Tenshi se rua dessus sans réfléchir et le brandit fièrement comme un trophée, tout le sourire qu'il fit, figurait une joie sans contour d'avoir en main ce jouet cabossé. Malheureusement, les enfants se moquèrent et n'en avaient plus cure. Ils décidèrent de rentrer chez eux. Tenshi les invitait à continuer de jouer, car le soleil n'était pas encore complètement couché, mais ils ne l'écoutèrent pas. Les cloches sonnèrent toujours. Alors qu'il poursuivait les garçons, tenant fermement le jouet en main, il leva les yeux vers les hauteurs où il vit le soleil plus grand et plus beau que jamais pour lui. Il fut si émerveillé qu'il en lâcha le jouet et se mit à courir vers le soleil à grande allure, il tendait la main comme s'il pouvait le saisir. Il le voulait, il le voulait si hardiment. La lumière devenait aveuglante, quand il entendit des pas derrière lui. Il se retourna et regarda innocemment ce qui se présentait.

Un grand et beau chevalier, à la chevelure sombre et très courte dans une armure tout aussi sombre, qui ne brillait en rien, il avait des yeux rouges de braise pourvue d'une lueur bleue rutilante en leur centre. Tenshi cria machinalement PAPA ! Mais son père semblait emprisonné dans une ombre, on ne le discernait qu'à peine, il était silencieux et la lumière aveuglante qui entourait Tenshi semblait le dévorer, prête à l’éteindre. Il le voyait si peu bien qu'il doutait qu'il fût bien son père, ressentant pourtant un immense amour pour lui. Tenshi se mit à courir vers lui, abandonnant le soleil, il leva la main pour l'attraper, mais son père disparu quand il cria une nouvelle fois — PAPA ! Les cloches s'arrêtèrent. Quand la lumière disparue et son père avec elle, Tenshi tourna son regard vers le soleil, il était toujours beau, mais il était noir, et aussi improbable que ce soi, demeurant noir, il demeurait aussi toujours aussi brillant au-dessus d'une immense montagne, dont le sommet était creusé par le sillon de l'astre flamboyant qui siégeait dans les hauteurs. Quand il regarda le jouet par terre à son retour, il était comme neuf. Il aurait voulu à nouveau le saisir, et s'enfuir avec, mais là à l'horizon, cet astre étrange et noir, si puissant qu'il paraissait, lui semblait être un meilleur trophée, alors il se mit à courir à nouveau vers lui, il courut sans s'arrêter, il courut vers lui, jusqu'à disparaître dans cette lumière noire, jusqu'à — s'y brûler. Enfin, alors, seulement, la porte des rêves se refermait.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeJeu 11 Avr - 0:28
La nuit fut reposante, mais je me levais bien avant l'aube, et silencieusement, tandis que Thérèse restait dans les bras de Morphée tout comme ses filles, je me rendis à la couche de Tenshi, pour m'agenouiller à côté de celle-ci, directement sur le sol, et saisir sa tête de ma main. Je me permis ainsi de sonder son esprit, et d'y voir ce à quoi, il rêvait, ainsi que ses souvenirs, même ceux dont il ignorait sans doute lui-même l'existence. Cela me prit pas mal de temps, mais veillais en même temps à ce qu'il dorme bien, usant de chakra pour maintenir son sommeil profond. Agir ainsi m'évitait d'avoir à lui poser des questions, et me permit en même temps de connaître son passé, de savoir exactement ce qu'il avait eu à vivre durant la fuite qu'avait ordonnée son père. La guerre est la guerre, on ne la fait pas sans recevoir des coups. Hélas, il advint si trop souvent que les innocents prennent les coups que lorsque l'innocence comme la sienne avait à le vivre, la triste banalité que j'en ressentais n'ajoutait que plus de poids sur ma conscience. Malgré ces horreurs, dans son sommeil, il paraissait paisible, le souffle régulier et lancinant.
Je découvrais donc qu'il était fils de shinobi, de la famille Uchiha plus exactement. Un nom qui n'était pas dépourvu de prestige, mais qui était inférieur à la renommée d'autres depuis que la guerre avait mit à mal sa réputation. Sa mère était cependant une civile, et son père lui donnait le deuxième prénom de Gi, pour le sacrifice de son confort matériel et de sa carrière militaire auquel il consentit après sa naissance. Comme beaucoup de shinobis, il avait espéré éviter à son fils les obligations guerrières que son nom et son rang lui imposaient. Une mère civile ne devait rien arranger à tout cela par les temps qui couraient. C'était à se demander si cet enfant n'avait pas été maudit dès sa naissance, encore qu'il disposait d'un pouvoir latent bien assez exceptionnel pour pouvoir se considérer plus tard bien différent de la masse.... Je venais en effet de Konoha et mon clan était depuis toujours très proche des Uchiha. J'en avais suffisamment côtoyer pour savoir que leur prestige décroissant n'était pas le résultat d'une force amenuisée, mais plutôt d'un clan décimé par l'assurance qu'il se conférait à lui-même, allant parfois jusqu'à faire preuve de bêtise.
-Mais que fais-tu ? Me susurrait alors, Thérèse qui venait de se réveiller.
Je lui fis signe de faire un grand silence, en montant l'index sur mes lèvres. Là, me redressant sur ma faux, je l'invitais à se rendre en dehors de la tente, pour ne réveiller personne. Le soleil n'allait pas tarder à se lever, mais je comptais à ce que nous puissions profiter du peu de calmes que nous avions encore pour converser un peu tous les deux.

Nous passions dehors, à la joie de découvrir le bon air de matin. La cité de la joie était silencieuse, endormie, si ce n'était les guerriers qui guettaient sur les remparts et les civils qui étaient assignés à d'autres taches. Pour la survie de ce misérable camp, tous avaient mis la main à la patte, mais ce n'était pas le sujet qui intéressait Thérèse quand elle me parlait.
-Tu as beau jouer le glacial, tu es profondément tendre en réalité. Me disait-elle en venant se coller derrière moi, le menton posé sur mon épaule et allant à m'enlacer. Je souriais à cela, et sans songer que je la décevrais, je lui expliquais son erreur.
-Je ne lui caressais pas la tête. Je veillais à ce qu'il dorme bien et sondais son esprit pour espérer trouver des informations.
-Pourquoi t'assurer qu'il dorme correctement si ce n'était pas aussi de la tendresse ?
Je lui répondis d'abord part un court silence, car je ne savais pas comment contredire cela. Il était vrai que j'avais à cœur que cet enfant trouvât un véritable instant de repos dûment mérité.
-Tu souhaites l'adopter lui et sa sœur ?
-S'ils veulent de moi, pourquoi pas...


Collée à moi et son souffle dans ma nuque ainsi que son timbre de voix m'indiquaient qu'elle eut une pensée plus vaste que cette seule réponse. Envisager l'avenir ensemble, c'était tout de même très tôt pour s'en soucier, malgré tout je sentais bien qu'elle y pensait déjà. Après tout cela, est-ce que je partirais ou resterais ? Est-ce que je demeurerais à ses côtés ? Que pensais-je de ces enfants ? Voilà les questions qu'elles se retenaient de me poser. On a toujours, dans le présent, des motifs de désirer l'avenir. Le sien, je pense, dans ses espoirs ne se déliait pas du mien, d'avenir.
-C'est un enfant shinobi. Lui répondais-je. Et sa sœur en sera une aussi.
-Avec l'aide d'un shinobi je pourrais m'en sortir sûrement. Me lâchait-elle.
-Tu cesserais ton métier si j'acceptais ? Ne pouvais-je retenir.
-Tu cesserais de tuer si je le faisais ? Me renvoyait-elle à son tour.

Cesser, de tuer. Je savais déjà pourquoi cette idée m'angoissait tellement. Si je ne tuais pas, qu'est-ce que j'étais ? Semer la mort était mon métier, c'était ce qui me définissait le plus. J'étais, la mort. Abandonner la voie du guerrier ne signait-il pas ma propre fin ? J'étais séduit par l'idée, une famille et un éternel repos. Mais en même temps, à quoi servais-je alors ? La plus grande félicité est le repos du cœur et la liberté de n'agir que selon sa volonté et son pouvoir. Si je laissais derrière moi ces années sanglantes, me liant par la vie et la volonté à cette femme, n'y perdrais-je pas ma liberté et tout ce qui faisait que j'étais ce que je suis ? Mes talents, seraient-ils utiles à Thérèse ? Ma passion du sang, c'est mon être aimé... Celle dans laquelle je me suis damné. Me sauverais-je en acceptant, ou au contraire, me perdrais-je ? Est-ce que j'aimais Thérèse aussi ? C'était si rapide, je ne savais pas, je ne pouvais encore décider. En vérité, j'espérais que tout cela finisse, j'espérais réellement faucher le blé plutôt que les hommes, mais prendre cette décision maintenant me paraissait précipité.
-Il me faudra tuer quelques ennemis de ton frère avant de décider. Lui répondais-je tristement.
-Mais si nous sommes sauf, tu feras quoi ? Insistait-elle sans se délier de moi.
-Tu me le diras à ce moment-là. Concluais-je.

Un soleil se leva, grisant la misère sous son éclat rougeoyant du désert qui s'y reflétait. Petit à petit, la cité de la joie s'éveillait, sans ne trop que savoir ce que la journée nous préparait. Dans son baraquement, Bohémon était parmi les premiers à se lever de son lit. Cette journée ne lui semblait pas être comme les autres, elle avait une odeur différente, alors, quand il se préparait, il ne choisissait pas son masque d'argent. S'habillant et revêtant sa cotte de mailles, il s'emparait d'un autre masque, un masque miroir, qui reflétait les visages qui se posaient sur le sien, ainsi si on désirait le regarder droit dans les yeux, c'était son propre visage avec les yeux d'un homme mourant et brisé que l'on voyait. Puis il posait le voile blanc de soie sur sa tête. C'est là, qu'il vint se regarder lui-même dans un grand miroir. Dans cette glace, il voyait son visage caché derrière ce masque miroir, reflétant ce miroir dans la glace qu'il contemplait. Une image étrange, qui offrait une perspective peu commune. Cette vision l'apaisait, lui donnait du courage, mais il ne savait pas pourquoi. Est-ce une mise en abîme ? Se demanda-t-il. Ou était-ce la mise en abîme d'une mise en abîme. Peut-être que si c'était cela, on pouvait conclure que la mise en abîme d'une mise en abîme concluait au retour de l’abîme. Une pensée vertigineuse, qui ne le tourmentait pas, car s'y perdant entièrement, cela l'extirpait de la fatalité à venir.

Regardant ainsi au fond de lui-même, à travers lui-même, il se remémorait toutes les erreurs qu'il s'imaginait avoir commises. Et se dévisageant dans cet abîme, il cherchait son propre pardon. C’était en regardant au travers de lui-même, qu'il démasquait les attraits de l’influence. Une quête ainsi définie prenait une tendance à la volonté d’innocence. Comme pour épurer le défaut originel. Retrouver cette idylle de l’aube, sans cette tache dans l’âme qu’incombait toute vie vécue, son seul et véritable ennemi finalement pensait-il, était lui-même.

La porte du baraquement toquait soudainement. C'était Batzu qui demandait la permission d'entrer, ce à quoi Bohémon qui s'en doutait répondit favorablement. Son plus proche ami et confident pénétrait la pièce d'un pas lourd, déjà armé de son immense épée et recouvert d'une épaisse armure.
-Je savais que tu serais debout très tôt. S'annonçait Batzu en entrant.
-Je voulais prendre le temps et réfléchir un peu avant de nous réunir. Lui répondit simplement Bohémon.
-Tu sais déjà quoi faire ? Demandait ensuite Batzu en allant s'asseoir sur un siège.
-Vraiment, je n'en ai pas la moindre idée. S'ils avaient voulu attaquer, ils l'auraient déjà fait, je pense. J'ai besoin d'avis différents du mien pour décider.
-Ils attaquent et nous tenons notre position. Qu'est-ce que tu voudrais faire d'autres ?
-La tenir efficacement, ... Cette position.
-Tu comptes sur les shinobis pour ça ?
-Nos hommes aussi. Mais les shinobis restent et resteront toujours de meilleurs soldats que nous. Ils naissent et sont élevés pour ça, tu ne diras pas le contraire. Leurs conseils seront utiles, ils l'ont déjà été.

Batzu n'osait pas dire le contraire, mais ne confirmait pas non plus. C'était plus fort que lui, quelles que soient les indéniables qualités militaires des shinobis, il refusait toujours de les considérer supérieurs aux civils. Batzu était à la mesure de ces Rêveurs dotés de pouvoirs surnaturels, mais il était une exception au Pays du Vent, à Gobi, et il le savait lui-même. La mine aussi fermée que basse, il se dédouanait d'avoir à répondre par un chemin de traverse verbale, trop évident pour que Bohémon ne s'en aperçu pas, sans pour autant le lui avoir fait remarquer.
-Il serait peut-être sage d'armer tous les hommes valides entre 12 et 60 ans. Nous ne manquons pas d'armes et d'armures et cela gonflerait nos rangs. Ainsi tentait Batzu de convaincre Bohémon.
-L'un des shinobis étant déjà mort, je savais que devrais me résoudre à prendre cette décision. Lui répondit tristement Bohémon.
-Un shinobi mort ? S'étonnait Batzu. Haaaa, tu parles de Shino. Il n'est pas mort. Il est revenu.

Bohémon tournait enfin le regard vers Batzu. Une forme de soulagement passait à travers ses yeux, des yeux tendres. Batzu ne laissait pas répondre, pour, sans le ménager, lui annoncer aussi mon rapprochement avec sa sœur. Batzu pensait ainsi créer une sorte de dissension, mais en l'apprenant, il semblait que le Roi lépreux s'en trouvât encore plus soulagé et ne se ménageait pas pour le faire savoir à Batzu.
-Je crois que ta sœur est tombée amoureuse cette fois. C'est elle qui le soigne sous sa tente. Elle a des gestes et des regards vers lui qui ne trompent pas.
-Je m'en doutais déjà quand elle choisissait de l'attendre à l'entrée du camp. S'il est bon avec elle et qu'elle cesse sa profession, je ne vais pas m'y opposer. Ce n'est pas franchement le moment de penser à cela en plus. Comment annoncer à tous ces gens que leurs enfants et leurs vieillards devront se battre avec nous ? Ils vont mal le vivre... Qu'il aura survécu ne change rien au final à ma décision.
-Dis-leur simplement la vérité. Que s'il ne le font pas nous allons tous mourir.


Bohémon, tout en se rendant à son épée, et passant la ceinture à sa taille, réfléchissait alors, à comment la cité de la joie avait pu en arrivée là si rapidement. Bien sûr, ils avaient fait les coups de main sur les convois de ravitaillement, mais il lui semblait injuste que tout ces gens dont il avait la garde devaient en souffrir. C'était comme si le destin, selon lui, le mettait à l'épreuve une dernière fois, peut-être une fois de trop.
-Finalement, même dans le pays du vent, dans le désert de gobi, dans un trou perdu, la guerre nous touche et fait de nous des soldats. Suis-je tyrannique ? Non... Je ne crois pas. Mais pourquoi les shinobis sont-ils ainsi chez nous ? Pourquoi nous traitent-ils si bassement, pourquoi devons nous nous opposer à eux, ou n'avoir d'autres choix que la soumission... Était-ce ainsi avant la Fracture ? Comment l'humanité se réglementait-elle, sans Rêveurs pour se croire supérieurs aux civils ?
Batzu, sentant la fébrilité chez un homme normalement d'une immense sagesse, y puisait toutes ses inquiétudes. Bohémon, malgré son état, avait porté la survie de la cité de la joie, s'il perdait sens et ne trouvait plus la force d'inspirer ceux qui le suivaient, la suite des choses serait dramatique et Batzu ne pouvait le permettre. C'était donc avec force et courage, qu'il tentait de redresser Bohémon.
-Ce n'est pas une histoire de Rêveurs et de civils. À l'ouest, dans les contrées occidentales les civils sont bien mieux traités, presque les égaux des Rêveurs dit-on. C'est l'équilibre de cette nation que les clans shinobis menacent. Il n'est pas de nation en ce monde qui ne commette pas d'acte tyrannique... Elles rivalisent d'inhumanité dans leur quête d'hégémonie. C'est la logique même du monde des hommes. Les confédérés et l'alliance, et l'Empire et tout le reste des Rêveurs se battent pour des idéaux et se servent des civils pour les asseoir. Parce que ce sont les civils qui forgent les armes et les armures, sèment les récoltes, bâtissent les châteaux et lavent les sols, quel versant des belligérants nous arme pourtant ? Aucun ! Cette guerre de shinobis n'est pas la nôtre, si nous voulons y avoir une place, nous devrons la prendre nous-même un jour. Même si personne dans l'avenir n'entend parler de nous, c'est toi, ici, dans ce tout petit pays, qui aura montré que les civils des contrées asiatiques peuvent aussi être à la hauteur de la puissance des clans shinobis.

Cette terre était maudite depuis longtemps, très longtemps. Ici, Bohémon avait goûté le sang pour la première fois et découvert l'étendue des horreurs que pouvait engendrer l'âme humaine. Ici finalement, en plein désespoir, les hommes tels que lui étaient plus chez eux qu'ailleurs. La guerre faisait déjà rage dans ces contrées quand il était enfant, et elle continuait toujours de nos jours, comme si le militarisme était devenu la dernière et unique expression d'une politique à l'impasse dans un régime militarisme qu'avaient imposés les shinobis, où toutes les grandes cités étaient des cités militaires sous le joug des Kage, des chefs claniques et des chefs de guerre avant tout. Les civils de ce pays n'avaient que trop souffert, tant et autant que dès son enfance, il s'imagina que des hommes normaux réunis pouvaient eux aussi tenir tête à des shinobis et faire preuve d'autant de cruauté. Il y a des menées excusables dans l'aveuglement des guerres civiles, mais qui ôtent à ceux qui se les permettent le droit de se plaindre des sévérités de leurs adversaires. La guerre n'est pas toujours pour un État un aussi grand mal qu'on le pense. Il est des circonstances où elle est le seul remède contre les factions qui le déchirent, surtout lorsque le fanatisme les met aux mains. Pas dupe lorsqu'il dut prendre ses responsabilités, le discours de Batzu l'y rappelait étonnamment, il lui fallait choisir un premier camp autrefois, et c'est celui qui lui paraissait le plus moralement acceptable qu'il choisissait, celui des opprimés, avec l'espoir que le fanatisme dont il souffrait lui-même ne prônait l'infériorité imagée des civils, pour au contraire leur donner le poids militaire qu'ils méritaient au moins autant que les shinobis.

Raffermit, en bouclant sa ceinture, le regard semi-aveugle de Bohémon se fit plus décidé, et il se tint de nouveau près à devoir être de ceux qui feraient couler plus de sang, à fin qu'un jour, son idéal puisse se déclarer officiellement dans toutes les bouches sans qu'aucun ne puisse en rire.
-Demandes à quelques hommes de ramener ici les shinobis. Aujourd'hui, beaucoup de sang va couler, veillons à ce que ce soit celui de la division blanche plutôt que le nôtre.
-Je vais distribuer les armes et les armures en même temps.
Lui répondit Batzu en se relevant. Se dirigeant ensuite vers la porte, avant de l'emprunter, il continuait... Comment tu savais que les shinobis n'allaient pas te dénoncer quand tu leur a avoué que c'étaient nous qui attaquions les convois ?
-Je ne le savais pas.
Répondait Bohémon dont le sourire passait aisément derrière le masque à travers ses yeux.
-Cela aurait pu nous faire beaucoup de mal.
-Si je prenais soin de ne pas écraser les fourmis, je ne pourrais pas avancer.


À cela, Batzu n'avait rien à rétorquer. Il ne pouvait commenter ou contredire parce qu'il se trouvait entièrement d'accord avec l'idée. Chaque nouveau pas peut amener son lot de malheur, ce n'est pas pour autant qu'il fallait craindre d'avancer effectivement. Face au sourire et la nouvelle conviction retrouvée de son ami, il se rappelait pourquoi il le suivait, et se sentait plus que jamais prêt à devoir en assumer les conséquences.

Le message couru dans la cité dès qu'il sortait et transmettait ses ordres. Les résidents en capacité de tenir une arme étaient conviés à se rendre au dépôt pour qu'on leur fournisse de quoi se défendre. Ce ne fut pas aussi mal reçu que ce qu'avait cru Bohémon. Chacun y réagissant à sa façon, mais sans jamais protester. La peur d'être sans défense primait sans doute sur tous les autres doutes que cela pouvait inspirer, et on pensait à juste titre que jamais de toute façon Bohémon ordonnerait une sortie, il ne s'agirait que de défense. Cet ordre incriminait également que des enfants comme Jill et Tenshi furent aussi armés.
Les parents étaient inquiets, mais heureux de pouvoir rester avec leurs enfants, ainsi jamais séparés les plus pessimistes s'imaginaient déjà au moins réunis dans la mort. Et en même temps, il fallait être honnête, si la peur tenait aux tripes tous ces pauvres gens, il y avait une certaine exaltation à l'idée de pouvoir trucider du shinobi. Les griefs étaient nombreux, et l'esprit de vengeance s'en trouvait bien nourrit. La misère, le malheur, l'iniquité, tout cela formait le meilleur creuset de soldats en devenir, la gangrène guerrière démarrait dans la plus basse extraction, là où la pauvreté faisait toutes ses offices, cette pauvreté, où les privations et la misère étaient l'école du bon soldat. Il s'agissait donc de survivre par tous les moyens possible, ce que nul n'ignorait, mais aussi, pour la première fois de leur vie, tous ses pauvres gens avaient une chance de montrer aux shinobis qu'ils ne pouvaient plus indéfiniment avoir tous les pouvoirs sur eux, c'était aussi cela qui faisait qu'ils acceptaient volontiers les armes qu'on leur mettait dans la main.

Le cliquetis des armes passaient par-dessus tous les murmures et les mots tandis que l'aube passait à l'horizon jusqu'à poindre au-dessus de la muraille. Les mines étaient basses, les regards livide et la tension dans les cœur forçait la majorité au mutisme. Je me trouvais toujours dehors, près de la tente de Thérèse quand je vis Zö s'approcher de moi. Je me trouvais alors seul car Thérèse était rentrée dans la tente pour être présente lors du réveil du Tenshi. Le vieil homme venait à moi avec une gourde, il avait le regard humble et admiratif quand ses yeux s'osaient à se poser vers moi. Je ne comprenais pas la signification de cette visite quand il approchait, mais ne bougeais pas et patientais.
-Bonjour Shino. S'annonça-t-il.
-Bonjour. Renvoyais-je des plus simplement.
-Je voudrais vous remercier pour ce que vous avez fait hier. Pour Jill. Je comptais vous rendre votre cape, mais Jill s'y accroche.
-Je ne crois pas mériter un remerciement. Quant à la cape, je vous la laisse, la cendre que je réalise peut m'en procurer autant que je souhaite.

-Prenez au moins ceci, pour remerciement, ce n'est pas grand chose, mais cela vous aidera. Me disait-il en me tendant la gourde qu'il avait en main et que je saisissais.
-Qu'est-ce que c'est ?
-Une potion de ma confection, elle ne vous guérira pas d'un coup, mais elle accélérera votre guérison.
-C'est vraiment très gentil de votre part. Mais je suis de ces shinobis qui guérissent vite, vous ne pensez pas qu'un autre en aura un meilleur usage ?
-"Un autre" n'a pas sauvegardé la vie, l'honneur et l'innocence de ma petite fille.
-Elle se remet ?
-Tranquillement... Mais j'ai entendu les miliciens de Bohémons dire que tout ceux qui pouvaient porter une arme devaient le faire. Même les femmes sont mises à contribution. Je crains qu'ils arment aussi ma petite fille.
-Auront-ils seulement assez d'équipements ? J'en doute.
-Je ne sais pas, mais ça ne me plait pas.

-Vous savez, j'ai protégé l'innocence de votre petite fille comme vous dites, mais il faudra bien mieux qu'elle apprenne à le faire elle-même. La virginité, limite de l’innocence, aussi sacrée que l’existence, ne devrait pas être violée, j'en conviens. Le prix d’une virginité et d’une vie ne peut se valoir que d’une autre. C’est le sacré, qui forge l’avenir des générations, que de protéger cette morale du pur pour du pur. Elle n'y coupera pas, que cette vérité vous offense ou pas.
-Je suis shinobi, on a dû vous le dire. J'aimerais qu'elle n'ait pas à suivre le même régime que nous.


Thérèse, qui entendit notre conversation et sortait au même moment en tenant Tenshi par la main, ne tardait pas à protester. Je m'en retournais légèrement, sans tourner complètement le dos à Zö.
-Il n'est pas question que Tenshi prenne les armes. Nous dit-elle sans hurler, mais sans moins de conviction pourtant. La férocité maternelle s'y ressentait déjà, je crois. J'avais déjà, hier, reconnu en elle ce goût de la maternité, cet instinct de femelle comme on le trouve souvent, mais pas toujours doté de la même ardeur. Moi qui étais par bien des versets, le chant de la mort, elle était mon véritable antonyme, la naissance. Car mourir est tout au plus l'antonyme de naître, l'antonyme de vivre restant à trouver. Par la maternité, la femme se relève et s'élève. Elle n'est plus irresponsable et désœuvrée. Elle tient dans ses mains — elle le sait — l'œuvre de l'avenir, et elle en répond. La trame qu'elle ourdit est celle de l'humanité. La fonction qu'elle accomplit est la plus haute, la plus noble, la plus difficile de toutes les fonctions. En est-il, en effet, de plus difficile, de plus noble et de plus haute que celle de concevoir un enfant, de le porter neuf mois dans ses entrailles, de lui donner la vie au risque de perdre la sienne, de l'allaiter pendant plus d'une année, de l'élever, de l'instruire, de discerner ses qualités, de reconnaître ses défauts, de former son caractère, son cœur et son esprit ? Thérèse, sans même avoir porté cet enfant, sans avoir l'hérédité de la chaire à l'esprit, exprimait déjà autant de tendresse qu'une mère se le devait. Aussi trouvais-je en elle une nouvelle fois une grande admiration que je ne croyais pas usurpée.

Malgré toute mon admiration, je ne me laissais pas encore prendre à la sensiblerie. Tenshi était silencieux, accroché à sa main, et l'on voyait bien qu'il ne savait absolument pas de quoi l'on parlait. Il regardait Thérèse, non pour exprimer une supplication, mais un questionnement. Tenir une arme ? Cela éveillait sa curiosité sans qu'il ne sût dire pourquoi. J'avalais d'une traite le breuvage dont Zö venait de me faire cadeau, puis je lui rendais la gourde. Thérèse était mécontente que ni lui, ni moi, ne lui répondions, mais une fois avalé ce qu'il y avait à avaler, je lui faisais la réponse que j'estimais être la plus juste.
-Pourquoi il aurait le droit à un traitement de faveur ?
-Il n'a même pas 10 ans...
Lâchait-elle immédiatement.
-À cinq ans, on m'enseignait la guerre et je servais de ramasseur de reste sur les champs de bataille. C'est un fils de shinobi, il a ça dans le sang. Tu irais contre les ordres de ton frère en plus ? Je doute que les enfants soient sur les remparts même s'ils sont armés. C'est une précaution, et il a raison, la situation l'exige.
-Et ma petite fille, n'a-t-elle pas vu la guerre d'assez près déjà ?
Intervenait Zö
Là, je me rappelais qui j'étais. Vu d'assez près ? Ce vieil homme, avait-il réellement fréquenté des champs de bataille ou était-il trop vieux pour se rappeler ce à quoi cela ressemblait ? Son enfant était intact, et quoi que l'horreur qu'elle découvrit n'avait certainement rien d'enviable, il faisait un excès de protection par lien d'affiliation, mais aucunement par lucidité. Répondant à Zö, je répondais aussi à Thérèse par la même occasion, car ce que j'avais d'argument valait pour tous les deux.
-Quand la division blanche marchera sur nous, j'espère que ceux qui n'auront pas d'armes auront près d'eux quelqu'un qui en possédera une. Car s'ils n'ont eux-mêmes pas de quoi se protéger, ne serait-ce qu'un peu, ils seront comme des agneaux livrés à des loups. En voulant cacher le monde et ses faiblesses à ses proches, on ne fait que conduire ses proches à être faible eux-mêmes.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeVen 12 Avr - 3:53
-Moi je veux arme... Intervenait subitement Tenshi de sa voix frêle et hésitante.

Il en attira nos regards et nous laissèrent un instant sans voix. Zö paraissait mécontent, mais ne pouvait relever cela, car il n'était finalement pas concerné. Thérèse le prenait aussi mal, mais en plus la frayeur se lisait aisément au fond de ses yeux tandis que je me sentais pour ma part désemparé par cette nouvelle. Fils de shinobi, ce que j'avais vu de la scène qu'il avait vécu, donnerait normalement à penser qu'il souhaiterait à tout prix se tenir le plus loin possible des affrontements. Normalement, j'aurai pensé qu'il chercherait là une sorte de vengeance sur la division blanche, qui sait, même sur la vie elle-même. Mais dans ses yeux bleus, je ne lisais que la gravité d'une sagesse à l'état de fécondation. Pas un souffle de violence ne transpirait de son regard, de son faciès, de sa posture, et pourtant la conviction qu'il avait mis dans ce désir d'être de ceux qui prendraient les armes n'en fut pas moins étonnante de force, que disais-je — de violence.
-Pourquoi ? Tentais-je alors sans quitter ses yeux du regard.

Il lâchait la main de Thérèse, et fit un pas vers moi. Là, quoi que j'avais devant moi la petitesse de l'enfance maladroite et un visage si angélique qu'il désarmerait la mort d'un sourire, je me sentis pénétrer d'une grandeur que je n'avais vu que rarement chez l'autrui. Thérèse avait levé la main quand il passait devant elle, comme pour le retenir, mais sans aller au bout de son geste. Elle avait alors le sentiment de le perdre, je crois, et Zö se grattait la barbe sans ne savoir comment prendre la nouvelle d'un enfant plus prêt au combat qu'il ne l'était sans doute lui-même. Les yeux de Tenshi vagabondèrent de gauche à droite, de haut en bas, trahissant qu'il ne savait lui-même s'il était bien certain de comprendre les émotions qui le traversaient, cherchant à mettre des mots sur ses sentiments, son timbre se fit ainsi aussi hésitant qu'innocent.
-Parce que... Parce que je suis un shinobi. Mon père a voulu que j'en sois pas un. Mais je suis là. Si je ne me bas pas maintenant, quand je le ferais ? Je ne veux pas que ça recommence... Je ne veux pas... Finissait-il ému.

Thérèse ne relevait pas, ne comprenant pas en réalité à quoi faisait véritablement allusion Tenshi. La mort de sa famille, bien sûr, mais ce qu'il avait vu, je voyais bien dans ses yeux que c'était de cela qu'il parlait. Peut-être avait-il honte de lui-même en fait, peut-être se sentait-il tristement responsable du sort de son père et de sa mère. C'était ce qui le conduisait finalement à devenir ce pourquoi, il était né, un destin que son propre père lui avait refusé en pensant le protéger.
-J'ai mentis... J'ai mentis à ce moment-là. Je ne veux plus mentir. Continuait-il au bord des larmes.
-Mais de quoi tu parles ? Tentait tendrement Thérèse.

Moi, je savais. Il avait menti sur son nom quand le shinobi de la division blanche le lui avait demandé. Son instinct de survie lui avait dicté de mentir et probablement que s'il ne l'avait pas fait, il serait mort ou prisonnier actuellement. Je comprenais alors la honte qu'il ressentait. Non-content d'avoir fait l'expérience de l'horreur, il s'était confronté à une réalité existentielle de l'humanité qui dans le cas présent, laissait un goût amer en bouche pour peu que l'on fut doué d'une conscience. Tout homme a en lui un mauvais instinct qui reparaît dans les grandes occasions de la vie, dont il peut triompher à la longue, mais qui, appuyé sur le matérialisme du fait, conserve longtemps encore son autorité. C'était ce mauvais instinct qui l'avait conduit au mensonge. Mais en même temps, la survie est un impératif tout à fait naturel auquel il n'est guère instinctif de se soustraire. On ne pouvait lui en vouloir d'avoir renié son nom pour demeurer vivant. Tous les shinobis, non, tous les soldats le savaient bien ; rien de plus meurtrier que l'instinct de survie.

Tenshi ne pouvait répondre à la question de Thérèse, et ignorant que je savais déjà la réponse, je pense que si j'avais moi-même posé la question, je n'aurai eu qu'un silence pour réponse. Ce silence qu'il nous renvoyait désarmait Thérèse qui ne savait alors que prendre un air désolé, et qui aussi, avait au moins la sagesse de comprendre qu'il y avait là à entendre une souffrance qui la dépassait tellement qu'aucun de ses mots n'auraient de valeurs aux oreilles de cet enfant. Il souhaitait donc se battre, devenir le shinobi qu'il était né pour être. Je dressais alors le visage, prenant un air subtilement supérieur, mais aussi bienveillant. C'était un enfant qui me rendait fier, alors que j'avais aucun lien en réalité avec lui. Mais donnant l'exemple du sacrifice de soi à un si jeune âge, je sentais cette fois que ni chez Zö ni chez Thérèse, il n'y avait de quoi contredire cette volonté funeste. Quand on tenait à se battre, on n'aimait pas à vaincre sans coup férir, une leçon que Tenshi avait déjà apprise sur le tard et à ses dépens. Une leçon qu'il donnait aux autres par son exemple, malgré qu'il n'avait pas la moitié d'âge de ceux qui venaient de s'opposer à l'armement des enfants du camp.
-Tenshi, un nom d'ange... Un nom tendre. Trop tendre pour un guerrier. Désormais, tu seras Uchiha — Senshi. Lui disais-je sans prendre de gants.
-Senshi... Répétait-il machinalement.

Derrière Tenshi, qu'on appellerait désormais, Senshi, Thérèse me lançait un regard gravissime et accusateur. Elle n'appréciait pas que j'encourageasse celui qu'elle prenait sous sa coupe à se diriger vers la voie des armes. Une partie de moi, sachant ce qui l'attendait, ne pouvait qu'être d'accord avec elle, mais en même temps, je n'escomptais pas cacher la réalité du monde et ce qu'impliquait sa condition de Rêveur à cet enfant. Aussi forçais-je un sourire rassurant vers Thérèse, afin de la convaincre, sans résultat, je pense, qu'il ne risquait rien de plus que nous tous. Me trompais-je ? Toutes les convictions basées sur la foi étaient des paris. Pour être fort, nous les Rêveurs devions être convaincus, et pour avoir des convictions, il nous fallait aussi être un peu naïf. N'était-ce pas cela d'ailleurs, qui définissait le mieux ce que pouvait être la foi ? On disait que la Porte des Rêves modifiait le monde en fonction des rêves que l'humanité faisait. Qu'elle se nourrissait de l'imagination pour la mêler à la réalité. Notre foi devenant ainsi, une mise fois en commun, la définition substantielle du réel que nous vivions. La foi si absurde qu'elle pouvait être devenait ainsi le seul et véritable moteur de nos mornes existences.
Qui savait, pendant que Thérèse et moi, nous jugions du regard, ce qui pouvait bien traverser l'esprit de cet enfant ? L'envie de protéger sa sœur ? De défendre sa vie ? De se venger de la division blanche ou du destin ? Parfois, il ne fallait pas forcément chercher à comprendre à tout prix, et seulement se laisser porter par la décision qui nous paraissait la plus conséquente.
-Tu peux te rendre au dépôt d'armes. Annonçais-je à Senshi tandis que Thérèse continuait de me défier du regard.
-Je peux aller voir ma sœur avant ? Nous demandât-il.
-Tu pourrais passer voir ton amie en même temps ? Jill, je crois. Elle doit avoir besoin d'un visage amical de son âge en ce moment. Enfin, si son grand-père est d'accord. Lui répondais-je tout en questionnant Zö du regard.

Une façon détournée de conduire Senshi vers Jill afin qu'il la conduise elle aussi vers le dépôt d'armes. Manœuvre que Zö avait parfaitement comprise. Le vieil homme hésita un court moment, pour finalement nous offrir une approbation fournie d'un hochement de tête. Il rendait les armes et acceptait donc que sa fille fut enrôlée avec le reste de la population. Il ne semblait pas m'en vouloir d'avoir joué sur la corde du bien-être de sa petite fille, car il dut penser que Senshi, allant voir Jill, serait, en effet, bénéfique pour elle. Ces deux enfants d'un âge relativement proche avaient vécu des choses atroces à peu de temps d'intervalle, les conduisant inexorablement à se rapprocher encore plus qu'il ne l'était déjà, du moins c'est ce que j'espérais.
-Elle est où ma sœur ? Insistait alors Senshi.
-Thérèse le sait mieux que moi, disais-je en me retournant. Je dois voir Bohémon. Merci encore Zö pour votre potion.


Dernière édition par Uchiha Senshi le Lun 15 Avr - 15:13, édité 1 fois
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeVen 12 Avr - 19:50
M'éloignant, je laissais derrière moi, je crois, un goût de cendre en bouche et un silence. Zö n'avait même pas relevé mon remerciement et je comprenais bien pourquoi. Par ce nouveau nom, je déliais Tenshi de son ancienne destinée. Désormais prénommé Senshi, il était un véritable soldat en devenir, qui se décidait à prendre à bras-le-corps son destin de Rêveur. Thérèse et Zö n'étaient pas convaincus que ce chemin était le plus saint. Que pouvais-je pourtant faire d'autres qu'accompagner un shinobi dans la voie du shinobi ? Un regard extérieur à cette histoire, me verrait-il comme un monstre ? Penserait-il que mon jugement de tout cela était aussi puéril que faux ? Je l'ignorais. Je ne cherchais fondamentalement à convaincre personne de ce que je croyais. Cependant, s'il advenait que je devais en venir là, je rappellerais que, qui voudrait convaincre les autres devait se convaincre d'abord lui-même. Plus les hommes s'éclairaient, plus ils apprenaient à estimer la vertu, à se convaincre qu'elle seule était digne de commander, et que la naissance n'y faisait rien. Sachant que Senshi allait prendre les armes, donnant l'exemple du sacrifice, nous pouvait-on y voire l'écho d'une grande vertu, avec moi en demi-teinte l'y encourageant malgré les réticences de quelques-uns ?

Faisant quelques pas, tandis que Zö et Thérèse indiquaient à Senshi où se trouvait à la fois sa sœur et Jill, il sortait de la tente de Thérèse, Maëlis accompagnée d'Hélène. Elles sortaient, je ne savais pas pour quelles raisons, en tout cas, ce n'était certainement pas pour armer cette pauvre fille qui était déjà bien incapable de prononcer son propre nom. Il me sembla alors, à mon grand étonnement, ressentir un chakra d'une puissance tout simplement phénoménale. Je retournais mon regard vers les deux jeunes filles, me préparant à vérifier cet étrange ressentis qui m'avait traversé l'échine. Il était vrai que j'ignorais encore à qui appartenait le dernier chakra que j'avais ressenti dans le baraquement de Bohémon. Pourtant, me concentrant quelques secondes sur Maëlis et Hélène, je ne ressentis rien, comme si ce chakra avait déjà disparu dès que je l'avais décelé. À peine posais-je mon regard sur Hélène, qu'elle grognait de nouveau en se cachant derrière Thérèse, ne manquant pas d'étonner une nouvelle fois celle-ci. Une shinobi amnésique qui s'ignorait ? L'idée me traversait l'esprit, mais alors son chakra ressortirait sans cesse, le flux étant un élément continu passant à travers chacun de nous à chaque instant, elle ne pouvait intentionnellement le cacher. Je me pensais alors, simplement encore trop faible pour user efficacement de mes dons sensoriels. Après tout, bien loin d'être remis de mon combat contre Serafi, il était fort possible que mes compétences, même les plus basiques, s'en retrouvèrent amoindries.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeDim 14 Avr - 23:01
Le doute m'assaillit malgré tout. Thérèse tentait de calmer sa protégée en la rassurant, mais celle-ci à chaque fois qu'elle posait les yeux sur moi semblait voir quelque chose que personne d'autre ne voyait. J'ignorais quoi, mais je devais surtout avouer qu'elle me mettait aussi profondément mal à l'aise. Tant et si bien, que je préférais reprendre mon chemin que chercher à insister. Peut-être que la sensation de chakra que j'avais ressenti n'était, au-delà même d'un défaut de mes capacités, rien de plus qu'un rêve éveillé.

Il était encore bien tôt, le soleil se levait à peine, cependant le brouhaha de la cité empêchait même les plus gros dormeurs de se laisser entretenir par les bras de Morphée. Parmi eux, il y avait aussi Kumiko et Fujisawa qui avaient pourtant passé une nuit pour le moins mouvementé. La pile électrique qu'était Kumiko forçait Fujisawa à émerger plus rapidement qu'il en avait l'habitude. Elle lui sembla inquiète, et curieusement étrange aussi, elle avait l'air aux yeux de Fujisawa d'attendre quelque chose, mais il ne se donna pas la peine de vérifier cette impression en lui demandant quoi. Cette matinée était étonnamment silencieuse, verbalement, pour tous les deux. Pas un bonjour, pas un baiser, ils ne se demandèrent pas comment ils avaient dormi. Il semblait que chacun gérât sa tension en se fondant en lui-même sans chercher le réconfort de l'autre. Il fut mainte fois des cas où le silence était le meilleur truchement des âmes pour les soldats d'expériences, ceux qui savaient que les sombres moments à venir ne laisseraient guère plus de temps pour réellement se souvenir qui ils étaient avant d'entamer le combat. Dans le fracas du fer, dans le chant de la mort et du feu, l'instinct prédominant toute chose, ces quelques moments de silence faisaient figure d'une pâle mise en condition pour s'absoudre de l'épreuve guerrière.

En effet, s'habillant et s'armant, ils savaient tous les deux qu'en sortant de la tente, ce qui les attendait dans les heures, peut-être même les minutes à venir, aurait un goût de déjà vu pour eux ; qu'ils n'auraient pourtant jamais souhaité voir se réitérer. Au-dehors, peu avant de passer la toile de la tente, ils entendaient déjà les cliquetis des armes et de l'acier, sans tintement de voix plus audible qu'un murmure, à faire croire que plus qu'un chuchotement ferait disparaître toutes les paroles qu'on s'oserait.
Kumiko avait particulièrement la mine basse, malgré le plaisir qu'elle avait eu la joie de goûter durant la nuit. Étant de nature à ne pas supporter la tension, avant même de passer la toile de la tente, elle tournait le regard derrière elle sur Fujisawa, qui terminait de se préparer.
-Tu n'as pas peur ? Lui demanda-t-elle.
-Non. Pourquoi je devrais ? On sait ce qui nous attend, ou on en a une bonne idée en tout cas. Lui répondit-il sans la regarder.
-Tu ne ressens même pas l'envie de te venger ? Ce sont des impériaux là-bas. Tu prends ça avec un tel... Détachement. Continuait-elle sans cacher son étonnement.

Achevant sa préparation en faisant sa queue-de-cheval, Fujisawa ne se retint pas d'émettre un grossier rictus avant de retourner ses yeux sur Kumiko. Seulement alors lui sourit-il, avec autant de bienveillance que d'ironie.
-Parce que des Impériaux ont massacré les Sabakyo, je devrais haïr tous les Impériaux ? Est-ce que toi, tu haïs Shino parce qu'il est un Samidare et toi une Saïbogu ? Lui répondit-il fermement.
-Non, bien sûr... Il est sans aucun doute un Samidare de Konoha. Mais je ne vais pas haïr tous les Konohajins parce que Konoha est en guerre contre le village d'Ame. Enfin... Je veux dire... Bafouillait-elle.
-Je sais très bien ce que tu veux dire. Konoha tente de conquérir ton pays depuis toujours, mais Konoha n'est que le village militaire de Zhongguo. Ce n'est pas une personne. Tu sais, avant que l'Empire n'anéantisse mon clan, nous étions connus pour faire des recherches sur les gaz empoisonnés de l'ère Pré-Fracturienne. Tu as déjà entendu parlé de la Shoah ? Lui demanda-t-il comme s'il cherchait à la tester.
-Non... Lui répondit-elle dubitative.
-C'est un triste événement de l'ère Pré-Fracturienne. Un groupe d'êtres-humains s'est très mal conduit. Il massacrait par milliers des gens grâce à des gaz empoisonnés. De quoi fasciner ceux de mon clan n'est-ce pas ? Quand on leur a demandé des comptes, c'était toujours la même rengaine. Ce n'est pas moi disait le Capo, allez voir mon supérieur. Ce n'est pas moi disait le chef de camp, allez voir mon supérieur, ce n'est pas moi disait le ministre, allez voir mon Führer... "Je ne faisais qu'obéir aux ordres". C'était la seule excuse dont ils étaient capables pour justifier des actes plus atroces les uns que les autres. Je ne hais pas l'Empire. L'Empire, ce n'est qu'une idée, un concept à qui l'on donne vie pour projeter sur un mur l'ombre d'un pouvoir fédérateur. Je hais les hommes qui ont massacré les miens, et ceux qui leur ont donnés l'ordre. Donner un ordre est un acte, et il est aussi responsable que le geste qui exécute l'acte. Je hais l'homme en tant qu'individus, pas l'institution qu'il représente. Comme toi, je fais la part des choses, il y a des monstres sous tous les habits, mais faire des généralités, cela équivaut à sombrer. Ceux qui ont détruit les miens, ils auront beau dire "j’obéissais aux ordres", je les tuerais sans me soucier de qui a la réelle responsabilité face à la loi et aux règles de la guerre.

Kumiko, malgré qu'elle était déjà éprise de ce jeune-homme dont la personnalité lui paraissait parfois aussi sombre qu'insaisissable, se sentit d'autant plus éprise qu'elle comprenait maintenant, pour une infime partie, ce en quoi leurs âmes se liaient si facilement. Ce regard sur le monde, qui n'avait pas l'indélicatesse de rassembler tous les humanoïdes dans un même panier les unifiait en effet. La différence profonde était que Fujisawa déconsidérait l'Empire en tant que influenceur. Pour lui, chaque homme, chaque femme, faisait ses propres choix et devait en assumer les conséquences. Kumiko elle, considérait l'Empire comme néfaste pour ce qu'il représentait et encourageait, elle considérait qu'il légitimait des concepts et des idées qui devaient être abolies et donnait, d'une certaine façon, une excuse à ceux qui les mettait en application. Cette subtilité, qui les empêchait d'être complètement d'accord, mettait un frein à leur relation, mais leur permettait aussi de se nourrir de l'un de l'autre, allant pourquoi pas, songeait-elle, "jusqu’à combler leurs lacunes".
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMer 17 Avr - 19:03
Fujisawa ayant terminé, il se dressait et commençait à se rendre vers la sortie de la tente, allant jusqu'à dépasser Kumiko et l'écarter un peu tandis qu'elle lui bouchait le passage. Il releva la toile, et c'est alors qu'elle lui répondait gravement.
-Tu juges notre époque en la comparant à un événement qui s'est passé il y a 2000 ans...
-Il y a 2000 ans, ils jugeaient ce qu'ils se passaient 2000 ans avant eux. Lui répondit Fujisawa en passant la toile de la tente. Ils n'ont jamais eu l'air de tirer des leçons du passé plus que nous n'avons tiré nous-même. Concluait-il

Il était suivi de Kumiko, qui semblait très insatisfaite de sa réponse. Le Sekaï était fragmenté depuis 1000 ans. Leurs ennemis se disaient membres de la confédération clanique, mais la confédération était une organisation au service de l'Empire. Il n'y avait pas à proprement parler de massacre ethnique dans le Sekaï. D'ailleurs depuis la Fracture, on ne pouvait plus vraiment parler "d'ethnie" au sens propre du terme tel qu'il se comprenait avant la Fracture. Le monde avait réellement changé pour ce qu'elle savait de l'époque Pré-Fracturienne. Profondément changé. Cependant, cette réflexion de Fujisawa l'avait mise en doute sur une chose, est-ce que la personnalité des hommes, elle, avait réellement changé ? Kumiko était du côté de l'alliance clanique, elle avait été jusqu'à déserter Ame no Kuni, le Pays de la Pluie, pour la rejoindre et combattre l'Empire. C'est là qu'elle remarqua que les civils de Gobi n'était finalement pas mieux traités que ceux de son pays, il y avait toujours un certain rapport hiérarchique entre les Rêveurs et eux, même si les dit Rêveurs cherchaient l'indépendance voir l'émancipation et la protection des civils. Plus que jamais, elle se rendit compte qu'elle était complètement dépassée par ce conflit. La politique, les clans, les nations et les familles, plus rien n'avait de sens. Elle conservait avec difficulté son air enjoué lorsqu'elle sortait, faisant bonne figure à qui la remarquerait, mais pour Fujisawa qui ne la connaissait que trop bien, le masque ne suffirait pas, il sentait qu'elle était saisit d'un doute intérieur, d'un doute presque existentiel.

C'est là que Fujisawa et Kumiko me croisèrent du regard, tandis que je me rendais au baraquement de Bohémon. J'avais en effet laissé derrière moi mes doutes sur Hélène et laisser aussi Senshi se débrouiller avec ce qu'il avait à faire. Même si je n'étais pas encore en état de me battre, il se pouvait que mon opinion ne fût pas désuète dans notre situation. C'était peut-être arrogant de ma part, mais il ne me revenait pas d'en juger.
-Il a l'air de vite se remettre. Commentait Kumiko en me voyant passer.
-Oui, mais je doute qu'il soit encore capable de grand chose. Lui répondait Fujisawa.

Je devais avoir l'air de me traîner sur ma faux, ce qui ne m'empêchait pas d'avoir l'air toujours aussi fier. On ne se refaisait pas... Mon intention était donc de rejoindre le baraquement, sans doute la même intention que celle qui animait Fujisawa et Kumiko. Cependant, de l'autre côté du désert, dans le camp de la division blanche, on se préparait déjà à l'événement de la matinée qui ne nous permettrait pas d'employer la nôtre comme nous l'avions initialement envisagée.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeJeu 18 Avr - 0:23
La division blanche avait reçu l'obligation de se lever encore plus tôt que la cité de la joie, avant même le lever du soleil. Shigurui en tête, préparait son entrée en scène en donnant ses ordres qu'il escomptait voir être suivi à la lettre. Les troupes shinobis s'étaient avancées pour se mettre en ordre de bataille. Pendant ce temps, les officiers galvanisaient des hommes qui se sentaient déjà tout à fait prêts à massacrer une fois de plus des civils. Ce tout uniforme, avançait comme une masse linéaire et inaltérable dans le désert, laissant derrière elle son camp militaire qui fut rapidement fortifié dans la nuit précédente. Les hommes marchaient en ligne, parfaitement synchronisés et tous aussi silencieux qu'en exigeait l'usage dans une formation de leur type.
Arrogant étendards flottant par-dessus leurs terres, poitrails gonflés, et armes rutilantes en mains, cette masse de shinobis formée pour et par le combat qui s'avançait sur le sable laissant à son sillage un lit creusé par leurs pas, se croyait dans son bon droit par sa naissance et l'institution qu'elle représentait. Cette armée d'un millier de Rêveurs était l'émanation extrême de l'idéologie sempiternelle qui fut pourtant toujours mise à mal sans jamais s'éteindre. En effet, car en chacun de ces hommes, résonnait avec force la plus extravagante idée qui pouvait naître dans la tête d'un politique, celle qui était de croire qu'il suffisait à un peuple d'entrer à main armée chez un peuple étranger, pour lui faire adopter ses lois et sa constitution. Personne n'aimait les missionnaires armés et le premier conseil que donnait la nature et la prudence, c'était de les repousser comme des ennemis.
Un millier d'hommes était peu, mais à voir même au loin, c'était impressionnant, d'autant plus lorsqu'on savait que ce millier d'hommes venait précisément pour anéantir ce qui oserait s'opposer à son passage.

Sur la muraille de pierre crée la veille, les civils de la cité de la joie se massaient pour voir le spectacle qui les terrifiait pour une majorité d'entre eux. Un cor de chasse avait sonné pour prévenir de ce mouvement de l'ennemi, car on considérait bien cette armée, déjà, comme ennemie. Un silence pesant planait sur ces éternelles victimes de la guerre. Femmes, hommes et enfants alignés sur le mur ne savaient que dire tandis que les shinobis traversaient la chaleur du désert, comme sortant des enfers. Aucun sur cette muraille n'était prêt à l'affrontement, et si Shigurui avait lancé une charge, il était plus que probable qu'ils seraient tous restés béa à attendre de se faire massacrer.

Les batailles ménageaient d'imprévisibles surprises, tout comme les rois et ceux qui les menaient, la surprise présente était que les shinobis demeuraient bien loin de la cité de la joie quand ils se stoppaient. Ils se déployèrent dans un méli-mélo désordonné en apparence, mais qui avait sans doute du sens pour eux. Aucune attaque ne suivit lorsqu'ils semblèrent se fixer dans l'horizon, à guetter aussi intensément la cité de la joie que la cité les guettait eux aussi. Montant difficilement les rares marches qui menaient en haut de notre muraille d'infortune, je rejoignais Batzu et Bohémon qui y étaient déjà postés, et j'étais rapidement suivi par Fujisawa et Kumiko qui allaient jusqu'à me passer devant tant j'étais lent. Rapidement, Batzu ordonnait que l'on éloignât les enfants et les femmes de la muraille, qu'ils furent placés à l'arrière pour que ce qui serait certainement la première ligne de l'affrontement soit couverte par les troupes les mieux armés et les plus expérimentées.

De l'autre côté, Shigurui en tête de son armée, était accompagnée d'Iliana comme toujours. Pour l'occasion, il avait revêtu son armure flamboyante qui lui moulait le corps. Sa grande taille et sa maigreur l'auraient fait passer pour un slender man tant les formes de ses pièces d'armure donnaient une illusion disproportionnée de ses membres. Sur le visage d'Iliana, se ressentait une certaine inquiétude, mais celui de Shigurui demeurait inaccessible, car la visière de son casque empêchait qu'on en décèle la moindre nuance. Déjà grand, sa claymore plus grande encore et en plus très fine était plantée dans le sable, la lame reposant sur son épaule, ce qui donnait l'illusion qu'il ne se tenait debout qu'en s'appuyant sur celle-ci. Du sommet de son casque, descendait jusqu'à ses chevilles une longue et fine crinière bleue, qui ballottée parfois par le vent hypnotisait Iliana qui se tenait derrière lui.
Les officiers savaient qu'ils ne devaient surtout pas ordonner d'assaut ou de bombardement pour le moment, car Shigurui leur en avait expressément intimé l'ordre. Il souhaitait en effet suivre son plan, qui était de se rendre avec Iliana en avant, avec un drapeau blanc, pour discuter des termes de la survie de la cité de la joie. Son exigence était simple, il voulait ma tête et en échange, il promettrait que la cité n'aurait pas à subir la colère de la division blanche. L'inquiétude d'Iliana résultait de la crainte que la cité refusa le marcher. Si dans son esprit, il ne faisait aucun doute qu'elle ne pourrait résister à l'armée de Shigurui, elle n'oubliait pas qu'il avait été placé au commandement de la division normalement pour reprendre en main ces hommes afin qu'ils cessent leurs exactions sur les civils. Raser un camp de réfugiés n'entrait pas vraiment dans cette ligne de conduite et si Shigurui en arrivait là, il n'était guère assuré que toutes les excuses qu'il fournirait, justifiées ou non, suffiraient à calmer la colère de l'état-major Impérial.

Iliana ignorait ce que pensait alors son ami. Elle qui le connaissait mieux que personne, se demandait si le deuil de Serafi n'allait pas altérer ses capacités à garder son calme. Aussi le silence dans lequel il se fixait la mettait plus mal à l'aise qu'à l'accoutumée. Mine de rien, il avait sur les épaules le poids du regard de ses propres troupes, qui allaient l'observer en train de discutailler avec des civils, ce qui aux yeux de ces fanatiques n'avait pas de quoi le glorifier.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeJeu 18 Avr - 15:09
Lorsque le cor de chasse de la garde de notre muraille sonna, Senshi ne s'était pas encore mis en quête de Jill et de sa sœur, ce son de mauvais augure poussa Thérèse à l'envoyer là où il devait se trouver. "Cours !' Lui avait-elle ordonnée. Zö lui confirmant l'ordre d'un "vite !". Ainsi Senshi, recevant quelques évasives indications, couru vers la tente de Zö pour y retrouver Jill. Thérèse et Zö se rendirent de leur côté vers l'entrée de la muraille dans l'espoir d'y retrouver son frère, Batzu et moi-même. La fourmilière qu'était la cité de la joie s'activa, les personnes y grouillant en tous les sens, perdus et incomprises à force de se demander si l'heure de leurs fins était venue. C'est alors, que dans cette foule comprenant des soldats improvisés, des femmes, des enfants et des vieillards, transpirait autant la terreur qu'on ne pouvait les blâmer de l'éprouver. Tous des enfants, qui n'avaient pour eux rien de ce que les shinobis possédaient. On éleva ces enfants civils dans une série d'illusions qui ne résistaient pas à l'expérience ; on les avait persuadé, durant leur enfance, volontiers que, dans ce bas monde, tout était miel et vertu, qu'ils y trouveraient fiel et vice. Cette foule de civils, non-contente de n'avoir les pouvoirs dus à la Porte des Rêves, n'avait pas été fortifiée contre l'inévitable bataille de la vie, puis, lorsqu'ils avaient l'âge d'homme, ou à peu près, on les avait lâchés désarmer, presque nus, au milieu du combat ; au premier pas, ils étaient blessés, et ils ne guérissaient jamais. Ils marchaient d'étonnements en étonnements, et chaque étonnement était une meurtrissure, meurtrissure d'autant plus vive et douloureuse qu'ils ne l'avaient pas prévue. Ainsi, marchant vers l'inévitable dénouement guerrier, c'était avec le poids du monde et de leurs illusions, comme autant de cicatrices sur le corps, qu'ils devaient se résigner à affronter la folie de leur époque.

Il demeurait cependant une âme neuve dans la cité de la joie, une âme neuve à qui nul n'avait encore menti sur ce qu'était réellement le monde. Une âme neuve que nul n'avait bercée d'illusion. La sœur de Senshi, qui était si pure, qu'elle n'avait pas encore de nom. Ainsi, elle avait été épargnée par le premier acte de dépossession de soi qu'était d'être nommé par ses parents. Aucun parent ne pouvait dire de cet enfant, "c'est MON enfant", ce nourrisson, jusqu'à preuve du contraire, était pourvu d'un cœur libre de toute contrainte. Elle était depuis toute la nuit sous la garde de Joshua et de Sibile qui s'étaient mit en quatre pour la nourrir convenablement et lui offrir le meilleur foyer qui fut possible. Pour Sibile, ce bébé avait l'innocence d'une page blanche, sur laquelle il fallait absolument écrire la vertu. Ils ignoraient tous les deux les gravissimes circonstances de sa naissance, même s'ils se doutaient bien que les parents de cet enfant ne fussent définitivement plus de ce monde. Sibile et Joshua s'étaient relayés toute la nuit pour veiller l'enfant, se donnant avec joie au rôle de parent improvisé, et se laissant l'un et l'autre, sans se le dire, prendre à rêver qu'un jour, ils auraient leur propre nourrisson à veiller. Le bébé dormait avant que tonne le cor de chasse, et il en fut réveillé. Le couple n'avait pas suffisamment dormi pour être en grande forme, mais ils savaient tous les deux ce que ce bruit annonçait. Le bébé se mit à pleurer sous la tente, couvrant le bruit de la foule à l'extérieur tant il sonnait strident.

Ce son rappelait Sibile et Joshua à la réalité. Elle qui avait oublié l'espace d'une nuit sa maladie et sa condition, et lui son passé et sa situation, ils se retrouvèrent sèchement à devoir retrouver le court normal de leurs existences.
-Reste avec elle. Je vais sur le mur. Annonçait le visage bas Joshua.
-Joshua... Je... Balbutiait alors Sibile.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeVen 26 Avr - 0:48
-Tu restes avec elle, et tu ne quittes pas cette tente.
-Je n'aurais pas d'arme ?
-C'est un bébé, il ne te fera aucun mal.
S'amusa Joshua.

Sibile se prit à sourire, peut-être plus nerveusement que parce que la plaisanterie fut bonne. Elle s'approcha du bébé, et lui caressa la tête avant de conclure.
-À tout à l'heure.
Et Joshua sortit.

Joshua s'en allait vers le mur, et vers nous. De l'autre côté du désert, Shugurui était encore trop loin pour que quelqu'un puisse le voir. Mais Kumiko sortit un rouleau, et d'une main sur un sceau qui y était apposé, elle sortait une paire de jumelles. Quelques fugaces regards furetèrent, pour nous-même Rêveurs qui ne sommes pas Saibogu, une paire de jumelles était de la technologie et pour le reste de la population aussi d'ailleurs. Regardant au loin avec celles-ci, nous restions tous silencieux, pendus à ce qu'elle allait nous dire.
-Je vois environ 700 hommes. Nous annonçait-elle.
-Où sont les autres ? Je croyais que la Division comptait 1000 hommes, nous demandait un mercenaire de Bohémon présent.
-Ils bloquent les autres sorties.
Lui répondait Fujiwara en soupirant de condescendance.
-Pourquoi ne pas forcer l'une des garnisons moindre ? Nous demanda Bohémon.
-Je te le déconseille, lui disais-je. Ces garnisons sont autant de murs contre lesquelles Shigurui, leur chef, lancera une vague pour nous écraser dessus par l'arrière.
-De quel clan est-il ?
Intervenait Kumiko.
-C'est un Momoru. Ils sont deux là-bas pour ce que j'en sais.
-Quel rang ?
Grognait la voix de Batzu
-Iliana est le rang A. Répondais-je d'abord. Ce qui ne manquait pas de tous les faire tiquer. Et Shigurui est l'un des très rares dans le monde à recevoir le rang SSS, d'après l'institut impérial. Nous savons tous comme ces classements sont sujets à cotions de toute façon.
-Si c'est vrai, aucun de nous n'est capable de lui tenir tête en face-à-face. Et c'est vrai.
Nous coupait Joshua lorsqu'il arrivait.

Un silence parmi nous suivait. Nous savions tous pourquoi il le savait, mais aucun de nous ne l'en blâmions. Un simple regard vers Thérèse que je comprenais qu'elle pensait qu'il était sincèrement amoureux de son autre fille, la blonde dont je ne me rappelais même pas le nom. Cela me suffisait pour que je ne lui fis aucun reproche.
-Mais nous avons un rang S ici. Il y a Katerik.
-Qui est Katerik ?
Interrogea Bohémon.
-C'est moi. Samidare, Katerik.
-Tu es un Konohajin. En somme, tu es un déserteur de ce côté du mur.
Insista Bohémon.
-Je croyais qu'il travaillait pour n'importe qui ? Enchérissait Batzu.
-Oui, parce que j'ai déserté depuis longtemps.
-Pourquoi ?
Semblait s'en amuser Fujisawa.
-Je n'aimais pas ce que l'on faisait aux gens différents. Lançais-je en regardant Kumiko.
-Je pourrais tenter de l'abattre d'ici. Proposait étrangement Kumiko. Avec un tir de sniper, arguait-elle ensuite.
-Et son armée se jetterait sur nous. Prophétisait Fujiwara.
-Ils le feront de toute façon. S'imposait Batzu.
-Vous n'aurez peut-être pas à le faire, nous achevait Kumiko en pointant l'horizon. Et Kumiko regardant avec ses jumelles nous annonçait pourtant pleine de terreur ; Un homme shinobi avec un drapeau vient vers lui.
Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeMar 30 Avr - 4:27
Du côté de la division un Rêveur Shinobi apportait effectivement un drapeau blanc à Shigurui. Dans l'esprit de la majorité de ses hommes, cela signifiait la trahison à venir, ils applaudissaient déjà intérieurement pour la plupart. Pour Shigurui, le symbole n'était pas encore celui de la perfidie, car il escomptait en toute sincérité tenter de parlementer. Lorsqu'il se saisissait du grand drapeau d'une main, il le fit sans sourire et sans satisfaction. Il saisit alors le manche de son épée de son autre main, et portant la lame sur son épaule pour l'y reposer, il se déclara à Iliana sans parvenir à faire entendre la moindre tonalité de compassion.
-Marchons vers eux.

Il dressa son regard vers la cité de la joie, tandis qu'Iliana baissait le sien vers le sable, ainsi, lui à l'avant et elle derrière lui, ils avancèrent à pas lent dans le sable chaud. Heureux de les voir tous les deux amener vers la cité de la joie le symbole de mort qui avait leur réputation, les shinobis de la division blanche se mirent à chanter. Ce qui était étrange, c'était qu'outre la mélodie et quelques ajustements, la totalité d'entre eux ignoraient l'origine de leur chant. Il le chantait par tradition, sans savoir qu'il avait traversé les âges jusqu'à eux, et que le poème dont il germa n'avait jamais eut vocation à glorifier la mort. Pour eux, le nom même de son prodigieux auteur, Victor Hugo, ne signifiait rien et le message qu'il cherchait à insufflé dans sa prose leur passait par-dessus la tête. Ce qu'ils trouvaient dans ses paroles, était seulement l'écho d'une émotion qu'ils partageaient, d'un quelque chose qu'ils ne comprenaient pas, ni ne cherchaient à comprendre, une simple chanson de Rêveurs, qui leur parlait si bien qu'ils n'avaient finalement pas le désir de chercher à véritablement en comprendre le sens.

Tu me parles du fond d’un rêve
Comme une âme parle aux vivants.
Comme l’écume de la grève,
Ta robe flotte dans les vents.

Je suis l’algue des flots sans nombre,
Le captif du destin vainqueur ;
Je suis celui que toute l’ombre
Couvre sans éteindre son coeur.

Mon esprit ressemble à cette île,
Et mon sort à cet océan ;
Et je suis l’habitant tranquille
De la foudre et de l’ouragan.

Je suis le proscrit qui se voile,
Qui songe, et chante, loin du bruit,
Avec la chouette et l’étoile,
La sombre chanson de la nuit.


Ils passaient tous les deux à travers la chaleur, lui comme un démon, elle comme un ange, ils passaient tous les deux à travers la chaleur, drapeau blanc au vent, lui terrifiant, elle apeurée. Accompagnés du chant de leurs instruments, chefs maudits, et perclus par la chaleur, la honte, et l'indignité, ils passaient tous les deux à travers la chaleur. Sur le mur de la cité de la joie, le silence glaçant répondait au drapeau blanc, parce que la réputation de la division le précédait. C'est là que Bohémon souriant sous son masque déclarait fatalement.
-Qu'on m'apporte un drapeau blanc. Non. Notre drapeau.

L'étonnement nous saisissait tous. Je savais que Shigurui n'était pas comme tous les fanatiques qu'on l'avait chargé de commander, mais lui l'ignorait, tous ici l'ignorait, et en conséquence cela équivalait à annoncer sa propre à tous ses proches.
-Et amenez mon cheval. Ajoutait-il.
-Je t'accompagne. Semblait vouloir commander Batzu.
-Pas cette fois. Le coupait Bohémon. J'y vais seul.

Thérèse, particulièrement, était désarçonnée et sachant pourtant qu'aucune parole ne suffirait à retenir Bohémon, elle cherchait malgré tout à le supplier du regard. Un regard qu'il ignorait en toute connaissance de cause.
-Si tu meurs la cité de la joie est perdue Bohémon... Le suppliait alors Zö.
-Allons, Toi, Batzu et Thérèse êtes ici, entourés de vaillants shinobis. Lui répondit-il

S'approchant de Zö, il ne se permit pas de le toucher, car sa lèpre lui avait retiré cette possibilité dans son esprit, et ce depuis longtemps. Il inclina et se contenta de sourire, si gracieusement que même en ne voyant que ses yeux, on le devinait. Ce masque miroir reflétait nos expressions lorsqu'on le croisait, nous laissant à chacun le soin de nous voir nous-même en lui.
-Des déserteurs, des repentis, des idéalistes, des mercenaires... C'est à vous qu'il revient de protéger la cité de la joie. Regardez-moi y aller, et voyez qu'un civil peut être aussi imposant qu'un Rêveur. Je ne sais pas si je vais mourir là-bas, mais je sais que mort là-bas ou non, je ne serais pas mort pour rien.

Thérèse, Zö, et même Batzu auraient souhaités l'embrasser, mais aucun ne le fit. Ce n'était pas seulement parce qu'il avait la lèpre, c'était une façon de respecter cette dignité royale que cet homme avait gagné non par la naissance, non parce qu'il était né avec un grand pouvoir de Rêveur, mais par son travail, sa sagesse et son humanité. Descendant de la muraille, il reçut son drapeau tâché de sang, et on l'aida à monter sur son cheval. Il ne nous offrit pas plus de mots, et se rendit vers son destin en toute simplicité. Je devais admettre que le voir sur son cheval, respirant mal, à moitié aveugle et déjà demi-mort, j'aurai dû éprouver de la pitié, or ce que j'éprouvais à ce moment était de l'admiration. Il passait l'entrée sur son cheval, lui et sa monture tout vêtus de blanc, aussi blanc que son drapeau tâché de sang.
Nous entendions pendant ce temps le chant de la division blanche, trop lointain pour que nous puissions en discerner les paroles. N'ayant plus que son dos en mire, ses hommes se mirent à chanter à leurs tours. Nous ressentîmes une énergie folle à ce moment, une énergie retenue et confinée dans le cœur de tous ces hommes et de toutes ces femmes qui craignaient autant qu'ils admirassent celui qui avait voué sa courte vie à l'amélioration de la leur. Ils chantaient l'hymne de l'Ordre EQUI. J'ignorais pourquoi, quoi que ce drapeau blanc tâché de sang était également le symbole de cet ordre. Je sais que si je ne chantais pas, comme Batzu, Thérèse, Joshua, Zö, Kumiko et Fujisawa, la voix de toutes ces personnes sur ces remparts suffisaient de toute façon à rendre tout l'honneur que méritait Bohémon.

Haut le chevalier ;
Je m'initiais à la quête de ce titre,
Vertus, honneur et dignité pour vie
Jusqu'à ce que l'arme me soit imprégnée ;
Et la peur dominée,
Sans jamais craindre le nom de tuer
Mais d'y être obligé,
Aimer le monde et les hommes
Riches ou mendiants,
Religieux ou athées
Puis faire de ma vie un don de moi
Pour ne jamais offenser ;
La terre et le ciel
Mon temple et ma maison ;
L'homme pour patrie
Un drapeau blanc tâché de sang
Pour nom.

Métier(s) : Admin
Avatar : Rang A
Talents : 2940
Messages : 101
Uchiha SenshiUchiha Senshi
http://fracturedesshinobis.forumactif.com/t120-uchiha-senshi-en-construction#131
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitimeSam 11 Mai - 10:40
Le joug de la chaleur de Gobi n'écrasait pas encore notre royal lépreux qui s'avançait à l'avant de notre chant tout droit jusqu'à son destin. Sur sa monture, au pas, il s'approchait de Shigurui qui était précautionneusement suivit d'Iliana. Bohémon tenait son drapeau blanc tâché de sang dans sa main droite, et ses reines de la gauche, Shigurui tenait son drapeau blanc dans la main gauche, et sa claymore dans la droite. Observant cela du haut de notre muraille improvisée, je les vis se rapprocher l'un de l'autre jusqu'à parvenir à mi-chemin entre la division blanche et la cité de la joie. Shigurui planta d'abord sa claymore dans le sable, solidement et fermement, et fis un pas de plus en avant pour planter finalement son drapeau, lui aussi, dans ce même sable. Iliana restait à distance derrière lui, à quelques pas, veillant sans faille à la sécurité de celui qu'elle accompagnait. Le chef de la division découvrait alors qui était son adversaire. Un homme épuisé sur un cheval, qui malgré la douleur, se tenait aussi dignement qu'un roi et faisait preuve d'une majesté éblouissante, d'un rayonnement à faire pâlir les esprits morts qu'ils pouvaient invoquer. La hauteur de Shigurui plaçait son visage face à celui du destrier, l'obligeant à lever les yeux pour voir Bohemon lorsque celui-ci s'arrêtait d'avancer. À seulement deux pas l'un de l'autre, le roi lépreux plantait à son tour son drapeau dans le sable, laissant flotter la voile maculée de sang au gré des brises matinales.  

Shigurui fut immédiatement saisi d'un malaise en voyant son reflet dans le masque miroir de Bohémon. Ces yeux morts que le roi lépreux plaçait dans le reflet de son propre visage lui donnèrent le sentiment d'avoir déjà perdu quelque chose avant même que ne commença les négociations. Ne se laissant cependant pas suffisamment amenuisé par la sensation qui le traversait, il commençait lui-même à parler, paisiblement, sans haine et avec un grand respect, tant et si bien que Bohémon se sentit comme un égal dès le début de cette conversation.
-Je suis Shigurui du clan Momoru. Oyabun de la division blanche de la confédération clannique, sous protection et mendat impérial. Commença-t-il.

Bohémon ne dit rien pendant quelques secondes, se laissant agiter par sa monture qui trouvait déjà le temps long. Puis d'une voix à peine audible pour Shigurui, il répondit à son tour très humblement.
-Je m'appelle Bohémon, et je protège la cité de la joie.
Shigurui comprit rapidement qu'il avait à faire avec un lépreux, et se sentit admiratif de voir cet homme venir à lui parlementer malgré la réputation que se traînait la division blanche. Quoi que la visière de son casque ne laissait passer que son œillade, on lisait pourtant dans ses yeux qu'un profond respect s'installait déjà pour cet homme. Il n'en perdit pas son objectif de vue, mais éprouva simplement un plus important désir de voir son interlocuteur céder à ses exigences pour ne pas avoir à le tuer et raser sa cité.
-Ta cité est pleine de femmes et d'enfants — de vieillards — et de civils comme tu sembles en être un. Livre-moi le déserteur Samidare Katerik. Et je te fais le serment que nul parmi les tiens n'aura à souffrir. La Porte des Rêves m'en soit témoin. Annonçait-il sûr de lui.

Bohémon ne lui sembla pas plus réceptif que cela à sa proposition. Pourtant, le dilemme bouillonnait dans l'esprit du roi lépreux. Sauver son camp de réfugiés au prix d'une seule vie, la mienne, était pour lui le choix qui était à la fois le plus simple et le plus sûr. Il ne doutait pas de la sincérité de Shigurui, car il devinait bien qu'il était certain de pouvoir anéantir la cité de la joie s'il n'obtenait pas gain de cause. Hélas, Bohémon se rappelait que j'avais déjà risqué ma vie pour sauver les siens, et surtout, que sa sœur qui était tombée amoureuse de moi risquait de ne pas se remettre d'un tel sacrifice. Bien sûr, elle pardonnerait, mais était-il prêt à lui infliger cette nouvelle douleur après tout ce qu'elle avait déjà enduré pour lui ? "Quel choix devrais-je faire ?" Se demandait Bohémon en imposant son silence à Shigurui. Toute action supposait un choix, et tout choix demandait un sacrifice. Ici, pouvait-il risquer la cité de la joie pour le seul bonheur même pas assuré de sa sœur, et risquer le sacrifice de millier d'innocents pour le sourire assuré d'une seule ? Qui voulait choisir souvent prenait le pire finit-il par se dire à lui-même avant de répondre sans crainte à shigurui ce qu'il avait enfin décidé.
-Si je te livre Katerik, je te livre un des miens, tu ne peux donc tenir ta promesse.
-Un des tiens ? Répondit non sans étonnement Shigurui avant de poursuivre. Un Shinobi déserteur. C'est un assassin rien de plus. Depuis quand est-il chez toi ? Une semaine ? Tu risquerais des milliers de vies pour ce monstre-là ?
-Pourquoi tiens-tu tellement à lui s'il n'est que ça ? Demanda posément Bohémon en répondant.
-Il a tué Serafi, mon cousin. Rétroqua froidement Shigurui.
-C'est donc de la vengeance ? Insista Bohémon toujours bien paisiblement.

Iliana, discernant à peine ce que disait Bohémon, ne put se retenir entièrement, trahissant son agacement en mordillant un bref instant sa lèvre inférieure. Shigurui ne comprenait pas vraiment où la tournure de la conversation les menait. Bohémon venait pour ainsi dire de refuser l'accord qu'il lui proposait et néanmoins, désarçonné par ses questions, il se laissa prendre et ne se contrôla pas suffisamment pour y couper court. Plutôt que d'en venir ce à quoi allait inexorablement le mener la décision de Bohémon, il perdit sa constance et aggrava le ton, faisant la preuve à Bohémon que Shigurui était de ceux qui haïssaient d'autant fortement qu'ils en possédaient une vengeance patiente.
-La vengeance exige un certain courage, combien de gens ne sont magnanimes que par lâcheté ?!
-Mais ce serait lâcheté que de te livrer Katerik aussi.

Là, Shigurui découvrit le ressort du respect qu'il éprouvait pour cet homme. Même en situation de faiblesse, même quand tout le conduisait à ses yeux au plus simple des recours, il ne se résignait pas à faire preuve de bassesse. Pour un Rêveur de sa trempe, cela ne pouvait qu'inspirer de l'admiration. Il s'adoucit subitement, à l'étonnement d'Iliana.
-Je n'aurai pas de plaisir à vous faire massacrer tu sais. Aucun. Mais si je n'obtiens pas ce que je demande...
Ce à quoi Bohémon souriait sous le masque, souriait aussi tendrement que plein de bienveillance.
-Je suis désolé, mais je ne veux pas être ton ennemi, ce n’est pas mon affaire. Commença le roi lépreux. Je ne veux ni conquérir, ni diriger personne. Je voudrais aider tout le monde dans la mesure du possible, Les Rêveurs, les civils, les humains et les non-humains, quelle que soit la terre d'origine où le nom qu'ils donnent à un dieu. Nous voudrions tous nous aider, les êtres humains sont ainsi fait. Nous voulons donner le bonheur à notre prochain, pas le malheur. Nous ne voulons ni haïr ni humilier personne. Dans ce monde, chacun de nous a sa place et notre terre est bien assez riche pour nourrir tout le monde. Nous pourrions tous avoir une belle vie libre, mais nous nous sommes perdus en chemin. L’avidité a empoisonné l’esprit des hommes, a barricadé le monde avec la haine, nous a fait sombrer dans la misère et les effusions de sang. Nous avons développé le rêve pour finir enfermés en nous-même. Les machines qui nous apportaient l'abondance nous ont laissés dans l'insatisfaction. Notre savoir nous a rendu cyniques, notre intelligence inhumains. Nous pensons beaucoup trop et ne ressentons pas assez. Nous sommes devenus trop mécanisés, et nous avons finit par manquer d’humanité. Étant trop cultivés, nous manquons maintenant de tendresse et de gentillesse. Sans ces qualités, la vie n’est plus que violence et tout est perdu. La porte des Rêves nous a donné le pouvoir de donner corps à notre imagination, à nos désirs les plus profonds, ces inventions ne trouveront leur vrai sens que dans la bonté de l’être humain, que dans la fraternité, l’amitié et l’unité de tous les hommes. J'ai dit à tous ceux qui m’entendaient : Ne désespérez pas... Le malheur qui est sur nous n’est que le produit éphémère de l’avidité, de l’amertume de ceux qui ont peur des progrès qu’accomplit l’Humanité. Mais la haine finira par disparaître et les dictateurs mourront, et le pouvoir qu’ils avaient pris aux peuples va retourner aux peuples. Et tant que les hommes mourront, la liberté ne pourra périr.

Entendant cela, Shigurui n'en croyait pas ses oreilles. Ce discours était sorti avec un tel naturel qu'il le frappa aussi durement qu'un coup de poignard. Iliana derrière se sentait autant touchée, car même s'ils faisaient tous les deux parties de la caste dominante, rejetées qu'ils étaient par les leurs, ils se sentirent tout aussi imprégnés du message que le roi lépreux venait de leur clamer sans émettre une once de haine, ni de rancune. Mais Bohémon n'avait pas terminé, et il continuait cette fois, plus intensément, si intensément qu'il sembla en même temps combattre le mal qui le rongeait, ce mal si fiévreux, avec lequel il avait toujours vécu, qu'il combattait avec la même force qu'il affirmait ses convictions.
-Je dirais à mes soldats quand vous frapperez, ne vous donnez pas à ces brutes, ceux qui vous méprisent et font de vous des esclaves, enrégimentent votre vie et vous disent ce qu’il faut faire, penser et ressentir, qui vous dirigent, vous manœuvrent, se servent de vous comme chair à canon et vous traitent comme du bétail. Ne donnez pas votre vie à ces êtres inhumains, ces hommes-machines avec des cerveaux-machines et des cœurs-machines. Vous n’êtes pas des machines ! Vous n’êtes pas des esclaves ! Vous êtes des hommes, des hommes avec tout l’amour du monde dans le cœur. Vous n’avez pas de haine, seuls ceux qui manquent d’amour et les inhumains haïssent. Soldats ! Ne vous battez pas pour l’esclavage, mais pour la liberté ! Voilà, ce que je leurs dirais.

Là, Bohémon manqua de souffle, rongé par lèpre, il tenait difficilement sur son cheval, et shigurui le voyait en train de chercher à calmer son mal malgré une respiration haletante qui faisait peine à voir et à entendre entre deux toux grasses et violentes.
-Grand homme et utopiste que tu es, si fou que le ridicule ne t'atteint pas et force l'admiration, tu vas mourir de toute façon. Lui lança Shigurui en s'en sentant désolé. Qu'as-tu donc à m'opposer ? Une armée de civils mal préparée. Un shinobi rang S avec Katerik. Un rang B avec le déserteur Joshua. Et cet autre shinobi qu'on m'a rapporté qui porte un macuahuitl en acier ? Ce ne sera pas suffisant, j'en ai peur.
Contenu sponsorisé
MessageSujet: Re: La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)   La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO) I_icon_minitime
 

La Fracture - Takama Ga Hara (SOLO)

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

 Sujets similaires

-
» 03.1 Chronologie du Second Âge de La Fracture
» 03. Chronologie du Premier Âge de La Fracture
» 01.Pré-Ouverture de La Fracture des Shinobis
» 03. Première Conférence de la Fracture
» Votez pour la Fracture des Shinobis

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Le Dernier Testament des Rêveurs :: Cimetière-